~ CHAPITRE 20 ~ ou l'art de la confrontation entre hommes des cavernes

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Suite à la demande de Naya, je saisis deux récipients en verre sur la petite étagère et m'approche du bassin d'eau.
J'en remplis un à moitié et les pose parterre, attendant les prochaines instructions.

« Le but de cette séance est de t'apprendre à maîtriser les bases de ton pouvoir. Pour l'instant tu arrives à faire flotter de l'eau dans les airs pendant une petite durée. Grâce aux petits exercices que je vais te donner tu vas devenir plus endurante et avoir plus de contrôle sur ton élément ! »

Je hoche vigoureusement la tête et attends avec impatience que la Conseillère reprenne la parole, ce qu'elle fait dans les secondes qui suivent :

« Décale les petits bols sur le côté, on ne va pas s'en servir tout de suite. Tu vas créer une bulle d'eau que tu devras maintenir dans les airs pendant quinze secondes. C'est seulement lorsque tu auras réussi qu'on passera à l'exercice suivant.

- Ok ! »

Je me retourne vers le bassin et commence à me concentrer. Quinze secondes... Ça devrait aller.

~~~

Ça ne va pas du tout.
Plus le temps passe et plus j'ai la sensation de m'être surestimée.

Ça fait bien trois quarts d'heure que j'ai commencé et mon record est de seulement huit secondes. Je souffle bruyamment, ce qui arrache une petit gloussement à Naya.

« Courage, tu peux le faire ! »

Vu comment c'est parti, pas sûr !

Mes bras tremblent et de la sueur ruisselle sur mon front. En plus j'ai faim.

« Allé, si cette fois tu tiens dix secondes, on va manger, dit-elle comme si elle lisait dans mes pensées. »

Il ne m'en faut pas plus pour retrouver ma motivation. Je recommence, déterminée à en finir le plus rapidement possible. La bulle se forme et Naya compte :

« Un... deux... trois... »

Je peux le faire !

« Quatre... cinq... six... »

J'ai passé la moitié, à moi la nourriture !

« Sept... huit... ne...

- Naya, tu fais quoi ? Ça fait trois heures que je t'attends pour aller bouffer, interrompt une voix tellement lasse qu'elle ne peut appartenir qu'à une seule personne.»

Ma concentration vole en éclats et je romps la suspension. Noooon ! À une seconde près !

« Oh doudou, c'est toi ! Je t'ai dis que tu n'avais pas à m'attendre aujourd'hui, s'exclame-t-elle. »

Je me retiens de pouffer.
Doudou ? Sérieusement ?
Le concerné à l'air de se rendre compte de mon hilarité puisqu'il me lance un regard mauvais avant de grogner.

Emilio se gratte la tête, l'air gêné et murmure si bas que je ne suis même pas sûre de comprendre ce qu'il dit vraiment :

« Hum... comme ça faisait longtemps, je me disais... tu sais... qu'on aurait pu manger en tête-à-tête...
Il est donc capable de changer d'expression...

- Parle plus fort mon amour je n'ai pas compris !

- Laisse, c'est rien. Mais au fait gamine, tu ne devrais pas t'entraîner avec ton guide ? me demande le Conseiller. J'ai compris, sous-entendu "au lieu de t'accaparer ma copine".

- Euh... en fait, il avait des choses à faire, je soupire.

- Tch, il sert à rien. J'ai parfois du mal à croire qu'il soit le neveu de Carl.

- Mooh tu exagères. »

Pour ma part je ne réagis pas. Je n'ai pas apprécié qu'il parle d'Owen ainsi mais je préfère éviter de me le mettre à dos. De plus, je suis légèrement confuse. Je suis persuadée de connaître ce fameux Carl, du moins de nom, mais je n'arrive pas à me souvenir clairement de lui.

Naya se tourne vers moi et me propose d'aller déjeuner.

« Oh mais je n'ai pas passé les dix secondes ! je m'exclame.

- Tu allais les passer, tu t'es juste fais interrompre. »

Je finis par acquiescer. Emilio jette un regard blasé à sa montre.

« Il est déjà quatorze heures. Le temps qu'on sorte de la forêt, je ne sais pas s'il y aura grand chose d'ouvert.

- Oh mais pas de soucis ! J'ai emmené des sandwichs, dit la jeune femme. Ne bougez pas je reviens ! »

Et avant même qu'on puisse répliquer quoique ce soit, elle disparaît.
Je jette un coup d'œil à l'homme qui est juste à côté de moi. Il a le dos appuyé contre le mur, les bras croisés sur sa poitrine et il fixe le plafond, signes de son désintérêt total vis-à-vis de ce qui l'entoure - et de moi par la même occasion.

Peut être qu'engager la conversation permettra de briser la glace ?

« Dites ? je commence. »

- Hum..?

- Ça fait longtemps que vous êtes Conseiller ?

- Ouais.

- Ah d'accord... je réponds, mal à l'aise. Et vous aimez bien ça ? »

Il hausse les épaules. Comment je fais moi s'il ne répond qu'avec des monosyllabes ?!
Au moins c'est clair, il n'aime pas faire la discussion.

Je me retiens de soupirer et m'assois parterre, patientant le retour de Naya. Lorsque j'entends des bruits de pas se rapprocher, je relève la tête. Cependant la touffe de cheveux noire qui franchit la porte n'appartient pas à cette dernière mais à Owen.

« Ow...

- C'est maintenant que tu te ramènes sale môme ? m'interrompt Emilio.

- J'ai eu un contretemps, réplique le concerné avant de se tourner vers moi. Diana, tout va bien ? Qu'est-ce que vous faisiez ?

- Oui ça va. Naya m'a aidé avec mes pouvoirs et on l'attend pour manger. Elle est allée chercher des sandwichs. »

Je m'apprête à lui demander si tout va bien de son côté mais m'abstiens. Il ne veut sûrement pas en parler devant le Conseiller d'eau.

« Je vois, finit-il par répondre.

- T'entends ça gamin, Naya a fait ton boulot. »

La mâchoire d'Owen se contracte. Je me retiens de me claquer le front. Qu'est-ce que j'ai fait pour me retrouver seule avec deux énergumènes pareils ? Quelqu'un veut ma mort.

La tension entre les deux est plus que palpable et ça en devient pesant pour moi.

Owen grogne. Ces deux là ne savent que faire ça. Franchement on dirait des hommes préhistoriques.

Je laisse échapper un long soupir que je regrette immédiatement lorsqu'ils tournent la tête vers moi et me scrutent l'air de me demander si j'ai un problème.

« C'est bon je suis là ! dit Naya en faisant irruption dans la pièce. Owen ! Tu es là ! Parfait, viens manger avec nous.
Ouf, elle a vraiment un bon timing.

- Ouais... »

La jeune femme s'empare du bras de son amant et le tire énergiquement. Avec la tête blasée que tire Emilio, la scène est vraiment comique. Avec ces deux là, la phrase "les opposés s'attirent" prend tout son sens.

Owen et moi marchons derrière eux, légèrement en retrait. Après y avoir réfléchi, je me suis dit qu'il a forcément une raison d'être plus froid qu'à l'accoutumée et que peut être il a juste le besoin d'être écouté.

« Tout va bien de ton côté ? je commence. J'ai remarqué que depuis ce matin tu n'es pas dans ton assiette. »

Il me regarde, surpris, puis il détourne la tête.

« Tout va bien ne t'en fais pas. »

J'ai du mal à le croire mais n'insiste pas. Après tout s'il veut me parler de ses problèmes il le fera. Je suppose.

« Et... Diana ?

- Oui ?

- Je sais que je n'ai pas toujours un caractère facile mais surtout ne le prends pas personnellement. »

Je réponds à l'affirmative et ne peux m'empêcher de sourire légèrement. Déjà il a reconnu qu'il avait un caractère de cochon, ce qui est une grande avancée. Mais surtout, je sais maintenant que le problème ne vient pas de moi et je ne saurais comment l'expliquer mais c'est comme si on ôtait un poids de ma poitrine.

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