End Game (2)

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 Nous restons à table plus d'une heure, à parler, à rire, avant d'enfin nous décider à passer dans le salon, je fais clairement tout sauf réviser pendant toute la matinée. Et avant que nous nous décidions à passer au déjeuner, quelqu'un sonne à la porte de l'immeuble. Même si je sais que ça doit être Zacharie, le petit copain de Caroline, ou Guillaume, celui d'Isabelle, je me lève et annonce que je vais ouvrir. Mais étonnamment, c'est Arthur, mon petit frère qui attend en bas.

Pourtant, je suis certaine de lui avoir dit, en même temps qu'à mes parents, qu'avec le rattrapage de mes partiels qui commencent demain, je ne préférais pas fêter mon anniversaire, car mieux valait que je révise afin de ne pas rater définitivement mon année. Apparemment, ce que j'ai dit est tombé dans l'oreille d'un sourd. Je songe sérieusement à ne pas le laisser monter, mais je n'ai pas le cœur, mon frère n'a jamais aussi bien supporté que moi de passer du temps sans moi et en plus, il faut quand même avouer qu'il a fait la route jusqu'à Abidjan spécialement.

— Allez, monte, l'invité-je à travers l'interphone.

Puis j'attends à la porte qu'il gravisse deux étages pour lui ouvrir.

— Bon anniversaire, Déborah ! s'exclame-t-il les bras écartés dès qu'il est rentré dans notre appartement étudiant.

Pour ne pas lui mettre un vent, je lui fais un câlin tout en le remerciant. Il me tient serrée contre lui un peu plus longtemps que d'habitude et ses dreadlocks commencent même à me chatouiller la joue à force.

— Tu m'as manqué, ça fait longtemps que je ne t'ai pas vu, dit-il avant de me lâcher.

— Mais oui, six jours, c'est long, me moqué-je gentiment.

Il ne relève pas et je dois tout de même reconnaître que le temps que nous passons ensemble pour danser m'a clairement manqué ces derniers jours. Mais c'est de ma faute si j'en suis privée, j'avais qu'à être plus sérieuse, pourtant, avec le temps, on pourrait penser que j'avais appris la leçon, mais apparemment, pas encore.

— Je l'embarque, nos parents ont prévu un resto, annonce-t-il convaincu.

— Mais je dois réviser, tenté-je de protester sachant déjà que je suis foutue.

Je sais bien que les révisions de dernières minutes sont strictement inutiles, surtout que ça fait une semaine que je révise matin et soir. Mais j'en ai besoin mentalement et si je continue comme ça, je sens que je n'aurai pas ouvert mes cours de la journée, j'ai déjà perdu quatre heures de travail.

— Oui, bah tu réviseras cet après-midi, allez vient, papa et maman nous attendent.

Je soupire, ce n'est pas que ça m'embête, au contraire, ça me faisait chier de ne rien faire d'autre que de réviser aujourd'hui, mais je n'ai vraiment pas envie de rater ma deuxième année à cause d'un anniversaire.

— OK, attends quelques secondes, je vais chercher une ou deux fiches, je reviens, finis-je par céder.

Je pars jusqu'à ma chambre et je l'entends me rappeler que les révisions de dernières minutes ne servent à rien, mais je n'y prête pas attention. Une fois dans ma pièce, je me dépêche de récupérer ma « Bible » – plus couramment connu sous le nom de code civil, je n'ai pas de vraie Bible, mais ça revient au même, vu que je le trimbale partout – et j'y glisse discrètement le plus de fiches possible, la plupart ne serviront à rien, mais mieux vaut prévenir que guérir.

En revenant, je passe devant la boîte à chaussures, contenant la veste, j'hésite quelques instants à la prendre, après tout il ne fait pas froid, c'est sûr, mais elle est tellement belle... Ce serait bête de ne la porter que chez moi et, en plus, il va peut-être même pleuvoir. Du coup, j'ouvre le carton et la récupère avant de l'enfiler.

Arthur lève les yeux au ciel en me voyant arriver et je ne réussis pas à savoir si c'est dû à ma tenue – c'est vrai que je ne suis pas certaine que ma robe jaune poussin aille à merveille avec la veste bleue – ou si c'est parce que j'ai pris mon code civil. Dans tous les cas, il ne dit rien et nous descendons les escaliers côte à côte avant de sortir de l'immeuble.

Dehors, je vois, devant le bâtiment, mes parents attendant dans la Mercedes de ma mère même si c'est mon père qui tient le volant. Je monte à l'arrière et Arthur aussi. Ma maman m'illumine de son sourire étincelant et me souhaite :

— Bon anniversaire, ma puce.

Peu importe les malheurs que l'on puisse rencontrer, si ma mère sourit, on ne peut pas faire autrement que de lui sourit en retour, c'est automatique.

— Bon anniversaire, Déby, déclare mon père, tout sourire, presque au même moment que sa femme

En les voyant là, côte à côte, à l'avant de la voiture, je m'aperçois à quel point ils m'ont tous les deux manqué, ça fait encore plus longtemps qu'Arthur que je ne les ai pas vus, ça a beau faire trois ans que je ne vis plus sous leur toit, je rentre encore souvent en dehors des partiels alors cette période plus longue que d'habitude sans voir mes parents me fait toujours bizarre. Vivement que je sois en vacances, je les reverrai beaucoup plus souvent !

Mon père nous conduit au restaurant qui est seulement à quelques minutes de mon appartement et pendant le trajet, j'en profite pour discuter avec mes parents et venir aux nouvelles. Ma mère a d'ailleurs très vite remarqué ma veste, ça doit même être la deuxième chose qu'elle ait dite. Mon père se gare et nous descendons avant de rentrer dans mon restaurant préféré, un petit restaurant italien de quartier qui fait les meilleurs raviolis et les meilleures pizzas du monde. Étonnamment, à l'intérieur, il y a beaucoup moins de personnes que d'habitude, mais c'est sans doute dus au fait que nous sommes dimanche.

Nous sommes presque directement accueillis par une serveuse qui nous conduit directement à un coin banquette après avoir vérifié que nous sommes bien quatre. À peine installés, nous reprenons la conversation là où nous l'avions laissée. Assez vite, nous passons commande, sans même avoir regardé le menu, nous le connaissons par cœur, puis nous sommes servis, mais nous continuons de parler même en mangeant. Une fois nos desserts apportés par la serveuse, mon frère se lève et part, mais ne va pas vers les toilettes, il sort vraiment du restaurant. Intriguée, je demande à mes parents pourquoi il est parti.

— Tu verras, affirme mon père en essayant d'adopter un ton mystérieux, en vain.

Je n'insiste pas pour savoir, je me doute bien qu'Arthur n'est pas parti faire un footing, mais qu'il est plutôt allé chercher des cadeaux dans la voiture, par exemple, surtout qu'il est en train d'ouvrir le coffre de notre véhicule, ce qui détruit en partie le mystère qu'ils ont voulu instaurer.

Effectivement, quand mon frère revient, il tient un paquet dans ses mains. D'ailleurs, même s'il n'y a pas grand monde dans le restaurant, toutes les personnes présentes le regardent d'un drôle d'œil. Il pose le cadeau, enfin les, il y a une enveloppe au-dessus devant moi, veillant tout de même à ne pas écraser mon Banana Split.

— Vous savez, ce n'était pas la peine, déjà que mes amies m'ont beaucoup trop gâtée... leur annoncé-je face à cette attention

— Arrête de te plaindre espèce de cruche ! réplique mon frère avec toute la délicatesse qui le caractérise.

Je lève les yeux au ciel et soupire, mais ne rétorque rien. Je sais très bien qu'Arthur ne changera pas même si on lui répète toutes les deux minutes ses défauts – je n'ai bien évidemment jamais essayé –, mais je le connais depuis qu'il est né, ça me suffit pour savoir comment il fonctionne.

J'attrape l'enveloppe et l'ouvre tout de même. Ma curiosité me perdra. Et Bon Dieu, que je fais bien d'être curieuse plutôt que râleuse. À l'intérieur se trouve un diamant vu que ce n'est rien de moins qu'un exemplaire des billets d'entrée au concert du Wembley Stadium de Her Majesty. Celui du 20 juin 1986. Le tout dernier show du groupe en entier. Je ne sais pas exactement combien de billets comme ceci sont en vente, mais je me doute qu'il y en ait très peu.

Et ce n'est pas tout puisque le papier porte les autographes des cinq membres de Her Majesty étant donné que Terrie Century est morte le lendemain, le laps de temps pour faire signer le billet a été très court.

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