Il était fatigué. Vraiment fatigué. De toutes les journées et de tous les croupiers disponibles, il avait fallu que ce soit eux. Lui et ce gros bonnet prétentieux.

Un gros client du casino fêtait aujourd'hui l'acquisition d'une somptueuse villa au bord de la ville et il n'avait rien trouvé de mieux que de gaspiller un peu plus son argent. Clément ne le supportait déjà pas de base alors là... Il sentait le regard de ce crétin sur lui. Encore une fois.

Il était marié, avec une femme, ce qui ne l'empechait pas de courir aussi bien après les jolies blondes botoxées qu'après les hommes de la trentaine. Mais il ne pouvait rien dire, il devait subir en silence.

- Clément, quel plaisir de vous revoir. Vous ai-je manqué ?

- Bonsoir Monsieur et ... c'est toujours un honneur de vous recevoir dans notre maison.

- Toujours aussi poli et raide mon pauvre. Détendez-vous voyons ! c'est la fête !

Oh de dieu, il devait supporter de tas de chair pendant encore... 4 heures. Au bout d'un heure et n'en pouvant plus, Clément demanda une pause pour soit-disant aller fumer. Il attrapa son téléphone et envoya un message à son petit-ami depuis un an.

- Je vais craquer Nör, y a encore l'autre crétin qui s'est pointé...

- Qui ? Valander ?

- Ouais...

- Tiens le coup mon cœur. Promis tu rentres, je me réveille rien que pour toi et je te fais l'amour avec du chocolat <3

- T'es con ><

- Oui mais tu m'aimes :D

- A tout à l'heure.

Clément sentit une pointe d'amertume à devoir retourner travailler. Heureusement, la promesse de Nör lui fit chaud au cœur et il sourit.

- Qu'est-ce qui peut bien te faire sourir à ce point, toi qui est toujours si crispé hum ?

Clément, surpris, se retourna et son visage se transforma lorsqu'il reconnu Valander, appuyé contre le mur, une lueur salement lubrique traversant son regard.

- Rien qui ne vous regarde. Maintenant laissez-moi passer j'ai du travail.

- Tsss tsss pas si vite. Cette fois-ci il est hors de question que tu me refoules.

- Pardon ?

- Ne fais pas semblant. Je te veux, croupier. Tu me rends fou. Tu crois vraiment que je viens dans ce casino miteux pour me faire bien voir ?

- Ce que vous faîtes de votre argent m'est égal. Alors je le redis, laissez-moi passer.

- Ho allez, refais moi voir ton joli sourire ! Qu'est-ce qui te faisais sourire d'ailleurs !

Sans lui laisser une chance de répliquer, le gras du bide se saisit de son téléphone qu'il avait toujours en main. Clement grimaça en voyant l'expression outrageusement dégoûtante qui orna le visage du riche.

- Haa ! Je savais bien que t'étais du genre à être une chaudasse derrière cette table de blackjack ! Je suis sûr que cette charmante petite bouche peut faire bien d'autre choses que des paroles toute faite n'est-ce pas ?

- Comment osez-vous ! Rendez moi ça !

- Ho non mon petit croupier, je suis bien décidé à toucher le jackpot ce soir...

Là Clément allait vomir. Il fallait qu'il dégage d'ici, qu'il aille près de la foule !

- Maintenant ça suffit, fit-il en reprenant son téléphone d'un geste brusque. Si vous n'arrêtez pas immédiatement, je serais obligé de prévenir la sécurité. Vous ne voulez pas gâchez votre petite soirée bien dégueulasse si ?

- Tes petites menaces ne m'éffraient pas. Et à ton avis, qui de nous deux sera pris au sérieux si cet « incident » s'ébruite ? Le client qui a tous les droits et qui est roi ou le petit employé qui baise tous les chiens en chaleur de cette ville ?

- Espèce de...

- Maintenant cesse d'être arrogant et laisse-toi faire. Tu verras, ça passera beaucoup plus vite.

Valander bloqua Clément contre le mur, restreignant le moindre de ses mouvements. Il essaya d'embrasser le mage, sans succès, ce qui l'énerva d'autant plus. Une première gifle sonna Clément, qui lança un regard noir de haine à son assaillant. Loin de se laisser intimider, Valander continua de plus belle ses assauts. Sa main se baladait sur les vêtements de Clément jusqu'à arriver au niveau de son ceinturon.

- Si vous osez... Murmura Clément d'une voix rauque de colère.

- Je vais me gêner.

Le geste suivant la parole, le client glissa sa main en direction de l'intimité du jeune homme. Un hoquet de surprise et de terreur saisit Clément. Personne d'autre que Nör n'avait le droit de le toucher là ! Et surtout pas ce répugnant personnage ! Il avait l'impression qu'une anguille se faufilait dans tout son bas-ventre. Il savait qu'il allait le regretter mais tant pis !

D'un geste rapide, il leva le genou et frappa Valander qui, sous le choc, s'éloigna de Clément.

- Espèce de salope ! Je t'avais prévenu, ton job ici est foutu, crois-bien que je vais tout faire pour que ce soit le cas.

- Faites ce que vous voulez ça m'est égal. Et pour info, vous devriez éviter de rejeter votre propre conscience mal léchée sur les autres. Je suis fidèle et je l'ai toujours été, gros tas de viande. Répliqua Clément.

La suite de l'incident ne se fit pas attendre. Clément fut accusé par Valander d'avoir essayé de le séduire dans les coulisses. Le gérant du casino se doutait de l'innoncence de Clément mais il ne pouvait pas se permettre de perdre un aussi gros client. Il s'excusa auprès de Clément et lui promis des lettres de recommandation si besoin. Clément, dépité et fatigué, quitta le casino vers les cinq heures du matin. Comme prévu, il se dirigea vers l'appartement de son amant, soucieux de devoir lui avouer s'être fait viré.

Devant la porte de Nör, il se sentit comme un enfant qui ramenait une mauvaise note à sa mère. Il prit son courage à deux mains et toqua prudemment afin de ne pas éveiller le voisinage. Nör, habitué, lui ouvrit tout de suite. Clément sourit doucement en aperçevant des marques d'oreiller sur sa joue.

- Bonsoir love.

- Mmmh bonsoir.

- Houlà... toi t'as mal terminé ta soirée. Raconte-moi.

- Je... j'ai... pff je sais pas par où commencer, avoua Clément, gêné.

- Le plus simple ?

- Je me suis fait virer.

- Toi ? Virer ? On ne t'a jamais rien reproché pourtant ! Qu'est-ce qui s'est passé ?

- C'est Valander.

- Encore ce connard ?

- Il a... essayé d'abuser de moi. J'ai répliqué et ça lui a pas plu.

Clément attendit une réponse mais rien ne vint. Ce silence l'angoissait, terriblement. Il n'osait pas regarder son petit ami. Qu'y verrait-il ? De la colère ? Du dégout ?

- Nör je... il ne m'a rien fait et ... c'est pas grave je trouverai un autre travail...

- Est-ce qu'il t'a touché ?

- C'est rien je te dis Nör...

- Est-ce qu'il t'a touché ? Gronda la voix de son interlocuteur.

Clément leva enfin les yeux et lorsqu'il croisa le regard du pompier, il vit une lueur rouge menaçante. Il n'avait jamais vraiment vu Nör en colère ou à ce point effrayant. De plus en plus fatigué, il s'avança et embrassa fougueusement son homme.

- J'ai envie d'oublier cette journée de merde Nör, alors s'il te plaît, fais-moi tien maintenant, que je puisse oublier.

Ce à quoi Nör répondit d'un simple hochement de tête.