Chapitre 13 | Au bord des limites.

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"Des coups de feu. Des cris. Du bruit, partout. Des explosions. Des morts. Du sang. Du danger. C'était dangereux ici, il fallait s'enfuir. Alors il courait, pour éviter le plus possible de se faire toucher. Il devait essayer de se cacher, de ne pas être vu. Il devait se mettre en sécurité. C'était dangereux. Il risquait de mourir.

Pourquoi était-il là ? Qu'est-ce qui l'avait conduit ici ? Qu'est-ce qui l'avait amené à faire ce choix ? Photographier la guerre avait un côté intéressant, mais il n'était pas invincible non plus. Il ne savait pas ce qu'il faisait là. Ce qu'il savait, c'est qu'il était.. fasciné, d'un côté. Cet univers là avait quelque chose de passionnant, après le fait d'être horrible. Et c'était peut-être ça qui était passionant, justement. Il s'en fichait de voir des gens mourir, ce n'était pas le pire. Ça ne l'attristait pas.

Non.. Il ne ressentait rien. C'est pour ça qu'il était là. Mais il ressentait peut-être un minimum de peur, au fond, dans les moments où il craignait vraiment d'être touché. Il ne voulait pas mourir, pas avant d'avoir ressenti quelque chose de fort, de vrai, qui lui donnerait vraiment la sensation d'être vivant, enfin. Il avait toujours vécu sans vraiment vivre. Il existait, peut-être, mais il ne vivait pas vraiment. Il était simplement là.

Alors peut-être qu'ici.. Enfin... Il ressentirait cette sensation tant attendue.. Mais quand ? Et surtout comment ? Il n'avait pas le temps de se poser des questions, il avait des photos à prendre. Alors il partit à nouveau à travers tout ce danger ambiant."

Mais avant tout, il se réveilla.

Lui aussi, ça lui arrivait de se réveiller en pleine nuit, presque en sursaut, devant ce qu'on pouvait appeler des cauchemars. Ça faisait longtemps qu'il n'avait plus rêvé de ça. Avant, au début, il avait eu l'habitude de faire beaucoup de cauchemars sur sa période de photographe de guerre, après son accident. Il y avaient aussi beaucoup de gens qui pensaient que ça l'avait traumatisé. Lui, il n'en savait rien.

Il n'avait pas l'air de le vivre si mal que ça, plus maintenant, en tout cas. Et puis, suite à ça il avait développé ses tendances pour l'art, alors il n'avait pas le temps d'y penser. Ou bien en tout cas, ça l'aidait justement à se concentrer sur ce qui était important. Il n'y avait pas toute sa vie d'artiste sans celle de photographe de guerre.. L'une avait été créée par l'autre. Il n'aurait jamais pu créer son art sans cet accident. Et il lui en était reconnaissant, grâce à lui, il pouvait réellement voir et comprendre la vie, le monde.

Sauf que pour l'instant.. Il ne pouvait plus rien faire. Encore. Et il ne savait pas quand il pourrait reprendre. Ça faisait.. une semaine de plus, sûrement ? Il ne savait même plus. Sans son art, il ne savait presque plus qui il était. C'était tellement important pour lui, il devait créer. C'était le but même d'un artiste, qu'était-il sans ça ? Ça n'avait aucun sens. Et il ne pouvait pas arrêter de tuer des gens, ça aussi il en avait besoin. C'était tout aussi essentiel, c'était la base de son art. La mort, tout simplement, il avait besoin d'elle.

Mais ça faisait déjà quelques semaines qu'il devait se retenir, il ne savait pas pourquoi, ni pour combien de temps encore. Il avait dit à Matthew que c'était seulement provisoire, le temps qu'il fasse ses "analyses"... Est-ce qu'il avait fini de l'observer, maintenant ? Il avait pu parler avec lui, non ? Il avait un minimum pu savoir quels problèmes il avait ? C'était bon, maintenant, qu'est-ce qu'il voulait savoir de plus ?

"Tout", il se disait. Et il le savait. Matthew voulait tout savoir de lui. Donc son enfance, sa famille, aussi, sa vie avant la guerre. Toute sa vie avant qu'ils ne se rencontrent. C'était fatiguant, pourquoi voulait-il savoir autant de choses ? Il lui faisait presque un interrogatoire, là, c'était à la limite de faire peur. C'était donc ça, que faisaient les gens "normaux" entre eux ? Ça aussi, il lui avait dit, que c'était juste normal.. Mais lui, il n'était pas normal.

Il s'en fichait d'apprendre des choses sur les autres, ils ne servaient à rien. Alors dire des choses sur soi-même, c'était pire. Les gens n'avaient pas à savoir ce qu'il avait vécu, quel genre de vie il avait eu dans quelle famille. Ça ne regardait personne. Et personne n'avait le droit de savoir ça sur lui. Personne ne méritait de connaître des choses sur lui. À part peut-être une exception.. Mais même lui, ils s'étaient tous les deux rendus compte qu'il ne connaissait presque rien de Stefano. Seulement l'essentiel.

Mais Matthew voulait en savoir plus, alors que ce n'était pas nécessaire, pourtant. Qu'est-ce que ça lui apporterait ? Qu'est-ce que ça changerait à sa vie ? Il voulait juste apprendre à le connaître.. Mais Stefano ne savait pas pourquoi. Il ne savait pas pourquoi il insistait tant. Pourquoi il restait toujours, pourquoi il ne fuyait pas et pourquoi il ne le détestait pas. Pourquoi il ne le regardait toujours pas avec dégoût ? Pourquoi depuis toujours, il avait été le seul à vraiment apprécier ce qu'il faisait, et à l'apprécier lui ?

Pourquoi il avait l'impression de.. vraiment se sentir apprécié de quelqu'un, voire aimé ? Même ses propres parents, justement, ils ne lui avaient jamais autant témoigné d'affection. Il ne s'était jamais senti aimé des autres, des propres membres de sa famille... Toutes les personnes qu'il avait pu rencontrer n'étaient jamais restées bien longtemps, de toute façon, et il sentait, il savait que ce n'étaient pas de vraies amitiés. Ce n'était pas sincère, parce que lui n'était pas sincère, et parce que les autres n'avaient pas forcément envie de lui parler.

Visiblement, il avait toujours été bizarre aux yeux des autres. Depuis tout petit, il avait l'impression d'être différent, pas comme eux. Et en grandissant, ce n'était toujours pas parti. Les autres continuaient de trouver qu'il était étrange, qu'il ne parlait pas beaucoup, qu'il n'avait pas les mêmes centres d'intérêt qu'eux. Alors après son accident, pas étonnant qu'il se soit encore retrouvé seul.. Il n'avait personne. Il n'y avaient que lui et son art.

Puis il avait rencontré quelques personnes avec qui il avait semblé bien s'entendre, avant de les tuer pour son art, justement. Il n'avait besoin de personne. Jusqu'à ce qu'il rencontre Matthew, cette fois, et sérieusement. Depuis, il se demandait encore ce qu'il faisait. Pourquoi il le laissait en vie, pourquoi il continuait de rester à ses côtés, lui aussi, pourquoi il aimait autant être avec lui.. Ça aussi, ça n'avait aucun sens. Mais il n'avait pas le temps de repenser à sa vie, là, et encore moins à pourquoi il se trouvait autant faible. Ce n'était pas le moment...

Il ne savait pas de quoi c'était le moment, en fait, au milieu de la nuit, couché dans son lit à avoir des réflexions existentielles sur soi-même. De toute façon il s'en fichait, de savoir pourquoi il était comme ça, pourquoi il faisait tout ça.. Tout ce qu'il voulait, c'était reprendre son art, évidemment. Il en avait marre, il ne pouvait plus attendre. Parfois, il se demandait aussi pourquoi il en avait tant besoin, justement, mais ces pensées-là aussi disparaissaient vite. C'est vrai, pourquoi il créait, après tout ? Qu'est-ce que ça avait de si vital ?

Enfin non, d'après Matthew, ce n'était pas vital. C'était juste son cerveau qui.. ne savait pas ce qu'il faisait. Alors le mieux pour guérir était déjà d'arrêter, pour commencer. S'il se retenait suffisamment de temps.. s'il ne pensait plus à son art, il y avait peut-être moyen d'arrêter définitivement cette passion morbide. Mais il ne voulait pas arrêter, et il voulait encore moins guérir. Il s'en fichait, comme d'habitude. Il faisait juste ce qu'il avait envie de faire sans se poser de questions, sans se compliquer la vie.

Mais maintenant on le privait de ce qu'il aimait faire.. Et il ne savait toujours pas pourquoi il obéissait, aussi. Il lui suffisait simplement de chercher sa nouvelle proie.. puis de faire ce qu'il avait à faire pour créer son art. C'était simple, et c'était ce dont il avait besoin. Il devait voir la mort, il devait absolument la revoir. Il la trouvait si belle, si inspirante, il ne pouvait pas vivre sans elle. Et à présent, ça faisait déjà trop de jours qu'il avait arrêté, juste pour Matthew.

Après tout, il pourrait lui désobéir.. Rien ne lui disait d'accepter ses ordres... Il n'avait jamais obéi à personne, alors pourquoi à lui ? Il pouvait juste arrêter de se retenir, c'était si fatiguant, ça aussi.. C'était plus simple de se laisser aller, de se laisser contrôler par l'autre partie de lui-même, la partie sombre. La plus forte, aussi. Il sentait qu'il approchait des limites, Matthew n'aurait jamais dû lui faire confiance. Il avait sous-estimé le psychopathe qu'il était, le monstre qui se cachait en lui...

Et il était puissant, il sentait qu'il allait finir par s'échapper, bientôt. Il ne pourrait plus le contrôler. Il allait recommencer, c'était sûr, et il ne voulait pas se retenir, de toute façon. Il voulait reprendre son art, alors pourquoi lutter ? Il pouvait bien réussir à ignorer ça, oublier au moins un instant quand il était avec Matthew, qu'il parlait avec lui, mais il savait que ça ne marcherait pas éternellement. Il allait le décevoir... Il ne savait juste pas quand, même s'il savait que c'était proche.

Par contre, il ne savait pas que Matthew, lui, avait peur, justement, qu'il reprenne un jour ses meurtres. Il craignait le jour où ça arriverait, car il savait que ça finirait par arriver. Il ne pouvait pas changer Stefano, l'empêcher de faire ce qu'il voulait vraiment faire.. Il était inarrêtable, malheureusement. Alors en attendant, tous les deux appréhendaient plus ou moins le jour fatidique.

Stefano savait qu'il était au bord de ses limites, et Matthew espérait malgré tout qu'il arrive à se contrôler jusqu'à la fin. Mais tous les deux savaient que c'était impossible, alors comme d'habitude.. ils étaient bloqués.

Et tout ce qu'ils pouvaient faire, comme d'habitude, c'était d'attendre.

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