— T'en penses quoi des idées de Jaehyun ?

Chenle releva la tête vers Jaemin, qui était celui qui avait posé cette question. Le chinois se demandait pourquoi son ami la lui posait, alors que la réponse était pourtant évidente.

— Et toi, qu'en penses-tu ? Contourna Chenle.

— Je n'ai jamais aimé la violence, donc même si les cygnes noirs ont tué mes parents, je n'ai pas envie de les tuer en retour. Expliqua-t-il avant de reprendre. Je pense qu'il y a des manières bien plus diplomates de résoudre un conflit.

— Je vois, je pense un peu de la même manière.

— J'ai en effet remarqué que tu ne t'étais pas enrôlé dans l'armée de Jaehyun.

— C'est vrai... Je n'aime pas me battre non plus. Et même, le fait de dire que les cygnes noirs sont tous mauvais... Je trouve ça un peu extrême, car ceux qui sont dans notre lycée ne m'ont pas l'air bien méchants.

— Tu as raison.

Un silence s'installa entre les deux garçons, qui se sentaient seuls au sein de leur propre tribu. Tout le monde ne pensait qu'à faire la guerre, et à être les seuls à se situer sur ce territoire. Les deux amis se sentaient incompris et ne pouvaient compter que sur eux-mêmes.

— Et par rapport à nos amis, et surtout Renjun dans ton cas ?

Jaemin avala difficilement sa salive face à la question du Chinois. Voir ses amis, et en particulier Renjun s'enrôler dans l'armée lui faisait mal au cœur. Ceux qui étaient ses amis, celui qu'il aimait, comptaient tuer des personnes qui au fond, avaient des racines similaires à eux.

— Je préfère ne pas en parler... Murmura simplement Jaemin.

Chenle acquiesça devant la réponse de son ami, qui était plutôt logique. Lui-même avait du mal à imaginer la situation, et c'étaient probablement les seuls.

— Bref... J'ai promis à Renjun que j'allais le rejoindre à minuit, donc je ferais mieux d'y aller. Dit le prince des cygnes blancs tout en se levant. Tu veux venir ?

Chenle ne prit pas le temps de réfléchir qu'il répondit directement "non". Il savait que Jaemin le lui avait proposé par politesse, mais qu'en réalité, il voulait se retrouver seul avec Renjun. Le chinois ne voulait pas paraître de trop et tenir la chandelle entre ses deux amis amoureux. Le garçon plus âgé partit donc après avoir salué Chenle, qui attendit quelques minutes avant de partir à son tour.

Le cygne blanc marchait sans réel but, tout en étant dans ses pensées. Il réfléchissait encore et toujours à cette guerre qui se préparait petit-à-petit. Il pensait aux différentes fins possibles, mais toutes étaient négatives, et pleines de sang. Jamais Chenle n'avait été aussi pessimiste.

Il décida de ne plus penser à ça. Il ne voulait pas être rongé par des pensées sombres. Il regarda donc où il était, et reconnut la cascade de l'autre jour. Il n'y était pas retourné depuis sa dernière discussion avec Jisung, le cygne noir et blanc de la dernière fois, car malgré le fait qu'il soit en vacances, il avait beaucoup de devoirs à effectuer en plus de ses parents qui lui mettaient la pression concernant les cygnes noirs.

Il jeta un rapide coup d'œil à la petite falaise de la cascade, et il n'y vit pas le jeune cygne bicolore. Le chinois en était un peu déçu, car le garçon lui avait l'air gentil et bienveillant, et faire une nouvelle connaissance, et peut-être un nouvel ami, lui aurait allégé le cœur. Mais il n'avait pas l'air présent, donc il se retourna et s'apprêta à partir.

Cependant, quelque chose passa sous son nez, ce qui l'arrêta d'un seul coup. C'était une plume d'une couleur bien plus sombre que celles de Chenle. Elle était noire. Son visage se tourna vers le lac, et c'est à ce moment qu'il vit un cygne, aux plumes noires et blanches, qui semblait se reposer sur le lac.

Devant la simple lumière de la lune qui reflétait dans le lac, et les étincelles qui s'émanaient du cygne, Chenle était émerveillé. Il n'avait jamais vu quelque chose d'aussi beau, si bien que son cœur s'en allégea. C'était comme si toutes ses inquiétudes étaient parties durant l'espace de quelques secondes.

— Jisung...? Murmura finalement le cygne blanc.

Le cygne bicolore ouvrit un œil, et c'est à ce moment qu'il vit le cygne blanc qui le regardait d'un air admiratif. Il se sentit légèrement mal à l'aise, mais ça ne l'empêcha pas de rejoindre la rive, où il reprit sa forme semi-humaine.

— Oh c'est vraiment toi ? J'avais peur de me tromper... Dit Chenle tout en se grattant l'arrière de la tête.

— C'est pas comme s'il y avait beaucoup de cygnes blancs et noirs dans le coin, sourit Jisung d'un air triste.

Le chinois s'en voulait un peu d'avoir dit ça sans avoir pensé à ce que pourrait ressentir son interlocuteur, c'est pourquoi il s'en excusa.

— Ce n'est pas grave, répondit le coréen. Comment vas-tu ?

— Ça peut aller, mentit Chenle, et toi ?

— On va dire que ça peut aller aussi, je suis content de te revoir.

— Oh... Vraiment ? Demanda désormais le chinois un peu surpris.

— Oui, t'es quelqu'un de gentil, et j'ai l'impression que ça se fait de plus en plus rare aujourd'hui, constata Jisung. Chenle allait répondre, mais le coréen reprit la parole. On va s'asseoir au bord de la falaise ?

Chenle hocha la tête, et les deux garçons marchèrent jusqu'à la petite falaise. Ils s'y assirent dans un profond silence, qui était bien plus apaisant que malaisant.

— Je peux te poser une question un peu indiscrète ? Demanda Chenle, l'air hésitant.

— Oui ?

Le cygne blanc avait légèrement peur de comment allait réagir son interlocuteur.

— Comment ça se fait que tu aies des ailes bicolores ?

Les lèvres de Jisung s'esquissèrent en un petit sourire. Il s'attendait à cette question, car personne ne parlait des cygnes comme lui, et il avait compris que Chenle était un garçon curieux. En règle générale, il aurait été gêné d'en parler, mais Chenle semblait avoir un cœur pur. Donc lui en parler ne le dérangeait pas.

— Je suis simplement né d'un cygne blanc et d'un cygne noir. Mes parents se sont rencontrés avant que les relations entre les deux tribus ne soient aussi mauvaises. Mais avec cette histoire, c'est très rare de trouver un cygne blanc et un cygne noir en couple.

— Et tes parents, ils vont bien ?

Le sourire du bicolore s'effaça soudainement, et le cygne blanc comprit.

— Ils ont été assassinés, il y a huit ans. Dit-il d'une seule traite. Je n'ai pas été tué car j'étais avec des amis qui sont des cygnes noirs, ces derniers m'ont d'ailleurs recueilli et je serais mort sans eux.

Le chinois ne répondit pas sur le coup, bien trop estomaqué par l'histoire que lui avait raconté Jisung. Ce dernier était donc orphelin, et avait donc du vivre sans ses parents, en sachant qu'ils avaient été tués par des cygnes blancs.

— Je suis désolé pour tes parents.

Ce furent les seuls mots que le cygne blanc avait pu dire. Le coréen, en réponse, déposa une de ses mains sur l'épaule de celui qui venait de s'excuser.

— Ce n'est pas ta faute. Au bout du compte, on s'y fait à cette vie. Disons qu'aujourd'hui, je vis pour eux.

A ce moment, Jisung parlait avec douceur, comme s'il essayait de réconforter Chenle, alors que selon ce dernier, ça aurait plutôt dû être l'inverse. Mais il est vrai que désormais, le cygne blanc en était rassuré.

— Bref, sinon pour continuer à répondre à ta question, il y a une autre raison qui fait qu'un cygne peut être bicolore.

— Ah oui ? Et pourquoi donc ?

Le cygne blanc et noir resta silencieux un moment, avant de simplement répondre :

— C'est compliqué, parlons d'autre chose.

Le chinois ne comprit pas pourquoi ce soudain changement de sujet, mais il ne rechigna pas. Il continua de parler avec Jisung pendant plusieurs heures, sans voir le temps passer.

Car le cygne bicolore dégageait quelque chose de rassurant, qui ne donnait pas envie à Chenle de le quitter.