Chapitre 8

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Qui a dit que les hommes étaient plus forts que les femmes ?

Baptiste

Sur la ligne, la tension monte. Coup de sifflet, plus qu'une minute avant le premier départ.

Le vent souffle de plus en plus fort, mais ce n'est pas un problème pour moi. Plus concentré que jamais, je m'approche à tribord — main droite la plus proche du mât — du bateau comité sans pour autant le toucher, près à partir quand le dernier gong retentira.

En équilibre permanent entre avancer et reculer pour faire du sur place, mes jambes tremblent légèrement sur ma petite planche qui s'enfonce un peu dans l'eau sous mon poids. Les autres concurrents viennent se placer au fur et à mesure autour de moi sans me toucher, mais en me pressant quand même.

- Y a plus de place ! Je grogne quand certains n'arrivent pas à bien gérer leur gréement.

Quelle idée ils ont eu de faire un départ tous en même temps, hormis les minimes qui sont partis quelques minutes avant nous pour leur propre course ? Certes, nous ne sommes pas cinquante, mais entre les espoirs, les techno-plus comme nous et les garçons/filles, ça commence à faire beaucoup de catégories mélangées.

Je jette un coup d'œil à ma droite, où une personne se faufile avec brio entre moi et le comité, sans me gêner, ni risquer une pénalité si elle touche le bateau. Ses cheveux roses sont ramenés en arrière dans une petite queue de cheval, sa mine sévère par la concentration, ses bras qui tremblent à cause de la grande voile.

Je l'observe quelques secondes mais elle ne me jette même pas un regard. Pas parce qu'elle ne le veut pas, mais je sens qu'elle est plus déterminée que jamais.

Quelques secondes nous séparent du départ, et tout se presse autour de nous. J'entends quelques planchistes tomber dans l'eau, entraînant d'autres dans leur chute. J'entends des protestations, jamais d'insultes, même si tout est lourd de sens.

- Bonne chance, je déclare à Amélie qui ne daigne pas m'observer.

- Garde ta salive et concentre-toi, elle réplique aussitôt ce qui me fait ricaner.

J'entends les hommes sur le bateau comité se remuer en posant la bière qu'ils sirotaient — pas sûr qu'ils en aient le droit — puis se préparent avec le drapeau qu'ils hisseront rapidement pour le départ, ainsi que l'homme qui sifflera le début de la course.

Je jette un coup d'œil rapide à la montre accrochée sur mon gilet de sauvetage, m'indiquant qu'il ne reste plus que 10 petites secondes avant le coup de sifflet.

Anticipant le vent que me fera Amélie et la possibilité qu'elle me fasse tomber, je me recule sur ma planche, et commence à avancer dangereusement vers la limite de la ligne.

5 secondes.

Proche des coachs, j'entends tout le monde dire à voix basse le compte à rebours.

4 secondes.

Les voiles commencent à se remuer dans un boucan d'enfer qui surpasse celui du vent.

3 secondes.

Je commence à remuer ma voile comme eux, pompant pour prendre de l'élan et ne pas faire de faux départ.

2 secondes.

Le sang qui palpite dans mes veines.

1 seconde.

Amélie qui n'est pas très loin, nos planches se touchant presque.

Le coup de siffler retentit, et je ne réfléchis plus. Je pompe de toutes mes forces, créant du vent dans ma voile pour m'élancer à travers la ligne. La masse nous suit, tous proches les uns des autres, même si au fur et à mesure de la course, tout le monde s'éloignera.

Le peu de personne qui ont décidés de partir à bâbord de la ligne se retrouvent coincés, obligés de nous laisser la priorité. Si parfois ça passe, cette fois, personne n'a réussi à devancer la foule de tribord.

Je pompe encore plus jusqu'à ce que je me sépare du groupe de deux mètres, puis profite de cet élan et de ce dégagement pour avoir plus de vent. L'avant de ma planche se décolle légèrement de la surface de l'eau, et c'est parti.

Pieds dans mes straps à l'arrière qui me permettent de ne pas glisser, ma planche file à toute vitesse vers la première bouée qui se trouve au vent. Comme il est impossible de naviguer face à celui-ci, je vais me retrouver à faire des allers retours en zigzags, jusqu'à atteindre le point qui m'intéresse. Du coin de l'œil, je remarque qu'Amélie est au dessus de moi, me dépassant tellement sa planche file.

Si sa voile a la même superficie que moi, sa petite taille l'aide sûrement en compétition.

Bien décidé à la contrer, je m'applique d'autant plus à faire mon près — la remontée vers le vent en aller-retours — ce qui nous oblige à nous croiser plusieurs fois. Un coup elle me laisse la priorité, un coup c'est moi : jusqu'ici, pas de faux pas.

Les autres ne sont pas si loin derrière, si bien que je fais très attention à ne pas chuter ; le temps de remonter sur la planche, de redresser ma voile et de reprendre de la vitesse, je ne serai peut-être pas dernier mais pas loin.

Amélie me devance de quelques secondes en passant autour de la première bouée, puis file comme un éclair vers la deuxième plus facile d'accès. Je passe la bouée à mon tour, manquant de perdre l'équilibre comme j'ai failli la toucher, mais reprend mes esprits rapidement. Quelqu'un me rattrape, et je devine qu'il s'agit de la brune qui me colle depuis tout à l'heure.

Je ne me souviens même pas de son nom, mais tout ce que je sais, c'est qu'elle me parle de tout et de rien de triturant ses cheveux depuis deux longues heures. C'est à peine si je lui répondais, mais ça n'avait pas l'air de la déranger.

Agacé, je descends un peu pour la coincer dans la course et l'obliger à rester derrière moi. Je l'entends râler plusieurs fois, tendant l'oreille au cas où qu'elle m'insulte, mais je préfère encore qu'Amélie gagne plutôt que cette morue qui se maquille pour aller dans l'eau de mer. Ridicule ses lèvres rouges.

Amélie passe la bouée un peu trop longuement et je la rattrape, suivit de près par l'autre fille.

La troisième bouée semble loin, mais elle est sous le vent, ce qui nous permet d'aller extrêmement rapidement à celle-ci.

La vitesse a laquelle nous allons est vertigineuse, et dans cette allure, notre planche est ultra sensible. Un faux pas, et on tombe assurément dans un gros fracas et avec quelques bleus en plus.

C'est ce qui arrive à la morue. Je n'entends que le bruit de son mât contre l'avant de sa planche, et un plouf tinté de douleur derrière moi.

Je ne me retourne pas, elle s'en remettra.

Maintenant que la chiante ne peut pas nous rattraper — ou alors elle est plus forte que je ne le pense —, toute mon attention est reportée sur Amélie, qui est si proche mais pourtant inaccessible.

Ses manœuvres sont tellement fluides et maîtrisées, son aisance sur l'eau me fait presque rager. Mais je ne lâche rien. Elle passe la bouée avec prudence pour ne pas tomber, et j'en profite pour la devancer. Je comprends son hésitation dans ce virage, mais je préfère prendre des risques quitte à perdre. Je fais mon empannage avec minutie, essayant de garder le maximum de ma vitesse, puis reprends l'allure en zigzags pour retourner à la deuxième bouée.

Sur mon chemin, je croise le reste du troupeau qui se dirige vers celle que je viens de passer, mais j'arrive à les contourner pour éviter les drames inutiles. Le vent siffle dans mes oreilles tandis que le clapot tape sur les planches qui cassent les petites vagues par leur passage.

Je ne sais pas où est Amélie.

Je jette un coup d'œil à l'arrière de ma planche pour estimer quand tourner et ainsi ne pas louper la bouée que je dois enrouler, et ma mâchoire manque de se décrocher quand je vois des cheveux roses en faire déjà le tour.

Eh merde.

Je vire de bord — c'est-à-dire que je fais demi-tour — et me précipite à la bouée pour en faire le tour. Dans l'action, je manque de la toucher avec ma planche et de me prendre une pénalité, mais je me rattrape au dernier moment en ramenant ma voile vers l'arrière de ma planche.

Je n'entends plus que les battements frénétiques de mon cœur qui pulsent dans mes tympans.

Plus qu'une bouée et après c'est l'arrivée.

Je ne suis pas sûr de rattraper Amélie.

Je me mets en arrière, pieds dans les straps qui me permettent de rester au contact de la planche, harnais accroché dans la boucle pour que se soit mon corps qui supporte le poids du vent dans la voile, et je file. Je passe entre les gens qui remontent sans me soucier de les faire tomber. Je serre les dents et ferme les yeux quand je reçois des jets d'eau salée dans la tête, irritant mes yeux.

Il faut que je gagne.

J'arrive à la bouée à deux secondes d'Amélie qui entame déjà les derniers mètres face à la ligne. Je la passe, et me précipite à sa rencontre. Ma planche touche presque l'arrière de la sienne, et je décide de passer au-dessus d'elle. Ainsi, le vent qui gonflait sa voile se retrouvera dans la mienne ce qui la ralentira.

Mais le bord est trop court. Nous passons la ligne à deux, côte à côte.

Les hommes et femmes présents sur le bateau d'arrivée se mettent d'accord, puis disent à voix haute les numéros par ordre d'arrivée.

- FRA 466, dit-il doucement malgré le vent qui nous empêche de bien entendre. ITA 220.

Il continue au fur et à mesure que les gens passent la ligne tandis qu'une femme note précieusement les résultats dans un carnet.

Je lâche ma voile dans l'eau quand je suis assez loin pour ne pas gêner la fin de la course, et le laisse tomber en arrière dans l'eau glaciale.

Les abysses m'entourent un instant, j'accueille l'eau qui rentre dans ma combinaison comme de petites aiguilles qui viennent piquer ma peau, et je remonte à la surface doucement à cause du gilet qui me comprime la poitrine jusqu'à ce que je sente le froid du vent sur ma tête.

Les vaguelettes frappent mon visage quand je nage pour rejoindre ma planche à la dérive, que je rattrape d'une main.

Elle a gagné cette manche. Mais il en reste 4. 

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