Chenle était à table avec ses parents. Ces derniers discutaient encore et toujours, et essayaient de convaincre leur fils de s'enrôler dans l'armée de Jaehyun. Mais le garçon n'écoutait que d'une seule oreille, il regardait fixement l'horloge qui était dans le salon, et attendait que la grande aiguille avance avec impatience. Il avait promis à Jisung qu'ils se retrouveraient à vingt-deux heures pour discuter.

— Chenle, tu nous écoutes ? Interpella la mère.

— Oh... Lâcha le garçon tout en regardant ses parents qui avaient les yeux fixés sur lui. Oui, je vous écoutais, pourquoi ?

— Tu avais l'air dans tes pensées, remarqua le père qui posa désormais son regard sur l'assiette encore pleine de son fils. Tu ne manges pas ?

— Je n'ai pas très faim, je peux sortir de table ?

Les deux parents soupirèrent en chœur, avant d'accepter. Le jeune chinois se leva de sa chaise, et dit à ses parents qu'il sortait. Ces derniers n'eurent le temps de ne rien dire, qu'il était déjà parti de la demeure familiale.

Avec eux, le cœur de Chenle était lourd.
Avec Jisung, son coeur s'allégeait.

La veille, ils avaient parlé jusqu'à tard, pendant environ deux heures. Chenle et Jisung avaient discuté de leur vie, de ce qu'ils faisaient. Le chinois avait appris que son nouvel ami n'était pas dans le même lycée que lui, et qu'il était plus jeune que lui d'un an. Le cygne blanc avait légèrement parlé de ses parents, mais pas trop car il ne voulait pas que Jisung se sente mal à cause de ses parents décédés.

Chenle marchait rapidement, jusqu'au lieu plus ou moins habituel où ils se retrouvaient. Il avait été si rapide qu'il en arriva le premier. Le chinois partit donc s'asseoir sur la petite falaise, et regarda ses ailes pour la première fois depuis longtemps. Il était vrai qu'il n'avait pas l'habitude de les regarder, tout simplement car s'il avait eu le choix, il aurait préféré être un être humain tout à fait normal.

Quand il regarda ses ailes, il vit quelque chose qui le surprit. Il se frotta les yeux, mais quand il les rouvrit, cette chose avait disparue. Même quand il regarda de plus près, il ne vit plus aucune trace de ce qu'il avait vu.

— J'ai dû rêver... Murmura le cygne blanc.

— De quoi ?

Chenle sursauta et lâcha un petit cri, ce qui fit rire le cygne bicolore qui venait tout juste d'arriver. Celui-ci s'assit juste à côté de son nouvel ami, toujours un sourire sur les lèvres.

— Du coup ? Questionna curieusement le plus jeune.

— Non, ce n'est rien d'important. Comment vas-tu ?

C'est ainsi que l'échange recommença entre les deux garçons. Chenle avait pas mal de questions à poser à Jisung, étant un éternel curieux sur la vie que Jisung pouvait avoir.

— Je me demandais, en vrai, ils sont comment les cygnes noirs ?

— Bah... Ce sont des personnes comme toi et moi, avec des ailes noires.

— Pas physiquement, je m'en doutais qu'ils ressemblaient à ça, rit le chinois. Je voulais dire au niveau de leur personnalité, car chez nous, on raconte qu'ils sont... des meurtriers ?

À ce moment, Jisung se mit à rire, ce qui voulait dire que les pensées de la tribu de Chenle étaient fausses.

— C'est bien ce que je dis, ce sont des personnes comme toi ou moi avec des ailes noires.

Le cygne blanc comprenait mieux ce que voulait dire son ami. Ce dernier faisait référence au fait qu'il pouvait y avoir des personnes gentilles, comme exécrables, d'autres un peu bizarres, drôles, ou encore réservés. Le plus jeune allait dire quelqu'un chose, mais une autre voix se fit entendre.

— Jisung ?

Les deux garçons sursautèrent, et se retournèrent en même temps. Ils connaissaient tous les deux le garçon qui venait d'interrompre leur discussion, mais l'un d'eux le connaissait plus que l'autre. L'autre ne l'avait vu que quelques fois au lycée, et il se disait qu'il paraissait bien plus imposant et bien plus somptueux avec ses ailes noires, que sous sa forme humaine.

— Jeno ? Qu'est-ce que tu fais là ?

— Je pourrais te poser la même question, qu'est-ce que tu fais avec lui ?

Le nouvel arrivant montra Chenle d'un coup de tête, et ce dernier se sentit légèrement mal à l'aise. Jeno lui lançait un regard sombre, qui montrait toute l'antipathie qu'il ressentait envers lui.

— C'est un ami que j'ai rencontré il y a peu de temps. Et toi ?

— Je t'ai suivi jusqu'ici, expliqua le cygne noir, je ne comprenais pas pourquoi tu t'étais éclipsé aussi rapidement et on ne sait jamais ce qu'il peut arriver, alors j'ai préféré t'accompagner.

— Tu n'as pas à t'en faire, Chenle est quelqu'un de confiance...

— De confiance ? C'est un des amis de Jaemin !

Jisung eut un frisson à ce moment, et posa son regard sur Chenle.

— C'est vrai ?

— Oui c'est vrai, dit Chenle pour la première fois depuis l'arrivée de Jeno. Mais je n'ai parlé de Jisung à personne, car je lui ai promis.

— C'est ce que tu dis... Soupira Jeno.

— Je le crois. Chenle est, pour le peu que je le connaisse, très gentil avec moi et ne m'a jamais jugé.

Le cygne noir soupira. Chenle avait compris par cette courte discussion que Jeno se méfiait des cygnes blancs, et il comprenait totalement pourquoi. Entre la mauvaise entente, les attaques et le mépris, il y avait de quoi avoir une image négative de la tribu de Chenle.

— Fais attention à toi Jisung, je ne veux juste pas qu'il t'arrive quelque chose de mal.

— Je fais attention, je te le promets.

Jeno acquiesça, et laissa les deux garçons malgré son inquiétude. Chenle le regarda s'éloigner de plus en plus d'eux.

— Tu n'arrives pas à détacher ton regard de Jeno, n'est-ce pas ?

— Oh, lâcha le chinois tout en se retournant vers Jisung. Excuse-moi.

— Ce n'est rien, c'est même compréhensible. Ce n'est pas le chef des cygnes noirs pour rien. Enfin, non pas qu'il est l'est pour ce qu'il dégage, mais ça lui donne un certain charisme.

— Je ne savais pas que c'était le chef... Murmura Chenle.

— Oui, c'est probablement parce qu'il est jeune. Il est très gentil mais... Un peu méfiant depuis que les cygnes blancs ont tué ses parents, expliqua le plus jeune. Mais je vais faire en sorte qu'il change au moins d'avis sur toi.

— C'est gentil. J'aurais bien fait de même avec mes amis mais... Je ne pense pas que ce soit une bonne idée.

— Pourquoi donc ?

— Manque d'ouverture d'esprit.

À ce moment, Chenle se mit à penser à cette guerre qui se peaufinait, encore une fois. Il repensa à ses amis, à sa famille, et son cœur en devint lourd. Jisung le regardait, et vit son désespoir dans son regard, qui était toujours présent quand ils se parlaient.

— Malheureusement, tout le monde ne peut pas être ouvert d'esprit comme nous le sommes. Ce serait beaucoup trop facile, et je comprends que ça te touche. Mais si ça en devient trop lourd pour toi, tu vas devoir commencer à marcher sans ces personnes, pour éviter de t'auto-détruire.

Le cygne blanc releva la tête, et esquissa un faible sourire. Jisung avait raison, Chenle devait avancer, mais il devait avant-tout être prêt à être rejeté de tous, et à le faire sans ses proches.

Et ça, il ne se sentait pas encore capable de le faire.