[Eldarya] Karma Negatif

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Cet OS date de quelques années maintenant et relate une mission de mon OC : Fawkes.

Taille de l'OS : Nouvelle

Trigger warning : Violence, sang, scène de sexe implicite, nudité.


********************************



Ce jour-là, au lieu de se rendre sur Terre comme il lui est permis, Fawkes s'abstient. Il a déjà passé trois journées à déambuler dans cette fourmilière humaine appelée Nouille Orque et il préfère s'épargner le reste de l'exploration. De plus, le renard n'en oublie pas son travail premier : chasseur de primes. Réconcilié avec sa collègue de chambrée, il se sent plus léger et une nouvelle motivation l'accompagne depuis son réveil.

Comme la plupart des Gardiens se rendent aux quartiers des Étincelants pour accéder au portail de téléportation, Fawkes bifurque vers le Labyrinthe Brumeux. Il cherche une mission. Mais pas une de celles qu'on peut trouver sur le panneau d'affichage du grand Hall. Il veut une mission qui rapporte un gros paquet d'or.

Fawkes descend donc au tableau réservé aux gardiens qui disposent d'une autorisation spéciale et il en sélectionne une rapportant pas moins de 9 500 pièces d'or. Une tête à faire tomber. Bien. Très bien.

Une note est apportée au mandat d'assassinat concernant le niveau de danger. La cible n'est pas du genre à se laisser faire et peut opposer quelques résistances au missionnaire. Fawkes en ricane. Evidemment. Qui se laisserait tuer sans rechigner de toute façon ? Cette note est des plus inutiles !

Après avoir prévenu sa camarade de son départ afin qu'elle ne s'inquiète pas, Fawkes se met en route. Il part du quartier général de la Garde d'Eel en début d'après-midi. La destination se situe à un peu plus de deux jours de marche. Si on s'accorde sur une journée d'observation et une pour remplir le contrat, le renard sera de retour dans moins d'une semaine, avec 9 500 pièces qui l'attendront ! Parfait. Superbe ! Il lui faudra encore beaucoup de missions rapides et faciles comme ça pour remplir son objectif, mais c'est une bonne rémunération.

Fawkes s'accorde le strict minimum de repos pour être sûr d'être en forme pour sa mission, mais il ne ralentit pas sa marche. Il est habitué aux longues distances et préfère ne pas perdre de temps sur les trajets. C'est donc deux jours après son départ qu'il arrive effectivement dans la ville de sa mission : Lehonas. L'après-midi est à peine commencée quand Fawkes passe le panneau d'accueil de la petite ville alors il décide de mettre cette première journée à contribution rapidement. S'il peut passer à l'action dès le lendemain, ce sera toujours ça de gagné.

Les bureaux de l'administration de la ville sont son premier arrêt. Le mercenaire sait par où commencer dans ses recherches. Il dispose d'un nom mais rien de plus. A lui de compléter les trous pour en faire un de taille dans la tête de la cible. Avec toute la discrétion dont il sait faire preuve, Fawkes s'infiltre dans les bureaux et il subtilise sans grande peine les documents du cadastre. La brownie qui s'occupe de l'accueil est facilement distraite et Fawkes repart aussi vite qu'il est arrivé avec l'information recherchée. Sa cible, un dénommé Trevils, âgé de quarante-six ans, a élu domicile aux abords de Lehonas dans une grande demeure ancienne dont l'accès semble bien contrôlé au vu du large périmètre délimité du terrain.

Il ne faut guère de temps à Fawkes pour trouver l'imposante bâtisse. Elle est certes dissimulée entre les arbres, mais elle n'en est pas moins visible quand on sait quoi chercher. Tapis dans les ombres de la végétation, Fawkes épie. Il observe, scrute et apprend. Il repère la cible, encre son visage sur sa rétine et retient ses habitudes. Un homme grand. Plus grand que lui. Bien plus carré et imposant aussi, exhibant sa masse musculaire comme une fierté. Ses cheveux courts, noirs et raides lui donnent un aspect rigide désagréable. Il a une petite moustache qui semble danser quand l'homme prend la parole. Et ses sourcils épais sont constamment froncés.

Le goupil appréhende les gardes, nombreux, qui parcourent la propriété. Ils quadrillent la zone et sont armés, la plupart munis de sabres à la ceinture. D'autres n'ont l'air d'avoir que des poignards. Du corps à corps et aucune arme de lancer à première vue. Ce sera du gâteau pour Fawkes qui pourra donc dégommer Trevils à distance sans risquer de représailles.

Le renard jubile, pourtant son visage reste impassible. Il ne doit pas crier victoire trop vite. Sa concentration reste optimale, maître de lui-même. Alors que le soleil décline sérieusement vers l'horizon, la cible sort de chez elle. Escorté par quelques laquais, Trevils se rend en ville en charrette. Fawkes le suit depuis l'abri des bois. Ce n'est pas bien difficile parce qu'il ne fait pas galoper sa bête de somme. Les sens du renard sont aux aguets, il surveille, il guette. La charrette s'immobilise à l'entrée du village et le groupe d'hommes continue à pied, forçant leur traqueur à garder ses distances pour ne pas se faire prendre. Les rues sont encore pleines de monde mais il ne veut pas que son visage devienne familier pour Trevils, au risque d'éveiller les soupçons.

L'homme entre dans un bâtiment dans lequel un brouhaha trahit une certaine animation. Fawkes lève les yeux vers l'enseigne au-dessus de la porte. La "Belle Chataîgne". Il hausse un sourcil. Une taverne, soit. Le lieu idéal pour espionner en toute impunité. Fawkes attend un peu avant d'entrer à son tour. Il hoche du menton quand le tavernier le dévisage et part s'installer à une table qui, comme à son habitude, se situe dans un coin de la pièce. Le renard s'assied dos au mur, dans l'angle, et fait mine d'observer la foule hétéroclite. En vérité, son attention est focalisée sur Trevils, qu'il surveille à la périphérie de son champ de vision.

Le type est à une extrémité du bar et passe commande d'une façon bourrue qui n'a pas l'air de beaucoup plaire au tenancier. Quand on lui demande ce qu'il veut, Fawkes réclame une simple chopine dans laquelle il trempera à peine les lèvres. Il y a quelque chose d'étrange dans ce qui se passe sous ses yeux. Trevils qui vient s'installer à la taverne comme s'il en était un habitué et pourtant, la réaction de crainte du tavernier, les regards en coin désapprobateur des clients, les messes basses sont autant criantes pour Fawkes que si quelqu'un avait hurlé "Tu n'as rien à faire ici, Trevils !"

Si cela l'intéressait, Fawkes se demanderait ce qui justifie un changement si drastique dans les habitudes de sa cible, parce qu'il est clair qu'il ne vient pas ici tous les jeudis soirs. Mais ça ne l'intéresse pas particulièrement. Ce qu'il guette, c'est un élément qui puisse faire levier et qui sera indéniablement une faille pour Trevils, ce qui provoquera sa chute.


- Et voila pour toi, voyageur, brassée dans la région ! vante la serveuse en posant lourdement une chope à la mousse jaunâtre sur la table.


Fawkes hoche le menton pour la remercier et la congédier. Il n'a pas besoin de faire la discussion, au contraire.

Il faut un long moment pendant lequel Trevils semble s'impatienter pour qu'un homme le rejoigne au bar. L'inconnu n'accorde aucun regard aux manants de la taverne quand il entre et se dirige directement vers celui qui ne vivra plus très longtemps. C'est tout juste s'il relève la tête quand on lui apporte de quoi se désaltérer et Fawkes peut entendre la serveuse ronchonner sur la politesse et la générosité des bourges quand elle retourne à ses affaires sans même avoir reçu un "merci".

La chope levée contre ses lèvres, Fawkes observe les attitudes des deux hommes, sous ses cils. L'inconnu n'est clairement pas du coin. Richement vêtu, la peau basanée par le soleil, il a probablement traversé plusieurs landes pour arriver jusqu'ici. Fawkes le soupçonne de venir des terres de l'Ouest, là où la chaleur est bien plus aride qu'à Eel. Quoiqu'il en soit, Trevils doit fournir un service particulier pour attirer une clientèle si éloignée. Le renard grimace. La bière est tiède. De plus, il doute que ce soit du houblon qu'ils cultivent dans le coin pour produire une boisson au goût aussi rance. Si les deux hommes font durer les choses, Fawkes aura bien du mal à donner le change en trempant seulement ses lèvres dans le breuvage de piètre qualité. Mais il n'en perd pas son objectif de vue et reste imperturbable.

Au vu de leurs attitudes, les deux hommes se rencontrent pour la première fois. L'inconnu parle par gestes est assez expressif. Fawkes devine qu'il explique la nature de sa commande, pourtant il ne parvient pas à l'entendre depuis l'endroit où il se situe. Quoi qu'il en soit, Trevils en a l'air satisfait puisqu'un sourire illumine son visage droit. Fawkes fronce les sourcils quand il balaye la salle du regard. Les laquais ne sont pas là. Trevils est seul avec son client si on ne considère pas la foule d'inconnus. Il a choisi cet endroit pour garder leur échange secret, c'est l'évidence même. Qui prendrait attention à la conversation de deux hommes dans une pièce déjà trop bruyante ? Le malfrat ne fait pas confiance en ses propres hommes... Mais il ne se fie pas non plus à son interlocuteur, sinon il n'aurait pas besoin de se protéger sous le couvert des locaux. Le client ne peut donc pas montrer son désaccord -si désaccord il y a- avec véhémence au risque d'attirer l'attention. C'est un moyen de pression comme un autre qu'utilise Trevils, même si Fawkes se dit que ce n'est pas le meilleur.


- Bah alors voyageur ?! s'exclame soudainement la serveuse qui se plante en plein milieu du champ de vision du renard.


Fawkes l'a vu arriver mais n'y a pas accordé d'importance, pensant que l'ignorer suffirait à la dissuader de venir le chercher.


- Vous n'avez pas bu ? La bière vous plait pas ? Vous devez avoir faim, non ?

- Pas tant que ça... ment Fawkes, non sans un sourire cordial.

- Vous savez, nous avons toutes sortes de mets ici pour vous rassasier.


La donzelle insiste, Fawkes retient un soupir et avant qu'il n'ait le temps d'ouvrir à nouveau la bouche, une écuelle de ragoût est déposée juste devant lui. L'odeur alléchante fait réagir son ventre, le forçant à admettre qu'il a terriblement faim, en effet.


- Je m'appelle Rhelana, si vous avez besoin de quelque chose, monsieur taciturne, demandez-moi.


Fawkes relève les yeux de son assiette fumante et tombe nez à nez avec une paire de seins rebondis qui ne demandent qu'à jaillir du bustier qui les retient. Les yeux du renard se relèvent encore d'un niveau et fixent la demoiselle, Rhelana donc, toute sourire qui lui accorde un regard pétillant.


- Euh... ça ira pour l'instant, merci.


Fawkes la gratifie d'un sourire charmeur, il ne peut s'en empêcher, mais souffle dès qu'elle a tourné les talons et s'est éloignée. Il suit le roulement gracieux de ses formes pendant un court instant avant de plonger la cuillère dans le ragoût tout en tendant l'oreille vers les deux hommes. Eux aussi disposent d'un repas. Fawkes en déduit qu'ils ont encore à discuter, il a le temps de manger avant de devoir poursuivre sa filature.

Malgré son attention, Fawkes ne parvient pas à capter la moindre bribe de dialogue entre les deux hommes. Il ne peut pas braquer ses oreilles dans leur direction, ce serait bien trop indiscret et le bruit ambiant ne l'aide vraiment pas à se concentrer. Néanmoins, les détails de la commande du client semblent se distiller tout au long du repas et alors que le tenancier débarrasse les écuelles, l'accord se symbolise par une poignée de main. Fawkes doit se faire violence et s'encourage d'un "quand faut y aller...". Puis il vide sa chope d'une traite, retenant la grimace quand le liquide chaud coule dans sa gorge. Il pense avoir senti des morceaux mais essaye de se convaincre que ce ne sont que des grumeaux de levure. C'est l'estomac en vrac qu'il se lève rapidement, sa chope vide à la main pour la faire remplir au bar.. Il en profite pour réserver une chambre pour la nuit qu'il règle d'avance. Il doute pouvoir exécuter la cible le soir-même, mais il est certain de régler ça demain.

Le renard signe le registre d'un gribouilli illisible et boit une gorgée du liquide ambré et infecte de la chope quand la cible et son client passent dans son dos. Fawkes prend le temps de faire tourner la clef de sa chambre entre ses doigts, arborant un air pensif avant de sortir à son tour. Dès qu'il se trouve dehors, il rabat sa capuche sur sa tête et adopte une démarche titubante pour feindre l'ivresse et déambule dans la rue encore assez animée pour l'heure tardive.

Le riche étranger est parti vers le cœur de la ville, où il loge sûrement pour l'occasion, mais Trevils se dirige vers l'extérieur de Lehonas. Fawkes suit l'homme, l'air de rien en prenant appuie sur les murs dans l'ombre pour que personne ne le soupçonne d'être trop lucide pour être un traqueur, et ça fonctionne parce que personne ne veut trop l'approcher. Sans doute craignent-ils de se recevoir le contenu d'un estomac imbibé d'alcool. Pourtant, dès lors qu'il a franchi l'enceinte de la ville, Fawkes abandonne son attitude d'ivrogne et reprend ses instincts d'Ombre. Il se fond dans le noir et observe d'un oeil prédateur. Trevils rentre chez lui. La soirée se termine là.

Le renard réfléchit. Trevils doit apporter une preuve de la qualité de la commande à son client demain soir à la taverne. Sur le trajet entre la taverne et la charette, Fawkes a pu entendre Trevils s'agacer des doutes émis par le client, auprès de ses sous-fifres. Ce sera donc sa fenêtre de tir. Fawkes doit éliminer Trevils mais éviter d'éveiller de quelconques soupçons sur l'identité de l'exécuteur. Un sourire découvre les crocs du goupil. Il a une idée.

Mais pour ce soir, il ne pourra rien faire de plus, alors il s'en retourne vers l'auberge de la Belle Chataîgne où il grimpe les marches vers l'étage deux à deux pour trouver sa chambre. Quand il en pousse la porte, il a la surprise de découvrir la serveuse assise sur le bord du lit. A son sourire quand le renard arrive, il est évident qu'elle l'attendait. Fawkes ouvre la bouche pour savoir comment elle est entrée, mais déjà, elle fait tournoyer autour de son index un petit trousseau de clefs. Des doubles...

Elle se lève alors et s'approche de Fawkes. Elle repousse la porte d'une main et pose l'autre sur le torse du renard.


- Ma présence ici est un service en extra proposé par l'établissement... uniquement pour nos meilleurs clients.

- Je ne suis jamais venu ici, je suis loin de correspondre à ce critère, réplique le renard en fronçant les sourcils.


Mais déjà, il a posé sa main sur la taille de la demoiselle qui se déhanche. Elle fait une petite moue et lui adresse un regard coquin.


- Hum, c'est vrai, mais après cela, j'ose espérer que vous reviendrez souvent pour nos services chaleureux.


Fawkes sait bien que peu importe la chaleur du contact, il y a très peu de chance qu'il remette les pieds dans cette ville après sa mission, mais, c'est aussi une raison de plus pour se laisser tenter. Aucun risque d'avoir cette fille dans les pattes à l'avenir. Les lèvres du renard s'étirent, dévoilant une expression carnassière et alors que sa deuxième main se rabat sur le flanc de la jeune femme, Fawkes vient déjà lui dévorer le décolleté. Les vêtements tombent vite au sol, éparses et les gémissements emplissent l'air. Rhelana ne se gêne pas pour faire profiter les voisins de l'étage du plaisir que lui offre le renard.

Mais pourtant, Fawkes doit, comme bien souvent, effectuer un rappel à l'ordre quand la serveuse a voulu lui attraper l'oreille alors qu'elle emmêlait ses doigts dans ses cheveux roux. Elle s'en vexe mais n'insiste pas. Et même si ce n'est pas transcendant, Fawkes se satisfait de sa rencontre nocturne.

La nuit est bien avancée quand les deux jeunes gens se vautrent sur le matelas. Les draps traînent par terre et Fawkes a chaud. Pour cause, Rhelana est encore à moitié sur lui, dessinant de son index des formes aléatoires sur la peau de son torse nu. La respiration du renard s'est calmée, il s'endort presque, mais d'un coup, la demoiselle se redresse en prenant appui sur ses côtes, lui coupant le souffle par la même occasion.


Elle sort du lit sous le regard neutre de Fawkes et enfile ses vêtements. Le renard en profite pour tendre la main vers le drap et le tirer à nouveau sur le lit afin d'en couvrir sa taille. Rhelana s'assied alors sur le bord du lit, pousse Fawkes pour l'obliger à se rallonger et laisse encore courir ses mains sur sa peau nue jusqu'à jouer avec le filet de poils châtains qui remonte vers son nombril.

Elle se mordille le coin de la lèvre avant de relever les yeux vers lui. Son index vient dessiner la ligne de la mâchoire du jeune homme et elle ronronne :


- J'espère pouvoir te compter parmi nos meilleurs clients, à présent.


Fawkes se retient de lever les yeux au ciel. Si ça peut lui faire plaisir de croire qu'il reviendra... Comme elle semble attendre une réponse, Fawkes raille :


- Alors quoi, t'attends une promesse écrite, c'est ça ?

- Que tu es naïf ! sourit-elle en tapotant le nez du renard. Un remerciement me suffira.

- Un remerc...


Fawkes comprend vite quand Rhelana frotte ton index et son pouce ensemble. Il fronce les sourcils et ses oreilles se plaquent en arrière. Elle plaisante, là ? Elle réclame un paiement ?


- Quoi ? J'espère que tu te fiches de moi ?! se rebiffe-t-il en se redressant sur ses coudes. Je te dois rien, je...

- Hey, selon toi, ça veut dire quoi "service en extra" ?

- Mais t'aurais pu prévenir avant, non ?

- Je l'ai fait, tu aurais voulu que je te fasse un devis ? se moque-t-elle.


Fawkes fulmine. C'est bien la première fois qu'il se fait avoir de la sorte. Et c'est bien la première fois qu'il aura à débourser des pièces d'or pour une partie de jambes en l'air ! Malgré son air renfrogné, la demoiselle n'en démord pas et réclame son dû. Alors Fawkes attrape sa petite bourse d'or et en sort une pièce. Mais ce n'est visiblement pas une juste compensation en vue du temps passé en sa compagnie selon Rhelana, qui plonge la main dans le petit sac et en extirpe une jolie poignée.


- Voilà, c'est mieux comme ça. Fais pas ton radin, beau renard. Ne me dis pas que ça t'a pas plu !


En tout cas, clairement pas à la hauteur de cette somme ! Fawkes s'abstient de lui dire que le service n'en valait pas le prix et s'empresse de refermer le lacet de cuir de sa bourse amaigrie. Son petit cœur de goupil saigne et une boule acide s'est logée dans sa gorge. Dès lors que la fille sort de la chambre et referme la porte derrière elle, Fawkes cache sa bourse au fond d'une de ses bottes, juste au cas où et enfonce sa tête dans l'oreiller, furieux de s'être fait dévaliser de la sorte. Il aurait dû la mordre. Lui arracher la main. Ou peut-être la gorge. Nan, trop salissant, il aurait attiré l'attention et n'aurait pas pu mener sa mission à bien. Il tente de se consoler en visualisant les 9500 pièces d'or qui l'attendent quand la tête de sa cible sera trouée, mais ça ne suffit pas à lui offrir un bon sommeil. Pas assez réparateur.


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Le jour suivant, Fawkes ne tarde pas avant de sortir de l'auberge. Il a un plan pour éliminer sa cible. Alors il traîne un peu en ville, découvrant un peu les lieux, s'approchant des étales. Il a juste besoin de laisser passer le temps. Il se montre, il se fait voir, raconte à qui veut l'entendre qu'il n'est qu'un voyageur qui s'accorde une journée de repos dans son périple. Il ne reste cependant pas assez longtemps avec les habitants pour leur laisser le temps de trop mémoriser son visage.

Quand arrive le soir, Fawkes est encore près d'un étal, sur le chemin de la taverne. Il discute avec le marchand et s'enquiert de la qualité de ses fruits exotiques. Le maraîcher est de bonne foi et ne perd pas patience avec le renard qui a visiblement décidé de camper devant son point de vente.

Et puis Fawkes perçoit un mouvement dans son champ périphérique mais n'a pas besoin de détourner le regard pour savoir que c'est son homme qui arrive. Le renard s'empare d'un fruit bien rond et le fait rebondir dans sa paume avant de pivoter d'un coup sur le côté, percutant violemment un buste massif qui l'arrête net. Le renard porte la main à son nez qui s'est écrasé contre une clavicule et s'apprête à s'agacer du manque d'attention de passant, mais quand il lève les yeux, il ravale ses paroles. Trevils se tient juste devant lui et l'assomme de son regard hautain et dédaigneux.


- Pardonnez-moi, monsieur, se tasse Fawkes en rabattant ses oreilles en signe de soumission. Je... euh, j'vous avais pas vu .

- Il me semblait les rues de Lehonas étaient régulièrement balayées ! tonne l'homme en s'adressant au marchand.


Trevils ignore complètement Fawkes et le renard plisse à pleine les yeux en imaginant le plaisir qu'il prendra à lui loger une balle dans le crâne.


- Ce... ce jeune homme est un voyageur, monsieur Trevils, tente de tempérer le pauvre homme derrière son étal de fruits.


La même crainte dans la voix que celle dont a été témoin Fawkes, la veille, dans la taverne. Le malfrat lève son bras et l'abat vivement sur le renard. Ce dernier pourrait l'esquiver, le parer, mais il n'en a pas l'intention. Inutile de capturer l'attention de Trevils plus que nécessaire. La frappe barre l'épaule du renard et le pousse au sol.


- Un voyageur ? se moque l'homme. Je ne vois qu'un vagabond qui te volera ton labeur à la première occasion, vieillard. Méfie-toi de ces bêtes-là, on dit qu'elles ont la rage...


Fawkes enfonce son menton dans son torse, feignant la honte, mais en vérité, il a bien envie de planter ses crocs dans la chair du type pour le lui montrer s'il a la rage... Dès lors que Trevils est parti, le maraîcher se précipite et se penche sur le renard, inquiet de son état.


- Oui, oui, tout va bien, répond le goupil, les yeux toujours fixés sur Trevils qui prend la direction de la taverne.


Quand Fawkes se détourne, il sort une petite bourse de cuir de sous sa cape et la soupèse. Elle Elle était précieusement accrochée à la ceinture de Trevils et le malfrat ne l'avait pas la veille, alors Fawkes a logiquement supposé qu'elle contenait la preuve de qualité de sa marchandise. A sa surprise, elle est plutôt légère, très légère, même. Curieux, Fawkes s'isole un peu et c'est à l'abri des regards qu'il ouvre la bourse de cuir. Il observe ce qu'il a volé à sa cible : des mèches de cheveux, soigneusement enroulées et nouées séparément. Fawkes ne comprend pas trop. Il les renifle. Cheveux féminins. Jeunes.


- Qu'est-ce que c'est que ç...


Soudain, il écarquille les yeux. Il ne lui en faut pas plus pour comprendre, parce qu'il sait de quoi il s'agit. Lui-même serait un hors la loi s'il n'agissait pas sur ordre de la Garde, et il a donc plus facilement accès aux informations sur les activités illégales. Il en a déjà entendu parler mais n'y a jamais eu affaire. Un trafic de jeunes filles. Probablement vouées à l'esclavage, quelle qu'en soit la forme. Fawkes cache la bourse dans les déchets d'une rue peu fréquentée et retourne à l'auberge où sa cible est déjà attablée. La salle se remplit, alors comme la veille, Fawkes prend place dans un coin. Cependant, l'étranger prend son temps pour arriver. Il est plus long que la dernière fois et Fawkes se demande s'il n'a pas changé d'avis sur sa commande.

La serveuse à la généreuse poitrine vient servir le renard avec un grand sourire, mais cette fois-ci, il s'abstient de le lui retourner. Il a encore en travers de la gorge le sale coup qu'elle lui a fait. Et si elle tente de le dérider un peu, elle finit par repartir, ne cherchant pas davantage le contact. Enfin le commanditaire entre dans la taverne bondée. La discussion s'amorce et Fawkes a beau tendre l'oreille, il n'entend pas plus que la veille. Ca l'agace mais il sait se montrer patient. L'inconnu a l'air particulièrement emballé à l'idée d'attester de la qualité de la marchandise, ça se lit dans son langage corporel. Maintenant que Fawkes en connaît la nature, il a bien envie de caler un projectile dans la tête de l'acheteur aussi. Mais il n'aura pas de prime au nombre de victimes, alors c'est inutile. Et qui sait, peut-être qu'un jour il aura une mission avec son nom. Chaque assassinat doit servir, Fawkes se refuse de tuer gratuitement, ça deviendrait trop facile, dans le cas contraire.

L'étranger sort quelques bourses de son paquetage et Trevils les soupèse. C'est lourd, à n'en pas douter. Le malfrat défait un lacet et sort une pièce de son écrin de cuir pour tenter de la plier entre ses dents. Ça ne bouge pas. C'est de l'or. Fawkes ne peut s'empêcher de soupirer. Il y en a pour une belle somme et il aimerait bien mettre la main dessus... La cible de son contrat fouille alors sous sa cape pour déposer sa part du marché, mais il ne trouve rien. Son visage se décompose peu à peu, tandis que Fawkes sourit en coin alors qu'il porte son écuelle à sa bouche pour boire le bouillon du pot-au-feu.

Par dessus le tintamarre de la grande salle, le renard parvient à entendre le ton qui monte. La suspicion aussi. Le commanditaire pense que Trevils cherche à l'arnaquer. Bien, parfait. L'étranger range l'or et l'autre tente de le retenir. Fawkes n'entend pas distinctement ce qu'ils se disent, mais à ce stade, ce n'est plus très important. Pourtant, malgré la véhémence qui se lit sur leurs visages, les deux hommes s'efforcent de garder un ton suffisamment bas pour ne pas attirer l'attention. C'est bien dommage parce que Fawkes se serait régalé d'un scandale.

Rhelana revient et demande au renard s'il désire autre chose. Quand il répond par la négative, trop occupé à jubiler de la situation, la serveuse fait comprendre que ses attributs sont encore à sa disposition ce soir, s'il le désire. Fawkes s'interrompt. Il pose son écuelle, relève les yeux vers la jeune femme. Il n'en revient pas qu'elle fasse preuve d'un tel toupet. Alors il s'adosse complètement à sa chaise et croise les bras sur son torse avant de verrouiller ses prunelles noires dans les yeux coquins de la jeune femme, pour qu'elle comprenne bien.


- Compte pas sur moi pour me faire avoir une deuxième fois ! T'auras pas une pièce de plus venant de moi ! Trouve-toi un autre beckett.


La demoiselle papillonne des yeux et laisse pendre sa mâchoire de manière disgracieuse pour extérioriser sa vexation. Le bon côté, c'est que cette fois-ci, elle repart sans un mot, fichant la paix au renard. Non mais et puis quoi encore ?!

Fawkes n'a pas le temps de se recentrer que déjà un tabouret racle violemment le sol. L'étranger se lève brusquement et peste d'une grosse voix. Inutile de tendre l'oreille pour l'entendre, et malgré l'animation ambiante, quelques habitués se détournent de leurs conversations pour tendre l'oreille vers la dispute qui éclate au comptoir.


- Cet affront ne restera pas impuni. Vos affaires en pâtiront ! Comptez bien sur moi ! menace le marchand étranger.


Puis il s'en va, furieux, et laisse Trevils en plan. Le malfrat fouille encore sous sa cape, l'énervement se lit de plus en plus sur ses traits. Il enrage intérieurement, Fawkes peut le voir à son visage crispé et ses poings serrés. Sans doute Trevils se prépare à rejeter toute la faute à un de ses sous-fifres. Après un instant à serrer les dents et à retrouver le contrôle de sa respiration, l'immonde bonhomme sort à son tour de la taverne. Fawkes n'attend pas beaucoup avant de se lever pour profiter qu'un groupe de poivrots sorte et beuglant des chansons salaces pour se glisser avec eux.

Puis discrètement, le renard s'éloigne et se faufile dans les ombres. Il suit Trevils de loin. Il serre les dents pour retenir un sourire jubile. Oh Fawkes pourra remplir son contrat ce soir, et tout le monde pensera que c'est l'étranger qui aura commandité ce meurtre. Quand c'est ce genre d'homme qui se fait abattre, les habitants ne cherchent pas bien loin et sont souvent soulagés de la disparition. Pour des histoires de vengeance, le peuple préfère rester en retrait. Par contre, s'ils savent que c'est un assassin freelance, c'est différent. Plus instable. Quelqu'un qui tue pour de l'argent, qui leur garantit qu'il ne reviendra pas les éliminer eux aussi, parce qu'ils en savent trop ?

Alors que le grand gaillard donne des ordres à ses laquais, Fawkes se tapit dans le noir d'un coin de rue. Les lumières de l'avenue centrale n'éclairent pas jusque là et le renard peut les épier en toute impunité alors qu'il n'est qu'à quelques mètres d'eux. Il peut entendre Trevils leur gronder dessus et exiger des explications.


- En fait, c'est que tu es un voyeur, c'est ça ? s'outre une voix dans le dos de Fawkes.


Le renard se détourne, le cœur battant à toute vitesse. Derrière lui se tient la serveuse de la Belle Chataîgne, les poings sur les hanches et les sourcils froncés. Mais qu'est-ce qu'elle fout là, celle-là ?! Et comment ça se fait que Fawkes ne l'ait pas entendu ?


- Nan mais vraiment ! C'est pour ça que tu as refusé de remettre ça ? Ou c'est parce que je suis trop chère pour t-


Fawkes l'attrape par le poignet pour la plaquer contre le mur de la bâtisse et lui coller une main sur la bouche pour la faire taire.


- Mais tu vas fermer ta grande bouche de crécelle, oui ?!

- Moi, je te veux ! Allez, je te fais une ristourne si vraiment je suis pas dans tes moyens ! insiste la dévergondée après avoir tiré sur la main du renard.


Sur le coup, le renard a envie de la frapper. Comment pourrait-il ne pas se faire repérer avec ses crissements de voix ? Il n'a même pas le temps de regarder derrière lui pour voir si le malfrat a eu le temps de s'éloigner avant que Rhelana ne s'égosille, que déjà une grosse main s'abat sur son épaule.


- Un manant et sa fille de joie, chef ! grogne l'homme qui tire Fawkes dans la lumière de la grand-rue.

- Hey, je suis pas une prostituée ! se scandalise la fille la serveuse. J'ai une vertue, figurez-vous !

- Ta gueule et dégage, toi ! siffle Trevils avant de baisser les yeux vers Fawkes.


Le renard garde le menton bas. Et merde ! A cause de cette conne, sa mission prend un tournant qu'il n'avait pas prévu. Il entend les pas de Rhelana s'éloigner en courant. Et bien, elle le voulait pas tant que ça si elle l'abandonne aussi facilement aux mains d'un trafiquant de faeries... Des doigts épais passent sous la mâchoire de Fawkes pour le forcer à relever le visage et quand il est bien obligé de lever les yeux, il croise le regard fin et haineux de Trevils. Et merde, merde, merde !


- Je te connais, toi ! T'es la petite merde qui a collé à ma semelle tout à l'heure ?

- Non, vous devez faire err-

- Oh te fous pas d'ma gueule ! gronde l'homme en saisissant le renard à la gorge pour l'approcher de son visage. Espèce de petite raclure dégueulasse ! C'est toi qui m'a dépouillé ! Tu m'es pas rentré dedans par hasard !


Fawkes tenterait bien de démentir mais les doigts qui écrasent sa trachée l'empêche de parler. Il fallait que Trevils soit pas trop con, par dessus le marché... De toute façon, quoique Fawkes pourrait dire, il est certain que Trevils ne se laisserait pas berner. Il a besoin d'un responsable et il a trouvé le parfait coupable. Le renard jette un regard circulaire en portant la main à son colt mais il suspend son geste quand il voit quelques habitants plus loin, dans la rue principale. Il ne peut pas assassiner Trevils et ses sous fifres en pleine rue. Ca ferait désordre. Le problème c'est qu'un des laquais voit le mouvement du renard et s'approche pour s'emparer des armes. Fawkes tente bien de l'en empêcher mais le malfrat lui décolle une grosse baffe sur le coin de la figure et la puissance du coup le calme aussi sec.

Il se sent jeté sur un sol en bois, qui se met aussitôt en mouvement et il devine qu'il est dans la charrette. Sa tête tourne fort et bien qu'il soit allongé, il a l'impression de perdre l'équilibre. Il ne met pourtant pas longtemps à se remettre mais une grosse main est toujours sur lui pour le forcer à l'immobilité.


- Rends-moi ce qui m'appartient ! ordonne le malfrat.

- De quoi vous parlez ? Je vous connais même pas...


Fawkes sait que même dire la vérité ou obtempérer ne pourra pas lui garantir un meilleur traitement, alors il préfère se cantonner à sa version de l'innocence. Il jouera aux imbéciles jusqu'à ce qu'il ait une fenêtre de tir. Ou qu'il n'ait vraiment plus le choix.

La réponse ne doit vraiment pas plaire à Trevils parce que Fawkes voit la main de l'homme se lever et s'abattre sur lui aussitôt. Il ne se souvient pas de l'impact, ayant fermé les yeux par réflexe. Par contre, il se souvient du bruit qu'a fait sa tête en cognant sur le bois de la charrette. C'est fou comme l'esprit est bien fait, à se concentrer sur des détails pour évincer et endormir la douleur.

Quand il reprend conscience, Fawkes a la tête lourde. Son menton est appuyé contre son torse. Il lui faut un instant pour retrouver les sensations de son corps et comprendre qu'il est assis, les poings liés au dossier d'une chaise. Quand sa position se dessine dans son esprit, le renard lève la tête et force sur ses liens. Oh bordel, ça sent pas bon pour lui, là !


- On va être clairs, tous les deux, annonce d'emblée une voix qu'il reconnaît comme étant celle de Trevils. Je pose des questions. Tu me donnes des réponses. Si tu le fais pas, il faudra bien que je passe ma frustration sur quelqu'un.

- Et si la réponse vous plait pas ?

- Il faudra bien que je passe ma frustration sur quelqu'un, répète l'autre.

- Génial... grince le renard mais un coup à l'estomac lui coupe le souffle et le fait se plier en deux.


Trevils attrape Fawkes par les cheveux et lui fait relever la tête.


- Première question : qui t'emploie ?


Fawkes reprend son souffle et braque son regard sur un des molosses qui attend dans un coin de la pièce à peine éclairée. Le type a l'air costaud mais pas fûté pour deux sous.


- Lui, indique le renard avec un coup de menton vers le sous-fifre. C'est lui qui m'a embauché.


Trevils regarde son homme et, pendant un instant, Fawkes se demande s'il est assez stupide pour le croire, mais la douleur sourde qu'il reçoit à la mâchoire finit de le convaincre du contraire.


- J'ai toute la nuit et j'aime faire mal, annonce le malfrat.


Fawkes ouvre et ferme la bouche pour se masser indirectement la mâchoire et s'assurer qu'il n'a rien de cassé. Il aime faire mal ? Vraiment ? Le renard n'avait pas remarqué.


- Et moi j'ai encaissé bien plus que tes caresses, Ducon. T'es un amateur à côté de Warde !

- Warde ? C'est qui ça ? Ta petite pucelle de copine ? se moque l'homme à la moustache.

- Warde, il te ferait chier dans ton fro...


Un nouveau coup lui cloue le bec une fois de plus. Celui-ci était frontal et brutal. Un goût de cuivre imprègne rapidement la bouche du renard qui geint pour déboucher son nez du caillot qui vient de s'y former. Le sang coule à l'intérieur et vient également bientôt se répandre sur ses lèvres. Okey, Trevils n'aime pas qu'on le provoque ou qu'on n'éprouve pas de peur envers lui ? Bah il est pas prêt de trouver satisfaction avec Fawkes.


- Aucune minutie, c'est du boulot de sagouin, se moque le renard en crachant sur Trevils.


Encore un choc. Sur la tempe. Ça sonne bien, mais pendant que l'homme s'amuse comme ça, Fawkes peut réfléchir à un plan. Encaisser, il sait faire. Il n'aime pas, mais il sait faire. Et il a appris à fragmenter la douleur de la torture pour se laisser un coin d'esprit lucide et s'éloigner de la souffrance. Ce coin d'esprit lucide, à l'heure actuelle, il est employé à chercher un moyen d'inverser la situation.

Le renard tire sur ses liens à chaque fois qu'il prend un coup. Il les frotte sur l'arête de la chaise pour les user. Mais ça risque d'être long et un voile rouge recouvre déjà son œil gauche. Malgré cela, il provoque encore, se moque ou souffle pour montrer son désintérêt. Et à chaque fois, Trevils frappe, cogne et bat. Tantôt le visage, tantôt les côtes ou le ventre. Quand il a mal au poing, il demande à un de ses laquais de frapper à sa place. Mais ils ont beaucoup moins de force si bien que Fawkes ne sent presque pas leurs coups. Sa chair meurtrie est anesthésiée. Comme il l'a dit, ils ne font pas le poids à côté de Warde. Warde, lui, il s'assurait que jamais Fawkes n'échappe à la douleur.

Fawkes bénit cette époque où il a appris à encaisser, où il a sû faire certaines douleurs siennes jusqu'à réussir à les occulter. Il sait pertinemment qu'il devra libérer la douleur tôt ou tard et que quand ce sera le cas, il va vouloir en crever, mais pour l'instant, il a plus important à penser. Le problème, c'est qu'il faiblit. Parfois, il perd conscience. Ça lui offre quelques minutes de répit, mais ce n'est pas très bon non plus.


- Il me fracture l'entrejambe, ce con ! grogne Trevils.


Le malfrat glisse sa main sous la mâchoire du renard pour lui faire relever le visage et siffle presque, comme le serpent qu'il est :


- Tu parleras pas, hein ?

- Hum... t'es... peine à articuler Fawkes tant sa mâchoire est engourdie. T'es perspicace, Ducon.

- Ouais, tu fais ton malin. Les renards sont futés à ce qu'il parait... On va voir si tu feras toujours le malin avec une patte en moins.


Trevils claque des doigts et un de ses laquais s'approche. La main sur le fourreau de son sabre, il pousse la garde de son pouce pour dévoiler la brillance de la lame.


- Coupe-lui un bras. Peu importe lequel et si tu le sens encore réticent, tu peux t'amuser avec une de ses oreilles, mais prend ton temps. Laisses-en une intacte. Il doit être illettré c't'animal, faut qu'il entende les questions quand il sera décidé.


Et puis Trevils s'en va et referme la porte derrière lui. Parce que Fawkes affiche un rictus moqueur, un des hommes lui met une forte tape à l'arrière du crâne.


- T'as quand même pas cru que le boss allait se faire éclabousser par ton sang de bête ?!


Le cœur de Fawkes s'accélère. Il n'a pas fini d'user la corde et ils menacent de lui couper un bras. Pire, ils veulent s'en prendre à ses oreilles, cette bande de gros malades ! L'homme dégaine son sabre et le goupil s'active de plus belle. Le type lève sa lame, c'est trop tard, il n'aura pas le temps.

Et l'arme s'abat sur lui. Réflexe instantané, Fawkes plonge en avant et embarque la chaise avec lui. Le sabre vient percuter son poignet, sur l'os mais le choc est atténué par la corde qui se coupe sous l'impact. Fawkes retient un grondement de douleur quand le tranchant se plante dans son poignet et lui lacère la chair.

Mais tout d'un coup, ses mouvements sont plus amples, plus libres. Ces imbéciles l'avaient attaché avec une seule corde et un seul nœud... Le voilà libéré. Les deux autres hommes dégainent leurs armes aussi. Un autre sabre et un gros poignard. Fawkes vient pousser la porte de son dos afin de rester face à l'ennemi, mais la porte est bloquée. Et merde !

Les trois types ricanent. Le renard est fait comme un rat. Le premier, celui qui devait s'occuper de son bras, fuse à nouveau alors, appliquant méticuleusement l'enseignement de Lowe, Fawkes s'approprie la force de son adversaire, il laisse le sabre venir. Il l'esquive vivement mais vient porter la main jusqu'à la garde et d'un coup sec dans le poignet de son assaillant, le renard le désarme. Pourtant, au lieu de s'éloigner, il s'agrippe au bras du type et l'attire vers lui. Juste à temps ! A peine se place-t-il dans le dos du laquais qu'une lame vient le traverser. Elle était pour lui, celle-là. Fawkes ramasse le sabre et pousse le sous-fifre qui agonise avec une lame dans le corps, plantée en plein cœur.

Fawkes n'est pas escrimeur, mais pour l'instant, il doit bien se contenter de ce qu'il a. Son poignet droit le fait souffrir, il n'arrive pas à lui donner de force à cause de l'entaille profonde qu'il a reçu. Alors de sa main gauche, aussi fort qu'il le peut, il vient trancher l'homme à présent désarmé. Le tranchant traverse son buste et n'épargne pas sa gorge. Rapidement, il enchaîne l'autre qui oppose plus de résistance, mais Fawkes en vient à bout. Il récolte une nouvelle belle entaille sur le bras, mais ses heures ne sont pas comptées. Le renard est hors d'haleine et s'il parvient à bander son poignet avec un lambeau de tissu pour retenir un temps soit peu le saignement, il ne s'occupe pas de l'entaille de son bras. Il n'en a pas le temps, il doit se carapater avant que Trevils revienne pour prendre l'avantage sur lui. Muni du poignard, Fawkes force la serrure de la porte et s'évade de la cellule.

Il laisse des empreintes de sang derrière lui mais ne s'en préoccupe pas. Le poignard en main, il cherche Trevils. Il doit l'éliminer s'il veut toucher sa prime ! D'autres hommes sont là et c'est étonnamment plus simple de leur percer les organes quand il se fait discret pour les attaquer dans le dos. Presque aussi facile qu'avec ses colts. Plus silencieux aussi, mais plus salissant. Quand l'un d'eux le voit sans remarquer qu'il a un poignard et qu'il s'approche pour l'interpeller, Fawkes l'attend. Il attend qu'il soit à portée et lui tranche la gorge sans une once de remords. De toute façon, ce ne sont que des pourris, alors pourquoi avoir des scrupules ? La seule chose qu'il regrette, c'est qu'il ne touche pas d'extra au nombre de morts supplémentaires... L'avantage, c'est que le carnage est tel que si enquête il y a, on ne pensera pas qu'un seul homme puisse avoir commis ces meurtres.

Fawkes se dirige à l'ouïe. Il n'y a plus personne qui respire ici. Et puis d'un coup, il entend les pas lourds du malfrat. De Trevils. Dans le hall qu'il a déjà traversé et qui est à présent décoré de quelques cadavres. L'homme peste et Fawkes peut entendre les insultes dirigées contre lui depuis sa cachette.

Planqué derrière une demi-cloison, Fawkes ne fait pas de bruit. Trevils est juste derrière. Il s'avance peu à peu le long de la cloison, à la même allure que sa cible pour pouvoir lui porter un coup fatal sans qu'il ait le temps de se rebiffer. Le renard lève son bras, pointe de lame en avant. Il est tout près. Pourtant, un cliquetis caractéristique fait tiquer ses oreilles. Le temps de comprendre, Fawkes rentre la tête entre les épaules quand une détonation se fait entendre juste à côté de lui. Ses oreilles bourdonnent et il peine à saisir ce qui s'est passé.

Trevils a dû l'entendre et a tiré à travers la parois. Il a tiré ?! Avec un de ses colts ! Fawkes le voit. L'homme le tient dans sa main et pose son gros doigt immonde sur la queue de détente de son petit bijou ! Le canon de sa propre arme est pointé sur lui. Fawkes réalise à temps ce que ça signifie, secouant la tête pour chasser le bourdonnement qui le sonne. Sans avoir pu frapper la cible, Fawkes détale comme un lapin.

Il s'enfuit dans les couloirs laissant une piste de gouttes de sang derrière lui. Bordel, il y a plus discret quand même ! Il doit priver Trevils de sa vue. Un coup d'œil vers le plafond et la solution est toute trouvée : Fawkes détruit les luminaires à grands coups de poignard, faisant exploser les cristaux fins qui les composent.

Le couloir est soudainement plongé dans l'ombre. L'aube n'est pas tout à fait là alors il fait encore bien noir. Fawkes se trouve une porte déjà ouverte sur le long mur du couloir, il se cache dans la pièce et s'accroupit dans un coin. Il tente de calmer sa respiration et son pouls. Bon sang, s'il pensait que sa mission pourrait si mal tourner il aurait pris plus de précautions. Est-ce que la note visait particulièrement cette nouille de Rhelana ou est-ce que ça concernait le nombre de laquais au service de Trevils. Si Fawkes avait pu appliquer son plan initial comme il l'entendait, peu importe le nombre de trouffions qui gardaient la maison, il aurait eu Trevils d'un coup, d'un seul !

Fawkes tend l'oreille pour entendre sa cible arriver. Avec tous ces débris de cristal et de verre au sol, ça devrait être aisé. Et en effet, le crépitement de ses pas trahit son approche. Le renard se concentre. Il a une idée mais il a besoin de faire appel à l'Autre, celui de son autre forme. Cela va lui demander un effort incroyable, parce que jamais Fawkes ne s'est transformé sans émettre la moindre plainte de douleur, mais son corps est déjà si meurtri que peut-être cela s'avérera plus facile ce soir. Alors après s'être défait de ses vêtements déjà abîmés, discrètement et le plus silencieusement possible, le renard laisse son corps prendre sa forme de goupil ! C'est inconfortable, mais la sensation passe vite.

Tapis dans l'ombre de la pièce, le renard guette. Trevils approche. Il tâtonne, il cherche, le colt pointé en avant. Ah ce que Fawkes déteste ça qu'on touche à ses armes sans lui demander, alors si en plus on se permet de les utiliser, ça lui file des ulcères ! Le bras de l'homme apparaît dans le couloir juste devant la porte. Vif comme l'éclair, Fawkes bondit. L'impulsion de ses pattes arrières le propulse dans le couloir et sa mâchoire se referme sur le bras qui tient le revolver. Ne tenant qu'une seule arme et prisonnier des crocs effilés du renard, Trevils gueule et lâche tout alors qu'il frappe le museau de son autre poing.

Le colt tombe au sol, Fawkes peut relâcher l'homme. Vite, il doit reprendre forme humaine et c'est bien parce que la situation l'exige qu'il se pousse à muter plus rapidement encore. La douleur point à nouveau parce que l'Autre aurait voulu rester plus longtemps, mais Fawkes se promet de se faire pardonner. Son corps est encore en train de reprendre sa forme de bipède, complètement nu à présent, que le renard se penche déjà pour s'emparer de son colt.

Ses doigts effleurent la crosse, il en sent la texture mais un violent coup de pied vient le percuter à la tempe. Perdant l'équilibre, Fawkes ne résiste pas et se fait projeter contre un mur. A nouveau ses sens sont en alerte. Son instinct hurle à lui en crever les tympans. Complètement embrouillé, il a l'impression que sa tête a été secouée dans tous les sens, si bien qu'il mélange le haut et le bas, et sa perception ne lui donne rien de tangible auquel se raccrocher. L'angoisse lui serre les tripes. Il se sait au sol, il s'en doute parce que ses jambes ne le tiennent plus, pourtant il n'arrive pas à savoir si son poignet douloureux touche la fraîcheur du sol ou celle du mur.

Son arcade sourcilière s'est ouverte et du sang coule dans son œil, alors que la transformation brève avait colmaté les égratignures les plus superficielles ! Trevils profite que Fawkes soit désorienté pour empoigner sa gorge et le soulever du sol. Il l'appuie contre le mur et le lève à sa hauteur. Le renard a beau tenter de trouver le sol de ses pieds nus, en vain. Trevils jubile. Il se sait gagnant, même s'il a perdu une grosse partie, si ce n'est la totalité, de ses hommes.

Il lève son poing près du nez de Fawkes. Ca, il le voit bien nettement. Puis il recule son épaule et son coude pour prendre de l'élan. S'il le frappe, il va lui enfoncer le crâne, ça ne fait aucun doute. Mais alors que tout laisse présager qu'il va prendre sa revanche sur le renard dans la seconde qui suit, Trevils s'arrête dans son mouvement, le coude suspendu en l'air. Ses yeux sont écarquillés, il retient sa respiration.

Sur le visage de Fawkes, un sourire sadique et satisfait jure avec les entailles de verre, les hématomes et le sang qui coule. Le canon de son colt est sous le menton de sa cible. Sa cible à 9 500 putain de pièces d'or ! Le goupil a eu le temps de ramasser son colt avant d'être envoyé valdinguer contre le mur.


- J'ai gagné, Ducon !


Fawkes appuie sur la détente. La détonation, le recul dans sa main, le bruit de l'impact et l'odeur de poudre mêlée à celle du Maana qui se consume. Tout autant d'éléments que le renard adore et qui sont aussitôt gachés par la cervelle de Trevils qui retombe en pluie. L'homme tombe et les jambes du renard le lâchent. Il a besoin d'un instant pour que son corps cesse de trembler. Ça lui prendra un peu de temps pour se remettre de sa nuit merdique. Le jeune homme parvient à se redresser, pour s'adosser. Il ne sent même pas les éclats de verre qui se fichent dans ses fesses et ses cuisses.

Son regard balaye le couloir. L'aube point au loin et les quelques lueurs roses et oranges de l'astre diurne viennent nimber la demeure et rebondir sur les nombreux cadavres. C'est un véritable carnage et Fawkes est encore un peu sous le choc. C'est avec un esprit lointain et un regard éteint qu'il constate la sauvagerie dont il a fait preuve en quelques heures.

Lui qui se vante d'accomplir ses missions proprement... Celle-ci est un véritable fiasco ! Mais qu'importe ! La cible est abattue et il gagne 9 500 pièces d'or en quelques jours. Le renard se laisse souffler un peu avant de s'encourager à bouger à nouveau. Pourtant, il sent sous sa peau que l'Autre a besoin de sortir. Comme il n'a plus la force de lutter, la mutation reprend et la douleur est moindre quand ses os s'allongent, que ses omoplates craquent pour se repositionner. Enfin à quatre pattes, il fait quelques pas, avant de se coucher sur le côté. La langue pendant, il halète. Le Renard aussi est épuisé.

Fawkes attend un peu avant de retrouver pour la dernière fois sa forme humaine. Il attend que les bienfaits de la transformation agissent sur lui pour accélérer la guérison des blessures les plus profondes. Quand il estime que c'est suffisant pour rentrer sans trop douiller, le renard abandonne son pelage pour retrouver une peau lisse mais souillée de sang. Il ne s'en occupe pas pourtant et préfère se rhabiller. Il récupère son deuxième colt sur Trevils et cherche dans la maison.

Une arme dans une main, au cas où, il cherche les filles à qui appartiennent les cheveux de la bourse. Elles doivent bien être quelque part. Il utilise ses sens, son odorat beaucoup, mais également son ouïe. Il entend des pleurs, des gémissements après s'être laissé guider par une odeur âpre. Les cellules du sous-sol sont dans un état lamentable et les pauvres gamines qui s'y trouvent font peine à voir !

Dire que ces gosses étaient vouées à devenir les esclaves des plus pervers ou des plus friqués eldaryens... Fawkes en a un haut le cœur et ne peut s'empêcher d'être triste pour elles. Leur innocence est bafouée maintenant. Même si dans les faits, elles s'en sortent indemne pour la plupart, l'expérience, le traumatisme restera ancré en elles pour le restant de leurs jours.

Fawkes s'approche, force les serrures des cadenas pour les libérer, mais les jeunes filles ne bougent pas, toutes recroquevillées les unes contre les autres dans le fond de leur cellule. Fawkes réalise que son apparence actuelle ne doit pas être des plus rassurantes. Le visage tuméfié mais également tâché de sang comme le reste de son corps, une arme à la main... Les pauvres doivent se demander quel sévice les attend.


- Vous êtes libres, les filles. Sauvez-vous. En sortant par le portail, suivez le chemin, vers la ville. Vous y trouverez de l'aide.


Elles hésitent encore, mais une d'entre elles, sans doute plus téméraire, ose un pas et passe devant Fawkes pour sortir. Elle lève les yeux vers lui, comme pour le supplier de ne pas lui faire de mal. Et quand elles voient toutes que le renard n'est pas là pour prendre le relais de Trevils, elles se précipitent toutes et s'enfuient sans demander leur reste.

Lui aussi sort de la bâtisse et il plisse les yeux quand le soleil du matin vient lui agresser les prunelles. Il réalise qu'il a fait le tour du cadran. Avec les deux jours de route qui l'attendent, il sera claqué en arrivant au QG. Aussi ne prend-il pas le temps de se nettoyer. Il n'a qu'une hâte : rentrer.

Le renard évite la ville, il n'a rien à y récupérer et il n'a aucun intérêt à se faire voir la bas. Il reprend la route au plus tôt et tente d'être le plus direct possible. Il esquive les axes principaux et préfère s'envelopper dans sa cape quand il croise quelques voyageurs. Choisissant la discrétion et sa hâte de rentrer, Fawkes ne traîne pas en chemin. A l'aube l'aube, quand les animaux s'endorment ou s'éveillent, quand tout est calme et suspendu, il s'autorise à l'allonger dans les broussailles en bordure de chemin, mais il ne ferme les yeux guère plus d'une heure avant de repartir.

Cinq jours après son départ initial, Fawkes arrive enfin à la cité d'Eel. Il a été un peu plus rapide ce coup-ci, et n'a mis qu'un jour et demi pour rentrer. Par contre, il est exténué. Il a faim, il veut se laver, il veut dormir un peu. Beaucoup.

Enfonçant sa tête un peu plus dans sa capuche pour que le sang qui l'imprègne n'attire pas trop l'attention, il avance d'un bon pas vers le dortoir de l'Onirique. Il ne prend pas le risque de passer par sa chambre pour prendre des vêtements propres. Tanpi, il couvrira sa taille d'une serviette une fois propre ! Fawkes pousse directement la porte des douches masculines et s'engouffre dans le premier box ouvert. Il fait couler l'eau pour lui laisser le temps de chauffer et se défait de ses vêtements. Il ne tente même pas de les éloigner du jet d'eau. Un petit coup de rinçage ne pourra pas leur faire de mal. Il se peut même qu'il ne puisse rien en récupérer.

D'ailleurs, c'est un ruisseau marron de sang séché et de crasse qui s'écoule par l'évacuation d'eau.

A son tour, Fawkes tend la main vers la douche. L'eau est chaude, ça fait un bien fou. A présent nu comme un ver, il présente son corps souillé de meurtres à la petite cascade artificielle. Il lui faut au moins ça pour laver son âme de tout ce karma négatif.




















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