7/04/2016

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Un OS écrit sur un coup de tête après que j'ai appris l'attaque au camion-bélier à Stockholm. Ce sera probablement dans le journal demain.

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Ils étaient une heureuse famille.

Eva avait vingt-cinq ans, Edvin vingt-sept. Ils avaient un fils de deux ans, Finn, et Eva était enceinte de trois mois.

Edvin travaillait en tant que reporter pour un journal local, Eva venait de finir ses études et cherchait un travail dans l'enseignement. Avec le salaire d'Edvin, ils louaient un petit appartement à Stockholm ; ce n'était rien de grand, le voisin du dessus était insomniaque et celui d'en face jouait de la batterie le week-end, mais ils en étaient contents. Finn grandissait vite, il parlait de mieux en mieux. Ils envisageaient de déménager bientôt en périphérie de la capitale, dans une maison à eux, où ils pourraient avoir un chien - les animaux n'étaient pas autorisés dans leur immeuble.

Ainsi vivaient Edvin et Eva Lindgren. Ils avaient une famille, une vie qui se construisait peu à peu, un avenir qui se dessinait.


Mais ils vivaient dans une époque cruelle. Une époque imprévisible.


C'était passées 13h, le vendredi 7 avril 2016. Edvin venait de finir de manger, et Eva était partie depuis quelques minutes chercher des couches pour Finn - il avait sali la dernière le matin même et ne pouvait pas faire de sieste sans.

Mais le temps passait, et Eva ne revenait pas. Edvin regarda le petit Finn qui était en train de s'impatienter, tirait les oreilles de son doudou et menaçait de commencer à s'énerver. Le père de famille alla donc au téléphone fixe, composa le numéro d'Eva, laissa sonner.

Elle ne répondit pas.

Il réessaya.

Elle ne répondit pas.

Il prenait son propre portable pour lui envoyer un message, quand une notification Twitter retint son attention. Un ami qui avait posté quelque chose. Il le lut. Ne le crut pas. Mais ne le croyant pas, il se précipita quand même vers la télévision pour allumer les infos. Et il refusa aussi de croire ce que le présentateur annonçait.

Drottninggatan. La rue piétonne la plus importante du centre-ville. Celle que lui et Eva empruntaient pratiquement à chaque fois qu'ils allaient faire des courses, parce qu'elle était bordée de commerces divers. Celle dans laquelle un camion était venu se perdre, fonçant dans la foule.

Il n'y croyait pas, toujours pas - rien n'aurait pu l'y faire croire.

Mais alors, pourquoi est-ce qu'il sentait son cœur accélérer, son souffle se raccourcir ? Pourquoi est-ce que ses mains étaient si moites ? Pourquoi est-ce que sa vision se troublait, et ses oreilles bourdonnaient ? Pourquoi il ne comprenait pas ce que Finn, venu à lui, lui disait ?

Il ressortit son téléphone. Appela Eva.

Elle ne répondit pas.


Ce n'est que quelques heures plus tard qu'Edvin apprendra, comprendra, croira.

Il comprendra que le camion avait été dirigé sur la foule, et que dans cette foule, il y avait Eva, un paquet de couches dans les bras.

Il comprendra qu'elle fait partie des victimes - non, des morts - que les autorités sont encore en train de décompter.

Il ira voir Finn dans sa chambre, doucement, sur la pointe des pieds, pour ne pas le réveiller. Il verra l'enfant, sur le dos, le doudou dans les bras, la bouche entrouverte d'où coule un léger filet de bave, indiquant que le petit dort bien. Il verra ces yeux fermés, ces paupières sous lesquelles se jouent des rêves qu'il ne saura jamais. Il pensera à leurs rêves, à Eva et lui, les siens seuls désormais.

Il s'effondrera, à côté du lit de Finn. Le bébé grimacera mais ne se réveillera pas. Il dormira, paisiblement, alors qu'à côté de lui son père pleurera toutes les larmes qu'il a, recroquevillé sur lui-même, complètement brisé.

Et quand il se réveillera, il rira en voyant Papa allongé par terre - mais quand il verra les yeux bouffis, encore pleins de larmes de Papa, il sentira que quelque chose ne va pas. Papa le sortira du lit, changera sa couche, lui remettra son pantalon.

Le soir, Finn demandera, à table, où est Maman. Et il ne comprendra pas pourquoi Papa éclate en sanglots sans répondre.


Ils avaient été une heureuse famille : Edvin, Eva, Finn, et l'enfant encore à naître.

Ils étaient désormais une famille brisée. Eva avait disparu, son deuxième bébé n'avait même pas eu la chance de venir au monde. Edvin devrait élever seul Finn, l'éduquer, l'accompagner, lui apprendre à vivre.

Finn oublierait jusqu'au visage de sa mère ; quand on est grand, on perd les souvenirs d'avant ses trois ans. Mais voyant ses camarades, inéluctablement, il demanderait à Edvin pourquoi il n'avait pas de maman, contrairement aux autres. Et Edvin devrait répondre, et Edvin devrait comprendre, et Edvin essayerait mais ne pourrait pas remplacer la mère qu'Eva aurait dû être.

Finn grandira sans connaître la chaleur des bras d'une mère, son amour inconditionnel. Edvin aura été incapable de retrouver l'amour après l'attaque.

Ce n'est qu'une vie brisée de plus. Une vie comme il s'en détruit des centaines de nos temps.

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Pensons à eux, prions, joignons nos mains,

Formons un cercle, chérissons nos vies

Que le sort peut nous ôter à l'envi

Dans la guerre du fou contre l'humain.

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