Le matin, j'ouvre doucement les yeux. Toujours sans vêtements, je me sens terriblement bien, allongé d'une drôle de position verticale sur le corps tout aussi nu de Reiner. Il dégage tellement de chaleur.

Je me redresse en frottant mes yeux fatigués, profitant d'être le premier réveillé pour admirer le magnifique visage endormi de mon amant. Il semble si paisible comme ça, mais l'angoisse commence à naitre en moi. Ai-je fait une erreur en me donnant sans hésitation à lui? La manière dont Reiner a agi hier soir démontrait qu'il savait comment s'y prendre, preuve que je n'étais certainement pas son premier. Était-ce pour lui un simple amusement ou une preuve d'amour? Je sais que je suis amoureux de lui et j'aurais préféré l'entendre aussi de sa bouche avant de franchir cette étape importante.

Reiner ronfle légèrement, mais ce n'est pas un bruit désagréable. Je quitte mon étrange position pour m'allonger confortablement contre lui en essayant de ne pas le réveiller. La tête sur son torse, j'en profite pour écouter le battement régulier et apaisant de son cœur. Le blond ne tarde pas à passer son bras autour de mon corps pour me serrer affectueusement contre lui d'un geste adorable.

Tout ce que je souhaite, c'est qu'il m'aime. Nous ne nous connaissons pas encore beaucoup et je n'ai aucune idée de quoi ressemble son passé. Je ne connais pas sa famille, il ne connait pas la mienne. Je ne sais même pas s'il a des frères et sœurs! Peut-être avons-nous brûlé des étapes?

J'enfonce mon visage au creux de son épaule pour respirer son odeur que j'aime tant. Je n'arrive pas à croire que moi, Bertholdt Hoover, le garçon timide qui rêve de Reiner depuis des années soit enfin avec lui! C'est un rêve qui devient réalité.

-Tu es réveillé? Marmonne Reiner en ouvrant difficilement ses yeux.

-On dirait bien. Tu es mignon quand tu dors.

Le blond sourit avant de m'embrasser amoureusement. Je ne voudrais plus jamais me passer de ses lèvres succulentes. Quand il éloigne ses lèvres, il caresse ma joue en me faisant frissonner.

-J'ai passé une très agréable nuit avec toi, affirme-t-il, comment tu vas ce matin?

-Oui, c'était très agréable... Je vais bien.

-Je suis heureux de l'entendre.

Reiner se penche à nouveau vers moi pour dévorer langoureusement ma bouche qui ne demande que ça. Sa main se balade sur ma peau dénudée qu'il a eu l'occasion d'explorer hier soir. Alors que je caresse ses cheveux, je me fige en entendant du bruit au rez-de-chaussée. Des voix? J'éloigne mes lèvres du garçon pour mieux écouter.

-Qu'est-ce qui se passe? S'enquiert Reiner en m'embrassant le cou.

-Il est quelle heure?

-Hum... 11h 21. Il faut dire qu'on s'est endormis tard.

-Merde!

Je me lève d'un bond sans donner d'explication, cherchant des vêtements à enfiler au plus vite. Reiner me regarde sans comprendre, restant étendu sur le lit à m'admirer. Il devrait faire comme moi s'il ne veut pas être jeté à la porte par mon père!

-Je pense que mes parents sont arrivés, expliquai-je.

Reiner ouvre grands les yeux, comprenant la situation. Il se lève à son tour pour enfiler ses vêtements de la veille laissés sur le sol. J'aimerais lui prêter quelque chose d'autre à se mettre, mais ses muscles ne rentreraient pas dans mes chandails. Nous sommes loin d'avoir la même corpulence.

Qu'est-ce que mes parents diront quand ils me verront arriver avec mon beau blond? Ils ne savaient même pas que j'invitais un ami et voilà que je fais la grâce matinée avec le garçon que je dessine continuellement. J'entends déjà les moqueries de mon frère... Si nous n'étions pas au deuxième étage, je demanderais à Reiner de sortir par la fenêtre pour esquiver cette humiliante confrontation.

Reiner parait beaucoup moins stressé que moi. Les mains dans ses poches, il me suit au rez-de-chaussée sans aucune expression. Je me demande s'il réalise qu'il va rencontrer mes parents... Dans la cuisine, ma mère fait la vaisselle que j'ai omis de ranger hier. La connaissant, elle ne doit pas être très contente.

-Berthy, pourquoi tu as laissé une pizza calcinée sur la table? Demande ma mère sans se retourner, et ma casserole est fichue! Comment tu t'y es pris?

Les mains sur ses hanches, elle se retourne vers moi pour me réprimander, mais elle se calme instantanément en voyant le beau blond près de moi. Je rougis alors qu'elle sourit :

-Oh, je ne pensais pas que tu avais de la visite! Tu nous présentes ton ami?

En entendant sa femme parler, mon père vient à son tour voir le mystérieux invité, les sourcils froncés. Je n'invite jamais personne à la maison à l'exception de Annie, donc amener un garçon est un miracle en soi. Il le regarde de haut en bas, comme pour le passer aux rayons X. Mes parents doivent certainement reconnaitre ma muse.

-Reiner Braun, se présente lui-même le garçon en s'approchant de mon père pour lui serrer la main, je suis le petit ami de votre fils.

Petit ami? Mon cœur fait un agréable bond à cette affirmation, même si j'aurais préféré être au courant avant mes parents. Reiner Braun est MON petit ami! Ça me semble beaucoup trop beau pour être vrai, mais c'est aussi très gênant que ma famille le rencontre dans un tel contexte.

Mon père serre fermement la main de mon homme avant de lui lâcher, puis Reiner va faire poliment la bise à ma mère qui sourit idiotement. Lorsqu'il ne la regarde pas, cette dernière me fait un pouce d'approbation qui me fait rougir.

-Tu veux rester pour le repas, Reiner? Propose ma mère, nous avons acheté du poulet.

-Ce serait avec plaisir.

Mon nouveau petit ami s'assoit près de moi à la table, répondant sans gêne à toutes les questions de mes parents et de mon petit frère, qui lui, semble uniquement intéressé par ses prouesses sportives. J'ignorais que Reiner a déjà été son entraineur de football pendant un été. À l'entendre parler, il a même été sauveteur de piscine comme petit boulot. Je ne savais même pas qu'il pratiquait d'autres sports que le baseball... Au moins, ma famille semble déjà l'adorer.

En début d'après-midi, mon blond doit partir, donc je l'accompagne jusqu'à la porte d'entrée. Reiner m'attire dans ses bras musclés pour m'étreindre affectueusement. Je me sens bien contre lui.

-On se voit lundi, affirme Reiner.

J'acquiesce, puis il m'embrasse avant de partir. Je le regarde jusqu'à ce qu'il disparaisse de mon champ de vision. Ce mec est mon petit ami! Jamais je n'ai été si heureux, mais j'ai malgré moi peur que ma bulle de bonheur éclate... Ce n'est jamais normal quand les choses vont trop bien.

***

À l'école, personne ne sait que nous sommes un couple, car Reiner préfère attendre avant de faire l'annonce. Je comprends parfaitement ce choix, même si je suis impatient que le monde entier sache que j'appartiens au plus beau des garçons. Les gens pensent que nous sommes de simples meilleurs amis. C'est difficile de ne pas l'embrasser en public comme les autres couples.

Le mercredi, après notre entrainement de baseball, Reiner m'amène à la même piste cyclable que la dernière fois. Nous marchons un moment avant de nous installer sur un banc, main dans la main. Loin de l'école et des élèves qui pourraient nous voir, mon petit ami n'a pas peur de m'embrasser.

-J'ai envie qu'on joue à un jeu, affirme le blond entre deux baisés.

-Quel genre de jeu? Je t'avertis tout de suite, si c'est quelque chose comme cache-cache, je refuse.

-Non, idiot! Je pensais plus à un jeu de questions? J'ai envie d'apprendre à mieux connaitre mon petit ami.

-Je n'y vois pas d'inconvénient.

Reiner sourit en se plaçant face à moi pour mieux me regarder. Je me demande quel genre de question il va me poser. Je n'ai rien à cacher, de toute façon.

-Commençons simple. Qu'est-ce que tu aimerais devenir plus tard?

-J'hésite encore entre prof d'art, graphiste ou encore travailler dans un musée. J'aime beaucoup les musées, mais l'art abstrait ne m'inspire pas. Je trouve cela très laid et dénué de talent... Tu as dû le remarquer lors de notre balade avec les statues? Ça me déçoit qu'aujourd'hui on ne puisse plus être simplement talentueux sans devoir absolument maitriser aussi l'abstrait. Toi?

-Je me vois bien entraineur ou encore gardien de prison. Quelque chose de ce genre.

Nous continuons à nous poser des questions banales dans lesquels j'apprends un peu à le connaitre. Reiner est enfant unique et il vit avec sa mère et son beau-père duquel il n'est pas très proche. Ses parents ont divorcé quand il avait six ans, mais comme son père vit loin, il n'a pas souvent l'occasion de le voir. Mon blond a un chien nommé Pluton depuis dix ans et il l'adore. J'ai hâte de rencontrer ce gros labrador.

-L'an dernier, j'allais dans les bars fréquemment avec l'équipe, raconte Reiner, un ancien joueur que j'adorais nous avait aidés à avoir de fausses cartes. Faut dire qu'il avait beaucoup de contacts un peu louches... L'une des dernières fois, ça s'est mal passé et on a failli tous être arrêtés par la police. Jean avait dragué une fille en couple et son petit ami l'a très mal pris. Il a ramené ses potes pour se battre. On était tous un peu ivres, donc on a tous sauté dans le tas pour protéger Jean. C'est Marco qui a réussi à convaincre la policière de nous laisser partir.

J'ouvre grands les yeux, choqué par cette histoire. Combien d'aventure de ce genre Reiner a-t-il vécue? Contrairement à lui, j'ai l'impression d'être resté dans un concon toute ma vie. Même si je cherche au fond de ma tête, il n'y a aucune anecdote extraordinaire à raconter. Serait-il impressionné de savoir que j'ai gagné un concours de dessin au collège?

-Je crois que j'aurais eu peur, avouai-je, vous étiez tous là?

-Non, Mike n'était pas là. On a eu une grosse dispute l'an dernier. C'est réglé aujourd'hui, mais dans ce temps, c'était très tendu entre nous. L'équipe était divisée comme jamais elle ne l'a été... Bon, changement de sujet! Tu as déjà eu un petit ami? Ou peut-être une petite amie?

J'aurais eu d'autres questions à poser au sujet de ce mystérieux conflit avec Mike, mais Reiner ne semble pas ouvert à en parler. Les deux blonds semblent pourtant très bien s'entendre aujourd'hui. Ils font des blagues ensemble et je les vois souvent discuter. Qu'est-ce qui a pu entraver cette amitié?

-Euh... En fait en début de collège j'avais un peu fréquenté Annie, mais ça n'a jamais dépassé le stade du câlin. J'ai vite remarqué que les filles ne m'attiraient pas, mais je n'avais jamais eu de petit ami. Toi?

J'ai peur de la réponse qu'il va me fournir.

-J'ai fréquenté quelques filles au début, mais ce n'était jamais sérieux. Quelque chose me déplaisait, mais je voulais absolument faire comme les autres. Puis je suis tombé amoureux d'un gars et j'ai réalisé que c'est ce que j'aime. Il n'était pas comme moi, donc ça n'a jamais dépassé le stade de l'amitié entre nous deux... Tu dois savoir que trouver un autre garçon homosexuel, ce n'est pas simple? Après que le gars dont je t'ai parlé soit parti, j'ai essayé de fréquenter des hommes, mais ça n'a jamais dépassé le cap des deux semaines. Je crois que je n'étais pas prêt mentalement.

J'écoute son discours, un peu surpris. Qui était ce gars dont il était amoureux? Malgré moi, une certaine anxiété m'envahit. Suis-je aussi un coup passager comme les autres qu'il a fréquenté? Cette perspective m'inquiète et Reiner semble le comprendre. D'un geste rassurant, il passe son bras autour de mon épaule.

-Je suis désolé si je t'ai inquiété, mais avec toi c'est différent, Bertholdt. Je promets de ne jamais te laisser tomber. Comme je t'ai dit, tu n'es pas comme les autres et c'est pour ça que je t'aime.

J'ouvre grand les yeux. Il vient vraiment de le dire?

-Ce n'est pas quelque chose que je dis à n'importe qui, affirme Reiner, si je te le dis c'est parce que je le pense vraiment.

-Je t'aime aussi, Reiner!

Sous l'émotion, je lui agrippe le visage pour l'embrasser tendrement.

Ce chapitre n'est pas le meilleur, mais dans le prochain, Thomas arrive ~