Deux êtres puissants, deux amis, deux frères d'armes, de cœur, se faisaient face au milieu des plaines chatoyantes de Guilli.

- Layuli, je vais partir pour le gouffre quelques temps.

- Hum ? Comment ça ? Tu es vraiment sûr dans ton état ?

- Oui. J'ai ressenti une grande quantité de miasme, il faut que j'aille voir.

- Mais tu ne peux pas ! Tu m'as dis toi même que tu commençais à avoir des pertes de mémoires, tout porte à croire que tu as atteint ta limite de karma !

- Oui je le sais, mais ce n'est rien, j'ai encore toute ma tête tu sais. Si je t'en parles c'est que je ne veux pas que Xiao soit au courant ou qu'il parte à ma recherche... Tu sais, il a beau avoir l'air impassible, je sais que la mort de nos compagnons l'a beaucoup affecté.

- ... Tu es entrain de me dire que tu vas les rejoindre !?

- Aah... ce n'est pas ça.

Il se frotta l'arrière de la tête d'un air embarrassé puis, voyant qu'elle le fixait d'un air sérieux et inquiet, il finit par lui avouer :

- ... Mmh. Prend soin de lui s'il te plaît...

Le sourire chaleureux qu'il affichait ne plaisait pas du tout à Layuli... Elle ne le connaissait que trop bien maintenant, il cachait quelque chose.

- Hors de questions que je te laisses partir tu entends ! Jamais !

Oui elle savait... Elle venait de comprendre, elle en était même sûre maintenant : c'était un adieu.

Effectivement il admit :

- ... Écoute, je sais que ce n'est qu'une question de temps avant que je ne sombre moi aussi, alors, une dernière fois au moins...

Il observa l'immensité des plaines de Liyue, la beauté de ce pays qu'il avait protégé durant des siècles aux côtés de ses camarades, puis sourit :

- Je veux pouvoir faire quelque chose pour la paix si durement gagnée perdure. Et surtout... je ne veux pas que vous me voyez perdre la raison et soyez contraints de me tuer.

- ...

Il posa l'une de ses quatre grandes mains sur l'épaule de la rouge. Chaleureusement.

- Je veux que Xiao se souvienne des bons moments passés ensemble, je refuse que la dernière image qu'il ait de moi soit un monstre incontrôlable. Tu comprends ?

- ...

Une larme glissa sur la joue de la jeune femme :

- Et moi alors ? Qu'est-ce que je vais lui dire !? Il ne sait même pas que tu commence à perdre contrôle ! Il ne me croira jamais ! Il te cherchera s'il estime qu'il y a une chance pour que tu sois toujours en vie !

- Dans ce cas...

- Idiot. Idiot !! Sûrement pas ! Ce n'est pas juste ! Tu es là, bien vivant devant moi, tu ne peux pas me demander une telle chose ! J-je ne peux pas tu entends ! Comment lui mentir sur une chose pareille !! Lui faire croire que tu es mort !? Et puis quoi encore !

Une autre larme, puis une autre, et encore une... La tristesse l'envahissait, elle considérait Bosacius comme son frère. De plus il avait été le premier Yaksha, il était l'aîné. Ils avaient partagés tant de choses ensemble.

L'air peiné de la voir dans cet état, il posa deux de ses grandes mains sur ses épaules tandis qu'une autre effaçait une larme du pouce, captant son regard :

- Je dois me rendre dans le gouffre coûte que coûte, je t'en prie Layuli, considère ça comme ma dernière volonté.

Ce que Bosacius ne lui disait pas c'est que c'est aussi pour Morax qui désirait tant aller là bas.

Sentant une grande menace surgir des profondeurs, Rex lapis avait entrepris de se rendre lui même au gouffre pour régler le problème. Cependant, Bosacius avait insisté pour y aller à sa place et absorber les miasmes une dernière fois. C'était en quelques sorte sa manière de lui dire merci et adieu.

Sa dernière volonté.

Il sentait son état instable depuis quelques temps et désirait plus que tout, s'enfoncer dans les profondeurs de la terre afin que le mal disparaisse à jamais avec lui. Et ce, même s'il ne savait pas le temps que ça prendrait.

Morax comprenait les raisons qui poussaient le yaksha à être si volontaire. Et bien qu'il soit un peu réticent au départ, il avait finit par céder à sa demande. Il respectait son choix.

- Promet moi de ne jamais révéler la vérité à Xiao...

- ...

- Layuli...

Il essuya d'un pouce l'une de ses joues à nouveau tandis qu'elle l'implorait du regard, le suppliait silencieusement de ne pas y aller.

Mais c'était peine perdue car il l'avait déjà décidé.

- Je... te le promets...

- Merci.

Il caressa sa tête affectueusement une dernière fois avec un doux sourire avant de lui donner un bout de sa tenue en guise de future preuve de sa disparition.

Puis tourna le dos.

-...

La jeune femme ne pu s'empêcher de venir l'enlacer par derrière une dernière fois, ce qui le surpris.

- Tu as toujours été comme un frère, je t'aimerai toujours. Je tiendrais parole...

Il arbora un dernier sourire. Il lui faisait confiance.

Ce fut la dernière fois qu'elle le vit.

Lorsqu'elle rentra, Xiao ne se doutait de rien, il n'était pas rare que Bosacius s'absente plusieurs jours lorsqu'il combattait.

Seulement ça ne dura pas...

Connaissant celle qu'il aimait par cœur, il ne mit pas longtemps à remarquer qu'elle fuyait son regard et mettait un peu de distance. Et puis, il avait l'impression qu'elle se forçait à sourire.

Mais pensant que ce n'était que passager, il ne dit rien.

Le lendemain elle avait l'air comme d'habitude, plus ou moins... comme il s'était battu toute la journée, il ne remarqua rien de nouveau.

Puis... Vint ce fameux jour...

Xiao s'était rendu compte que quelque chose n'allait pas.

- Je pars à sa recherche, cela fait trop longtemps qu'il est partit, ce n'est pas normal. avait-il déclaré.

Layuli, en proie au stress, l'avait retenue par le bras. Oh comme elle redoutait cet instant.

Qu'allait-elle bien pouvoir inventer pour justifier la disparition de Bosacius sans que Xiao ne se mette à le chercher...

Il la fixait d'un air interrogatif.

Pourquoi le retenait-elle ?

- Xiao écoute.

Sa main tremblante n'augurait rien de bon.

Le Yaksha se tourna pour lui faire face en fronçant les sourcils.

- Tu trembles, tout va bien ?

On pouvait lire de l'inquiétude dans les pupilles ambres du garçon.

De ses mains gantées il prit doucement les siennes.

Elle semblait mal à l'aise, ce n'était pas normal. Elle ne l'était jamais avec lui, quelque chose n'allait pas.

- Layuli... Parle moi...

Elle détourna le regard tristement, il fallait qu'elle lui dise quelque chose, et vite.

Que dire pour que Xiao ne se doute de rien et ne parte pas à la recherche de son frère d'armes..?

- J-je...

Il l'écoutait, la fixait sans un mot, Bosacius attendrait, celle qu'il chérissait passait avant.

Soudain elle su. Cependant elle hésita. Leur belle relation ne serait jamais plus la même après ça. Elle risquait de tout briser, ça lui fendait le cœur, pour elle oui. Mais surtout pour Xiao qui se sentirait obligatoirement trahis.

C'était pourtant bien la seule idée qui lui vint. Ridicule. Elle se maudissait déjà. Mais elle avait donné sa parole. Et plutôt que de révéler à Xiao que le dernier Yaksha à leurs côtés avait commencé à perdre le contrôle, qu'il s'était jeté au beau milieu du gouffre en plein milieu des miasmes, qu'il endurait probablement mille et une souffrance, elle préfèra lui mentir.

Au moins, pensa-t-elle, il ne chercherait pas à rejoindre Bosacius dans l'espoir de le ramener, il ne serait pas triste de savoir qu'il commençait à tout oublier...

Alors elle prit son courage à deux mains, et, décidée, elle planta un regard assuré dans le doux regard de l'adepte qui ne saurait changer d'expression bien assez tôt...

- Je... l'ai tué.

Elle avait quand même eut un instant d'hésitation mais trop tard, la bombe était lancée.

Il eut un choc. Avait-il mal entendu !?

- Quoi ?

Forcément il avait mal compris.

- J'ai tué Bosacius.

- ...

Il la fixait intensément. Ce regard vif signifiait clairement qu'il n'aimait pas du tout cette mauvaise plaisanterie.

Et il l'a lâcha.

L'ennui c'est qu'elle ne scillait pas, soutenant avec fermeté son regard.

Un frisson désagréable le parcouru de toute part. Et si... c'était vrai ?

Non c'était tout bonnement impossible, elle en était incapable ! Elle adorait Bosacius ! Elle avait partagée tant de choses avec lui, avec eux tous !

Elle mentait !

Seulement il ne parvenait plus à parler. Elle avait semé en lui le doute, il se sentait mal, tiraillé entre l'incompréhension de ses propos, l'air sérieux qu'elle affichait et son incapacité à croire en ces mots.

Et il l'aimait aussi ! Comment celle en qui il avait le plus confiance aurait-elle pu commettre un tel acte !?

Non impossible vraiment...

Et pourtant...

- Tu as bien entendu Xiao.

- ...

Il eut un mouvement de recul :

- Tu mens Layuli ! Comment oses-tu dire ce genre de choses !?

- Tu ne me crois pas ? Il y a une semaine, jour pour jour, tu combattais des monstres au Marais Dihua. Pendant ce temps Bosacius et moi avons eu un accrochage au beau milieu des plaines de Guili. Je l'ai tué tu entends.

- C'est... impossible...

- Si tu ne me crois toujours pas... Va voir par toi même près de l'eau. Je doute que la pluie ai effacée toutes traces de ce genre de combat.

Il la fixa intensément. Il ne la croyait pas. Il allait donc devoir aller voir sur place mais... il craignait grandement de voir ce qu'elle décrivait. Pourtant il continuait de croire... Croire qu'elle lui mentait, qu'il s'agissait d'une mauvaise blague, que Bosacius l'attendait là bas, son fameux grand sourire aux lèvres.

Il disparu. Non sans lui lancer un dernier regard, indéchiffrable.

Elle avait préparée le terrain au préalable, en prévention de ce genre de situation. Xiao ne pouvait douter. Car elle avait attachée à un arbre un bout de la tenue de Bosacius, une longue bande de tissu violet, qu'il lui avait donné avant de partir.

Le terrain lui ayant servi de défouloir, il était pareil à un champ de bataille.

Xiao n'en croyait pas ses yeux.

Son cœur battait à en plus pouvoir, l'angoisse l'étouffait presque.

Et lorsqu'il vit le tissu violet virevolter au gré du vent, ce fut le coup de grâce.

Nombre d'émotions firent surfaces.

Il se sentait totalement trahis, seul, en colère et triste. Totalement déchiré, totalement détruit.

Il prit le tissu du bout des doigts et le décrocha.

C'était donc vrai. Bosacius n'était plus.

Des gouttes d'eau salée vinrent s'écraser contre le sol.

Il sentait la douleur, s'immiscer en lui, de plus en plus fort.

- ...

Pourquoi... pourquoi avait-elle fait ça !?

Il ne comprenait pas.

Qu'avait-il bien pu se passer entre eux !? Bosacius ne pouvait pas être mort !! Il était le dernier ! Le dernier...

Non maintenant c'était lui, c'était Xiao le dernier des cinq Yakshas.

Et elle... Layuli. Comment avait-elle pu tuer Bosacius !? Comment avait-elle pu !!??

Il sentait la colère l'envahir. Non la rage.

Et c'est après qu'il l'avait confronté.

Un duel à mort, dont seul l'un des deux sortirait vainqueur et vivant. Lui en l'occurrence.

Il avait gagné ce combat. Mais avait perdu, amour, famille et amitié.

Il était seul à présent.

Vide.

N'ayant plus foi en rien.

Il ne faisait que se battre contre les miasmes. Chose qu'il avait toujours fait, et qu'il continuerait de faire jusqu'à la fin.

Seul.