JEUDI 1 / 20 HEURES 50

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La chambre d'adolescent de Louis était à l'image de son appartement : simple et efficace. Il n'y avait ni décorations, ni posters, les meubles servaient avant tout au rangement des vêtements, des livres et des cours qu'il amassait depuis le lycée. Le lit simple était calé dans un coin de la pièce. Les trois autres accueillaient le bureau avec l'ordinateur de gamer, l'armoire et la bibliothèque. Les murs étaient bleus, le sol noir. Un élément dénotait dans le décor : des haltères posées contre la table de nuit. Louis ne soulevait pas de fonte, à sa connaissance. Ou bien, s'il le faisait, ça ne se voyait pas...

Ninon avait déposé son sac au milieu du tapis et déballait ses vêtements pour les replier soigneusement. Il se défaisait pendant le voyage. Quand elle changeait d'environnement, elle devait ranger ses effets personnels selon un soin et un ordre particulier. Les pantalons, les chemisiers, les tee-shirts, les chaussettes, les sous-vêtements. Sa psy lui avait fait écrire tous les rituels obsessionnels auxquels elle s'astreignait et elle les avait classés selon l'échelle de l'anxiété : de celui qui, s'il n'était pas fait, l'embêtait le moins, on se débarrassait en premier, puis on remontait la liste. Petit pas par petit pas. Celui-là était bien en haut de la liste.

Son téléphone vibra, pas d'alarme, juste un message de Zia :

« allez le week-end chez les beaux-parents 👊👊👊 »

Ninon sourit, son amie trouvait toujours le temps de lui montrer qu'elle pensait à elle, même quand Ninon la laissait en vue pendant quatre jours, même quand elle ignorait ses appels et trouvait des excuses pour ne pas la voir. Quand elle se rappelait d'où était née leur amitié (d'un thé pris pour discuter d'un garçon marquant de leurs vies), Ninon se sentait d'autant plus coupable. Elle fit l'effort de lui répondre :

« Je te garde des détails croustillants. »

Zia répliqua avec la photo d'une femme qui sirotait son thé. L'échange s'arrêta là, mais il eut le mérite de lever le brouillard dans lequel Ninon était plongée pendant ses rituels. Là, elle voyait les progrès faits. Avant, elle aurait été incapable d'en mettre un en pause pour ne serait-ce que répondre à un message.

Louis sortit de la douche. Ils n'avaient pas mangé en même temps que sa sœur. Soit disant car le bébé mangeait trop tôt, et Louis n'avait pas faim. Elle le soupçonnait de vouloir se faire sa propre cuisine. Les cheveux mouillés, un tee-shirt floqué au logo d'une entreprise de BTP sur les épaules, il s'assit sur son lit.

― Pourquoi tu as toujours des fringues avec des marques dessus ?

Louis baissa les yeux sur son tee-shirt, comme s'il n'avait même pas regardé ce qu'il s'était mis sur le dos.

― Ah, ça ? Je faisais de l'athlétisme au lycée, papa me faisait sponsoriser.

― Toi, tu faisais de l'athlé ?

Louis s'offensa de sa surprise :

― Eh ! Je te rappelle que j'ai fait une année de STAPS.

― Tu as raté une année de STAPS, le corrigea-t-elle, taquine. Enfin, ça ne se voit plus trop...

Pour pousser la plaisanterie, elle tapa sur ses mollets, la peau dansa une ou deux secondes.

― Évidemment, je contracte pas !

― Vas-y !

Louis étendit sa jambe, quand Ninon répéta son geste, le muscle était bien plus dur.

― Mouais...

― Je vais t'en ficher des années de STAPS, moi !

Soudain, il se jeta sur Ninon et la cueillit du sol pour la soulever comme un sac de farine. Elle cria, se débattit, au fond d'elle, ça l'amusait. Perchée sur l'épaule de Louis, à un mètre cinquante du sol, elle gloussait, la tête en bas. Le jeune homme resta planté ainsi, une bras sous ses cuisses.

― Alors ? Qui c'est le plus fort ?

― Je sais pas, j'ai encore des doutes...

Ninon sentait le sang lui monter à la tête, mais elle préférait souffrir et charrier Louis plutôt que lui donner satisfaction. Ce n'était pas parce qu'il était son copain qu'il avait droit aux traitements de faveur – c'était même plutôt l'inverse ! Louis ne se démonta pas non plus et enjamba les affaires pliées de Ninon, il la fit basculer sur le lit dans une prise digne des meilleurs matchs de catchs. Ninon rebondit sur le matelas, le monde tourna autour d'elle, elle éclata de rire. Louis se pencha sur elle, et lui maintint les mains pour l'immobiliser.

― Qui c'est le plus fort ? répéta-t-il pour lui faire cracher le morceau.

― OK, OK, c'est toi !

Content, Louis se laissa tomber à son tour. Le lit accueillait leur deux corps avec mal. Ninon ne savait pas où elle allait dormir, mais il était certain qu'elle ne se collerait pas à Louis pendant quatre jours. Il donnait des coups dans son sommeil, l'horreur. Pour le moment, la proximité de la dérangeait pas. Elle se lova dans les bras de son petit ami, ils s'embrassèrent. La fougue du baiser lui donna l'impression que c'était le premier véritable de la journée. Jusque là, ils avaient été pris entre les préparatifs, le trajet, les repas de famille et le reste. L'après-midi, ils avaient visité le terrain où Clémentine voulait faire construire et regardé un film. Là, ils se reconnaissaient enfin.

Bientôt, leurs mains se fit aventurières. Ninon se laissa portée par les caresses de Louis, elle en avait oublié le rituel et les vêtements à plier. Elle y reviendrait, pour sûr mais l'instant était à l'amour. Leurs respirations s'accordaient avec harmonie, les cheveux de Louis gouttaient dans le cou de Ninon. Quand des doigts se glissèrent sous sa blouse et cherchèrent à décrocher son soutien-gorge, elle se laissa faire. Le tee-shirt moche de Louis passa par-dessus sa tête, Ninon le déposa sur l'oreiller, pas du genre à le balancer à travers la pièce. Le jean de Ninon capitula à son tour, quand Louis s'en débarrassa pour avoir accès à sa petite culotte. Un moment, il arrêta de l'embrasser, Ninon fronça les sourcils.

― Quoi ?

Ses lèvres tremblaient de désir. Louis chuchota :

― Tu imagines pas combien de fois j'ai rêvé de ramener une fille dans cette chambre et de lui faire l'amour.

― Ah oui ? Et tu en as ramené combien ?

Louis se mit à compter sur ses doigts avec ironie, au bout de dix, elle l'attira à lui pour qu'il la ferme. Entre deux baisers, il murmura :

― Juste toi.

Cette confession acheva de faire craquer Ninon. Elle s'abandonna au bonheur du moment présent. Soudain, des coups firent trembler la porte, Ninon et Louis se glacèrent, il plaqua une main étouffante sur sa bouche dans un réflexe calculé.

― Quoi ? cria Louis.

― Vous mangez ou pas ? l'interrogea sa sœur.

Louis se tourna vers Ninon, et articula sans un bruit : « Je te mange toi ». Puis à voix haute :

― Ouais, tout à l'heure.

― Il y a du poulet rôti. Nous, on va se coucher.

― OK, bonne nuit.

Ils patientèrent quelques secondes de sûreté, Ninon était embarrassée à l'idée que sa sœur ait tout compris. Comment pourrait-elle la regarder dans les yeux le lendemain ? Mais Louis ne s'en préoccupa même pas. Il libéra Ninon de son silence forcé, et l'embrassa sur la joue avant de se relever.

― Je vais fermer cette porte à clé.

Ce qu'il fit, en retournant sur le lit, il marcha sur un des vêtements de Ninon. Elle ne s'en formalisa même pas. Ils reprirent là où les choses s'étaient interrompues.


Le salon était plongé dans la nuit quand ils sortirent pour manger un bout. Le carrelage froid sous ses pieds nus extirpa Ninon de sa torpeur. Désormais, elle portait le tee-shirt moche de l'entreprise de BTP, Louis était aux toilettes. Elle posa ses doigts contre ses joues brûlantes, les émois de la soirée la tenaient encore par le menton.

Sa première relation sexuelle avec Louis remontait à bien des mois. En fait, très vite, ils avaient franchi le pas, en ayant tous les deux très envie. Quand ils couchaient ensemble, ce n'était pas parfait, mais ça tendait à le devenir. Louis était à l'écoute et respectait toutes les barrières qu'elle lui mettait, Ninon n'en demandait pas mieux. Le sexe était bien, le mec avec qui elle le faisait était encore mieux, Ninon était peut-être la plus heureuse du monde. Enfin... Si, n'y pensons pas.

Ninon avait soif, mais dans cette cuisine immaculée, d'où rien ne dépassait, elle n'osait pas ouvrir un placard au risque de tout déranger. Alors elle resta plantée dans le noir, à attendre que Louis la rejoigne. Quand il la trouva au milieu du séjour, il alluma la lampe du salon et murmura :

― Ça t'a tant secoué que ça ?

― Ta maison ressemble à un show-room Ikea, j'ai peur de faire une bêtise.

Il leva les yeux au ciel. Dans la cuisine, Louis lui servit son verre d'eau, et ouvrit le réfrigérateur pour en contempler le contenu. Au bout de trente secondes, Louis fit la moue, et sortit une casserole pour se faire cuire des pâtes. L'estomac de Ninon gargouillait depuis quelques heures déjà, mais elle accepta d'attendre une dizaine de minutes. Des pâtes avec du jambon, c'était parfait quand on venait de faire l'amour. Louis mit l'eau à chauffer, la sala, et contourna le gigantesque îlot pour lui embrasser les cheveux. Ils étaient niais à souhait, se disait souvent Ninon. Mais elle s'en fichait.

― Désolé si mes parents t'ont mis mal à l'aise ce midi.

Ils n'étaient pas revenu sur le déjeuner de la journée. Ninon avait trouvé la famille de Louis si bienveillante, elle s'en voulait d'avoir eu l'air fermée. Mais... au début, elle flippait à cause des médicaments restés dans la voiture et la peur de louper sa prise de midi. Puis, le reste du repas, elle avait été ailleurs, comptant mentalement le nombre de comprimés qu'il lui restait pour le week-end. Elle craignait ne pas en avoir assez, et pas moyen d'avoir une ordonnance, son docteur voulait la revoir pour faire le point avant d'en signer une nouvelle.

Résultat, elle était à côté de ses pompes. La mère de Louis avait posé des questions auxquelles Ninon avait répondu de manière évasive, loin de son esprit précis habituel. Ninon était sûre d'avoir fait mauvaise impression. Et Louis qui tenait tant à cette rencontre... Elle chercha néanmoins à le rassurer :

― Non ! Tes parents sont gentils, ils m'ont super bien accueillie. T'inquiète.

― On n'a pas eu trop de temps, c'est dommage. Mais ils ont pris des congés ce week-end.

Ninon esquissa un sourire léger. Sur le plan de travail, elle déplaça un vase pour qu'il soit aligné avec une des marbrures du bois. Elle sentait le poids des yeux de Louis sur elle, quand elle releva la tête, il demanda :

― Dis-moi, tu prends la pilule ?

L'eau se mit à bouillir. Ninon avait l'impression que l'eau des pâtes bouillonnait chaque fois qu'un élément important se présentait dans leur relation. Louis lui tourna le dos pour mettre les pâtes, elle lui répondit quand même :

― Non.

― Tu y as pensé ? Ce serait pas un mal, non ?

Ninon fronça les sourcils, d'où ça sortait ? Leurs chuchotements semblaient retentissants dans le silence du salon. Un rire nerveux plus tard, elle remit Louis à sa place :

― Je... je gère ma contraception, t'en fais pas. J'ai pas envie de prendre la pilule.

Les pâtes étaient dans l'eau, Louis baissa le feu, les bips de la plaque à induction percèrent le blanc, aigus. Son copain s'appuya sur l'îlot, les deux mains jointes, la capuche de son sweatshirt sur le crâne.

― Tu me le dirais, si tu étais enceinte, hein ?

― Bah bien sûr. Pourquoi tu me dis ça ?

Louis haussa les épaules.

― Comme ça.

Mais rapidement, Ninon fit le lien.

― C'est par rapport à la blague de mardi soir ? Sur le faux bébé ?

― Ouais... avoua Louis. En vrai, pendant un instant, j'y ai cru. Je me suis dit que tu me le cachais.

― Pourquoi je te le cacherais ? Si c'était le cas, tu serais le premier au courant.

― Tu voudrais avoir un enfant maintenant ?

― Hein ?

Elle ne comprenait pas d'où venait cette séance d'interrogatoire. Ils n'avaient jamais parlé ni d'enfant ni de grossesse depuis cette fois, pendant le deuxième confinement, quand elle s'était confiée à lui. On aurait dit que Louis macérait cette discussion depuis des mois et lui crachaient ses peurs sans prévenir. Il continua :

― Si tu tombais enceinte maintenant, tu voudrais le garder ?

― Si je tombais enceinte maintenant, on prendrait la décision ensemble.

― Je veux pas d'enfants à vingt-deux ans.

― Je sais, le rassura-t-elle.

Elle en avait vingt-quatre, était au chômage et en pleine psychothérapie. Elle n'en voulait pas non plus. La blague était restée en travers la gorge de Louis, visiblement... Le jeune homme parut rasséréné, il souffla un coup, Ninon lui attrapa la main par-dessus le plan de travail.

― Pardon, s'excusa-t-il. Je sais pas pourquoi, parfois, j'ai l'impression que tu me caches des trucs. C'est idiot. Excuse-moi.

Ninon ne dit rien, elle embrassa les doigts de Louis et lui sourit.

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