Hadès était arrivé. Il souriait en dévoilant ses dents pointues. La foule fut aussitôt prise d'une panique indescriptible mais l'émotion était si forte qu'elle ne bougea pas. Aucun des dieux ne pouvait détacher ses yeux du corps blanc, presque fantomatique, mais beau d'une certaine manière, de Hadès. Celui-ci frappa trois fois dans ses mains, produisant trois sons assourdissants dont l'acier qui recouvrait ses mains était la cause. 

La foule se couvrit les oreilles, mais bientôt, les mains des dieux se placèrent sur leur bouche. Les sons de l'acier n'étaient qu'un préambule à l'horreur qui se mouvait devant eux. Du sol avaient émergé des silhouettes couleur perle recouvertes d'une substance grise qui semblait être du sang. Les flammes offrirent leur lumière à ces apparitions. Leurs contours se précisèrent; les divinités étouffèrent un cri : c'étaient les âmes de soldats morts à la guerre. 

Elle s'étaient lancées dans une sorte de chorégraphie qui exhibait leurs plaies sanglantes. La peur règnait dans la clairière. Difficile de croire que quelques minutes plus tôt, le dieu du soleil y répandait le bonheur. Hadès se délectait de la terreur qu'il semait parmi ses confrères. Il se décida à les surprendre une dernière fois en claquant ses mains si fort qu'on aurait cru que le rocher de Sisyphe s'était écrasé tout près. 

Cette fois-ci, des cris d'épouvante lacérèrent les soupirs terrifiés des pauvres divinités. Puis, aussi rapide qu'il était apparu, Hadès s'évapora.