Et j'ai souri

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- Tout chez toi n'est que de la graisse. Lança cette pimbêche de Valéry en souriant de plus belle après sa remarque.


Un petit cercle s'était formé autour de moi, alors que j'essayais péniblement de me relever, de surmonter encore une fois la misère de Mademoiselle Perfection.

- T'es carrément dégueulasse. Marmonna-t-elle entre ses dents avec un rire aigu, grinçant, à faire peur aux plus courageux.

Ouais, je n'étais pas belle à voir, ouais on me regardait souvent avec mes bouts de ventre qui dépassaient, les bourrelets beaucoup trop présents, le menton abominablement remarquable.

- Crève dans tes frites. Finit-elle alors que je me relevai enfin, poussant un long soupir, fatiguée après l'effort.

Je me tus, l'envie de répliquer me brûlant la gorge.

La foule de lycéens se rapprochait davantage, m'emprisonnant dans un cercle parfaitement circulaire, avec Valéry au centre.

Ça arrivait souvent ces faits divers ici, pas vraiment un truc de dingue, quelques babioles comme disaient certains. Mais c'était tellement facile de s'en foutre royalement quand on n'était pas touché par ces crises de diva. Oui c'est vrai, moi aussi j'aurais été lâche si je voyais quelqu'un se faire démonter devant moi. Je la regarderais, attentive, cherchant à trouver un moyen de me faire un propre avis sur le sujet.

Je connaissais le schéma de cette bataille, la cohue des ados boutonneux, les clopes qui se fumaient alors qu'on me filmait discrètement me faire laminer par cette gâtée de la nature. Je partirais, les larmes aux yeux en courant vers les toilettes et en vidant mes tripes quelques minutes plus tard. Ouais c'était clair, le sourire rageur de cette pétasse dans le crâne, ça allait recommencer.

Mais soudainement, cette fille sortit de nulle part. Je ne la connaissais pas, elle était sublime, époustouflante. Fine, la peau légèrement hâlée, les cheveux parfaitement coiffées. La jalousie crevait mes poumons.

- Franchement c'est pas cool Valéry, arrête. Avoua-t-elle alors que tous les élèves se mettaient à se lancer des regards qui en disaient long.

Cette fille, elle était pote avec Valéry. Je le sentais, pourtant, elle me défendait. Elle ne trouvait pas cela chouette et ça m'avait tout de suite réchauffé le cœur.

Rapidement, une deuxième voix. Un gars. Un gringalet mal coiffé, le skateboard à la main, l'air sérieux.

- On ne devrait pas attaquer les gens comme ça. Personne ne mérite d'être menacé ou traité ainsi.

Inconnu aux beaux yeux bruns, ça te dirait de m'épouser ? Non sérieusement, j'eus subitement le courage de me lever contre elle, de me rebeller pour de bon. Mais son regard fourbe me perçait horriblement et beaucoup trop profondément. Je me stoppai dans mon élan.

Puis ce fut une foule, un énorme groupe de personnes qui avait commencé à râler, à rappeler qu'au fond, je n'avais jamais voulu être obèse. Sans blague. Je vis ma vie défiler. Pour une fois que ce monde semblait humain. Ma joie était infinie sur le moment, ouais elle retomberait sûrement le lendemain. Mais pour une fois j'étais fière d'admirer cette bande d'empotés me soutenir. Ouais, vraiment, un beau spectacle.

C'était le bon moment pour lâcher toute ma haine :

- Crever dans des frites? Oh non, ça c'est mort. Moi je préfère crever dans des gros gâteaux au chocolat. T'as tout faux Valéry. Je suis grosse, et alors ? Ouais je suis obèse, et alors ? Toi t'es bien siliconée non ? Et alors ? Voilà le problème, toi tu t'en fiche des « Et alors ? » alors que personne ne devrait sauter cette étape. Je suis laide à en chialer, aucun gars ne me regarde. Je vais nulle part par peur d'être exposée. Je ne suis pas heureuse que l'on soit d'accord. Je pourrais l'être si les gens comme toi n'existaient pas. Si on ne m'enfonçait pas une fois par jour pour essayer de me détruire. Mais regarde autour de toi bordel, mate moi ce monde fou. Eux aussi ils sont mal. Beaucoup en tout cas. J'arrive à lire dans leurs regards, au moins un quart est dépressif. La moitié mal dans sa peau. Puis le reste, heureux d'être eux. Quels veinards ceux-là, je les envie tout le temps. Mais je pourrais être comme ça tu sais, heureuse comme une poupée barbie. Ouais devant un miroir, je pourrais me trouver belle si les gens ne me disaient pas que je n'étais pas belle. Je pourrais être mignonne si tes sbires ne me suivaient pas chaque soir jusqu'à chez moi. Ne fais pas l'innocente Valéry, tu sais très bien de quoi je parle. Je suis peut-être hideuse? Grosse, obèse, laide même. Mais franchement, là je m'en fiche. Rentre ça dans ton crâne. Je suis obèse, et alors ?

Tout le monde s'était arrêté de parler. Un silence lourd, de plomb agrémentant la tension de ma tirade. Puis, dans un chrono hors pair, on m'applaudit. J'avais un peu pleuré au final mais mon cœur semblait enfin soulagé.

Je rentrai chez moi, fière pour une fois et je me regardai dans la glace. Et j'ai souri.



(corrigé)

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