Chapitre 11 - L'ange et le démon

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Je l'aide à descendre dans sa cabine. La douleur semble difficile à supporter, mais il ne se plaint pas. J'ouvre la porte de sa chambre et l'aide à aller s'asseoir au pied du lit. Je pose son sac au sol, sors ses vêtements de rechange et les pose près de lui.

— Je vais te laisser te déshabiller et te coucher... Si tu as besoin tu m'appelles. Enfin...

Il attrape ma main pour me retenir. Il prend son carnet et écrit lentement.

— « Aide-moi. Je n'arrive pas à bouger. »

— Je vais te voir sans ta chemise...

Il baisse les yeux et hausse les épaules. Je m'approche et lui touche la main pour qu'il appréhende mon contact. Je tente d'enlever la première manche sans lui faire du mal, mais il grimace. Je retire la deuxième et regarde son dos. Un tatouage prend toute la moitié de son dos, le côté droit et tout est lié avec celui de son bras. Il s'arrête à sa colonne vertébrale, wawouh. Je ne sais même pas ce qu'il y a de dessiné tellement il y en a. Je ne m'en serai jamais douté... Au milieu des dessins, il y a des plaies qui ressemblent à des lacérations ou bien des coups de fouets. Putain.

— Je... Je vais nettoyer ton dos. Ne bouge pas.

Je prends l'antiseptique et les compresses et j'entreprends de désinfecter lentement. Je le sens se raidir et je frissonne en imaginant la douleur que cela peut lui provoquer. Je passe ensuite à son torse. Il garde les yeux fermés. Son tatouage prend également toute la moitié de son torse et est délimité par son sternum et la ligne médiane de ses abdominaux. Étonnant ce choix de ne se tatouer qu'un côté du corps, et je suis certaine que cela représente quelque chose pour lui.

Je souffle lorsque j'ai terminé de tout désinfecter et de couvrir les plus profondes. La douche attendra demain, il n'est pas assez stable.

— Ça y est, j'ai fini. Il faut te reposer maintenant...

Il acquiesce et se lève doucement. Il prend ma main et la pose sur le bord de son jean, me faisant comprendre de l'aider. Je lui détache et l'aide à le baisser. Le déshabiller sans pouvoir le toucher est tellement perturbant. J'ouvre la couette de son lit. Il marche lentement et s'assoit au bord. Il essaie de s'allonger de la meilleure façon qu'il puisse, mais il doit avoir mal. Il se positionne sur le côté. Je remonte la couverture sur lui.

— Repose-toi bien... Tu es en sécurité ici.

Il pose sa main sur la mienne et me la serre doucement. Je me penche et dépose un baiser sur sa tête avant de sortir et de le laisser se reposer. Je soupire lorsque je ferme la porte. Je n'imaginais pas finir la journée de cette façon... D'une, je n'avais pas prévu de le revoir. Et de deux, le trouver si mal en point... Si je n'étais pas passé par là, personne ne l'aurait trouvé. Et il serait certainement mort à cette heure-ci. Un frisson me parcourt et je remonte sur le pont. Je m'allonge sur le bois frais et observe le ciel.

Je me posais déjà des tonnes de questions, mais alors là mon cerveau fulmine. Qui peut bien lui en vouloir au point de le tabasser et de le laisser pour mort dans une cabane en bois ? S'il n'avait jamais réussi à sortir de là, il n'aurait pas tenu longtemps. Et puis je repense aux premiers mots qu'il m'a dit... Il m'a avoué son prénom, chose qu'il semblait vouloir cacher, et il m'a dit merci... J'ai vu à quel point ça lui faisait mal de parler. Je n'avais jamais vu ça auparavant. Je me demande pourquoi il s'est débloqué ce soir avec moi ? Est-ce parce qu'il a eu peur, ou parce que je l'ai sorti de là ?

Je me redresse brusquement en entendant un bruit sourd. Mathyas ! Je descends rapidement à sa cabine et je le vois se débattre avec sa couette, comme la dernière fois. Je vais sur le lit et calme ses mouvements en l'appelant. Lorsqu'il se calme, je le couvre pour ne pas l'exposer davantage à mon regard. Je passe mes doigts dans ses cheveux.

— Tout va bien. Tu es sur ton bateau... Je suis là. Tu es en sécurité.

Sa respiration s'apaise au fur et à mesure. Lorsque je veux me redresser, je remarque qu'il tient le bas de mon tee-shirt. Son regard m'implore de ne pas l'abandonner...

Je ramasse la lampe de chevet qui s'est écrasée sur le sol et je m'allonge ensuite sur son lit. Il me regarde pendant de longues secondes.

— Tu peux dormir... Je reste là.

Il acquiesce et son visage se détend. Je vais pour éteindre la lumière et il m'interrompt. Il ne veut pas rester dans le noir, très bien... Il se blottit dans la couverture et ferme les yeux. Je l'observe longuement le temps qu'il se rendorme. Son visage a été plus ou moins épargné par les coups, mais il est tiraillé par la fatigue, la peur et l'inquiétude... Je pose ma tête et ferme les yeux. Je suis aussi épuisée de cette fin de journée...

***

Je me réveille, le soleil dans les yeux. Je les frotte et regarde autour de moi. Ah oui, je suis sur un bateau. Je m'étire et remarque qu'il n'est plus à mes côtés. C'est pas vrai, c'est une pile électrique cet homme. Je me lève et sors de sa cabine. Je monte sur le pont et le voilier est de nouveau en mer. Je l'observe de loin. Il est appuyé à la barre, dos à moi et pour une fois, il ne porte pas ses chemises manches longues. Il porte un tee-shirt gris qui laisse entrevoir les muscles de son dos, mais surtout ses tatouages sur l'un de ses bras. Sa casquette est sur sa tête pour ne pas changer, d'ailleurs j'ai la sienne dans mon sac chez Luis... Oh Luis ! Il faut que je l'appelle ! Mais il est beaucoup trop tôt. Je lui envoie un message rapide et mets mon téléphone dans la poche arrière de mon jean.

Je monte les dernières marches et le rejoins. Lorsque je m'approche, il se retrouve vers moi. Je lui souris en croisant les bras.

— Bonjour. Tu as bien dormi ?

Il me fait à peu près avec sa main. Je passe ma main sur son bandage légèrement humide et un peu tâché. Il a dû prendre une douche pendant que je dormais.

— Il faut que je te les change.

Il acquiesce et me montre du doigt une petite table où le petit-déjeuner est dressé.

— Tu as mangé toi ?

Il acquiesce et m'invite à m'installer. Je m'assois et prend un verre de jus d'orange. Je le bois en regardant le paysage. J'adore naviguer, c'est tellement apaisant... Je me retourne lorsqu'il me tapote l'épaule. Il me tend mon carnet de dessin. C'est vrai, je l'avais oublié hier soir lorsque je suis allée le voir. Je le prends et souris.

— Merci.

Il s'assoit à mes côtés et me tend mon crayon. Je pose mon verre et le prend. Il me prend la main et la pose sur mon carnet et me mime de dessiner. Je ne comprends vraiment pas sa requête, mais je ne le contredis pas et poursuis mon dessin d'hier.

Je sens son regard sur moi et je tente de me concentrer au maximum. Je tourne la tête et il observe mon dessin. Il lève ensuite les yeux vers moi. Ses yeux noirs m'hypnotisent et me coupe la respiration. Je pose ma main sur sa joue inconsciemment, mais il ne sursaute pas.

— Comment tu vas ?

Il acquiesce.

— Tu es sûr ? Ça a dû être horrible ces derniers jours...

Il baisse les yeux. J'effectue une pression contre son visage pour qu'il me regarde.

— Je suis là, Mathyas. Je ne sais pas ce que tu caches ni pourquoi tu t'es retrouvé dans cette situation, mais je peux t'écouter. Tu dois m'expliquer pourquoi tu m'as mise dans cette situation, pourquoi je suis aussi en danger et quel est le danger... Je ne peux pas me protéger si je ne sais pas.

Il se pointe du doigt et je hausse un sourcil. Il retire ma main de son visage et prend mon crayon, tourne la page de mon dessin et écrit « moi je te protège ».

— Mathyas. Tu n'es pas là pour me protéger. Je ne devrais même pas être embarqué là-dedans et je ne sais pas comment c'est arrivé.

Il écrit.

— « Tout est de ma faute. Je suis désolé. »

— Je ne peux pas te contredire... Mais j'aurais pu refuser.

Il sourit finement et je fais de même. Il me redonne mon crayon pour que je poursuive. Il aime me regarder dessiner j'ai l'impression. Et j'aime ça.

***

Je nettoie son poignet avant de lui remettre un bandage. Il a la tête tournée et refuse de regarder. Je poursuis en faisant le second puis caresse son avant-bras inconsciemment une fois que j'ai terminé.

— C'est bon, tout est recouvert.

Il regarde ses mains puis me regarde et me fait le signe du merci. Je prends délicatement sa main dans la mienne, comme pour le rassurer.

— J'aime t'entendre parler... Tu as une voix si douce... Je n'ose imaginer le traumatisme que tu as vécu pour en être arrivé là. Tu as l'air d'être un gentil garçon sous tes airs de grosse brute. Et j'en suis encore plus persuadée maintenant. J'aimerais tellement pouvoir lire en toi sans que tu ne sois obligé de dire quoi que ce soit...

Il me regarde et j'ai l'impression qu'il veut parler, mais que cela ne veut pas sortir... Comment a-t-il pu en arriver à ce point ? J'attrape mon téléphone dans mon sac. Je le déverrouille et ouvre le dossier notes puis lui tends.

— Tiens, ça te fera moins mal que d'écrire à la main.

Il le prend et tape doucement sur l'écran pour écrire. Je ne sais même pas s'il a déjà utilisé un téléphone, mais j'ai vu un ordinateur portable sur son bateau. Il a l'air de vivre cloitré de tout. Il me montre l'écran.

— « Je suis dangereux pour toi »

— Pourquoi ? Je suis une grande fille, Mathyas. Tu n'as pas besoin de me protéger.

Il tape de nouveau sur mon téléphone. Je me rapproche de lui pour pouvoir lire en même temps.

— « Je tiens à toi. Je ne veux pas que l'on te fasse de mal »

Il relève sa tête vers moi et je me plonge dans son regard sombre. Il tient à moi !

— Tu ne me connais pas, je pourrais être dangereuse aussi.

Il baisse ses yeux pour écrire. S'il pouvait parler, je n'aurais pas besoin de quitter son regard. Je regarde l'écran.

— « Tu es un ange. Je peux le voir dans tes yeux »

Il pose son doigt sous mon menton et redresse ma tête vers lui. Avant que je n'ai eu le temps de m'en rendre compte, ses lèvres sont sur les miennes. Je les entrouvre pour l'accueillir et il vient caresser ma langue. Je pose mes mains de part et d'autre de son visage tout en prolongeant avec envie. Il me retourne complètement par son baiser, et cet homme que je ne connais pas, qui a un passé et un présent qui semble douteux m'attire réellement. Physiquement parlant, cette fois-ci. Cependant, il m'embrasse mais ça ne va pas plus loin. J'ai l'impression de n'être qu'un échappatoire ou un truc du genre vu que ça se termine toujours par lui en colère et moi en larmes...

Il rompt le baiser le premier, mais ne s'éloigne pas de moi. J'en profite pour dessiner le contour de son visage de mes doigts. Puis je murmure près de ses lèvres.

— Chaque ange a son démon, Mathyas...

Il fond son regard au mien à nouveau et je m'y perds totalement... Je vois très bien que ça s'arrête là, à nouveau. Je tourne la tête vers l'horizon en prenant mon verre de jus d'orange que je n'avais pas terminé. Chaque petit signe m'indique que ça n'ira pas plus loin entre nous. Et pourtant il a dû m'accorder énormément de confiance pour qu'il arrive à me parler...

Je sens son doigt sur ma nuque et me tourne vers lui. Il me montre mon téléphone.

— « Pourquoi tu es triste ? »

— Je ne suis pas triste.

Il hoche la tête comme pour me contredire. Je soupire en passant ma main dans mes cheveux.

— Mon père m'empêche de voir mon petit frère. Le petit que tu voyais avec moi. Et je ne sais pas pourquoi. Ça me rend triste, il me manque tellement. Je n'ai pas l'habitude...

Et maintenant j'ai envie de pleurer. Il pose sa main sur ma joue et me caresse de son pouce, sans me quitter du regard.

— Dis-moi quelque chose Mathyas... Enfin si tu peux...

Il me fixe et fronce son regard. Je pense d'abord que j'ai fais une bêtise en lui demandant puis en réalité je vois qu'il se concentre pour parler... Sa voix n'est qu'un murmure...

— Am...bre.

Je ne peux m'empêcher de sourire, sincèrement. Il a prononcé mon prénom. C'est magique.

Je glisse mes doigts sur son visage puis dans ses cheveux. Il ferme doucement les yeux en appuyant sa tête contre ma main. Je me penche vers lui, lentement pour ne pas lui faire peur, et dépose un baiser au coin de ses lèvres.

— Merci.

Je passe délicatement mes mains dans son cou avant de me lever pour débarrasser la table du petit-déjeuner.

Lorsque je reviens sur le pont supérieur du voilier, après avoir fais la vaisselle, Mathyas est assis à l'avant, dos à moi. En m'approchant, je remarque qu'il est recroquevillé sur lui-même et le regard perdu dans l'océan. Il a caché ses bras avec une chemise noire. Cet homme est une énigme tout entière que je commence tout doucement à déchiffrer, mais qui semble bien trop compliquée pour moi. Je m'approche, en faisant du bruit pour lui indiquer ma présence.

Près de lui, je m'appuie sur la rambarde et observe l'étendue qui s'offre à nous. Il n'a pas bougé, ses bras enlacent ses genoux et son regard semble toujours perdu. Je parle doucement.

— J'ai une casquette à toi dans mes affaires...

Il tourne sa tête vers moi, haussant un sourcil.

— Tu as dû la perdre quand tu es parti. Je l'ai retrouvé à la place de ton bateau. Et je l'ai gardé au cas où, pour te la rendre...

Il acquiesce avant de reposer son regard devant lui. Je pose délicatement ma main sur son dos, et je sens tout son corps se tendre et un frisson le parcourir. Je la retire aussi vite.

— Je suis désolée Mathyas. Je ne voulais pas...

Il prend ma main et l'enlace des siennes. Je préfèrerais le contact de sa peau plutôt que celui des bandages, mais je m'en contente parfaitement. Le contact dont il n'a pas la maîtrise ce n'est pas ce qu'il préfère, j'ai l'impression.

Je me rapproche lentement de lui, en appuyant d'abord mon épaule contre la sienne. Il me prend par surprise en passant son bras autour de ma taille et je me blottis machinalement contre lui, la tête contre son épaule. Il me serre délicatement dans ses bras. J'aimerais le serrer moi aussi, l'embrasser, passer ma main dans ses cheveux, dans son cou, sur son torse... Détailler tous ses tatouages et en comprendre la signification. J'aimerais pouvoir lire en lui comme il arrive à lire en moi. J'aimerais tant de choses... Mais pour l'instant, je profite de ce que la vie me donne à ce moment même...

Ça faisait bien longtemps que je ne m'étais pas sentie bien. Et pourtant je suis au beau milieu de nul part avec un parfait inconnu, à échapper à quelqu'un que j'ignore. Mais ça ne m'effraie pas. Ce qui me fait le plus peur ce sont ces sentiments que je n'ai jamais vraiment ressenti. Des sentiments qui grandissent pour cet inconnu, pour cet homme qui me cache des tas de choses. Mais c'est en toute connaissance de cause, que je tombe amoureuse de lui chaque fois qu'il prononce un nouveau mot à mon égard et chaque fois qu'il me transperce de son regard ébène...

Amoureuse ?

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