Chapitre 33 : La cruauté du corps

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Dans la journée, Nemuri était restée à mes côtés durant toute la séance de soins de Recovery Girl.

J'avais été obligée de dormir toute l'après-midi alors que j'avais projeté d'aller observer mes camarades durant le cours de Super-Héros 101. J'avais boudé Nemuri de ne pas m'avoir réveillée mais pour se faire pardonner, elle m'avait emmené dîner à l'extérieur. Elle avait choisit un restaurant traditionnel et, le temps d'un soir, nous avions pu nous retrouver en famille sans penser à nos obligations héroïques. 

De plus, je pouvais à nouveau marcher et je n'avais plus besoin d'une assistance respiratoire. Tout semblait aller mieux mais j'étais actuellement assise sur mon lit, dans la pénombre de la nuit, le regard dans le vague. J'étais rentrée tard dans la soirée et tout le monde avait déjà regagner sa chambre.

Il y avait un grand vide.

Je n'étais pas en état de choc. Il n'y avait ni colère, ni rage, ni tristesse non plus.

Juste un immense vide.

Et je n'arrivais à penser à rien. Je ne savais pas si j'étais troublée ou fatiguée mais il n'y avait aucune émotion distincte en moi. J'avais sans doute épuisé toute ma réserve de larmes pour la journée. Quelque chose me manquait, je le savais mais je l'ignorais. Ce vide était l'œuvre du deuil et je ne pouvais rien faire pour le combler.

Il n'y a rien.

Alors, je sentis mon corps se mouvoir, bouger, se lever et marcher. Un pas après l'autre, sans vraiment savoir où j'allais, je quittais l'extension de l'internat. Lentement, je traversais le couloir et rejoignais la salle commune baignée dans la lumière de la lune déjà haute dans le ciel. Silencieusement, je m'enfonçais dans un autre couloir puis dans la cage d'escaliers. Je montais les marches, une par une, d'un étage à l'autre. Et enfin, je réalisais où mon inconscient m'avait mené uniquement quand je me retrouvais en face de la chambre de Todoroki.

Qu'est-ce que je fais ici ?

Je n'avais même pas le droit d'être dans l'aile masculine de l'internat et me voilà à braver les interdits pour aller voir mon camarade. Je devais avoir un sérieux problème pour venir jusqu'ici alors que je n'en avais aucune raison. Que pouvais-je bien faire ? Je ne pouvais pas simplement toquer à sa porte et le saluer sans avoir quelque chose à lui dire.

J'étais désespérante.

Mais alors que je m'apprêtais à partir, la porte en face de moi s'ouvrit à la volée sur un Todoroki surprit et les yeux écarquillés, m'arrachant dans le même coup un sursaut de frayeur. On se fixa dans le blanc des yeux pendant quelques secondes, sans savoir quoi se dire. Et malheureusement, ce silence-là n'était pas de ceux que nous apprécions entre nous.

Je déglutis difficilement et me raclais la gorge.

- B-Bonsoir Todoroki.

- Qu'est-ce que tu fais ici ? Je t'ai entendu parler derrière la porte.

Hein ?

Mes joues s'embrasèrent violemment, honteuse de ne pas m'être entendue parler toute seule. Mon cœur battait la chamade et je me liquéfiais sur place. C'était terriblement embarrassant !

On entendit une des portes s'ouvrir sur le palier et, par réflexe sans doute, mon camarade m'attrapa par le bras et m'attira dans sa chambre avant de refermer derrière nous.

J'étais désormais dans la chambre de Todoroki et ce n'était pas très rassurant.

- On a eu de la chance, tu aurais pu te faire punir si Sato t'avais vu, soupira-t-il.

- Je ne pense pas qu'il m'aurai dénoncée, répondis-je sans réfléchir.

J'observais la chambre de Todoroki, entièrement redécorée dans un style japonais traditionnel. Cela avait dû lui demander de nombreuses heures de travail pour en arriver à ce résultat et c'en était tout simplement bluffant. Toutefois, mon regard se perdit dans le vide, sur une photo de Todoroki et ce que je supposais être ses frères et sœurs.

Mon cœur se serra une fois de plus dans ma poitrine.

- Et donc, que se passe-t-il ? Demanda-t-il.

Ils étaient tous les trois magnifiques sur ce cadre. Bien que la pièce était plongée dans l'obscurité de la nuit, le faisceau lumineux d'une lampe de bureau me permettait de distinguer leurs visages heureux.

Si Hisobe avait été en vie...

Je sortis brusquement de mes pensées lorsque mon camarade me saisit par les épaules. Je relevais la tête pour croiser ses belles prunelles hétérochromes, visiblement inquiètes quant à mon manque de réponse.

- Yumeko, tu pleures...

- Hein ?

Je levais la main à mon visage et effectivement, de fines larmes avait dévalé mes joues sans que je ne m'en rende compte.

- P-Pourquoi ? Demandais-je à haute voix pour moi plus que pour lui.

J'essayais de les essuyer, d'arrêter de pleurer, d'arrêter d'être faible. Mais l'évidence était là. Je n'arrivais pas à stopper ce flot incessant de larmes qui s'amplifiait toujours. Voir la fratrie des Todoroki en photographie avait visiblement comblé ce vide en moi d'une nouvelle vague de tristesse que je ne pouvais réprimer.

C'était difficile et douloureux.

À ma grande surprise, Todoroki sortit un mouchoir en tissu soigneusement plié de sa poche et retira ma main de mon visage. Tout doucement, il vint tapoter le petit mouchoir contre mes pommettes et descendit jusqu'au bas de mon visage pour essuyer les traces que les sanglots laissaient sur leur passage. Il passa le tissu sur mes paupières, sur mes joues et enfin sur ma mâchoire.

Sans prononcer un mot, le garçon s'approcha d'un pas, réduisant la distance entre nous. Il passa timidement un bras dans mon dos et l'autre derrière ma nuque, me ramenant à lui dans une étreinte chaleureuse.

- Todoroki...

Mes larmes commencèrent à se tarir peu à peu et j'enfouis mon visage dans l'épaule de mon camarade, profitant du réconfort que ses bras m'offraient. J'y retrouvais également la même odeur de menthe que j'avais sentis en humant son vêtement la veille et je m'étonnais à grandement l'apprécier.

Je ne trouvais pas la force de lui rendre son étreinte, mais il savait que ce n'était pas un rejet. Il savait que j'étais vidée de toute mon énergie et que tout cela était très difficile pour moi. On resta dans cette position pendant de précieuses minutes où, l'espace d'un instant, je balayais les émotions néfastes qui m'accablaient depuis la mort d'Hisobe.

C'était reposant.

Lentement, le garçon se recula, me laissant entrevoir son habituel visage flegmatique. Mais je savais que Todoroki n'était pas sans émotions. Loin de là. Il était humain et je savais parfaitement que même si il ne laissait rien passer, à l'intérieur ce n'était pas le même sang-froid qu'à l'extérieur. Ce calme me rassurait et me permettait toujours de garder la tête froide en ces temps difficiles. Délicatement, il posa ses mains sur mes joues, ses doigts épousant parfaitement les courbes de ma mâchoire et je vis son visage se rapprocher considérablement du mien, enflammant furieusement mes joues.

Mon cœur allait sortir de ma poitrine.

Il déposa alors de délicats baisers sur chacune de mes paupières humides. C'était doux et chaleureux. À travers ce geste, il me transmettait tout le soutien et le courage dont j'avais besoin. Je savais qu'il était là pour moi, c'était le message qu'il me faisait comprendre. D'ailleurs il l'avait toujours été, pas un seul moment depuis notre rencontre il ne m'avait abandonné. Il avait même bravé les interdits pour venir me chercher jusqu'au fin fond des enfers.

- Yumeko, je déteste voir ces larmes sur ton visage...

Je ne pouvais refréner les battements de mon cœur qui me foudroyaient sur place. Quand bien même j'inspirais profondément, forçant mon corps à se calmer, je savais que je ne pouvais rien faire contre les sentiments que ce garçon éveillait en moi.

C'était explosif, brutal, mortel.

Et terriblement douloureux.

C'était un de ces sentiments humain qu'on ne pouvait cacher ou ignorer et ce fut désormais clair comme de l'eau de roche dans mon esprit.

Je désirais ce garçon.

- Todoroki, si tu savais à quel point ton réconfort me redonne l'espoir et la lumière dont j'ai besoin, répondis-je dans un souffle, le regard perdu dans l'océan de ses yeux.

Tout à coup, le visage de mon camarade vira violemment au rouge. Je me reculais alors subitement de lui, rompant notre contact fiévreux. J'avais dépassé les limites et j'en étais bien consciente.

- Je devrais peut-être y aller, il est tard.

- O-Oui, bégaya-t-il.

Je soupirais, bien embarrassée par les réactions incontrôlées de mon corps. Inévitablement, nous évitions de nous regarder dans les yeux, c'était prévisible.

- Tu devrais dormir avec Momo cette nuit, me suggéra-t-il. Je vais t'accompagner.

Il ne me laissa pas le temps de répondre et ouvrit la porte de sa chambre avant de s'engouffrer dans le couloir. Il n'avait pas tord, aller voir Momo me remettrait les idées en place. Je m'empressais donc de le suivre, l'observant marcher dos à moi. Todoroki avait le bout des oreilles roses et les poings serrés.

Je soupirais encore une fois. Ça s'était terminé si vite que j'avais l'impression d'avoir vécu un mirage. Et malheureusement, un goût d'amertume persistait dorénavant sur le bord de mes lèvres.

On arriva rapidement devant la chambre de la brune et Todoroki se retourna enfin pour me faire face.

- J'espère que tu iras mieux, n'hésite pas à venir me parler quand tu le souhaites.

Je hochais la tête et il toqua fermement à la porte de Momo. On attendit quelques instants avant que mon amie n'ouvre la porte, simplement habillée d'une légère chemise de nuit. Todoroki détourna le regard et au vu du visage ensommeillé de ma camarade, nous l'avions réveillé en plein milieu de la nuit.

- Bonsoir Yaoyorozu, la salua mon camarade. Est-ce que Yumeko peut dormir avec toi ?

Les joues de Momo rosirent lorsqu'elle s'aperçut enfin de la personne qui était en face d'elle. Elle passa ses bras devant elle, tentant vainement de cacher sa nudité.

- E-E-Euh oui bien sûr, viens Yumeko ! S'affola-t-elle en m'attrapant par le bras.

Je n'eus pas le temps de remercier Todoroki que la brune m'attira dans sa chambre comme le bicolore l'avait fait une vingtaine de minutes plus tôt. Elle claqua la porte derrière elle, soudainement bien réveillée. Cependant, elle fixa le bois de celle-ci de longues secondes, en pleine crise de ventilation alors que je m'inquiétais pour elle.

- Tout va bien Momo ?

Elle hocha vigoureusement la tête de haut en bas avant de prendre une profonde inspiration. Elle se retourna, comme remontée sur ressors et m'invita à me coucher avec elle dans son gigantesque lit. Silencieusement, je me hissais sous l'épaisse couverture et Momo prit place à mes côtés.

Elle semblait avoir reprit ses esprits et elle se tourna vers moi pour me faire face.

- Je suis rassurée que tu arrives à tisser des liens avec nos camarades, me sourit-elle. Depuis le début de l'année, tu n'appelles que les filles tes « amies ».

- Je ne sais pas si je peux appeler Todoroki un « ami », répondis-je en la regardant droit dans les yeux. Être camarade, ami ou je ne sais quoi n'a pas vraiment de signification pour moi. Momo, tu es ma précieuse amie mais je ne sais pas ce qu'il en est de Todoroki.

Son regard brillait dans l'obscurité. Ses longues mèches similaires aux miennes étaient détachées et venaient doucement épouser ses formes. Son doux sourire plein de bienveillance me rappelait celui de Nemuri. Momo était indéniablement une magnifique jeune fille.

- Au fait, désolée de te déranger en pleine nuit, m'excusais-je, légèrement embarrassée.

Elle secoua la tête.

- Non, tu ne me déranges pas du tout. C'est l'occasion de dormir ensemble et de papoter toute la nuit ! S'exclama-t-elle, les joues rougies d'excitation.

J'avais déjà remarqué cela chez Momo. Elle s'enthousiasmait toujours des choses les plus simples comme discuter entre amies, faire des séances de révisions ou dîner ensemble. Ayant grandit dans une bonne famille, elle n'avait vécu que peu d'expériences de ce genre durant son enfance. L'argent ne lui était pas monté à la tête et la voir profiter de choses aussi ordinaires plutôt que de les mépriser était tout simplement adorable.

Mais dans un sens, je la comprenais mieux que personne. 

- D'ailleurs, reprit-elle. Qu'est-ce que tu faisais avec Todoroki ?

Je sentis mes joues se réchauffer et je m'empressais de le dissimuler en hissant la couverture jusqu'à mon visage.

- Pas grand-chose, un coup de mou, répondis-je en détournant le regard.

Elle eut un petit rire et se rapprocha de moi avant de fixer le plafond à son tour.

- Son calme et son sang-froid légendaires sont très rassurants, n'est-ce pas ? Dit-elle et je sentis une pointe étrange de mélancolie dans sa voix.

Je hochais timidement la tête, ne trouvant rien à y répondre. Momo continua cependant de parler, légèrement perdue dans ses pensées.

- Tu sais, l'année dernière j'ai eu un faible pour lui. Alors que j'avais totalement perdu confiance en moi durant le festival sportif de Yuei dans un combat contre Tokoyami, j'ai mis en difficulté notre duo lors de l'examen de fin de trimestre. Todoroki m'a redonné courage et nous avons tous les deux réussis l'évaluation contre Aizawa, me confia-t-elle.

Cette confession me tordit douloureusement l'estomac et une boule d'acide remonta dans ma gorge. En arrivant dans cette classe, je n'avais pas fais attention à l'année qu'ils avaient déjà tous passé ensemble. Il était certain que des relations étaient nées entre eux. Il était aussi évident que certains puissent ressentir plus que de l'amitié pour d'autres.

Momo aimait Todoroki.

En y réfléchissant, ce n'était pas très étonnant. Momo était une sublime jeune fille intelligente et rationnelle. Quant à Todoroki, c'était exactement la même chose. Leur sens de la réflexion et leurs ressources leur permettaient toujours de s'en sortir tous les deux, surtout lorsqu'ils faisaient équipe durant les leçons de Super-Héros 101.

Ces deux-là ensemble sonnait... comme une évidence.

- C'est vrai, Todoroki est une personne formidable, répondis-je.

Je comprenais maintenant la réaction qu'elle avait eu en se retrouvant face à celui qu'elle appréciait au beau milieu de la nuit. Moi-même j'aurai très certainement perdu mes moyens.

Je secouais la tête brusquement, balayant toute l'avalanche de sentiments et de pensées que la confession de Momo avait provoqué autant dans mon cœur que dans ma tête. Un large sourire retroussa la commissure de mes lèvres et je me retournais vivement vers mon amie.

- À part ça... Tu ne m'as pas dis que tu aimais quelqu'un, la taquinais-je.

Un rictus mauvais étira encore plus les traits de mon visage lorsque Momo rougit violemment, plaquant ses mains sur le sien et lâchant un petit couinement de honte.

Et durant toute la nuit, je n'avais cessé d'embêter Momo à ce propos. Nous avions discuté très longtemps, oubliant notre fatigue pour profiter de ce moment rien qu'à nous. Je m'étais étonnée à penser qu'Hisobe aurait été friand aussi de ces petits ragots entre filles. Il m'aurait très certainement arraché la tête pour avoir cacher ce que je ressentais à ma précieuse amie. J'avais pourtant chassé cette idée, préférant me complaire dans la taquinerie plutôt que dans le mensonge. Je n'étais de toute évidence pas une bonne menteuse, il avait donc été plus facile pour moi de ne plus penser à mes sentiments pour Todoroki de cette manière.

Cependant, je savais que j'allais rapidement devoir faire un point sur ce que je ressentais envers le jeune garçon puisque j'étais désormais engagée sur une pente bien sinueuse dont je savais déjà que l'atterrissage serait le plus difficile.  

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Bonjour tout le monde ! 

Premièrement, je tiens à préciser que non, il n'y a aucune volonté de faire de Momo une (peste) concurrente amoureuse, rivale ou tout ce que vous voulez. J'espère donc que ce retournement de situation ne vous dérange pas (bien sûr que si ça doit vous déranger mais aller c'est pour le bien de l'histoire).

Je le précise car j'ai déjà vu des fanfictions où cet adorable personnage devient un réel bouc émissaire mais n'oubliez pas, Momo est la fille dont Yumeko est la plus proche dans la classe. ;)

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Ensuite pour celle.eux qui sont intéressé.e.s : 

Yumeko ne suit pas du tout la "courbe du deuil". En sociologie (merci le lycée), la courbe du deuil est une étude proposé par Kubler, avec une phase ascendante et descendante. Tout d'abord, le personnage passe par le Choc puis le Déni. Ensuite vient la première phase qui commence par la Colère et se traduit par le Marchandage où le sujet va se convaincre que tout cela n'est pas véritable. 

Puis, la Tristesse. Le personnage a comprit la situation et doit faire face à une avalanche d'émotions de perte et d'accablement. Il y a ensuite la deuxième phase : Acceptation, Pardon, Renouveau et enfin Sérénité. (ouais bon c'est bateau hein parce que tout le monde n'est pas pareil puis flemme d'aller chercher sur internet)

Bref, Yumeko a déjà subit la perte d'Hisobe lorsqu'elle avait 14 ans et lui 13. Elle l'a vu prendre feu de ses propres yeux et c'est quand Nemuri l'a recueillit qu'elle a vécu le "véritable" deuil. Elle a vraiment tout perdu : son grand frère lorsqu'ils étaient gamins puis Hisobe bien plus tard. À l'heure actuelle, son deuil se fait donc d'une manière un peu spéciale. Elle n'a revu son petit frère que pour quelques jours et tout cela lui fait l'effet d'un mirage dans sa tête. Elle ne sait même pas si ce qu'elle a vécu s'est véritablement passé, si ce n'est que ce sont les autres autour d'elle qui lui rappellent. Yumeko a donc revu celui qu'il lui était cher pour qu'on lui retire immédiatement après. 

C'est pourquoi, le sentiment dominant est le vide

Voilà, j'espère que vous comprenez un peu mieux notre OC maintenant ♡

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