Chapitre 1 - Alba

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Vendredi 1er décembre


— C'est vraiment ce que tu veux ?

Ma mère pose une main pour calmer mon père. Mais je sens qu'il ne peut contenir sa colère envers moi. J'ai envie de crier au monde entier, que oui je suis sûre de ce que je veux faire de ma vie, parce que mon père, lui, n'a pas l'air de me croire.

— Oui ! Je suis sûre, je veux arrêter ma licence. Elle m'apportera rien de plus... Je veux pouvoir voyager, je veux être photographe pro ! Et j'ai déjà gagné un concours...

— Gagner un concours ne fait pas de toi une professionnelle Alba, déclare froidement mon père.

Je plante mon regard sur lui et écarquille les yeux, choquée.

— Pardon ? Mais qu'est-ce qu'il te faut pour que tu comprennes que je suis douée pour ça ? Que c'est ce que je veux faire !

— Bon, bon, on va se calmer... tente de temporiser ma mère en vain.

— Alba ! Tu me parles sur un autre ton. Je sais que tu es douée pour ça, là n'est pas la question. Ce que je veux, c'est que tu obtiennes un diplôme au cas où...

— Au cas où quoi, papa ? le coupé-je.

Je pose mes coudes sur la table de la cuisine, exaspérée par cette conversation qui tourne en rond. Rien n'est assez bien pour lui, quoi que je fasse, j'ai l'impression que ce ne sera jamais assez. Il a toujours eu besoin que j'excelle partout, et même si j'ai été une bonne élève, aujourd'hui je n'en ai plus envie. Je n'ai plus envie de suivre des cours, de rester assise derrière un bureau à écouter religieusement quelqu'un déblatérer des faits sur du droit. Ce que je veux, c'est devenir photographe.

— Alba... Je veux que tu aies un avenir. Je veux que tu aies un diplôme, quelque chose qui t'assure un vrai métier.

— Mais c'est un vrai métier, photographe !

Il ricane et recule sa chaise.

— Ah bon, tu le crois vraiment ?

Je sens la pointe de sarcasme dans sa voix et ça m'énerve d'autant plus. Je ne sais plus quoi faire pour lui prouver que je suis douée dans ce domaine, que c'est ce que j'aime et que c'est possible d'en faire son métier. Il y a un tas de photographes qui ont démarré de rien du tout et qui se sont fait un nom petit à petit. Je n'aspire pas à devenir la plus grande photographe d'Espagne, mais au moins à avoir mon petit studio et à pouvoir assurer des événements, des shooting...

— Papa, je retournerai pas à la fac. J'ai jamais voulu faire du droit...

— Il est hors de question que tu quittes la fac avant les partiels ! Tu vas travailler, comme tous tes camarades et tu vas passer ces partiels !

— J'irai pas, papa, lui dis-je le plus simplement possible. Je ne sais pas ce qu'il faut que je te dise pour que tu comprennes. C'est ma vie, j'ai dix-neuf ans, et même si je ne sais pas de quoi demain sera fait, je sais une chose : je ne veux pas faire de droit. Je sais même une deuxième chose, c'est que la photo, c'est toute ma vie. Alors je suis désolée, mais je retournerai pas à la fac.

Il soupire et se gratte l'arrière de la tête. Ma mère secoue la tête et tente à nouveau d'apaiser les choses :

— Bon, on ne va pas encore avoir cette conversation... Il va falloir trouver une solution. Alba, je t'entends, rassure-toi, je te comprends. Mais tu ne peux pas tout arrêter et ne rien avoir...

— Mais je peux me lancer en free-lance ! Je peux être photographe à mon compte !

— Alba, c'est pas aussi simple que ça... Tu peux pas ouvrir ton entreprise sans aucun diplôme quand même...

— Mais l'école de photo coûte un bras ici... Vous savez bien que je serais allée dans cette école si on pouvait se le permettre.

— Je sais... souffle mon père. Mais on fait tout pour toi, crois-moi...

— Je crois que c'était pas nécessaire de m'envoyer à la fac de droit juste parce que tu es juriste. Ce que tu aimes n'est pas forcément ce que j'aime, moi.

Je me lève et marche à toute vitesse jusque ma chambre. Je claque la porte un peu trop fort et me réfugie dans mon lit. J'allume mon téléphone et un message de ma meilleure amie m'attend :

Lucia : Bon alors, tu leur as dit ?

Alba : Oui, ça s'est mal passé, je te raconterai.

Lucia : Je suis désolée... J'espère que ça va aller toi. Je suis là, tu sais ?

Alba : Oui... Merci <3

Lucia : Tu veux venir à la maison ce soir ?

Alba : Je crois que je vais rester là, au fond de mon lit...
C'est pas mal comme plan pour la soirée.

Lucia : Haha très drôle. Nan sérieux, viens!
J'aime pas te savoir triste toute seule.

Alba : C'est gentil, mais je vais vraiment rester chez moi.
J'ai pas envie que mes parents pensent que je les fuis.

J'écris les derniers mots et appuie sur envoyer en même temps que je me dis que c'est exactement ce que je fais. Je les fuis en restant dans ma chambre, je les fuis pour ne pas avoir à les affronter encore. Ils ne me comprennent pas. À croire qu'ils veulent à tout prix que je sois comme eux. Je ne veux pas renoncer à mon rêve. Et c'est aujourd'hui que je prends cette décision. La fac de droit, c'est l'enfer sur terre. J'ai tenu quelques mois... Mais à l'approche des partiels avant les fêtes de fin d'année, je ne pouvais pas me résoudre à me dire que c'est ce que je vais faire pour les prochaines années. Je ne peux pas, c'est pas moi.

Je veux faire de la photo, c'est aussi simple que ça.

J'entends trois coups toquer à ma porte alors que je somnole dans mon lit.

— Oui ?

Le porte s'ouvre doucement sur mon père qui hésite à rentrer. Je suis toujours énervée, alors je ne dis rien que je pourrais regretter. J'attends qu'il soit à l'initiative du dialogue, si dialogue il y a encore entre nous.

— Euh... Tu dors ?

Je me redresse sur mon lit pour m'asseoir et hoche la tête négativement.

— Écoute... On a beaucoup discuté avec ta mère, commence-t-il d'une voix douce que je ne lui connais pas beaucoup. Je crois que tu as raison.

Un « ping » se fait dans ma tête, je suis soudain bien plus intéressée par ce qu'il a à me dire. Tous mes sens sont en alertes et j'attends qu'il continue. Il s'approche encore jusqu'à s'installer à côté de moi sur mon lit.

— On a fait quelques recherches... Et si tu veux faire de la photo, alors c'est d'accord.

— Quoi ? C'est vrai ? m'exclamé-je mi-choquée et mi-excitée.

— À une condition, dit-il en levant un doigt devant moi.

Je hoche la tête et l'incite à poursuivre. Intérieurement, j'ai envie de sauter de joie mais je prends sur moi pour rester le plus calme possible.

— Si tu veux vraiment faire de la photo, alors il te faut un diplôme. Et c'est vrai, on a pas de quoi payer l'école qui est près d'ici... Mais avec ta mère, on a fait des recherches et on a eu une idée.

— Et c'est quoi ?

Il prend une inspiration et déclare :

— Tu obtiens une licence de photographie à l'Université en France, et dans ce cas tu pourras en faire ton métier.

— En France ? crié-je un peu trop fort. Mais on a pas de quoi payer l'école ici, pourquoi j'irais en France ?

Je ne comprends pas du tout la logique de mes parents.

— Attends que je t'explique. Là-bas, seuls les frais de scolarité de rentrée sont payants. Et tu pourras être logée par quelqu'un qu'on connaît.

— Quelqu'un que vous connaissez ? demandé-je dubitative.

— Oui, tu te souviens de notre appartement à Elda ?

J'acquiesce vaguement, parce que je me souviens qu'on a habité à Elda, mais j'avais moins de neuf ans donc je me souviens pas vraiment de l'appartement en lui-même. Et mes souvenirs sont assez flous de cette époque.

— Eh bien, notre ancienne voisine est toujours restée en contact avec maman. Elle habite maintenant en France, à Paris. Tu peux aller habiter chez eux pendant tes études là-bas. Ils sont d'accord.

— Ils sont d'accord ? répété-je comme pour être sûre que j'ai bien entendu. Mais attends, je dois partir en France ?

— Ma puce, tu es bilingue, je suis sûre que tu t'en sortiras très bien à Paris. Et c'est une bonne opportunité !

Ma mère nous interrompt en venant à son tour dans ma chambre. Elle replace un cadre sur le mur, elle ne peut pas s'empêcher que tout soit parfait.

— Alors, tu lui as dit ? demande-t-elle en faisant quelques pas jusqu'à moi.

Mon père acquiesce et elle poursuit :

— J'ai fait quelques recherches, tu pourrais intégrer l'Université pour le semestre prochain, donc commencer en janvier. Ce qui te laisserait quelques semaines avant de partir.

— Mais je vais pas tout quitter ? J'ai ma vie ici...

Mon père soupire et plante son regard dans le mien :

— Écoute Alba, c'est à prendre ou à laisser. On est prêts à te payer le voyage jusque là-bas. Si tu veux faire de la photo, c'est d'accord, mais tu obtiens un diplôme pour ça.

— Et puis tu verras, tu seras pas toute seule. Valeria a deux fils, tu te souviens peut-être de l'un d'entre eux. Agustin a ton âge.

— Je... Oui peut-être, enfin je me souviens pas vraiment de lui.

Un léger voile s'empare du regard de ma mère et je reporte mon attention sur mon père. Je ne réfléchis pas plus longtemps, même si l'idée d'aller suivre des cours en français ne m'enchante pas, je ne peux pas refuser une offre pareille. Dire adieu aux cours de droit pour faire de la photo, je ne peux que dire oui.

Je me lève et prends une grande inspiration avant de déclarer, le sourire aux lèvres :

— Alors on dirait bien que je vais aller à Paris ?

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