5. Jacob

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5.

Et sans même réfléchir ne serait-ce qu'une seconde aux conséquences, Milan se précipita pour attraper le bras droit d'Alice. Il voulait qu'elle s'arrête et lui fasse face. Il voulait revoir encore une fois le rouge à présent imprimé dans son cerveau comme une marque indélébile. L'alcool avait définitivement pris le dessus sur sa raison et il ne se souviendrait sans doute pas de ce moment le lendemain. Tout ce qui comptait était l'instant présent. Si bien qu'il ne remarqua même pas que la jeune fille avait eu un mouvement de recul tel un réflexe et que, déjà, elle se repliait sur elle-même.

Alice se chuchotait, de manière précipitée et haché, un tas de choses qu'il ne pouvait pas entendre. Il finit par percevoir quelques mots en tendant un peu l'oreille.

- I'm sorry if I seem uninterested. Oh, I'm not listening. Oh, I'm indifferent. Truly I aint got no business here but since my friends are here I just came to kick it.

[Je suis désolée si je ne semble pas intéressée. Oh, je n'écoute pas. Oh, je suis indifférente. Réellement, je n'ai rien à faire ici mais puisque mes amis sont là, je suis venue.]

Milan reconnut sans mal les paroles d'une musique qui était rapidement montée dans les charts ces dernières semaines, Here d'Alessia Cara. C'était justement le morceau qui était joué dans l'appartement du dessus. Puisque les fenêtres étaient ouvertes et que les fêtards ne se préoccupaient pas de la nuisance sonore qu'ils provoquaient, on pouvait en entendre quelques bribes jusque dans la rue.

Alice ne chantait pas. Non. Alice répétait cette phrase en boucle, de plus en plus rapidement. Parfois, elle reprenait son souffle, quelques grandes inspirations, puis quelques petites expirations. Les neurones du jeune homme étaient difficilement connectés à cause du liquide ingurgité en trop grande quantité. C'est pourquoi il mit bien plusieurs minutes à comprendre ce qui était en train de se passer. Deux, exactement. Et ce fut le laps de temps qui suffit à Alice pour se calmer. Elle retrouva son masque de froideur et détourna le dos pour reprendre son chemin.

Elle venait de lui faire une crise de panique à son simple toucher et elle avait réussi à se calmer d'elle-même en deux minutes. Qui était Alice ? Et pourquoi cette foutue blonde lui avait mis cette putain de mise en garde en tête ? Milan était contradictoire. Pas sur les refus, mais sur l'interdit. Plus on lui interdisait quelque chose et plus il le désirait.

- Ça te dérange si je te raccompagne ?

La jeune fille semblait en effet vouloir rentrer à pied. Milan ne s'attendait pas à une réponse de sa part. Il avait bien compris qu'elle économisait son temps de parole. Il ne savait pas très bien si c'était un traitement qui lui était personnellement réservé ou si elle était comme cela avec tout le monde. Il fut donc surpris d'entendre le son de sa voix alors qu'il avançait à ses côtés, les mains dans les poches et le regard droit devant lui.

- Le trottoir ne m'appartenant pas, il me serait difficile de t'interdire de marcher dessus.

Milan aurait voulu lever les yeux. Ce n'était pas une réponse. Mais apparemment ça l'était pour Alice qui continuait à avancer comme si de rien n'était. Ses cheveux s'emmêlaient quelque peu avec le vent et Milan crevait d'envie de les replacer. Il savait que c'était une de ses réactions typiques quand il était bourré. Il avait besoin de toucher les autres et il appréciait notamment le mouvement répétitif de la caresse. Cela faisait circuler l'alcool plus lentement dans ses veines, rendant ses effets plus désirables. Mais vu la réaction qu'avait eu la jeune fille quand il lui avait pris le bras, il était hors de question de réitérer l'expérience. Il était peut-être défoncé, et un beau connard en prime, mais il n'était pas complètement stupide.

Le trajet s'effectua en silence, les rues de la capitale étaient vides à cette heure-ci et le froid fit quelque peu dessoûler le jeune homme qui se demandait à présent ce qu'il faisait ici. Qu'est-ce qu'il lui avait pris ? Pouvait-il arrêter, pour une fois, de suivre son instinct et réfléchir trente secondes avant de foncer tête baissée dans une telle situation ?

Il envisagea de faire demi-tour quand Alice s'arrêta enfin. Il cherchait quelque chose à dire à la jeune fille, comprenant que c'était la fin du voyage, quand une furie sortit de la porte d'immeuble devant lequel ils étaient plantés. Oui, furie était le mot. Une grande rousse avançait au pas de course, le mascara coulant sous les yeux et répondant – criant – à quelqu'un qui devait se trouver non loin derrière. Alice arrêta tout mouvement pour la regarder passer près d'elle avant de prendre la parole.

- Ton mascara coule.

- Ta gueule, Alice. Ta gueule.

- Juliette, tu insultes encore une fois ma sœur et je te jure que ce ne sera pas la seule soirée où tu finiras en pleurs.

Milan aurait dû être choqué de ce qu'il se passait devant lui mais il connaissait bien ce genre de scènes pour en avoir été l'initiateur de nombreuses fois. Non, ce qui le laissa de stupeur fut la voix du protagoniste masculin. Cela ne pouvait pas être possible. Et, pourtant, quand il se retourna quelque peu pour faire face au jeune homme qui se tenait sur le seuil, sa vue ne sembla pas lui faire défaut. Emile Jacob était accoudé à la porte d'entrée, les bras croisés.

Avait-il dit « sœur » ? Milan était dans un beau merdier. Evan allait devoir lui trouver une très bonne explication pour l'avoir poussé dans les bras de la petite sœur d'un des mecs les plus redoutés des campus parisiens. Si Milan était un cliché à lui tout seul, Emile était une évidence. Grand, musclé, beau, en études de commerce, enchaînant les conquêtes comme les chemises, intimidant toutes les premières années qui oseraient s'adresser à lui, Emile était LE connard suprême, la référence. L'empereur.

- Alice passera toujours avant, je suis au courant. Putain, Emile ! Il va falloir qu'elle se détache de toi un jour. C'est mauvais pour toi mais pour elle aussi. Elle n'est plus une gamine, elle a dix-neuf ans punaise. DIX-NEUF ANS. Tu ne crois pas que c'est le moment qu'elle devienne indépendante ?

Mais l'empereur ne fit pas attention à sa conquête actuelle, il se contenta de détourner son regard sur Alice, en fronçant les sourcils. Juliette, exaspérée, ne s'attarda pas et claqua la portière de sa voiture, garée sur le trottoir d'en face avant de démarrer en trombe.

- Ce n'est pas Nate qui devait te raccompagner ?

- Il n'était pas disponible.

- Il est toujours disponible, Alice. Ne me mens pas.

- Je suis partie.

- Et lui ?

Il fit un petit mouvement du menton pour désigner Milan qui ne savait vraiment plus pourquoi il se trouvait là.

- Il marchait à côté de moi sur le trottoir.

- Hum.

Emile hocha de la tête pour indiquer qu'il avait compris. Alice avait apparemment conclu la discussion. Elle passa le seuil de chez elle et Emile referma la porte d'entrée derrière eux. Milan se retrouva seul. Comme un con.

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