Chapitre 7

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(en média, c'est notre cher Jolan dessiné par la talentueuse Grymm_
hihi merci encore. La phrase priceless est d'elle également.)

JOLAN

Laisser les deux filles discuter me semblait une bonne idée, à la base. Cela ne pouvait faire avancer les choses dans mon sens : cela voulait dire que la blonde avait probablement un plan, sinon, elle n'aurait jamais fait l'effort de parler à Autumn de son plein gré. Comme cette dernière s'empresserait de venir tout me raconter (car Cass était aussi douée pour convaincre les gens que moi pour les tuer), je pouvais espérer en apprendre un peu. Or, j'avais besoin d'un coup de pouce.

En effet, je cherchais toujours un moyen à la fois spectaculaire et monstrueux de tuer Autumn. La jeter du haut d'une falaise et la sacrifier dans un rituel de magie interdite figuraient dans mes options préférées. Mais d'une part, j'avais le vertige, d'autre part, ledit rituel nécessitait le meurtre d'une vierge ; dans les deux cas, j'étais donc mon propre détracteur. Bien sûr, je pouvais toujours me rabattre sur mon choix de secours : l'étouffer avec un oreiller. Inconvénient, ce n'était ni spectaculaire, ni monstrueux. J'aurais donc aimé trouver autre chose.

Pour me laisser la possibilité de glaner quelques informations, je pouvais bien supporter de rester seul avec Antonio. Lui et moi étions alors rentrés à la fondation.

J'avais surestimé mes capacités de tolérance : les dix minutes de marche suffirent à m'énerver.

Il faut le savoir : cet être humain manque de subtilité, et est incapable de voir quand les autres en font preuve. Depuis notre fameuse nuit, j'essayais donc d'être le plus direct possible avec lui pour lui faire intégrer qu'il ne m'intéressait pas. Ce n'était pas franchement concluant : après tout, il n'avait pas compris que le jeter par ma fenêtre s'apparentait à une tentative d'homicide.

Après avoir subi ses « j'espère que Autumn et toi n'avez pas rompu à cause de moi... » qu'il aurait volontiers remplacés par des « j'espère que tu as rompu pour moi... » s'il l'avait osé, je pris le parti de l'ignorer. C'était difficile, mais lire la liste des plus hautes falaises de France sur un des ordinateurs de la salle informatique m'aida grandement à me distraire de mes pulsions meurtrières à son égard.

Finalement, je ne lui portai l'attention qu'il me réclamait que lorsque j'entendis les fameux pas bruyants d'Autumn se rapprocher. Je n'avais toujours pas digéré le fait qu'elle ne m'en ait pas voulu de l'avoir trompée avec Antonio – non, pire, qu'elle ne m'ait pas cru. J'attendis donc qu'elle arrive à la porte, puis je me penchai pour embrasser le garçon.

Cette fois, j'étais sobre. J'eus donc tout le loisir de remarquer à quel point c'était répugnant : il avait le goût des Haribo réglisse qu'il mangeait compulsivement depuis toute à l'heure. Je pouvais endurer ça si cela était susceptible de mettre Autumn en colère. Voire, de la blesser.

Mais mon improvisation désespérée n'eut pas l'effet escompté.

Certes, quand elle traversa la pièce comme une furie, m'attrapa par le bras et m'entraîna dans le couloir avec un « Jolan, il faut qu'on parle », j'y crus. Puis, à la limite de l'hystérie, elle commença à me parler de Cassandre en termes peu chaleureux, et je compris que je n'étais pas la cible de sa colère. En fait, je pense même qu'elle n'avait pas remarqué ce qu'elle venait d'interrompre.

De son discours embrouillé, je retins que la blonde avait essayé de la convaincre de partir. C'était idiot. Si j'arrivais à retrouver la trace d'architectes septuagénaires de gymnase, il n'y avait pas de raison pour que je ne sois pas capable de faire de même avec mon ex-copine (qui, de plus, tweetait avec la localisation activée). Cassandre espérait sans doute gagner du temps en faisant ça. Peut-être pensait-elle que j'allais bientôt passer à l'action ? Cela voulait-il dire que j'étais sur le point de trouver le moyen idéal de supprimer la brune ?

Je caressai l'idée de la tuer sur le champ, dans ce couloir. Frapper son crâne contre le mur aurait un effet cathartique sur mes nerfs soumis à rude épreuve depuis le début de la nuit. Puis, toutes les excuses que les gens trouveraient pour nier ma culpabilité me vinrent à l'esprit (« oh, pauvre Autumn, elle a glissé et s'est fait une commotion cérébrale mortelle par accident, c'est tragique »), et je renonçai. Après tout, malgré les manigances de Cassandre, j'avais encore du temps. Ce n'était pas comme si elle allait s'enfuir.

Quand je repris le chemin de chez moi, c'était déjà le petit matin. La rosée humidifiait l'air et s'infiltrait à travers mes vêtements. Je préférais ignorer l'effet qu'elle avait sur mes cheveux (la teinture noire que je leur infligeais régulièrement les abîmait déjà bien trop, à mon grand désarroi. Mais pouvais-je réellement me pavaner avec mes boucles blondes et toujours prétendre être un méchant crédible ?)

Je n'avais qu'une hâte : rentrer, manger, puis me reposer. Je n'avais pas dormi depuis plus de vingt-quatre heures, et j'arrivais à mes limites (je me ramollissais un peu quand je manquais de sommeil ; un enfer).

Vue l'heure matinale, je pouvais en toute légitimité espérer ne croiser personne chez moi. Mais évidemment, comme tout était censé mal se passer aujourd'hui, la lumière de la cuisine était allumée. Tant pis. J'étais trop affamé. Et la réserve de ma chambre était vide depuis ma dernière nuit blanche.

« C'est à cette heure-là que tu rentres ? plaisanta papa quand je mis les pieds dans la pièce.

- Tu te trouves drôle ?

Il sourit et tendit la main pour m'ébouriffer affectueusement les cheveux (comme s'ils n'étaient pas déjà dans un état déplorable). Je le repoussai et ouvrit le frigo, à la recherche de quoi me sustenter. Je ne savais pas si le goût de réglisse persistait toujours dans ma bouche, ou si c'était seulement mon cerveau qui ressassait ce moment traumatisant.

- Tout s'est bien passé cette nuit ? Tout le monde est rentré en un seul morceau ?

- Malheureusement.

- Il reste des lasagnes d'hier soir, m'informa-t-il, sans doute dans une tentative d'enfin servir à quelque chose.

Il était assis au comptoir, en vieux T-shirt blanc cassé et bas de pyjama à carreaux. Une tasse de café était posée devant lui, à côté du journal du jour. Un cliché.

De toute manière, mes deux parents avaient toujours été beaucoup trop conventionnels. Il s'étaient rencontrés à la fac, avaient attendu trois ans pour se marier, un de plus pour avoir un enfant (moi), puis avaient acheté une maison pavillonnaire. Ma mère participait à des réunions Tupperware, et mon père avait une moto qu'il retapait dans le garage depuis environ dix ans. Nous étions allés une fois à Disneyland, partions un an sur deux au ski, et tous les étés au bord de la mer pendant deux semaines.

Quand j'eus douze ans, ils commencèrent à me donner de l'argent de poche.
Pour mes quatorze ans, ils m'offrirent mon premier ordinateur.
À seize ans, ils m'inscrivirent au code.
Et, le jour de mes dix-huit ans, mon père se chargea de la discussion.

"Alors mon grand, comment tu te sens maintenant que tu es majeur ? C'est le début des responsabilités, mais aussi des libertés ! C'est l'âge des expériences ! Ahah ! C'était pour ça que je voulais te parler !"
Effectivement, il m'avait parlé. Moi, je l'avais ignoré, et il était reparti dix pénibles minutes plus tard, satisfait d'avoir fait son devoir. À vingt ans, j'aurais donc cru pouvoir échapper à ce genre de discours. J'avais faux.

- Dis-moi... ta mère m'a dit pour Autumn et toi, commença-t-il prudemment.

- Fake news.

- Ça se passe bien, entre vous ?

- Je ne sors pas avec elle.

Je trouvai le Tupperware des lasagnes. Il y en avait au moins pour deux. Parfait. Je me mis en quête d'une assiette. Mon père pivota sur son siège pour continuer à me regarder, avec toujours le même sourire agaçant sur les lèvres. Il ne devait sa dentition colgate qu'à la profession de dentiste de son meilleur ami : pas de quoi en être aussi ostensiblement fier.

- Ah ! Ne fais pas le gêné, je sais ce que c'est ! J'ai eu ton âge, je te rappelle !

- Tu comprendras donc que je n'ai pas envie de te parler.

Mon père étant totalement dépourvu de magie, je veillai toujours à utiliser le plus possible mes pouvoirs devant lui. Réchauffer les plats était une exception à cette règle : je trouvais que ça donnait un drôle de goût (un goût de fleurs, à tout hasard). Je lançai donc le micro-onde. Deux minutes à tenir avant de me retrancher dans ma chambre.

- Allons mon grand, ne t'inquiète pas, cela ne sera pas très long. Bon. Vous n'en êtes sans doute pas encore là avec Autumn, mais mieux vaut prévenir que guérir. Je dois juste t'expliquer quelques petites choses importantes ! La contraception...

- Te fatigue pas, je suis déjà très au courant.

Mon père s'esclaffa, et des rides en pattes d'oies s'imprimèrent au coin de ses yeux. J'envisageai de les crever tous les deux.

- Oui oui, bien sûr... Bon, je t'en avais déjà parlé et...

- Et t'arrivais déjà trop tard à ce moment-là. Tu espères m'apprendre quoi de plus, au juste ?

- Oh, arrête de faire le fier... Je sais que ça te met mal à l'aise et que c'est nouveau pour toi, mais c'est sérieux, d'accord ? Je n'ai pas envie d'être grand-père si jeune !

Avait-il décidé de rendre ça le plus pénible possible ? Il n'avait pas aussi mal géré son monologue, la dernière fois. Sans doute parce qu'il n'était pas dans les six heures du matin. Ou alors, parce qu'il avait passé des heures à compiler des phrases-types sur les forums pour parents d'ados. Il avait poussé le vice jusqu'à monter me parler avec ses fiches bristol à la main. Mon père n'était pas un grand orateur.

L'odeur providentielle des lasagnes m'aida à ne pas lui enfoncer son journal dans la gorge. Moins d'une minute, et je pouvais fuir.

- Faudrait déjà qu'elle survive jusque-là, fis-je remarquer en toute pertinence.

- Ce n'est que neuf mois.

- Je l'aurais tuée avant, t'inquiète pas.

Avoir des enfants ne figurait pas dans mon projet de vie. À aucun moment (c'était trop dangereux : si vous saviez le nombre de fois où j'ai essayé de tuer mes parents). Et si ce malheur devait tout de même arriver, j'osais espérer qu'Autumn n'en serait pas la mère. Mélanger mes gènes aux siens serait insultant. Dans ce cas-là, je n'hésiterai pas avant de choisir l'option de l'étouffement par coussin.

- Il y a moins radical !

Comme il tenait là sa transition, papa se mit à énumérer la liste des différentes contraceptifs avec leurs avantages et leurs inconvénients. Finalement, il avait peut-être révisé. Le minuteur du micro-onde eut pitié de moi et finit par biper. Je me saisis de l'assiette et entamai ma retraite. Mon père accéléra son débit de parole en me voyant quitter la pièce.

- Si tu as besoin de conseils, n'hésite pas à m'en parler ! conclut-il.

J'accélérai le pas. L'assiette me brûlait un peu les doigts, mais c'était le cadet de mes soucis. Les lasagnes avaient intérêt à être succulentes. Parce que je venais de souffrir atrocement pour y avoir droit.

- Et protégez-vous ! cria-t-il dans mon dos.

*

Je fus tiré du sommeil par la sonnerie de mon téléphone. La lumière perçait franchement à travers mes volets fermés. Il ne devait pas être loin de midi. Désespérément trop tôt, donc. Je n'aurais pas craché sur des heures de sommeil supplémentaires. Je m'apprêtai donc à raccrocher sans scrupule, quand le nom du contact attira mon attention. C'était la mère d'Autumn. Elle m'appelait suffisamment rarement pour que cela attise ma curiosité. Je décrochai.

« Quoi ?

- Ah Jolan ! Désolée de te déranger, mais est-ce que Autumn est avec toi ?

Son ton clairement angoissé acheva de me réveiller. Je me redressai sur un coude, et balayai la pièce du regard. Au cas où.

- Non, pourquoi ?

Silence inquiet. J'entendais le bruit d'un moteur en arrière-plan. Téléphoner au volant, quel acte de rébellion. Avec un peu de chance, elle se tuerait en conduisant.

Elle ignora ma question.

- Et tu n'as pas eu de ses nouvelles ?

- Non plus.

- Tu as une idée d'où elle pourrait être allée ?

La liste des falaises que j'avais consulté la veille me revint en mémoire, mais je n'espérai pas trop. Au contraire de Cassandre, Autumn n'agissait jamais comme je le voulais. Je répondis une fois de plus par la négative et l'adulte émit un long soupir tremblotant.

- Je ne sais pas où elle est, avoua-t-elle dans un sanglot. Personne ne sait.

- Demandez à Cassandre.

- Elle n'a rien vu. Je suis en route pour la fondation. Tu penses que tu... que tu pourrais venir nous aider ?

Elle baissa la voix, et la suite de sa réponse faillit se fondre dans le bruit ambiant.

- Je crois qu'elle a disparu. Pour de vrai. Je pense qu'on l'a enlevée...

On pouvait penser qu'elle exagérait. Le fait qu'une fille de vingt ans découche n'était pas surprenant au point de directement penser à un kidnapping. Pourtant quand on prenait conscience du contexte (un génie du mal essayant régulièrement de nous tuer) et du genre de personne qu'était Autumn (elle n'avait clairement pas coupé le cordon d'avec ses parents), cette option ne paraissait pas si déraisonnable. C'était même logique.

- J'arrive. »

Je planifiais un meurtre, et on me retirait ma victime sans prévenir ? Comment avait-on osé ?

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