Chapitre 43 - Léo

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Il est deux heures du matin passée, j'ai envie d'aller me poser un peu dans la chambre de garde. Je sais que je ne dormirais pas. Je n'ai même pas sommeil à vrai dire. Je viens de voir le dernier patient de la salle d'attente, alors je vais avoir un peu de répit. Je signe un papier que l'infirmière me tend. Une de ses collègues nous rejoint.

— Docteur Martinez. Il y a une jeune femme qui désire vous voir. Je crois que c'est votre femme.

— Ah bon ? Fais la entrer.

Qu'est-ce qu'elle vient faire ici ? Qu'est-ce qui se passe ? Quelques secondes après, elle entre dans le couloir des urgences. Son visage est tiraillé par l'inquiétude et elle semble avoir pleuré. Bordel, qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Elle s'arrête devant moi et je congédie du regard toutes les personnes autour de moi.

— Kaithlyn qu'est-ce que tu fais ici ? Ça ne va pas ?

Elle secoue la tête en baissant les yeux.

— Non...

Je la prends par les épaules afin de l'emmener dans un box de consultations et referme la porte derrière nous. Elle a les larmes aux yeux et je déteste ça.

— Kaithlyn tu me fais peur... Qu'est-ce qu'il t'arrive ?

— Ce n'est pas moi... C'est Thomas...

— Thomas ? Tu m'angoisses là...

Putain qu'est-ce qu'il a fait ? Elle renifle et passe sa main sur ses yeux.

— Il a fait un arrêt à la maison... On a appelé le SAMU et il vient d'arriver ici... Il est réanimation.

— Quoi ?

J'ai bien entendu ce qu'elle m'a dit, mais je ne veux pas comprendre ses mots. Ce n'est pas possible. Il a vingt-cinq ans. Il ne devrait pas faire un arrêt cardio-respiratoire.

— Alayna m'a appelé... Je l'ai massé jusqu'à l'arrivée du SAMU puis ils ont réussi à faire repartir son cœur et l'ont intubé sur place... Il doit être arrivé.

— C'est impossible...

Je me laisse tomber sur la chaise en passant mes mains sur mon visage puis ma tête. Je ne peux pas le croire. Je n'entends pas les mots de Kaithlyn et ressens à peine sa caresse sur mes cheveux.

Je me lève subitement et sors du box. Je préviens mon interne que je m'absente et je me dirige vers le service de réanimation. Je sursaute lorsque je sens quelqu'un agripper les bords de ma blouse. C'est Alayna. Elle me regarde les larmes aux yeux. Elle a dû avoir très peur. Je devrais la rassurer...

— Léo... Je t'en supplie, dis-moi qu'il va s'en sortir...

Je la prends par les épaules et me reprends. J'ai toujours fait ça, rassurer tout le monde. Même quand je ne le suis pas.

— Calme-toi Alayna... Je t'ai déjà dit que Thomas était costaud et qu'il ne nous laisserait pas de si tôt.

Elle acquiesce avant de me lâcher. Je regarde Kaithlyn et lui dit que je reviens puis je passe les portes du service de réanimation.

Je suis accueilli par une infirmière. Je lui demande où est mon frère et elle m'y accompagne. Le réanimateur est avec lui. Et ça me brise en mille morceaux. Il est allongé sur le lit, endormi et il ne respire pas tout seul. Une infirmière lui fait une prise de sang et le réanimateur l'examine. Il se tourne vers moi.

— Bonsoir.

— Je suis son frère, le docteur Martinez. Comment va-t-il ?

— Eh bien nous l'avons sédaté afin qu'il soit plus confortable. Nous allons lui faire passer des examens complémentaires.

— Il a eu sa cure de chimiothérapie ce matin. C'est un nouveau traitement.

— C'est déjà une bonne indication. Nous vous tiendrons au courant dès que nous en saurons plus. Où travaillez-vous ?

— Aux urgences pédiatriques. N'hésitez pas.

Il acquiesce avant de sortir de la pièce et de me laisser seul avec Thomas. Le voir ainsi me fait mal au cœur. Je crois ne l'avoir jamais vu aussi mal en point. Il n'en est jamais arrivé là.

Je m'approche de lui et prend sa main dans la mienne que je serre doucement. Je vais aller chercher Alayna, je pense qu'elle souhaiterait le voir, même ainsi.

— Thomas ne fais pas le con je t'en supplie. Tout va bien ou presque maintenant... Ne nous fait pas ça.

Je renifle et passe ma main sur sa joue avant de reposer sa main et de sortir du service après avoir demandé l'autorisation pour Alayna. Elle me saute immédiatement dessus dès que je passe les portes.

— Alors Léo ? Comment va-t-il ?

— Il est sédaté, sous assistance respiratoire et il a eu un tas d'examens.

— Sédaté ?

— Endormi. C'est pour le confort de l'intubation.

— Et pourquoi il a fait ça ?

— Je pense que c'est peut-être une mauvaise réaction à sa chimiothérapie. Dans la plupart des cas, le choc se produit pendant la chimiothérapie ou tout de suite après...

— Son traitement a failli le tuer ? Mais il est con le médecin !

— Alayna ce n'est pas la faute du médecin. Ça arrive parfois dans ce genre de traitement.

— Je peux le voir ?

— Viens avec moi.

Je pose ma main dans son dos pour la conduire à l'intérieur. Je lui laisse un peu d'intimité avec lui après lui avoir tout expliqué en détail et je rejoins Kaithlyn.

Je passe ma main sur ma tête avant d'arranger ma blouse en soupirant. Elle a l'air épuisée lorsqu'elle se lève pour me faire face.

— Je vais retourner travailler Kaithlyn...

— Tu es sûr ? Tu n'es pas en condition de travailler...

— Si, ne t'en fais pas. Je sais très bien mettre mes émotions de côté.

Elle baisse les yeux. C'est ce que je fais de mieux. Je l'ai toujours fait et je l'ai même fait avec elle. Je le fais encore aujourd'hui, mais beaucoup moins. J'extériorise davantage depuis que je suis avec elle. Mais je sais très bien faire semblant, là-dessus il n'y a aucun souci, surtout au travail.

Elle se hisse sur la pointe des pieds pour me déposer un baiser sur les lèvres puis elle arrange les bords de ma blouse.

— Bon courage pour la fin de ta nuit et demain...

— Merci. Vas te reposer allez.

J'embrasse sa tête rapidement avant de retourner dans mon service. Au passage, je donne une petite tape dans le dos de Connor lui rappelant de bien veiller sur elle. La nuit va être horriblement longue.

***

J'ai été totalement à côté de la plaque toute la nuit. J'ai dit à Kaithlyn que je saurais gérer, mais à vrai dire pas du tout... Je ressentais le besoin d'être près d'elle constamment et j'ai pensé à plusieurs reprises à rentrer à la maison, mais je dois bien cette garde à Franck. Suite à mon message tardif, il s'est rapidement déplacé jusqu'à l'hôpital pour voir Thomas.

Il n'y a que Kaithlyn qui puisse contrer mon mauvais caractère, il n'y a qu'avec elle que je peux m'exprimer correctement. Elle est mon talisman, ma pierre sacrée. Et j'ai été froid avec elle hier soir... Comme d'habitude, j'agis sans réfléchir. Je suis sûr que je l'ai blessé sans le vouloir comme à chaque fois que je suis blessé. Je ne réfléchis jamais sur le moment et je sais qu'en rentrant elle va m'en vouloir. M'en vouloir car je ne l'ai même pas remercié ni même prise dans mes bras et par-dessus tout car je ne l'ai pas laissé être près de moi, encore une fois.

Je suis certain de dormir debout pendant le staff car je n'écoute que la moitié et lorsque l'on m'appelle je ne sais même plus de quoi on parle. Ça se termine enfin et je vais rapidement poser ma blouse avant de descendre en réanimation. Je rentre avec la carte que Franck m'a prêtée et je me dirige rapidement vers les réanimateurs présents. Celui qui s'occupe de Thomas me résume brièvement la situation et la seule chose que je retiens c'est qu'il est réveillé et qu'ils l'ont extubé ce matin.

Je me rends dans son box et je souris en le voyant en train de prendre un petit-déjeuner et un poids se retire de mes épaules.

— Tu m'as fait peur espèce de petit con, il rit doucement.

— Je suis là pour t'en faire voir de toutes les couleurs encore longtemps, grand-frère !

Je souris et m'approche de lui. Je déteste le voir dans un lit d'hôpital. J'ai l'impression de le revoir il y a treize ans, sans ses cheveux et si pâle. Il me frappe le torse de ses maigres forces.

— Tu as une sale tête Léo, vas te coucher.

— Je sors de garde Thomas et tu as mouvementé ma nuit.

— Alayna a dû avoir une de ces peurs...

— Un peu oui. Et Kaithlyn aussi.

— Alayna va venir me voir ?

— Je pense que oui. Je n'ai pas eu de nouvelles pour l'instant. Et j'ai prévenu Julia.

— Non Léo ! Elle va s'inquiéter pour rien !

— Pour rien ? Tu rigoles là. Elle me tuerait si je ne lui avais pas dit. Je n'ai pas encore eu de réponse, mais je pense qu'elle va se pointer.

Il soupire. Notre sœur est très mélodramatique. Elle a tendance à trop en faire pour rien comme dit Thomas, mais pour le coup ce n'est pas rien.

— Je sors quand ?

— Je n'en sais rien. Rapidement je l'espère. Tu as besoin de quelques jours de surveillance au moins. Tu as fait un arrêt.

— J'ai eu peur quand même. J'ai senti que ça n'allait pas, je n'ai même pas eu le temps de lui dire...

— Ça va aller Thomas... Il y a eu plus de peur que de mal heureusement.

Il acquiesce et je m'installe près de lui encore un peu avant de rentrer à la maison. Et retrouver Kaithlyn.

J'ai envie de me blottir dans ses bras et de ne plus bouger. Je ressens ce besoin qu'elle me rassure, qu'elle me caresse les cheveux pour m'apaiser... J'ai rarement ressenti ce genre de choses, mais depuis dix mois, je ressens une chose différente chaque jour auprès d'elle. Dix mois... Samedi ça fera dix mois que j'ai croisé son regard dans le hall de l'hôpital et j'étais loin de me douter qu'elle serait ma vie, ma respiration et mon âme. Sans elle, je ne suis plus capable de rien. Et je n'ai envie de rien sans elle. Elle est mon tout.

Je sursaute lorsque Thomas me pousse et il se met à rire.

— Tu dors debout Léo, rentres te coucher, moi ça va aller, j'acquiesce.

— Je reviens tout à l'heure.

— Ne t'en fais pas pour moi, vas profiter de Kaithy. Tu ne l'as pas assez vu cette semaine et ça se ressent sur ton humeur.

— Mon humeur est comme ça par ta faute, Thomas.

— Tu te trompes. Tu gères mieux tes émotions. Alors vas la retrouver, bouges ton cul.

Je souris en secouant la tête et l'embrasse. Il a tout à fait raison, il me connaît trop bien.

Et puis sans que je le prémédite, des mots, que je ne me souviens plus avoir dit à mon frère, me sortent de la bouche.

— Je t'aime petit frère.

Je vois dans son regard qu'il est presque choqué de m'entendre dire ça et moi-même je n'en reviens pas, mais d'imaginer ma vie sans lui l'espace d'une seconde m'a fait prendre conscience qu'il fallait que je change également avec lui.

— Je t'aime aussi Léo.

Il sourit et je lui dis au revoir avant de sortir de la chambre. J'ai encore un peu de mal avec ces mots-là en réalité... Sauf quand ils viennent de Kaithlyn, et encore c'est parfois difficile par moment.

Je retrouve Derek qui me conduit à la maison sans me poser de questions. Il est presque midi, j'ai beaucoup traîné à l'hôpital. Je salue Connor et Müller qui sont devant la porte et je monte directement. Alayna m'interrompt en haut de l'escalier.

— Léo ! Comment va Thomas ?

— Il est réveillé depuis ce matin, il va plutôt bien... Je t'emmènerais le voir tout à l'heure si tu veux. Je dois dormir un peu.

— C'est vrai il est réveillé ? Et son cœur ?

— Oui. Il passe des examens ce matin, on aura les résultats cet après-midi.

— D'accord... À tout à l'heure.

J'acquiesce et je vais jusqu'à notre chambre. Je sais qu'elle est impatiente, mais je suis épuisé, ça fait bien longtemps que je n'avais pas ressenti une telle fatigue. Je n'ai pas dormi la nuit où j'étais en déplacement à Paris loin de Kaithlyn, le mardi soir j'ai dormi à peine trois heures et hier soir j'étais de garde. Alors au bout de plusieurs jours, je suis sur les rotules bien évidemment.

Kaithlyn n'est pas dans la chambre. Je regarde autour de moi et j'aperçois la baie vitrée ouverte et je m'y dirige. Elle est assise sur un des fauteuils avec un gros pull et une écharpe. Il fait plutôt bon pour un mois de décembre, il doit bien faire une quinzaine de degrés. Elle écrit je ne sais quoi sur un carnet et congédie la personne avec qui elle parlait au téléphone. Je pousse doucement la baie pour sortir sur la terrasse et elle se tourne vers moi avant de se lever.

— Salut bébé.

— Léo. Tu as des nouvelles de Thomas ?

— Oui. Ça va mieux que je ne l'aurais cru. Il est réveillé, extubé, juste avec un peu d'oxygène. En forme comme d'habitude.

Elle soupire de soulagement.

— Oh je suis contente. Toi tu as l'air épuisé...

— Un peu.

Je passe ma main sur mon visage et sur ma nuque. Elle ne s'approche pas de moi ou bien je me fais des films.

Je m'avance d'un pas vers elle. Et elle s'avance également, sa main se pose sur ma joue et elle me brûle la peau jusqu'au plus profond de mon âme. Elle passe sa deuxième main sur mon bras.

— Vas prendre une douche, je vais te préparer un truc à grignoter.

J'acquiesce et je la rattrape avant qu'elle ne me lâche et je viens l'embrasser. Le baiser est trop bref et j'ai l'impression qu'elle m'en veut... Je suis parti comme un connard cette nuit. Elle me lâche après avoir caressé mon cou puis sort de la chambre. Je vais prendre une bonne douche froide pour me remettre d'aplomb et faire disparaître mon humeur morose.

Lorsque je reviens dans la chambre, Kaithlyn dépose un plateau sur la table près du fauteuil et je n'ai pas le moindre appétit, mais pour ne pas la décevoir... Je prends la tasse de café en la remerciant et je la pose lorsque j'ai terminé.

— Je vais te laisser te reposer Léo, tu en as besoin.

— Non Kaithlyn s'il te plaît. Viens te coucher avec moi...

Elle me regarde en passant sa langue entre ses lèvres et elle s'allonge sur le lit. Je m'allonge aussi.

— Prends-moi dans tes bras...

Elle me regarde sceptique, je ne fais pas souvent ce genre de déclaration puis elle m'ouvre les bras et je m'y blottis.

— Merci Kaithlyn... Merci d'avoir été là.

— Ne me remercie pas voyons.

Elle passe ses doigts dans mes cheveux et je soupire d'aise relâchant la pression de cette nuit d'enfer. J'enlace sa taille et me serre contre elle. Je me sens mieux, et pour une fois sans l'aide du sexe, juste elle qui me serre dans ses bras. Je ne suis plus seul avec ma tristesse, et j'ai encore beaucoup de mal à le comprendre.

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