Outro : moonchild

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Surprise ? :)

***


Dès qu'il l'entendait à la radio, Namjoon ne pouvait s'empêcher de sourire. Il était loin le temps où son protégé peinait à promouvoir ses chansons. Il avait su s'épanouir et s'affirmer dans ce milieu tellement compétitif. Si un jour on avait expliqué à Namjoon que le jeune homme qu'il avait rencontré une nuit pluvieuse sur la route deviendrait la nouvelle star de son agence et qui plus est, un de ses plus proches amis, il n'y aurait pas cru. La collaboration avait rencontré beaucoup de retours positifs et avait permis à Taehyung de se faire une place confortable dans l'industrie. Après cela, le plus jeune l'avait remercié de manière presque abusive (une fois, il avait débarqué dans son studio aux alentours de minuit pour simplement hurler un merci bien trop frétillant en cette heure tardive ; Namjoon avait presque senti son cœur l'abandonner définitivement). Après une énième frayeur, le composeur proposa d'aller prendre un café pour faire meilleure connaissance. Et si cette fois-ci son cœur bondit dans sa poitrine, ce n'était plus par peur mais à cause d'un sourire bien trop solaire.

Depuis, les étapes furent franchies les unes après les autres entre révélations embarrassantes et souvenirs d'enfance. Taehyung lui rappelait sans cesse son insouciance passée et cette désinvolture qui lui manquait tant. Cependant, lorsque Namjoon l'apercevait dans les couloirs de l'agence, il ne sentait plus cette émerveillement qui l'empêchait de respirer un instant. Les cheveux du chanteur, jadis d'un roux flamboyant, n'étaient plus que d'un brun terne et sans éclat (Taehyung lui avait expliqué que c'était pour coller aux tendances actuelles en ce mois de novembre car les fans aimaient les ballades mélancoliques et tout ce qui les accompagnaient ; il trouvait cela plutôt stupide mais, « Il faut bien faire vendre Namjoon ! ») et les cernes violacées semblaient devenir définitives sur son visage. Malgré les piètres excuses que lui racontaient son ami, Namjoon ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter. Les petites étoiles qu'il avait l'habitude d'observer dans les yeux sépias s'étaient tristement éteintes.

Il ne pouvait pas simplement se résoudre à laisser Taehyung seul. Et il avait raison. Lors d'une rare soirée où ils avaient réussi à passer du temps ensemble, le jeune homme avait laissé entrevoir un bout de désespoir à la suite de quelques verres alcoolisés. Toute cette solitude l'avait effrayé. Son protégé n'allait pas bien. Ce qui avait marqué Namjoon et poussé à s'enfermer à nouveau dans son studio pendant des heures, c'était cette souffrance qu'il avait lui même ressenti des années auparavant en débutant dans la musique. Sa timidité et sa peur de la scène s'étaient heurtées aux critiques et refus de nombreuses agences. Son rêve de pouvoir un jour se produire sur scène était partie en fumée, effacé par l'angoisse et l'impossibilité passée. Mais il ne pouvait pas laisser Taehyung se priver de sa raison de vivre par des pressions extérieures. Alors, Namjoon décida de faire ce qu'il faisait le mieux : composer une chanson.

Et voilà où il en était maintenant. La lumière éclairait son bureau projetant de drôles de formes aux alentours. Et mis à part celle-ci, il était plongé dans une pénombre épaisse. Son carnet posé devant lui, il caressait de manière mécanique la boule de poil qui était logée sur ses cuisses. Il devait bien être là depuis deux longues heures, ayant préféré travailler chez lui pour ce projet plus personnel. Cependant, rien ne venait. Ou plutôt, ses sentiments et idées tourbillonnaient bien trop rapidement pour qu'il puisse les saisir sur le papier. Son chat s'étira soudainement et tout en plantant ses griffes avec tout l'amour possible dans les pauvres cuisses de Namjoon, il le fixa droit dans les yeux.

« Toi aussi tu penses que je suis un pauvre idiot hein ? »

L'animal s'agita quelques instants de plus avant de descendre de son perchoir humain. Il miaula. Évidemment qu'il voulait à manger, le jeune homme était idiot de penser ne serait-ce qu'une seule seconde que son chat aurait une soudaine compassion pour sa personne. Il soupira. Toute distraction était la bienvenue à ce stade.

Après avoir donné à manger à son chat, Namjoon décida de s'aérer quelques minutes (et contrairement au stéréotype du magnifique balcon et sa vue incroyable, s'aérer consistait seulement à ouvrir une des fenêtres de son salon pour passer la tête dehors et tenter d'apercevoir un bout de ciel à travers les énormes gratte-ciels). Il réussit à trouver une position pas totalement inconfortable malgré un bras compressé contre le mur. Le ciel était d'un noir d'encre et couvert de nuages sombres cachant les étoiles. La lumière peinait à traverser la masse vaporeuse et semblait pitoyable vue de sa fenêtre. Comme son Taehyung. Le mécanisme se mit en marche. Le composeur chercha du regard la lune qu'il avait appris à associer à cette rencontre si particulière. Lorsque Taehyung avait chanté dans sa voiture, les rayons lunaires l'éclairaient de la plus fabuleuse des manières, ayant créé des projecteurs improvisés. Sur le coup, il n'avait pu qu'observer du coin de l'œil le rayonnement du garçon et cette lumière presque affectueuse et protectrice comme s'il n'était qu'enfant de la lune. Il la tenait. Il tenait sa chanson.

La suite se fit naturellement. Il réussit à finir les paroles dans les jours qui suivirent et s'occupa ensuite du fond musical. Il se surprit en retrouvant cette même impatience enfantine qu'il avait ressenti en composant une chanson avec son ami. Namjoon voulait juste la finir et la faire écouter à Taehyung. Cela faisait également longtemps qu'il n'avait pas produit une chanson du début jusqu'à la fin seul et qui plus est, de la chanter. Depuis ses débuts à l'agence et ses paniques incontrôlées à vrai dire. Et le jeune homme mentirait s'il disait que ça ne lui avait pas manqué. Mais après avoir eu l'habitude d'accompagner un autre artiste pour le résultat final, revenir au départ le mettait quelque peu mal à l'aise. C'était sa pensée et rien d'autre.

Namjoon finit moonchild (après maintes réflexions, c'était la qualification la plus proche qu'il avait trouvé pour décrire Taehyung) tard dans la nuit. Deux semaines intenses plus tard, le résultat était plus que satisfaisant (bon d'accord, dès qu'il avait écouté la version finale, il avait poussé un grand cri de victoire qui réveilla au minimum ses voisins). Son doigt hésita plusieurs secondes avant de l'envoyer au plus jeune. Comment allait-il réagir ?

Seulement après des heures interminables où l'angoisse le rongeait, la sonnette de l'entrée retentit. Il sursauta et prit un moment avant de se lever. Même si le chanteur ne l'avait pas prévenu, il avait l'intime conviction que c'était lui. En ouvrant la porte, il fut aussitôt assailli par une masse sanglotante.

« Tu es un idiot Kim Namjoon, murmura Taehyung dans le creux de son épaule.

- Tu as aimé ? »

Namjoon ne pouvait s'empêcher de sourire.

« Je l'ai adoré. Merci. »

Ils finirent tous les deux enchevêtrés dans le canapé à ricaner et chuchoter de tout et n'importe quoi. Plus tard, Taehyung insista pour qu'il la montre à l'agence dans l'espoir de la faire écouter au grand public (« Tu vas devenir super célèbre crois moi ! Et comme ça on pourra partir en tournée ensemble, c'est pas génial ? »). 

Les étoiles étaient revenues.

Moonchild, you shine.

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