Depuis que je t'observe, rien n'a changé. Les arbres ont perdu leurs belles feuilles dorées qui tapissent désormais le sol comme d'un tapis royal. Les quelques roses noires ayant survécu aux violentes pluies ont fané et pourrissent désormais à l'endroit où je repose.

Malgré tout ce temps, ces quatre mois écoulés, tu n'as pas changé. Tes yeux sont restés voilés de tristesse ; tes cheveux ont poussé négligemment et t'arrivent désormais aux épaules ; ta barbe à grandi n'importe comment et pointe par touffes noires entre deux rasages irréguliers.

Tu refuses d'avancer, et mon ombre plane sur toi à tout moment. Il te suffit de commencer à remonter la pente pour glisser sur un caillou nommé «souvenir», la dégringoler et retomber plus bas que terre.

Raye moi enfin de ma vie, je t'en prie. Tu ne peux pas vivre dans les souvenirs incertains, le passé est passé et tu dois t'en défaire, même si mes réminiscences en sont le prix.

J'ai été ton ange un court instant ; j'ai pour obligation de laisser désormais ma place à un autre qui te rendra tout aussi heureux que moi de mon vivant. J'ai le devoir de laisser ton esprit en paix et ton corps libre de tout chagrin ; je vais monter au ciel et je ne reviendrais plus te hanter. Tout au plus quelques secondes dans ta journée, en écoutant une chanson ou en te disant une phrase, tu penseras à moi ; je ne monopoliserai plus ton attention et je ne t'obligerai plus à penser à moi chaque seconde. Maintenant, je veux juste que tu passes à autre chose. Maintenant, je te laisse seul face à l'avenir ; je te laisse tourner la page et écrire ta destinée.