Dans le chapitre précédent :

« Allons, dit Alex en me tapant sur le dos. Tu sais où sont passées maman et Liliane ?

– Non, soufflai-je en fronçant des sourcils. Pourquoi ? Elles sont encore dans la maison, je peux les sentir.

– Moi aussi, mais tu étais préoccupé donc j'ai mis fin à ta rêverie. »

J'allais répliquer, mais me ravisai. Alex alla vers sa fille qui lui raconta l'histoire de je ne sais quel personnage sortant de son imagination débordante.

Et moi, j'attendis que Lucy arrive enfin sans stress, ou presque.

***

Soudain, Alex sortit de la pièce sans sa fille qui restait à colorier tout en humant un air. Je le regardai faire sans savoir ce qu'il avait dans la tête, mais laisser Anna alors que j'étais tendue n'était pas la meilleure idée. Je savais que je ne lui ferais pas de mal si je pouvais m'en empêcher, et actuellement je pouvais me contrôler. Mais elle n'aurait tout de même pas dû rester seule avec un Alpha.

Anna elle-même avait dû ressentir mon état au bord de la colère et de l'inquiétude, donc elle restait dans son coin. Mais sans avoir peur de moi. Et le fait qu'elle soit calme arriva à me soulager aussi de toutes ses émotions fortes et inutiles. J'allai me diriger vers elle après plusieurs minutes à la contempler, mais je sentis les effluves de mon âme-sœur qui arrivait bientôt derrière la porte.

Et elle n'était pas seule. Alex lui tenait la main que je fixais en fronçant les sourcils. Ma relation avec Lucy avait bien évolué. Elle acceptait mes câlins. Enfin. Mais le fait de les voir si proche fit grogner mon loup. C'était à moi d'être à la place d'Alex. C'était à moi qu'elle devait accorder sa confiance... La jalousie devait transparaitre sur mon visage, car Lucy fronça les sourcils sous l'incompréhension.

Alex, quant à lui, laissa un sourire malicieux fendre son visage. Lucy alla parler, mais une voix l'interrompit.

« Maman ! »

Quoi ?!

Abasourdi, je regardai Anna courir vers Lucy en criant maman encore et encore. Et mon âme-sœur était choquée. Immobile un instant, elle s'accroupit en serrant ma nièce dans ses bras. Je la vis humer son odeur à travers les cheveux bruns de la petite puis des larmes s'écoulèrent de ses yeux, inondant ses joues.

« Anna, souffla Lucy, le visage contre son petit cou.

– Maman, souffla une voix étouffée.

– Désolée, dit-elle en desserrant ses bras sans pour autant la lâcher.

– Pourquoi tu pleures ? demanda Anna en la fixant d'un air curieux que je devais aussi avoir.

– Parce que je suis heureuse, ma puce. Je suis contente de te voir, avoua-t-elle en séchant grossièrement mes larmes alors que je ne comprenais plus rien.

– Eh bien, quelle rencontre, s'exclama la femme de mon frère. Je suppose donc que vous êtes sa mère. »

Je me tendis aux paroles de Liliane. Impossible.

Lucy avait pris Anna dans ses bras et la portait dans un élan protecteur. La petite brune rigola et n'arrêta pas de gigoter ses jambes situées de part et d'autre de sa taille l'emprisonnant ainsi. J'allai parler, mais ce fut Anna me la coupa.

« Maman m'a retrouvée, » lança-t-elle en souriant en direction de son père Alex.

Au moins de temps qu'il n'en fait, je me jetai sur mon frère et lui mis un coup de poing au visage. Il avait couché avec elle ! La rage de mon loup me guidant je voulus recommencer, mais Alex réussit à me mettre un coup de genou dans les côtes. Après un cri étouffé, je me tins le ventre.

« Mais qu'est-ce qui te prend ?! » hurla Alex en tenant son nez.

Je lui lançai un regard noir rempli de colère, souhaitant le frapper encore. Comment pouvait-il me demander ça ? Il avait couché avec mon âme-sœur, à moi ! Mon loup était en plus excitait par les émanations de peur des autres personnes dans la pièce. Il voulait plus de sangs et marquer son territoire.

Anna se dégagea des bras se Lucy pour courir vers Liliane, sa mère qui l'avait élevé. Je n'avais pas vu son visage trop intéressé à lancer encore mon poing contre le visage d'Alex. Soudain, Lucy se plaça devant moi.

« Arrête ça tout de suite Adam ! Hissa-t-elle énervée alors qu'elle n'avait aucune raison de l'être.

– Tu as couché avec Alex ! » grondai-je sauvagement.

Mais ce n'était pas la peur qui était sur son visage, mais la surprise. Une surprise sincère.

« Je n'ai jamais couché avec lui, répliqua-t-elle, outrée.

– Anna est ta fille, » continuai-je.

Elle ne me répondit pas, mais me regardait avec confusion. Mon loup rageait à l'intérieur de moi, ce qui ne m'aidait pas à réfléchir correctement. Je passai ma main dans les cheveux en essayant de me calmer. Stupide ! Lucy avait à peine 20 ans donc c'était impossible qu'Anna soit sa mère biologique.

Derrière moi, je sentis la femme d'Alex aux côtés de son mari essayant tant bien que mal d'arrêter le liquide rouge de s'écouler. Lucy s'approcha du blessé en me contournant puis s'agenouilla près de Liliane.

« Désolée, plaida-t-elle tristement.

– T'en fais pas, tu n'as pas à t'excuser, répliqua Alex faisant, par conséquent, entrer le sang dans sa bouche.

– Tu es exactement comme il t'a décrite, dit Liliane qui regardait mon âme-sœur avec un mélange d'émerveillement et de curiosité.

– Vous aussi.

– Oh, tu peux me tutoyer. C'est malin, maintenant j'ai conscience de mon âge, s'exclama-t-elle en souriant tandis qu'un rire gêné s'échappa de la bouche de Lucy.

– Les filles, loin de moi de vous déranger, mais... »

Elles se retournèrent vers Alex qui avait un visage grimaçant. Je soupirai en voyant les dégâts que j'avais causés sous la rage. J'allai m'excuser quand Lucy parla.

« Il est hors de question que je sorte ma langue encore une fois.

– Quoi ?! »

Moi et Liliane avions crié en même temps face à cette phrase ambigüe. Sortir sa langue ? Pour quoi faire ?

« Ce n'est pas ce que tu crois, je t'expliquerai plus tard, » assura Alex précipitamment, paniqué par ce que pouvait penser sa femme.

Lucy roula des yeux puis se releva ; Liliane suivit son action. Mon âme-sœur voulut parler, mais ma mère entra dans la pièce avec un air horrifiée. Je soupirai doucement tandis qu'elle se précipita vers Alex.

« Bon Sang ! Tu étais obligé de lui casser le nez ?! vociféra-t-elle à mon encontre tout en essuyant le nez d'Alex.

– Il a cru que j'avais couché avec Alex parce qu'Anna m'a appelée maman. »

Lucy ouvrit grands les yeux après avoir prononcé ces paroles. Toutes les personnes dans la pièce la scrutèrent en silence. Même les quelques gardes venus pour tenter de séparer moi et mon frère la regardèrent plus qu'étonnés. Elle se mordit la lèvre inférieure et baissa la tête comme si elle avait commis une faute.

Ma mère se leva et s'approcha avec un sourire près de mon âme-sœur.

« Tu dois être Lucy. On m'a beaucoup parlé de toi, déclara-t-elle d'une voix douce et mélodieuse qui respirait la sérénité.

– Oh, vraiment, bredouilla-t-elle, gênée.

– Et ce n'est pas grâce à toi, mon cher garçon ! rouspéta-t-elle à travers notre lien.

– Elle vient tout juste d'arriver. Ce n'était pas la peine que tu la déranges dès qu'elle avait franchi la barrière.

– Si justement, tu aurais dû me prévenir à ce moment-là. Je suis ta mère tout de même ! Et tu as trouvé ton âme-sœur Adam, c'est une chose merveilleuse ! »

Elle sourit chaleureusement à Lucy et la prit dans ses bras. Celle-ci était si crispée que je voulais les séparer. Mon âme-sœur se sentait mal à l'aise, et le fait qu'elle dégage cette peur incompréhensible. De quoi avait-elle peur ? Ma mère devait être la personne la plus douce...

Inquiète, Clara rompit son étreinte avec Lucy qui essaya de sourire.

« Lucy ? » dis-je d'une voix inquiète. Elle me répondit par un simple hochement de tête, mais je savais qu'elle n'allait toujours pas mieux.

« Pourquoi a-t-elle autant peur ? questionnai-je Alex par le lien.

– Maman est trop parfaite, trop gentille, trop douce... elle doit sûrement lui rappeler sa vraie mère... Tu sais c'est compliqué de s'attacher à nouveau aux personnes qui nous entourent. Encore plus compliqué pour Lucy, qui a vraiment perdu toute sa famille.

– Recevoir notre amour est si compliqué que ça ? demandai-je avec peine, mais il savait que je parlais aussi de lui qui était resté en retrait pendant plusieurs années.

– Je suis désolé Adam. S'ouvrir après avoir été isolé et humilié comme nous l'avons été n'est pas une chose simple. »

Quand je me tournais vers les filles, Lucy et Liliane se souriaient d'un air complice. Comment étaient-elles devenues si proches alors qu'elle venait à peine de se rencontrer ?

« Lucy, insistai-je d'une voix agacée.

– Alpha, nous allons vous laisser, » dit Liliane en baissant la tête puis elle prit la main de sa fille Anna.

Lucy se tourna vers Anna comme si elle avait peur de la perdre. Je vis Alex attrapa son bras pour lui chuchoter des mots à l'oreille. Je grognai, mais mon frère m'ignora. Je serrai donc les dents et attendis qu'il ait fini.

« Elle ne va pas disparaître, la rassura-t-il. Et calme-toi, je sais que tu peux y arriver. »

Il lui fit un clin d'oeil puis partit rejoindre sa femme. Bouche bée, Lucy continuait de fixer la porte désormais fermée.

« Lucy, tout va bien ? s'exclama ma mère avec une voix douce.

– O-oui, ça va. »

Le trémolo dans sa voix l'avait trahie. Elle recommença à se mordre la lèvre. Des lèvres que je voulais mordre aussi. Je fermai les yeux un instant pour me calmer.

« Adam, tu es sûre qu'elle va bien ?

– Elle a été enfermée dans la même prison qu'Alex.

– Oh non... »

Ma mère enleva ce visage peiné et s'approcha de Lucy en lui tendant la main. Avec surprise, Lucy recula sa jambe droite. Elle rectifia aussitôt le tir en reposant sa jambe droite à côté de son homologue en bredouillant une excuse. Tête baissée, elle cacha ses bras derrière son dos. Comme si elle voulait éclipser ses magnifiques tatouages à notre regard.

Sentant son malaise, je vins devant elle pour la prendre dans mes bras. Elle se laissa faire, ce qui satisfaisait mon loup. La tête sur mon coeur, elle se détendit à son rythme tandis que j'appréciais ce moment où elle me laissait la toucher.

« Ça va mieux maintenant ? »

Elle hocha la tête donc je la relâchai même si l'envie de la garder encore près de moi me chagrinait. Lucy souffla pour se donner du courage, ce que je trouvais adorable.

« Nous devrions nous installer. »

Elle hocha la tête. Nous nous assîmes sur la petite table, moi aux côtés de Lucy et ma mère en face de nous.

« Je m'appelle Clara, je suis la mère d'Adam, se présenta-t-elle. Alors tu as une fille ? »

Prise de joie, le visage de Lucy s'éclaira à la question. Un doux sourire qui la faisait resplendir.

« Anna est la fille de ma meilleure amie. Elle est décédée en lui donnant naissance. Je me suis occupée d'elle avec Alex et les autres, avoua-t-elle doucement.

– Tu t'es occupée d'elle là-bas ? demandai-je.

– Les enfants étaient aussi utilisés, révéla-t-elle d'une voix froide renforçant le silence pesant qui étouffait la petite salle.

– Qu'est-ce que tu veux dire par... » commença Clara, mais elle arrêta dès qu'elle vit ses tremblements.

– Maman, » lâchai-je en voyant la détresse de mon âme-sœur.

Soudain, ses membres cessèrent de trembler et elle se tourna vers moi. Ses yeux dorés m'informaient que c'était Lulu, sa louve qui était aux commandes.

« Lulu, est-ce que Lucy va bien ? demandai-je, inquiet.

– Oui, ne t'en fais pas, répondit la louve en souriant. Elle est juste un peu... perturbée. »

Les yeux écarquillés de stupeur, ma mère suivait notre échange avec un mélange de doute quant à ce qu'il se passait. Je souris à sa mine ahurie.

« Je m'appelle Lulu, je suis la louve de Lucy. Ravie de vous rencontrer.

– C'est impossible, souffla Clara, stupéfaite et émerveillée.

– Je suis une louve assez spéciale. Peu de personnes connaissent mon état alors il serait bien que vous le gardiez pour vous.

– Mais comment... ?

– Je suis désolée, mais ce n'est pas à moi de vous le dire, trancha Lulu. Mais peut-être que je pourrais le dire à quelqu'un un jour...

– Je pourrais le dire à Alex ! » s'exclama-t-elle joyeusement en me regardant.

Elle me narguait clairement. Je grognai tandis que ma mère éclata de rire. Je compris que sa louve avait réussi à alléger la tension en l'espace de quelques minutes.

« Et tu as beaucoup d'enfants ? demanda ma mère, curieuse.

– Oui, vingt-six en tout. »

Clara sourit de toutes ses dents alors que je me tendis. Cela voulait dire qu'il y avait au moins vingt-six enfants dans cette prison... Et est-ce que tous ces petits étaient encore vivants maintenant ? Je n'osais poser cette question terrible. Je n'osais imaginer leur sort. Lucy me prit la main avec délicatesse pour m'aider à relâcher la tension, ce qui marcha.

« Certains enfants de 10 ans m'appelaient maman alors que je n'avais que cinq ans de plus qu'eux. Maintenant, ils vont sûrement m'appeler par mon prénom.

– Oh, dit ma mère, ne sachant que répondre d'autre. C'est une question un peu indiscrète, mais est-ce qu'un de ces vingt-six enfants est ton enfant biologique ?

– Non, aucun. »

Mes épaules se relâchèrent imperceptiblement.

« Oh, donc tu n'as jamais... »

Sa question fut coupée par des toquements à la porte.

« Oui, » répondis-je.

La porte s'ouvrit sur une femme à l'épaisse chevelure rousse. Rachel était une femme généreuse et sage pour celle qui la connaissait au delà des apparences. Malheureusement beaucoup d'hommes dans la meute ne voyaient que son élégance et ses formes. Ses yeux verts nous scrutèrent avant de se concentrer sur moi.

« Que se passe-t-il Rachel ?

– Il y a eu un problème avec la prisonnière. »

J'hochai la tête avant d'aller devant la femme debout. Je croisai les bras tandis qu'elle continuait de me raconter ce qu'il s'était passé.

« Après que tu aies ordonné de la mettre dans une chambre, elle était restée tranquille. Mais il y a une heure, j'ai voulu voir Ed pour lui parler, mais quand je suis arrivée dans le couloir, il était à terre, mais pas mort. Il a juste reçu un coup. J'ai directement contacté Luke étant donné que tu étais occupé. Il la recherche avec d'autres loups dans la forêt. Mais pas de nouvelles pour l'instant. »

Rachel s'en alla ensuite. Je me tournai vers Lucy, mais toujours dans mes réflexions. Edward était le garde que j'avais assigné à la prisonnière. Il était un bon guerrier. C'était impossible qu'elle arrive à s'échapper ainsi à part si elle avait usé d'une quelconque magie. Lucy pencha la tête sur le côté en guise d'interrogation.

« Alice s'est échappée, » déclarai-je.