Elle était magnifique. La grande lame était incrustée de runes anciennes que la petite Leah ne comprenait pas. L'écriture brillait avec joie dans la lueur de la pièce sombre.

La jeune fille avait trouvé l'habitation lors de sa promenade au coeur de la forêt. Elle n'avait pourtant pas le droit d'y aller, mais elle ne pouvait s'empêcher de tenir tête à son père. Encore.

C'était son passe-temps. Quand elle ne voulait pas voir des adultes, elle se promenait là où on ne l'apercevrait pas.

Devant la grande épée, elle avança avec de petits pas. L'obscurité lui faisait peur, mais la lame l'appelait comme si une douce mélodie dans l'air lui disait quoi faire. Sa main se tendit vers le manche de l'arme, mais une voix la fit sursauter de peur.

– Souhaites-tu que je t'aide, petite ?

Leah ouvrit grands les yeux puis regarda autour d'elle. Tout était noir. Elle déglutit, effrayée par autant de noirceur. Ses jambes, tremblantes, lui firent descendre les escaliers pour retourner sur le palier de la maison délabrée.

Elle posa une main sur son coeur qui battait rapidement. Quelque chose n'allait pas. Leah fronça son front, puis se mit en route vers le château. Le lieu où elle aurait dû rester pendant la journée entourée de ces précepteurs, enseignants qui l'endormaient à chaque nouveau cours donné.

Vêtue de sa robe fine et d'une cape par-dessus ses épaules, la jeune fille parcourut les quelques mètres qui la séparaient du village. C'était le point de départ qu'elle se donnait pour éviter de se perdre dans la forêt. Jamais plus de trois cents pas à partir de cet ensemble de maisons qui était installé en bas de la forteresse du château.

Soudain, Leah se figea aux cris qu'elle entendait. Elle fronça des sourcils, pensant que les entraînements aux combats avaient encore eu lieu et voulaient apercevoir les hommes manier leurs épées. Mais ce qu'elle vit lui glaça le sang.

Les yeux grands ouverts, elle resta figée sur le chemin de pierres qui pavaient le village. La végétation autrefois florissante était tâchée de rouge. Un rouge comme le sang. Le regard de la petite fille aperçut des centaines de personnes se battre. Le spectacle n'était pas semblable aux combats qu'elle aimait observer. Celui-ci était rempli de rage et de haine.

Différents hommes en armures se battaient contre ses sujets, ses amis. Comprenant qu'il y avait une grande bataille, la jeune fille pensa à son père qui résidait au château. Elle courut à perdre haleine entre des ruelles où la lumière du soleil ne passait plus pour échapper aux meurtriers. L'adrénaline et la peur se confondaient dans ses veines. Elle ne pensait plus qu'à son père. Leah avait déjà perdu sa mère quand elle n'était encore qu'un bébé ; elle ne pouvait risquer de laisser son père mourir aussi.

Cependant, alors qu'elle montait encore les chemins de pierres qui menaient plus haut, elle se fit projeter sur le côté. Le souffle coupé, elle ferma les paupières et sentit son corps retomber avec douleur sur le sol. Son dos racla contre les pierres. Elle ouvrit les yeux pour apercevoir son père en train de se battre.

– Leah ! Va-t-en !

La petite fille se releva avec difficulté. Elle se dirigea vers son père, mais une lame vint le toucher sur le bras. Leah cria de peur. Ses larmes s'écoulèrent d'elles-mêmes. Elle allait perdre son père.

Même s'il était le Roi, elle savait qu'il n'était pas invincible. Elle savait que les gardes le protégeaient, mais quand il n'y avait plus de gardes, elle s'était juré de le protéger à son tour. Mais elle avait mal jugé la peur qui la figeait. Elle avait mal jugé l'ampleur d'une véritable guerre. Elle n'en avait jamais connu, jusqu'à ce moment-là.

– Souhaites-tu que je t'aide, petite ?

Une nouvelle fois la voix masculine lui effleura les tympans. En voyant son père mettre un genou à terre alors qu'un homme l'attaquait l'obligea à répondre au vent.

– Oui !

Soudain, elle vit près d'elle l'épée. La même que celle qui était dans la maison abandonnée. Elle renifla puis saisit le manche de l'arme. Malgré la taille de l'épée, Leah fut surprise de la soulever facilement. Elle était légère dans ses mains, ce qui la fit sourire.

– Ferme les yeux, lui souffla le vent.

Elle fit confiance à cette présence enchantée et ferma ses paupières. L'arme bougea au gré de ses envies alors que Leah suivit la danse contre le vent. Elle sentit ses cheveux blonds s'envolaient à chaque tour qu'elle faisait. Pendant ce qui lui semblait des heures, elle continuait de danser avec l'arme dans les mains sans faire attention au liquide qui lui arrivait sur sa cape de temps à autre.

Epuisée, les mouvements de Leah s'arrêtèrent quand l'épée le voulut. Elle reprit doucement sa respiration puis ouvrit les yeux. Elle n'observa pas autour d'elle. Son regard était fixé sur la lame. Les runes ne brillaient plus comme avant.

– Qui es-tu ? demanda Leah, sur le point de s'effondrer.

– On me nomme Angurvdell, répondit la voix avant que la petite fille ne tombe dans les ténèbres du sommeil.

Histoire écrite pour un concours :)