Chapitre 16 (Partie II)

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Le silence ponctue son discours, tandis que je continue d'observer la plaine vide qui me fait face, l'œil droit fermé. Je ne suis pas sûre de savoir sur quoi rebondir. Dois-je faire une réflexion sur ses tatouages, qui m'intriguent depuis la première fois que je les ai vus ? 

Lui demander de m'en montrer, s'il en a d'autres que sur les bras ? Et pourquoi est-ce que ces dessins devraient avoir une signification ? Est-ce vraiment nécessaire ? Peut-être qu'il est né avec, après tout. Il ne s'en souvient juste plus. 

Mais rapidement, mon cerveau est emmené loin des tatouages et de cette histoire de significations pour se concentrer sur l'autre partie du discours. Ma perte de mémoire. Est-ce vraiment une nouvelle chance ? 

Je sais, je sens que Benny a raison, que cette perte de mémoire a effacé des moments de ma vie. Des moments importants. Certains sont de mauvais souvenirs certes, mais d'autres sont sûrement meilleurs ! 

Et après le rêve de la dernière fois, je suis incapable de savoir si je veux vraiment m'en souvenir. Un frisson remonte le long de ma colonne vertébrale et je baisse le regard quelques secondes pour retrouver une contenance. 

Un horrible goût de bile s'empare de ma bouche et j'ai besoin de toute ma volonté pour ne pas rendre un repas imaginaire sur le sol. Serrant mon pantalon de toutes mes forces avec ma main gauche, je me force à me lécher mes lèvres, avant de reporter mon attention sur Benny, qui m'observe du coin de l'œil.

— Tout va bien ? me demande ce dernier, visiblement inquiet de ne pas me voir répondre.

Lui adressant un mince sourire, je m'apprête à hocher la tête avant de me figer. Nous ne sommes que deux. Il n'y a plus que lui et moi. Plus rien d'autre que nous, pour je-ne-sais combien de jours encore. Je ne devrais pas lui mentir. 

J'ai besoin de son soutien, comme il a besoin du mien. Qui plus est, il vient de se confier au sujet de ses tatouages alors qu'il n'avait pas besoin de le faire. Après l'hôpital, les robots, le sang violet, je sais que je ne suis pas douée pour avoir confiance. 

Plus précisément, je crois que je n'ai jamais fait confiance à qui que ce soit depuis mon réveil. Mes yeux rencontrent ceux de Benny et j'y plonge sans m'en rendre compte. 

J'ai besoin de savoir Benny. Puis-je te faire confiance ? Non. Mauvaise question. Bien sûr que je le peux. C'est la seule personne qui a tenté de me prévenir. De me sauver. Qui a fini par me sauver. Bien sûr que je peux lui faire confiance. A qui d'autre sinon ? 

Je passe une main sur mon crâne, grimaçant en sentant la chaleur qui s'en dégage. Fichu soleil, il brûle si fort... Je pensais que les quelques feuilles restantes sur cette arbre allait me protéger de cette chaleur ! Il est probablement autour de quatorze ou quinze heures. 

Benny me dit que c'est les heures les plus chaudes de la journée, surtout en août. Et d'après lui, nous sommes à peu près autour du six août, puisque nous avons quitté l'hôpital en début de mois. Le jeune homme se racle la gorge et je sors de mes pensées pour reporter mon attention sur lui.

« Pas vraiment. C'est juste... J'ai du mal à accepter tout ce qui s'est passé, à l'hôpital. On en a pas vraiment discuté mais... A l'hôpital, je faisais souvent des rêves. Toujours au même endroit. Avec les mêmes personnes. Parfois, les détails changeaient mais je ne m'en rendais pas vraiment compte, c'était toujours si calme et reposant... Et récemment... Récemment... Il y avait tellement de sang. Des cris. C'était horrible. Mais je... Je serais incapable de te dire si ce n'était que des rêves, des simulations, ou de possibles souvenirs. C'est trop flou. J'oublie toujours tout au réveil. Enfin, jusqu'à ce qu'ils arrêtent de m'injecter leur substance violette bizarre. Et le jour où nous sommes partis... Ils allaient me rendre mes souvenirs. Je crois. Je ne sais pas trop quoi croire. Mais si c'est possible, j'aimerai essayer », j'avoue, les mains tremblantes et les larmes aux coins des yeux.

Prenant mon courage à deux mains, je risque un regard vers le jeune homme, qui n'a pas prononcé un seul mot depuis la fin de mes mouvements. Ses yeux fixent toujours mes mains, qui continuent de trembler légèrement, sans que je ne puisse rien y faire. 

Mes sourcils se froncent et je cherche dans le regard de Benny la moindre trace d'une quelconque compréhension de sa part. Voyant ses lèvres bouger de manière rapide et presque invisible, je comprends qu'il tente tout simplement de comprendre et déchiffrer mes phrases, afin de pouvoir y réagir. 

Cette découverte fait revenir un petit sourire sur mes lèvres et je me contente d'attendre patiemment et en silence la réaction du jeune homme. Lentement, je vois ses sourcils se froncer, sa bouche s'entrouvrir un petit peu plus et ses yeux viennent finalement à l'encontre des miens, comme s'il n'osait croire ce que je venais de signer. 

Comme si je racontais une bêtise, ou un mensonge. Non. Pas Benny. Il sait que je ne mens pas. Pas vrai ? Je sens quelque chose de chaud venir se coller sur ma main droite et baisse les yeux pour y trouver la main de Benny. 

Sa main enserre la mienne et d'un geste souple, il attrape mon autre main dans la sienne également, me forçant à reporter mon attention sur lui. Cette fois, c'est plus que de l'inquiétude que je lis dans son regard, c'est une sorte de tristesse voilée, comme si ce que j'avais vu le rendait triste. 

Sait-il des choses que j'ignore ? Question débile. Evidemment qu'il sait des choses que j'ignore, puisque je suis amnésique ! Parfois, il y a des pensées que j'aimerai oublier avoir. 

« Ce n'est pas déjà le cas ? », plaisante ma petite voix. Je lève les yeux au ciel et manque de me frapper la tête. Comme si ce n'était pas déjà étrange de l'entendre, il faut en plus qu'elle se moque de moi !

— De quoi tu te souviens ? demande le jeune homme d'une voix douce et calme, me poussant à revenir au moment présent.

Il fait ça beaucoup trop souvent, il faut vraiment que j'arrête de me perdre dans mon propre crâne. Sa question me surprend. Je viens de lui dire que je ne me souvenais de presque rien, oubliant tout au réveil ! Alors pourquoi cherche-t-il à me faire creuser ? 

Son regard bienveillant me supplie presque de lui faire confiance. Alors, lentement, je ferme les yeux et cherche dans mon esprit ce qui s'apparenterait à des souvenirs. Les plus récents me reviennent. Le sang. Les cris. Les espaces vides. Petit à petit, j'observe aussi des visages, un peu flou. 

Des paroles, qui ne me rappellent rien. Probablement une invention totale de mon esprit. Je cligne des yeux, chassant de mon esprit tous les souvenirs qui affluent et qui ne me semblent pas réels. Il y en a trop, beaucoup trop ! Je ne sais même pas d'où ils sortent ! 

C'est comme si je venais de donner l'ordre de tout ressortir... Mais depuis quand ? Et quels sont ces souvenirs ? Ils ne me disent rien, rien du tout ! Ils sont faux ! Tous faux ! J'ai l'impression d'étouffer, de me noyer... Je me sens me débattre, battant des bras et des jambes en parfaite harmonie. 

D'un seul coup, tout s'arrête. Mon cœur affolé est posé contre celui, beaucoup plus posé, de Benny, tandis que ses mains empêchent mes bras de battre vainement l'air en les maintenant dans mon dos. Cela me fait mal, mais c'est supportable. Assez pour que je ne tente pas de me débattre mais qu'au contraire, je me laisse aller dans cette étreinte.

Ma tête vient se caler dans le creux entre le cou et l'épaule de Benny et je laisse libre court à mes larmes. Je ne sens pas la transpiration qui émane de nos corps et je suis trop sujette à mes émotions pour réaliser à quel point nous sommes sales et affamés.

Cette fois, ce n'est cependant pas la tristesse qui m'anime, mais la frustration. J'en ai assez, d'être incapable de me souvenir de quoi que ce soit sans que cela ne provoque chez moi une réaction anormale et violente. 

J'en ai marre, de devoir tout le temps poser des questions à tout le monde afin d'avoir des semi-réponses qui ne m'aident absolument pas. Je n'en peux plus, d'avoir cette impression de ne servir à rien. Pourquoi est-ce que Benny se donne tant de mal pour m'aider, alors que je ne lui suis d'aucune aide ? 

Je ne fais que poser des questions et observer le monde comme si c'était la première fois que je le voyais. Parce que pour moi, c'est le cas. J'aurai aimé que Benny perde sa mémoire, lui aussi. Mais il se souvient de tout. 

Tout ce qui est en lien avec qui il est, ce qu'il faisait à l'hôpital et qui étaient ses amis. Je me demande même pourquoi il les a laissés derrière. Probablement parce qu'il a décidé de partir sur le moment. 

J'aimerai pouvoir lui dire qu'il peut y retourner, aller les chercher. Mais dès que je pense à ça, une terreur sans nom prend possession de moi et les mots restent bloqués dans ma gorge. Je ne sais même pas ce qui cause cette peur, probablement les robots. 

Mais en réalité, je crois que c'est surtout de moi, que j'ai peur. Parce que dès que je ferme les yeux, je revois l'infirmière. Je la revois arrêter de fonctionner sous mes poings, je revois le couteau planté dans ses circuits, je revois son visage, j'entends sa voix qui m'assure qu'elle ne peut rien me dire de plus... Je l'ai cassée. Elle est brisée. Et c'est de ma faute.

— Je suis désolé Felidae, je n'aurai pas dû te demander de faire ça, murmure le jeune homme dans mon oreille.

Se mélangeant alors à ma frustration, une colère sourde reprend le dessus et je repousse violement le jeune homme, qui titube de quelques pas avant de se laisser choir sur le sol face à moi, sans rien comprendre. 

Ses yeux cherchent les miens sans les trouver et je le vois essayer de formuler une question. Je l'arrête d'un geste net et baisse la tête, respirant fortement pour essayer de reprendre le dessus, en vain. 

C'est dans ces moment-là que j'aimerai pouvoir lui crier qu'il faut qu'il arrête de s'excuser, qu'il n'y est pour rien, que c'est moi le problème et pas lui. Mais je ne peux pas. Je ne peux que le regarder avec toute la colère et la frustration du monde dans les yeux, incapable de me souvenir de comment signer tellement ces émotions me consument. 

Je me remets sur pieds, tournant le dos au jeune homme et laissant mon poing droit s'écraser contre le tronc sec et dur de l'arbre contre lequel j'étais adossée. Aussitôt, une décharge de douleur traverse mon corps, manquant de me faire chuter. 

Je m'agrippe au tronc pour m'assurer un équilibre, venant alors frapper mon occipital sur le bois. Occipital ? Mon cerveau contrôlé par la douleur et la colère enfouit ce mot dans ma cervelle et se concentre à nouveau sur ma main, qui continue de pulser presque aussi vite que mon cœur. 

Ma bouche s'ouvre pour ne laisser sortir que de l'air, laissant mon cri de rage, de douleur et de désespoir ancré au plus profond de mon être. Seuls mes yeux expriment ces émotions, comme en témoigne les fines gouttes qui en découlent. 

Et cette fois, pour la première fois depuis notre départ, Benny ne bouge pas. Je ne le sens pas venir vers moi, ou essayer de comprendre pourquoi je l'ai si violemment poussé. Je ne l'entends pas poser de questions, ou tenter de s'excuser pour quelque chose qu'il ne peut maitriser. 

Je ferme les yeux, inspirant longuement, chassant ma colère et ma frustration hors de mon corps, si cela est possible. C'est fou comme une simple respiration peut à ce point contrôler toutes nos émotions.

Sentant mon cœur se calmer, je me décide alors à m'excuse auprès de Benny. Pour à peu près tout, en fait. En ouvrant les yeux, je recule de plusieurs pas, manquant de tomber en butant contre la jambe de Benny. 

Je sens aussitôt la main du jeune homme venir soutenir mon dos et comprends alors qu'il s'est mis debout. Cependant, je ne me retourne pas. Et lui ne me parle pas. Je ne saurais même pas dire ce qu'il regarde. Peut-être que c'est moi qu'il fixe. Peut-être pas. 

Je continue de fixer le tronc sans comprendre, observant la longue traînée de sang qui s'écoule lentement vers le sol. Du sang violet. Encore. Mes muscles se tétanisent, j'ai même l'impression que mon cœur et mon cerveau cessent de fonctionner pendant quelques secondes. 

Mes yeux suivent le tracé du sang jusqu'à ce qu'il touche le sol et amorce sa longue progression vers moi. Comme si ce sang venait pour moi. Ou à moi ? Qu'importe. Comment du sang pourrait-il être assez conscient pour savoir vers qui se tourner ? 

Je cherche à reculer d'un pas de plus mais Benny bloque le passage. Agrippant fermement mon bras, il me force à me retourner sans la moindre résistance et plonge ses yeux dans les miens. Ses deux mains viennent enserrer mes bras et sans un mot, il parvient à me convaincre de me calmer. 

Juste avec son regard. Ce n'est qu'une hallucination. Ce n'est pas réel. Il n'y a pas de sang. J'ai l'impression de pouvoir l'entendre me parler, comme si Benny venait de s'inviter dans mon crâne. Est-ce que c'est possible ? Je ne crois pas. 

Sinon, il l'aurait déjà fait. Non ? Et puis je n'ai pas besoin d'une seconde petite voix, une seule me suffit largement. Je cligne des yeux, laisse échapper un soupir et tourne lentement la tête vers le tronc, pour le découvrir entièrement vierge de tout liquide. 

Détournant alors le regard du tronc, rassurée, je retrouve le regard affectueux du jeune homme. Benny me lâche les bras et recule d'un pas, sans pour autant me lâcher du regard. Mes mains restent en suspens avant de se mettre lentement à bouger, attirant les pupilles du brun. 

Malgré l'incapacité de mon cerveau à formuler des pensées un tant soit peu cohérente, je signe. Je signe comme si ma vie en dépendait. Comme pour être sûre. Sûre de moi, sûre de lui, sûre de tout.

« Promets-moi que tout ça, c'est réel. Promets-moi que ce n'est pas un autre rêve, que le cauchemar est fini ».

De mon côté, j'essaye de continuer à écrire suite au NaNo. Ce n'est pas facile, je galère, mais ça continue à avancer. Le chapitre 18 est presque bouclé ! J'espère vraiment finir la partie II bientôt 💜.

Sinon, qu'avez-vous pensé du chap' ?
Les émotions de Felidae ?
Les réponses de Benny ?
Lequel préférez-vous entre les deux ?
Qu'attendez-vous dans la suite ?

Gros bisous à tous 😘
Bonne semaine 💜
Et à très vite !

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