Chapitre 2

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              Je me dépêche de verser les flocons d'avoine dans un bol et de le servir à Sadie. Il est déjà treize heures et si je n'accélère pas je vais être en retard pour mon travail. Si je veux réussir à convaincre Jane de me donner une avance sur mon salaire, j'ai l'intérêt d'être irréprochable. Je rassemble rapidement mes cheveux en chignon et finis d'avaler mon verre de jus de fruits en une gorgée.

— Dès que tu as terminé de manger tu vas te brosser les dents, d'accord ma puce.

Au même moment, j'entends du bruit provenir de ma chambre. Candace apparait chancelante. Ses cheveux blonds sont emmêlés, les résidus de son maquillage sont encore incrustés sur son visage.

— Maman ! s'écrit Sadie en se courant vers ma mère.

La petite commence à vouloir lui faire un câlin, mais celle-ci la repousse sans ménagement.

— Sadie ! peste-t-elle, arrête de crier, j'ai la tête en vrac.

— Pardon maman, prononce Sadie en baissant la tête.

Voyant ses yeux se remplir de larmes, je m'approche après avoir lancé un regard noir à Candace. Cependant, elle ne me prête aucune attention et va dans la cuisine se servir dans mon réfrigérateur.

— Ne t'inquiète pas ma puce, ta maman n'est pas dans son assiette, essayais-je de la réconforter, tu veux bien aller te préparer, je vais t'emmener à l'école.

— D'accord, bredouille-t-elle en partant vers la salle de bain.

Je me relève et me dirige vers Candace qui a la main dans mon paquet de céréales. Je récupère le bol de Sadie et le pose dans l'évier en faisant exprès de faire le plus de bruit.

— Arg ! Putain Peyton.

— Tu peux m'expliquer ce qui s'est passé hier ?

— Ce ne sont pas tes histoires, peste-t-elle en continuant à manger.

— Tu te fous de moi, Candace ? Ma voix monte d'un cran, presque en colère. Si je n'étais pas intervenue, qui sait ce que Chester t'aurait fait ?

Elle se redresse brusquement, son visage rouge de colère.

— Je n'ai pas besoin de ta protection, Peyton ! Je peux me défendre toute seule, s'énerve-t-elle.

Je prends une grande inspiration, essayant de garder mon calme.

— Ce n'est pas de la protection, c'est du bon sens ! Sérieusement, Candace, tu dois arrêter la drogue et toutes ses conneries. Ça ne te mène nulle part, regarde comment tu te comportes ! Soupiré-je d'agacement.

— J'te demande pas ton avis, je fais ce que je veux !

— Et comment vas-tu réunir l'argent que tu dois à Chester avant ce soir ?

Mes mains tremblent légèrement d'exaspération.

— J'en ai marre de tes questions à la con ! s'écrie-t-elle avec agressivité, ses poings serrés, fiche-moi la paix, tu n'es pas ma mère, s'égosille-t-elle en me pointant du doigt. Tu n'es pas meilleur que moi.

— Mais bon sens tu penses un peu à ta fille ? Il la menacer bordel !

Elle pivote brusquement sur ses talons, lançant un regard empli de colère.

— Sadie n'est pas ta fille, mais la mienne !

— Maman, tata, pourquoi criez-vous ? nous interrompt Sadie.

— Garde tes remontrances pour toi, je n'ai pas besoin des conseils d'une pauvre traumatisée qui a peur de son ombre. Tu n'aurais pas dû revenir ici.

Je reste silencieuse, impuissante, alors qu'elle saisit la main de Sadie et l'entraîne dehors. Énervée, je m'empare de mon verre et le balance à l'autre bout de la pièce où il se fracasse contre le mur, éclatant en mille morceaux.

— Merde, m'emporté-je avant de respirer profondément pour me calmer.

Je m'empresse de ramasser les morceaux de verre éparpillés sur le sol pour les jeter et récupère mon sac en bandoulière. Je monte rapidement dans la Chevrolet sans prêter la moindre attention au regard au coin que me lance le voisinage. Sur la route, je ne cesse de tapoter nerveusement la pulpe de mes doigts sur le volant. Cette histoire avec Chester me rend anxieuse. Candace n'a pas l'air de comprendre, mais si l'on ne amène pas la somme qu'elle lui doit, j'ai bien peur qu'il se débarrasse d'elle. Bien que Chester soit loin d'être aussi monstrueux qu'Ulrik, voir Balder, il n'en demeure pas moins une ordure de bas étage. Il voudra sûrement en faire un exemple. Je lui ai donné un peu plus de trois cents dollars hier soir, mais je n'ai aucune idée de comment je vais pouvoir réunir tout le reste.

Je roule jusqu'aux parkings déserts du motel et m'arrête près du seul véhicule garé, celui de Jane. J'avance vers l'accueil d'un pas déterminé, mais à peine le bruit de la cloche indiquant qu'une personne vient d'entrer résonne, que l'anxiété serre mon estomac.

Joan se tient derrière le comptoir, et dès que ses iris foncées se lèvent sur moi, ses lèvres s'étirent pour m'offrir un sourire charmant, à la limite effrayant. Ses cheveux bruns sont parfaitement coiffés, avec une mèche bien placée qui lui donne un air distingué. Il porte une chemise impeccablement repassée et un tablier en toile de lin qui semble avoir été choisi avec grand soin. Il me scrute avec une précision presque obsessionnelle.

— Bonjour Joan, le salué-je en m'approchant, est-ce que Jane est dans son bureau ?

Dès que j'évoque sa mère, il perd immédiatement son expression enjôleuse. Bien que son sourire reste figé sur sa bouche, le regard qu'il me lance n'est en rien amical.

— Oui, elle est là.

Je le remercie et pars frapper à la porte.

— Entrée ! retenti sa voix stridente.

Lorsque je passe le pas de la porte, l'odeur puissante des roses, mêlée à celle du tabac, m'insupporte.

Jane me fait face, assise derrière son immense bureau. Elle est focalisée sur les billets de banque qu'elle compte. Cette femme, aux alentours de soixante ans, porte encore les vestiges de sa jeunesse glamour. Elle aurait pu être une icône de beauté à une époque, mais le temps et un mode de vie chaotique ont gravé leurs empreintes sur son visage. Ses cheveux, qui furent probablement d'un blond éclatant, sont aujourd'hui ternes et maltraités, avec des racines grisonnantes. Les rides profondes sur son front et aux coins de ses yeux. Ses lèvres, jadis charnues et séduisantes, sont devenues minces et pâles, affectées par le tabac et l'alcool.

Elle maintient toujours une élégance dans sa façon de s'habiller, mais ses choix vestimentaires semblent désuets, comme figés dans le temps. Son visage exprime une certaine mélancolie, comme si elle regrettait les erreurs de sa jeunesse. Malgré tout, une aura de tristesse, de nostalgie et d'acceptation émane d'elle, évoquant une époque où elle régnait en reine de beauté.

— Tu es en retard, me rapproche-t-elle sans pour autant lever les yeux sur moi.

— Je...

— Je ne veux pas entendre tes pitoyables excuses, je n'ai pas le temps pour ça, me coupe-t-elle avant d'enfin poser son regard méprisant sur moi. Marion a disparu et ne répond plus à mes appels. Elle doit sûrement être en train de s'amuser avec ses petites habitudes quelque part. Tu vas devoir travailler à sa place ce soir.

— Jane, non je...

— Je t'arrête tout de suite, soit tu viens ou alors tu peux prendre la porte, je n'aurais aucun mal à trouver ta remplaçante, me menace-t-elle.

Face à ma résignation, un sourire s'étire sur ses lèvres, peintes en rouge carmin, mais il disparaît rapidement.

— Je veux en contrepartie une avance sur mon salaire.

— Une avance... répète-t-elle de manière hautaine.

Elle se met subitement à claquer la pointe de ses ongles manucurés contre le bois, montrant son irritation montante.

— Jane, je ne cesse de faire des heures supplémentaires sans être payé...

Elle lève soudainement sa main pour me faire taire.

— Je t'ai donné du travail et c'est comme ça que tu me remercies. Tu me dois une reconnaissance et tout ce que tu m'offres c'est de l'ingratitude. Vous êtes toutes des garces, toujours à quémander de l'argent encore et encore.

Incapable de m'en empêcher, je laisse échapper un léger rire. L'étonnement passe sur son visage, jusqu'à se transformer en peur lorsque je m'arrête subitement. Je pose la paume de mes mains sur son bureau et la fixe droit dans les yeux.

— Je ne vous dois rien du tout, prononcé-je en n'accentuant sur le mot rien, je préfère me retrouver sans travail plutôt que continuer à bosser pour vous.

Je ramasse l'un des tas de billets se trouvant devant moi pour les rangers dans la poche arrière de mon jeans.

— Je prends ça comme salaire que vous me devez.

Jane se lève si vite de son fauteuil que celui-ci tombe à la renverse.

— Comment oses-tu ? Élève-t-elle la voix désormais furieuse, je vais porter plainte, tu ne vas pas t'en sortir comme ça...

Je ne lui réponds pas et commence à partir.

— Ne me tourne pas le dos !

Alors que j'ouvre la porte, je pivote vers elle et lui offre mon plus beau sourire.

— Ah et Jane va te faire foutre.

Je passe devant Joan, qui me lance un regard ahuri, mais je n'y prête aucune attention. J'avance jusqu'à ma voiture, soulagée d'avoir enfin démissionné. Tandis que je m'assois derrière le volant, je m'empare des billets pour les compter. La réalité vient me frapper de plein fouet en m'apercevant qu'il n'y a qu'à peine cent dollars. Comment vais-je faire pour réunir le reste de la somme ?

Je sors l'écrin en vouloir rouge de mon sac et l'ouvre pour récupérer la bague. Je la contemple avec une certaine émotion. Elle n'est pas qu'un simple bijou, mais un véritable trésor familial. Une femme fortunée l'avait offert à mon grand-père en signe de gratitude après qu'il lui avait sauvé la vie. C'est avec cette bague qu'il avait demandé la main de ma grand-mère. Ornée d'élégants motifs gravés, elle respire la sophistication. Tout en or blanc, des lignes complexes s'entrelacent autour de l'anneau, convergeant au centre où une pierre précieuse trône fièrement. Sa teinte est un bleu profond et envoûtant, évoquant la couleur de l'océan en plein été. Elle semble changée de nuance en fonction de la lumière, passant d'un bleu clair et translucide à presque violet. C'est un bijou à la beauté captivante.

À la mort de mes grands-parents, la bague est revenue à ma mère. Elle a toujours refusé de la vendre en dépit des nombreuses difficultés auxquelles elle a dû faire face. Maintenant, je me retrouve dans l'obligation de la mettre au clou. La vie de Candace et Sadie repose entre mes mains. Malgré son comportement récent, je sais qu'elle reste une bonne personne. Les derniers temps n'ont pas été faciles pour elle. Élever un enfant seul n'est pas une tâche aisée, surtout à Gravemeadow. Elle m'a encouragée à partir, à poursuivre mes rêves, et lorsque je suis revenue, elle était toujours là pour moi. Elle est une des rares personnes à qui j'ai réussi à parler de ce que j'ai vécu, du moins d'une partie. Elle ne sait rien de ce qui concerne Ulrik et je ne suis pas certaine que je pourrais un jour en parler.

Je gare sur une place en face du magasin du prêteur sur gages. Le seul de la ville. Le Pawn Palace est le genre d'endroit que personne ne veut réellement fréquenter, sauf quand il n'y avait vraiment pas d'autre choix. C'est une bâtisse lugubre, presque perdue dans une ruelle sombre dans le vieux quartier. L'enseigne au néon au-dessus, jadis rouge criard, ne fonctionnait plus qu'à moitié, clignotant faiblement.

Dès l'instant que je passe le pas de la porte, une clochette grince au-dessus de moi. L'odeur distincte d'herbe flottait dans l'air. Les rayonnages, bondés d'objets hétéroclites, semblent prêts à s'effondrer à tout moment. Des instruments de musique délabrés, des bijoux ternes et des antiquités poussiéreuses se côtoyaient dans un désordre apparent. La lumière est tellement faible que mes yeux mettent un moment à s'habituer.

Le parquet, vieux et usé, crie à chaque pas. Derrière un comptoir, un homme au visage parcheminé par le temps se tient impassible. Les murs sont couverts de pancartes, annonçant des taux d'intérêt et des avertissements, donnant à l'endroit un air sinistre. Au moment où je dépose l'écrin sur le comptoir, il daigne lever les yeux sur moi.

— Que puis-je faire pour vous ?

Son haleine empeste tellement que je me retiens de faire une grimace de dégoût.

— Je voudrais mettre en gage cette bague.

L'homme soupire d'ennui, mais la prend tout de même pour l'examiner de plus près avec une petite loupe.

— Jolie bijou, vraiment bien faite, prononce-t-il en la regardant dans tous les sens, j'ai rarement vue une aussi bonne imitation.

— Une imitation ?

Mon sang se met à chuter dans mon cœur.

— Vous êtes sur ? Lui demandé-je la gorge serrée.

L'homme marqua une pause, puis souffla bruyamment.

— Oh oui ma p'tite dame, elle semble être de belle facture, mais la pierre, c'est une imitation plutôt fade du diamant Oppenheimer Blue. Je peux vous en donner soixante-quinze dollars.

Ses mots résonnèrent dans l'air. C'était mon dernier moyen pour réunir l'argent que Candace doit à Chester.

— C'est tout ? bredouillé-je, la gorge nouée par l'angoisse. Il me faudrait au moins cent dollars.

L'homme me lance un regard désintéressé, comme s'il avait entendu cette supplique des centaines de fois auparavant. Il secoue la tête lentement et repose la bague sur le comptoir.

— C'est à prendre ou à laisser.

Je récupère le bijou pour le parcourir avec nostalgie. C'était le seul héritage de ma famille et il est basé sur un mensonge. Le cœur lourd, je le lui tends.

— D'accord.

L'homme hoche la tête et la récupère avant de me donner une liasse de billets. Je sors du commerce, dépitée. Comment vais-je faire maintenant ? .

Je pénètre dans la voiture, et à peine ai-je fermé la portière de la Chevrolet que l'envie irrépressible de hurler m'envahit. Je frappe à nombreuse reprise le volant, tout en jurant. Plusieurs passants me jettent un regard incrédule tandis que je me calme. Je laisse reposer ma tête contre le siège, lasse. Mon regard dévie sur le rétroviseur intérieur de l'habitacle, quand soudain ma respiration se coupe. Ulrik est là. Se tenant seulement à quelque mètre, ses iris perçants sont fixés dans les miens. Mon cœur se met à battre la chamade. La main tremblante s'ouvre la portière et sort du véhicule pour lui faire face, sauf qu'il n'est plus là. J'avance en sueur, les jambes flageolantes, mais il a disparu. Je pivote la tête dans tous les sens, mais il n'y a personne. C'était encore une hallucination. Je deviens folle.  

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