Chapitre 5 : Refuge

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Adoption...

Adoption...

Adoption...

L'autre femme prononça des mots, émit une suite de sons désordonnée que l'esprit enténébré de la petite ne put déchiffrer. Elle n'assimilait d'ailleurs plus rien, ne percevait même plus les martèlements de son propre cœur, comme si celui-ci avait subitement cessé de se déchaîner sous le coup de la stupeur. Ses poumons n'inhalaient ni n'exhalaient aucun air, à sa plus grande indifférence. Son cerveau ne fonctionnait plus, tous ses neurones engourdis par la confusion.

C'était comme si Harmony avait tout bonnement cessé de vivre.

Il n'avait suffi que d'un mot d'à peine trois syllabes, lesquelles résonnaient désormais en écho dans sa tête sans qu'elle ne parvienne pourtant à percevoir complètement le sens de l'ensemble qu'elles formaient...

Adoption...

Adoption...

Adoption...

L'adoption, utopie plus inaccessible que l'horizon...

Cette sainte notion qu'elle avait toujours contemplé du bout du monde, le regard et la mine pleins d'abattement, le menton tremblant et les entrailles criblées d'échardes, tendant désespérément la main sans aucun espoir d'atteindre un jour ce rêve hors de sa faible portée... Elle aurait tout aussi bien pu essayer d'attraper une étoile...

Et aujourd'hui, ce mirage était bel et bien en train de prendre forme. Mystérieux, bienfaisant et tentateur, un rayon de lune dans la nuit noire illuminant son corps recroquevillé de sa pâleur sublime et opalescente, écartant spectres et ténèbres.

Pour l'admirer, il lui suffisait désormais d'ouvrir ses paupières...

- Dans ce cas, debout !

L'ordre de la bonne sœur la jouxtant lui soutira un petit sursaut, la tirant momentanément de sa torpeur. Cinq doigts minces emprisonnèrent de nouveau son bras gauche dans un étau implacable, avant de la relever avec une telle vigueur que ses pieds décollèrent du sol un bref instant.

Sitôt redressée, Harmony se plia en deux en poussant un couinement, grimaçante. Elle ne se serait pas sentie moins mal en point si on lui avait tailladé le dos à grands coups d'épée. Plusieurs gouttes de sang en coulèrent de différents endroits, avant de dévaler d'abord ses hanches, puis ses cuisses, et enfin ses mollets maigrichons sous ses vêtements de toile imbibés du précieux liquide.

De nouveau, la fillette se sentit à moitié soulevée dans les airs, le muscle quasi-inexistant de son bras comprimé à la limite du supportable. Mais cette fois-ci, c'était vers la sortie qu'on l'entraînait. Vers une potentielle liberté.

Le contraste lumineux lors de la transition entre la cellule et le couloir la força à plisser ses yeux embués pour distinguer un tant soit peu son environnement et l'endroit où elle posait les pieds. L'après-midi était déjà bien avancé, la nuit allait tomber d'ici une heure ou deux, fait qu'avait en partie estompé la position de la fenêtre de la petite salle, orientée plein ouest. Elle avait dû manquer le repas du soir, mais peu lui importait. La simple idée d'avaler quoi que ce soit ne faisait qu'intensifier son vertige d'une ampleur déjà inquiétante. Et de toute manière, manquer des repas était une habitude acquise depuis fort longtemps.

Une habitude qui, avec un peu de chance, n'allait plus jamais lui servir...

Heureusement, seul un large escalier de pierre grise en colimaçon séparait les deux endroits, serpentant entre les étages. La rouquine sentait vaguement la paume de ses pieds effleurer brièvement la surface dure et froide de chaque marche, mais n'y prêtait guère d'attention. Elle n'avait de cesse de ressasser dans son esprit parasité par un essaim de questionnements ces termes si simples, et pourtant si délicats.

Gens... Rencontre... Potentielle adoption...Gens...Rencontre...Potentielle adoption...

Gens...

Qui pouvaient être ces personnes ? Combien étaient-elles ? La première hypothèse qu'Harmony avait naturellement émise était qu'il s'agissait d'un couple, mais cela pouvait tout aussi bien être une femme ou un homme seul, accompagné d'un ou plusieurs proches quels qu'ils soient, amis ou membres de la famille. Ce genre de choses s'était déjà vu auparavant, de même que les sollicitations d'entretiens avec les enfants.

Rencontre...

À cette idée, l'estomac de la petite se tordit férocement, rejetant le liquide rance encore plus loin dans sa gorge lacérée. De nouveau, le rythme des palpitations de son noyau s'affola tandis que des sueurs froides se répandaient sur son épiderme déjà frigorifié.

Un, sinon plusieurs individus désiraient l'adopter, la recueillir auprès d'eux et faire d'elle leur pupille, peut-être de manière définitive. Et pour être certains de prendre la bonne décision, ils avaient demandé à la voir. À la rencontrer.

La rencontrer elle.

Un être faible, dénué du moindre intérêt, tout juste bon à trembler et sangloter à longueur de journée, tout juste capable d'encaisser le plus petit choc sans hurler à s'en arracher les cordes vocales...

Harmony sentit la panique monter en elle plus vite qu'un cours d'eau sous une pluie diluvienne.

Qui pouvait bien vouloir s'encombrer de ça ?

Elle était un boulet, un poids mort, une vulgaire charge. Et ça, ils allaient le comprendre au premier regard sur sa morphologie, tout simplement risible.

Non... Non, non, non ! Pas ça !

Mais le gémissement qu'elle contenait à grand-peine n'eût pas l'opportunité de franchir ses lèvres. L'enfant se sentit de nouveau projetée au sein d'un large espace, et réussit cette fois tant bien que mal à conserver son équilibre sur ce qu'elle devina être un carrelage. En relevant la tête, elle retrouva ce décor aussi familier à ses sens que la geôle, qu'elle rejoignait après chaque passage devant la poutre éraflée.

Très vaste endroit, la salle d'eau, aussi appelée discrètement « le refuge » par les pensionnaires, comptait une dizaine de cabines de douche défraîchies disposées en rang le long du mur de droite, séparées les unes des autres par des cloisons dont la peinture planche s'écaillait. Les fenêtres recouvertes de moisissure à l'instar des autres surfaces s'alignaient sagement sur la paroi du fond. La façade de gauche était couverte de lavabos ébréchés, et, à l'extrémité, séparé du reste par un panneau en bois, un siège de toilettes ayant connu des jours meilleurs qu'Harmony, pour y avoir frôlé la noyade lors d'un nouveau traquenard signé Cali, n'était pas prête d'oublier.

Derrière elle, la nonne fit soudainement tambouriner le battant contre la pierre, l'ôtant à sa contemplation.

- Arrange-toi et mets ça, s'écria la femme en lui jetant un tas de textiles que l'enfant peina à rattraper. Dépêche-toi !

Et elle referma la porte, laissant la petite fille seule et désemparée devant la grande salle vide dans laquelle résonnait encore l'écho de ces paroles...

Arrange-toi...

Le regard d'Harmony dévia vers les cabines de douches couvertes de rouille et de saletés diverses. Elle savait parfaitement quoi faire. Ce n'était pas la première fois qu'elle devait ''s'arranger'' suite à une flagellation. Non, le vrai et insoutenable questionnement était plutôt de savoir si cela serrait la dernière...

La toute dernière de sa vie...

Mets ça...

Avec des gestes hésitants, la fillette souleva les vêtements qui lui avaient été remis. Une petite robe à bretelles toute simple que l'on devinait blanche autrefois, et une paire de sandales en cuir marron très détérioré. Des habits tout ce qu'il y avait de plus normaux dans le monde extérieur. Mais pas ici, où un accoutrement aussi basique était considéré comme un costume de cérémonie.

La vêture d'entretien...

La vêture de l'entretien qui allait possiblement changer sa vie...

Dépêche-toi...

La remémoration de ce propos résonna dans son esprit comme une claque. Le dos voûté, la démarche chancelante, elle se dirigea d'abord vers le premier lavabo de la rangée, sur lequel elle disposa maladroitement ses nouveaux habits dont elle ne parvenait pas à détacher le regard. Inutile de s'y connaître pour se rendre compte qu'ils étaient bien trop grands. Elle allait flotter dedans. C'était sa première chance, très certainement sa dernière, et elle allait paraître si frêle... Si pitoyable...

Si faible...

C'en était trop.

Agrippant à deux mains le rebord en céramique, Harmony ouvrit la bouche, et se courba avant de déverser avec d'affreux soubresauts dans la cuve toute la souillure qui avait autrefois été son déjeuner avalé et longuement apprécié en dépit de sa piètre qualité. Ses organes internes s'enflammèrent en elle, la consumant de l'intérieur dans un insupportable brasier, elle avait l'impression que les parois de sa gorge étaient progressivement massacrées par une lame de scie incandescente en furie.

La petite rousse resta ainsi presque une minute entière, la respiration laborieuse, avant de se redresser en toussant de toutes les minces forces qui lui restaient, la main placée devant ses lèvres salies. Les larmes abondèrent à ses yeux et ne tardèrent pas à en affluer, sans qu'elle arrive à déterminer si ces pleurs étaient causées par la douleur ou la honte. Dans tous les cas, les sanglots n'allaient pas l'aider dans ses tentatives peu fructueuses pour reprendre son souffle.

Dans l'espoir de chasser le goût infect subsistant sur sa langue et son palais, Harmony chercha le robinet à tâtons, puis l'ouvrit au débit maximal, réglé sur la température la plus basse. Plaçant ses deux mains en coupe sous le jet, elle entreprit de prélever un maximum du fluide transparent, avant de porter l'eau recueillie à son visage, qu'elle arrosa généreusement. Ses larmes se mêlèrent aux gouttes translucides qui y ruisselèrent.

Par deux fois, elle réitéra l'opération. La troisième fois, elle amena son récipient improvisé à sa bouche, et aspira avidement les quelques gouttes du breuvage, les sentant avec un plaisir empreint de soulagement couler et apaiser les bords meurtris de son gosier en feu.

On frappa soudainement à la porte.

- Plus que trois minutes !

Avec un tressaillement anxieux, Harmony retira d'abord son pantalon de toile marqué de sillons écarlates, puis son haut en lambeaux imprégné d'hémoglobine, avec des gestes rendus raides par les lancinants élancements dans son dos. Abandonnant ses loques ensanglantées dans la poubelle au pied du lavabo, elle s'avança vers la première cabine, le bruit de ses pieds nus claquant sur le carrelage puis dans le bac de douche sordide en fond sonore.

Difficilement, la rouquine actionna l'unique robinet grinçant terni par l'usure. Une eau glaciale commença aussitôt à se déverser de la pomme de douche surélevée, d'abord par gouttes, puis par gerbes puissantes. Couinant à son brusque contact sur sa chair, incommodée tant par le mal que par le froid, la petite se pencha, puis frotta avec vigueur les traces cramoisies sur ses jambes efflanquées, remontant depuis ses chevilles frêles jusqu'à sa taille saillante. Elle voyait le bac de douche rougir du sang dilué et noircir de la crasse accumulée ces jours derniers, tous deux s'écoulant vers la canalisation de laquelle s'échappaient des relents d'égouts pestilentiels. S'efforçant d'ignorer les douloureux picotements qui parcouraient ses plaies, elle rapatria ses longues mèches auburn emmêlées derrière son épaule, puis laissa les flots gelés dévaler son dos encore quelques secondes, emportant avec eux la sève vermillon inutilement versée.

Après avoir pris le temps de nettoyer les pointes de ses cheveux où subsistaient des traces de vomissures, l'enfant, estimant son corps suffisamment décrassé, stoppa le flux polaire. Sans perdre une seconde, elle émergea de la petite cabine, grelottante de la tête aux pieds, et se saisit de son médiocre accoutrement.

- Une minute ! clama la voix depuis le couloir.

Accélérant frénétiquement ses mouvements, Harmony s'attela d'abord à l'enfilage des sandales. Ses orteils peinaient à en atteindre le bout, et c'était à peine si les lanières effleuraient ses chevilles. Elle allait devoir redoubler de précautions si elle ne voulait pas chuter en marchant, et perdre l'habitude de se mouvoir pieds nus. Elle osait à peine imaginer la réaction des potentiels adoptants si ils la voyaient s'étaler de tout son long sur le sol...

Ses souliers enfilés, la fillette s'attela sans tarder à l'enfilage de la robe, tâche rendue ardue par l'humidité de sa peau à laquelle le tissu adhérait, s'humectant au contact de son épiderme. L'enfant fit précautionneusement passer sa tête dans le trou prévu à cet effet, puis passa ses bras sous les bretelles, qu'elle ajusta malhabilement sur ses épaules menues. Comme elle s'y attendait, le vêtement beaucoup trop large atteignait presque le sol, et les fines bandes de tissu ne cessaient de glisser le long de ses clavicules.

Mais cela devrait faire l'affaire. Après tout, c'était largement préférable à ses haillons. Sentir une autre matière sur elle lui procurait un drôle de sensation, ni gênante ni agréable. Le textile blanc se collait à elle, masquant peut-être par la même occasion le problème que causait sa faible corpulence, et était sûrement devenu diaphane, laissant transparaître ses blessures encore saignantes de manière flagrante.

Il était impératif qu'elle prenne garde à ne jamais tourner le dos aux intéressés...

Que risquaient-ils de penser ? Comprendraient-ils qu'il s'agissait de punitions, et, auquel cas, la prendraient-ils pour une petite fauteuse de troubles vicieuse ? Ou bien interpréteraient-ils cela comme une maladresse excessive ?

À coup sûr, ils allaient la détester...


~~~~~~~~~~♡~~~~~~~~~~

Coucou les Boursoufs ! (ᵔᴥᵔ)

Comment vont-je ? :3

Nouveau chapitre après deux mois d'absence, ce dont je m'excuse  🙏 Mais vous noterez que celui-ci est nettement plus long que l'autre ;D

En espérant que cette partie vous ait plu, il y néanmoins une ou deux choses que j'aimerais qu'on clarifie ensemble :) (rien de négatif, rassurez-vous xD)

Cela s'adresse surtout à tous ceux qui m'ont signalé des incohérences dans le récit, ou qui les ont remarqué sans le signaler. Je parle d'incohérences telles que "Harmony ne peut pas avoir cet âge-là", "Elle ne peut pas être Animagus", les incohérences avec l'histoire originale. Et même celles au sein de la fanfiction, comme le fait que son œil n'est plus censé fonctionner.

Toutes ces contradictions, j'en ai conscience. Elles ne sont des contradictions que parce qu'il est trop tôt dans l'histoire pour fournir l'explication qui va avec, mais je vous l'assure, chaque souci en a une 👐

Attention, je ne blâme en aucun cas les personnes qui me les ont signalées, au contraire, je vous en remercie, c'est une initiative très gentille ^-^ Les auteurs ont besoin de lecteurs attentifs tels que vous ;)

C'est juste pour vous avertir, je suis assez pointilleuse pour rechercher les dates d'anniversaire de mes personnages en fonction de la signification des mois et des chiffres, alors ce ne sont pas des énormités pareilles qui vont m'échapper xD (dit la fille à qui il manque la moitié des justifications dans sa trame mentale...)

Oh, tiens, tant que j'y suis ! Je me doute également qu'on n'adopte pas un enfant aussi facilement que ça, il ne suffit pas de se présenter et de le rencontrer pour s'en aller avec aussi sec. Les orphelinats ne fonctionnent pas comme des drive au fast-food, "Bonjour, je voudrais un enfant s'il-vous-plaît" xD (celui/celle/la personne non-binaire qui a la référence, je lui fait un bisou :3)

Et je vous jure que j'ai vraiment essayé de me renseigner sur les procédures d'adoption en Angleterre dans les années 80 0-0 Mais ça, Google ne semble pas le comprendre.

Non Google, je ne veux pas adopter un enfant à l'étranger !

Non Google, je ne souhaite pas être adoptée par un couple né dans les années 80 !

T'es à la ramasse, Google, Ecosia il est mieux !

Rhâââââââ !

Bah...✋ Disons que cet orphelinat est unique en son genre et dispose de ses propres lois ¯\_(ツ)_/¯ Mais si vous avez les infos nécessaires, je suis preneuse 😇

En vous souhaitant d'agréables mois en attendant la suite 👋😆

Lot of kisses ❤

Lex

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