Nouvelle réunion

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*Siphano*

10h52. Je venais de vérifier l'heure sur mon portable, pour la vingtième fois en une minute. Moi, stressé ? Plutôt angoissé à mort. Et le silence absolu de la place déserte - d'où même le corps de Poupunou avait disparu Dieu sait où - n'arrangeait pas mon état.

Incapable de rester sans rien faire, je vérifiai mes messages - je n'en avais reçu aucun en l'espace de quelques secondes, "étonnamment" - et relus les conversations précédentes. Rosgrim, Arm', Xef avaient confirmé qu'ils venaient. Des autres, absolument aucune réponse, aucun signe de vie. Enfin, presque...

Je descendis à la conversation d'avec Newtiteuf, quelques minutes avant que je donne le rendez-vous aux autres.

"Tu as l'intention de réorganiser une réunion, je suppose ?

- Oui.

- Dis alors aux autres que je ne serai pas là.

- Pourquoi ? Tu es tout aussi concerné que nous, tu as le droit de venir !

- Que dalle. Si je me ramène, la moitié des autres boycottera le meeting. Et c'est important de se regrouper. Donc, je ne viens pas. Un NT de perdu, dix gens à se ramener."

Il avait raison, mais quelque part, je me sentais mal pour lui. Il était vraiment tout seul...

Un baiser furtif dans ma nuque m'arracha à l'état de quasi-transe dans lequel je me trouvais. Je souris, me retournai, embrassai Clémence au bord des lèvres. Heureusement qu'elle était là... et j'espérais qu'elle le serait encore pendant longtemps.

Ses yeux plongés dans les miens, elle sourit, lisant probablement mon désarroi. Je m'efforçai de lui rendre mon sourire le plus confiant et rassurant. Sans tellement réussir.

- Julien, ça ira. Je suis sûre que ça ira.

- Allons bon, c'est toi qui me le dis, maintenant ?

- On alterne ! pouffa-t-elle.

Bon Dieu, qu'est-ce que j'aime cette fille.

Son regard fut soudain attiré par quelque chose, et je tournai ma tête dans la même direction... pour voir Pepper, le visage fatigué, les yeux bouffis d'avoir pleuré, et sa coiffure, d'ordinaire soignée, dans un désordre incroyable. Mais de fait, elle était debout, elle marchait, alors qu'hier, rien ne pouvait la détacher du corps de son amoureux. J'esquissai un petit sourire joyeux à cette pensée ; cette fille était bien plus courageuse qu'elle ne l'aurait laissé croire.

Je laissai à Blondie l'honneur de courir vers sa soeur, la prendre dans ses bras et la serrer à lui en broyer les côtes, comme si elle doutait de la réalité des faits ; puis je m'assis par terre, attendant que les autres arrivent.

Ils furent plutôt prompts, comparé à hier. Arm' débarqua en premier, accompagné de Xef ; puis vint Kim, qui ne jeta même pas un regard à son petit ami. Encore fâchée ? Franchement, j'admirais mon ami, pour sa capacité à supporter un tel caractère. Par la suite, je fus surpris de voir que Rosgrim était arrivé sans Brioche, encore plus surpris de voir ce dernier se pointer quelques minutes plus tard, venu d'une autre direction, tentant d'éviter le regard de son colocataire au possible. Ma main à couper qu'il s'était passé quelque chose entre ces deux-là.

Les minutes défilèrent, mais aucune trace de Frigiel et Dortos. Je tentai d'envoyer un message à l'un, puis à l'autre, sans réponse ; 11h30 passées, je me résignai à commencer sans eux. Me raclant la gorge pour attirer l'attention des personnes en présence, je me dressai devant l'obélisque noir, avant de lancer :

- Bon... on dirait que plus personne ne va arriver, on devrait commencer cette "réunion".

Quelques têtes se hochèrent, m'encourageant à poursuivre :

- Si on est là, c'est pour débattre sur une question simple : comment sortir de ce merd... de ce jeu ? Des idées ?

La voix de Kim s'éleva aussitôt, teintée d'une désagréable note sarcastique.

- Je suggère un truc tout bête... par la route, peut-être ?

- La route ? répétai-je bêtement.

- Bah oui, la route. Regardez, fit-elle en désignant du bras l'une des avenues, la ville s'arrête aux bords du cercle qui la délimite... mais les routes, elles, elles continuent dans ce désert bizarre. Ce ne serait pas aussi bête que ça ?

- J'en doute, contredit Pepper. Ça paraît vraiment trop simple !

En d'autres circonstances, j'aurais été ravi qu'elle ait retrouvé une parole articulée et cohérente ; mais quelque chose d'autre m'avait frappé. Brioche avait eu un mouvement de recul léger, et l'expression de son visage, au départ impassible, se décomposait peu à peu. Je ne voulais pas vraiment le stresser plus que ça, mais là, je n'avais pas le choix. Je m'adressai directement à lui, coupant les deux filles qui commençaient à s'énerver l'une contre l'autre :

- Brioche, tu en sais quelque chose ?

Il sursauta. Quelque chose clochait définitivement chez lui. Il semblait dans un état de panique permanente, sans raison apparente... état que sa voix, chevrotante et un brin trop aiguë, me confirma.

- Je... heu... 'fin, oui, je...

Je soupirai intérieurement, faisant mon possible pour ne pas montrer mon impatience et l'angoisser encore plus... mais Kim, visiblement, n'eut pas tant de scrupules.

- Quoi, qu'est-ce que tu attends ? Si t'as un truc à dire, dis-le ! On n'a pas le temps !

À l'instant, il paraissait vraiment sur le point de se pisser dessus. Je ne sais comment, il reprit cependant son calme, sa respiration hachée, et parvint à articuler :

- On ne peut pas partir par les routes.

- Qu'est-ce que t'en sais ? l'attaqua Kim. T'as essayé ?

- Oui...

Immédiatement, il gagna l'attention de tout l'auditoire.

Pitié, Bri', pensai-je, ne fais pas de crise cardiaque maintenant... pitié...

- J'ai essayé... répéta-t-il, mal à l'aise. J'y suis allé à pied... mais au final, la route ramenait au point de départ.

- T'es sûr de ne pas avoir fait demi-tour ? glissa Xef.

- Mais oui ! s'énerva mon ami. Enfin... je crois. La tempête de sable rendait la visibilité misérable.

Le silence tomba sur l'assemblée. Pendant de longues minutes, nous ne pûmes que nous dévisager les uns les autres, avec probablement tous la même pensée en tête. Est-ce qu'on était vraiment coincés ici, sans aucun moyen de sortir ?

- Peut-être... osa Blondie, timidement. Peut-être que c'était juste cette route-ci ? Peut-être que les autres mènent ailleurs ? Ou juste une ? C'est possible qu'ils aient fait ça, non ? Une seule route, les autres sont des leurres...

- Pas bête, fit Pepper. Ça vaut la peine d'essayer.

J'adressai un grand sourire à ma chérie, fier d'elle, auquel elle répondit par une petite moue amusée. Je m'éclaircis la gorge et déclarai, étudiant la mini-carte :

- Il y a en tout 21 voies qui quittent la ville, dont 6 grandes routes, 8 moins grandes et 7 ruelles. On peut se diviser la ville en huit quartiers, et tester chacun son quartier ? Puis on se retrouve ce soir pour partager nos conc...

Un son vibrant me coupa en plein mot. La cloche de l'église... elle sonnait.

Mécaniquement, je sortis mon portable de ma poche, vérifiai l'heure. Midi. J'avais oublié cette échéance...

Certains étaient pétrifiés, d'autres paniqués, tournant frénétiquement la tête pour regarder chacun de nous. Je vis la bouche de Brioche s'ouvrir en grand, probablement pour pousser un cri, inaudible à cause du chant mortel de la cloche. De petites mains agrippèrent mon bras, et je baissai les yeux pour croiser ceux, terrifiés et larmoyants, de Blondie. Je n'eus que le temps de poser une main tremblante sur sa tête.

Au dernier coup de midi, ses doigts se desserrèrent, et ses jambes parurent la lâcher.

Je tombai immédiatement à genoux, la rattrapant avant qu'elle touche le sol. Dans ses yeux écarquillés dansait la même terreur que dans les miens, et je me préparai mentalement au pire.

Qui, étonnamment, ne vint pas.

Le temps d'un souffle, Clémence se figea, puis elle sursauta et s'écrasa contre moi, enfouissant sa tête dans mon cou, ses bras serrés autour de ma poitrine. Vivants... nous étions tous deux vivants. Ce qui n'était pas le cas de tout le monde.

Le cri suivant, bien audible cette fois, fut celui de Rosgrim. Brioche était tombé, lui aussi, mais ne se relevait pas, le corps entier secoué de spasmes, forts à lui en briser les os. Les uns se détournèrent, les autres contemplèrent le spectacle macabre ; posant la main à l'arrière de la tête de Blondie, je lui fis comprendre qu'elle ne devait pas lever les yeux.

Rosgrim, quant à lui, eut un comportement des plus inattendus. Au lieu de tomber à côté de son ami, de lui prendre la main, de lui parler, ou faire ce que font les amis en général, il resta debout, raide comme un piquet, avant de reculer. Un pas. Deux pas. Trois pas. Il reculait. Il... fuyait ?

Quand Brioche cessa de bouger, Rosgrim parut hésiter, mais eut tôt fait de prendre sa décision.

Il tourna les talons, et s'enfuit.

**********

RIP Brioche.
Avouez, vous aviez cru que ce serait Blondie.

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