Une heure après Minuit

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J'étais là, assis sur mon lit, et je regardais cet objet vieux d'un siècle. Il était là, devant moi aussi mystérieux à mes yeux que l'enfer ou le paradis pour les hommes.

Je me demande ce qui m'a pris de le ramener à la maison. C'est sûrement la curiosité. Mais, il n'y avait pas que ça... Autre chose aussi...

Donc je suis là, devant lui, et je le regarde. C'est une boite, qu'il est possible de fermer. Sur le couvercle, qui est en bois comme tout le reste de la boite, se trouve une feuille dans une pochette.

On était chez mon voisin, Monsieur Dormeau. Celui-ci est mort il y a trois jours, le 26 juin, et ses petits enfants sont venus vider la maison.

La boite est composée d'un combiné de la même forme que les téléphones à fils c'est à dire un manche avec à chaque bout, deux hauts-parleurs, l'un pour écouter, l'autre pour parler.

Comme j'aimais bien mon voisin, j'adorais quand il me parlait de la deuxième guerre mondiale, je les ai donc aidés à ranger la maison.

De cet objet, sort un fil jaune, qui est relié à une boite noire placée devant. Sur le côté se trouve une manette, avec écrit les chiffres 1 et 2. Plein d'écrous composent l'intérieur de la boite.

Après quelques temps de rangement de la cuisine et de la chambre, avec Julien, le petit fils de mon voisin, qui a 21 ans, je suis monté dans le grenier. Celui-ci était grand et rempli de toutes sortes d'objets.

Sur le côté gauche, se trouve une autre petite boite, en bois aussi, avec une serrure sur le dessus. Je me demande à quoi peut bien servir tout ça...

J'ai fait le tour de la pièce, avant de remarquer la présence d'un objet étrange, on aurait dit que celui-ci m'appelait. Il voulait que je le prenne. J'ai demandé à Julien, si je pouvais le ramener, et celui-ci a approuvé. Je rentrai donc chez moi, tout content de ma trouvaille sans savoir que cet objet était vraiment spécial, et peut être magique?

...

Ma mère toque à ma porte pour me demander de venir manger. Je cache l'objet sous mon lit, avant d'aller me laver les mains. Dans la salle de bain, je m'observe. Mes cheveux bruns en bataille, un léger bronzage de l'été qui vient de commencer, et des yeux bleus presque transparent tout ce qui font que je suis ce que je suis : un mec banal. Il ne se passe jamais rien dans ma vie. C'est banal. A table, je ne parle pas, et mes parents m'en font la remarque.

- Lucas, ça s'est bien passé le rangement chez les voisins?

- Oui, je réponds.

- Et vous avez fait quoi? Demande mon père pour enrichir la discussion.

- On a rangé...

- Mais vous avez rangé quoi? Questionne alors ma mère.

- De tout, je réponds lassé de leurs questions. Je n'avais qu'une seule envie, de retourner dans ma chambre, pour essayer d'en découvrir plus sur cet objet. Pour une fois qu'il se passe quelque chose d'intéressant.

Après le repas, je monte dans ma chambre, et sors l'objet de dessous mon lit. J'attrape aussi mon ordi, et m'installe. Je commence à chercher, mais je ne sais pas quoi mettre dans la barre de recherche d'internet, « Objet première guerre mondiale»? « Boite première guerre mondiale en bois»? Je ne sais pas. J'opte pour « boite en bois ancienne première guerre mondiale ressemble à un téléphone». Je vais sur Wikipédia, mais ne trouve rien d'important ni d'intéressant. Je tombe alors sur un site intitulé « objets de guerre, hommes de guerres ». En y allant dessus, je trouve alors plein d'images, représentant des objets de guerre je suppose, mais aussi des photos d'hommes, habillés en uniforme de guerre, tous bien droits, avec leur femme ou leur régiment...

Je fais défiler les images et observe plein de photos et j'ai comme un pincement au cœur. Ils étaient des hommes normaux, avec un métier, une femme, des enfants, une vie quoi! Et là, des hommes trop imbéciles se sont mis en tête de se battre entre eux, mais ils ne vont pas au front, c'est des millions de vies qui sont mises en danger, des vies qui n'ont rien demandé. Je trouve que la vie est injuste!

Je finis par tomber sur l'image d'une boite fermée qui m'intrigue. Je clique dessus mais ne voit que deux photos: une avec la boite ouverte et une autre fermée. Les deux images sont de très mauvaise qualité, et on n'y voit presque rien. La description me permet de reconnaître la boite qui se trouve sous mon lit. Il est écrit «qu'aucun n'a été retrouvé à ce jour». C'est donc pour cette raison que peu de photos sont présentes! Je m'accroupis devant mon lit. J'observe tour à tour l'objet et l'image. J'ai donc un téléphone de campagne de 1916 entre les mains! Le seul téléphone qui reste! Je ne sais pas, mais cet objet m'intrigue, et même si je sais maintenant ce que c'est, j'ai l'impression qu'il renferme encore de nombreux secrets.

...

Le lendemain, je me réveille avec l'impression d'avoir fait un cauchemar, mais quand j'ouvre les yeux, je découvre mon ordi sur mes jambes, et le téléphone à coté de mon lit. C'est donc la réalité, ce n'est pas un rêve! Je passe la journée à faire des recherches sur mon ordi, et en milieu d'après-midi, je vais chez mon voisin pour espérer voir Julien, avec qui j'ai lié d'amitié. Je lui demande des explications sur le père de Monsieur Dormeau.

- Que veux-tu savoir?

- Qui il était, son nom, son histoire, tout ce que tu sais sur lui...

- Je ne sais pas grand-chose... Les seules choses que je connais, c'est ma grand-mère qui me l'a dit. Et elle-même, c'était sa belle-mère, donc mon arrière-grand-mère, qui lui a raconté. Il s'appelait Jean Dormeau. Son vrai nom, c'était Jean Germain Léon Dormeau. Je sais qu'il est mort pendant la première guerre mondiale, très jeune. La seule chose que l'on a de lui, c'est le téléphone que tu as récupéré, et de vieux papiers...

- Où sont-ils?

- Chez moi, viens...

On va chez lui, et pendant qu'il cherche dans son bureau, j'observe des papiers qu'il tend de temps en temps au fur et à mesure qu'il en trouve. Il finit par sortir une dernière liasse de papier qu'il me tend. Je feuillette rapidement le contenue et tombe sur une fiche militaire, des lettres, et d'autres papiers officiels. Je remercie Julien, et court prendre le bus, pour aller au centre des archives départementale. J'entre, et une femme au regard venimeux me scrute de la tête aux pieds. Il faut dire que ce ne doit pas être tous les jours qu'un lycéen habillé en short et tongs, doit venir ici.

- Ce n'est pas ici le centre de loisir! M'apostrophe-t-elle.

- Je sais, répliquai-je, mais je viens pour...

- Allez-vous en, ce n'est pas pour des enfants!

- Mais... C'est bon je m'en vais!

Elle m'a énervée!

Je rentre en colère et passe le reste de la journée sur le canapé à regarder la télévision. Je me couche vers 11 heures, totalement fatigué et énervé de ma journée que je trouve inutile.

...

Je marche dans le noir. Je suis dans le couloir de la maison, car je reconnais la porte de ma chambre. Je la pousse et découvre un intérieur tout noir aussi. Un bruit arrive: un long sifflement.

Puis une explosion, et je me retrouve à un endroit que je ne vois pas, car il fait toujours noir, et là c'est la nuit, car je distingue la lune à travers ce qui peut ressembler à des nuages. Je suis à l'extérieur. Des bruits de fusils résonnent dans ma tête. Mais ici, ils sont réels. Un autre sifflement traverse l'air.

Une autre explosion.

Cette fois ci je ne suis plus dans un endroit sombre. Je suis dans une pièce lumineuse, et une charmante jeune fille se trouve devant moi. Elle est belle.

- Jean, dit-elle en se rapprochant bizarrement de moi, avec un grand sourire sur le visage. J'ai une bonne nouvelle.

Pourquoi elle m'appelle Jean? Pourquoi je suis là? Qui est-elle? Que va-t-elle faire? Où suis-je? Et qui suis-je? C'est lorsqu'elle m'embrasse, que j'arrête de penser. Elle approche sa bouche de mon oreille et me murmure:

- Je suis enceinte Jean!

Je suis stupéfait. Pourquoi me dit-elle ça? Une sonnerie retentit au loin. On dirait une alarme incendie. C'est après ce qui me paraît quelques minutes, que je me rends compte que ce n'est pas dans mon rêve que ça sonne.

J'ouvre un œil, et mon réveil indique une heure du matin. C'est de dessous mon lit que provient le son. Qu'est-ce qu'il y a sous mon lit? Il n'y a rien à ma connaissance, sauf le téléphone de 1916. Pourquoi sonne-t-il? Il est vieux de 100 ans. Je le sors, sans toucher à tout ce qui pourrait le décrocher... Le son provient bien de cet objet. Il sonne! Le temps que je trouve une idée de ce que je pourrais faire, il s'est déjà tu. Je regarde l'objet qui m'a tiré de ce rêve. Je me demande quoi en faire... Je me dis que je verrais ça demain. Je le repousse sous mon lit et essaye de me rendormir.

Mais impossible.

Je repense à cette jeune femme. Et si je me rendors, j'ai peur que le téléphone se mette à sonner.

Comme je suis sûr de ne plus retrouver le sommeil de la nuit, j'ouvre mon ordi, et tape «homme de guerre 1914». Le premier site proposé est «Mémoire Des Hommes». J'ouvre la page, cherche le nom de Dormeau, et tombe sur 12 résultats. Je cherche un peu plus et tombe sur celui que je cherche: Jean Germain Léon Dormeau. Il a appartenu au 154e régiment d'infanterie. Je pars ensuite sur Wikipédia, et cherche des informations sur le régiment auquel il a appartenu.

Je trouve de nombreuses informations, et note toutes les défaites et victoires du corps. Une date retient mon attention: Le 1er Juillet 1916. C'est le jour d'une défaite, la plus grande de la première guerre... Je suis dans le doute et dans l'incompréhension. J'ai l'impression d'avoir une réponse sous les yeux mais que je ne la vois pas. La seule chose que j'ai devant moi, c'est mon téléphone, et l'ordinateur.

Je fais des recherches toute la matinée, et c'est à 10h30, ma mère qui pensait que je dormais, entre dans ma chambre, et s'étonne de me voir réveillé. Elle m'oblige à aller manger, avant de pouvoir continuer quoi que ce soit.

...

Quand je reviens de la salle de bain, et après avoir déjeuné, je suis toujours dans l'embarras. Je trouve les papiers de Julien. Il y a des lettres. De vieilles lettres. De 1916. L'une est la permission de Jean. Il a été en permission du 14 au 22 mars. Il y a une autre lettre, écrite à la main cette fois-ci. Je l'ouvre et découvre un texte très émouvant.

« Cher Jean,

Comment expliquer combien tu me manques. Je ne peux m'empêcher de penser à toi. Tu es omniprésent dans mon esprit. Ta dernière permission de mars, est déjà trop lointaine. Tu me manques. Je veux me retrouver dans tes bras, qu'on discute ensemble, et que tu puisses me soutenir, que tu sois là quand notre enfant naîtra. D'ailleurs, j'ai trouvé des prénoms: Juliette pour une fille, et Pierre pour un garçon. J'espère que ces prénoms te plaisent.

Pour passer le temps, je travaille. Mais je vais bientôt devoir arrêter. Je ne sais pas comment je ferais pour manger. Je pense demander de l'aide à Gertrude, en lui proposant de garder ses enfants. Je verrais le temps venu.

Je pense aussi à notre mariage. Je fais des économies. Mais je n'aurais jamais assez. J'espère te revoir bientôt. Je pense à toi, ne l'oublie pas, et souviens toi que je t'aime.

Ta bien aimée,

Marianne

Fait le 1er juillet 1916 à Soissons »

Je repense à la fille de mon rêve. Ne m'a-t-elle pas appelé Jean? Ne m'a-t-elle pas dit qu'elle était enceinte? Non, ce n'était qu'un rêve !

Je décide de prendre mon vélo, et de retourner au centre des archives départementales.

Lorsque j'entre, je ne trouve plus la femme au regard venimeux, mais une charmante jeune fille. Je lui donne mes papiers, en lui demandant des renseignements sur Jean. Elle se lève, prend des papiers dans une grande armoire, et me les tend. Je la remercie et vais au centre-ville. Je m'installe sous un banc et commence la lecture.

...

Mon ventre se met à gargouiller. Je regarde l'heure, et me rend compte qu'il est une heure de l'après-midi. Je me dépêche de ramasser mes papiers, et rentre chez moi. Après avoir mangé un peu, je repars dans ma lecture. Au bout de 10 minutes, j'ai fini. Je n'ai rien appris que je ne connaissais déjà. A part qu'il habitait à Soissons, et des dates importantes de sa vie...

...

Je suis dans un trou. J'entends des pas au-dessus de moi. Je crie, mais personne ne répond. J'essaye de me lever, mais ma jambe est ouverte au niveau du genou. J'arrache un bout de mon vêtement, comme dans les films, et je me fais un bandage. Je remarque que le tissu que je viens de prendre, et un morceau d'un uniforme de soldat. Il est bleu comme le ciel lorsqu'il n'y a pas de nuage. Je me relève, et essaye de sortir de ce trou. Des sifflements passent au-dessus de moi. Comme ceux des westerns. Je rampe sur le sol. J'arrive vers ce qui ressemble à un grand fossé où il y a de la lumière. Mais des barbelés m'empêchent de passer.

Soudain, un sifflement apparaît dans ciel, et une énorme explosion à côté de moi m'assourdi.

Puis c'est tout noir.

La lumière apparaît, mais là je suis comme spectateur, invisible. Moi, dans cette pièce, et la jeune fille en face de moi. Elle s'approche, m'embrasse, et me dit qu'elle est enceinte.

Le noir réapparaît, mais un bruit l'accompagne. Une alarme, comme celle des pompiers, la même qu'hier.

J'ouvre les yeux, tire le téléphone de dessous mon lit. Je le regarde, et essaye de me concentrer car m'étant levé si rapidement, j'ai la tête qui me tourne. Mais la curiosité l'emporte, et je décroche le combiné. Une voix parle, mais un grésillement m'empêche de distinguer bien la voix du fond sonore:

« Ici le soldat Jean du ... ..-giment d'infanterie. NOUS AVONS BESOIN DE RENFORT SUR ... FR-.. DE LA SOMME ! IMMÉDIATEMENT ! JE RÉPÈTE, NOUS ..... BESOIN ... RENFORT ! LES ALLEMANDS ATTAQUENT ! »

Je repose immédiatement le téléphone. Je suis stupéfait. Je ne réalise pas qu'un français de 1916 vient de m'appeler, moi un garçon de 2016 ! Je regarde l'heure, il est 01:02. L'appel a duré deux minutes environ ... Donc deux soirs d'affilés, à la même heure, une téléphone vieux d'un siècle se met à sonner comme ça ... Je suis de plus en plus perturbé. Je reprends ma feuille sur les défaites. Le 2 juillet, il est marqué qu'une défaite se fait ressentir du côté français.

Je réfléchis un peu.

Le « Jean » qui m'a appelé, vit en 1916, et exactement le même jour, il y a juste 100 ans d'écart. Et il y a eu une défaite. Parce qu'ils avaient besoin de renfort, mais comme le téléphone a décroché en 2016, personne n'est venu les aider... Donc ils ont perdus... '' À cause de moi...''

Le matin, ma mère me fait la réflexion, que j'avais mis mon réveil et qu'il avait sonné au beau milieu de la nuit. Je lui réponds que j'avais remarqué et que je l'avais éteint. Tout le long de la journée, je la passe avec Julien, à l'aider à finir de ranger la maison de mon voisin.

...

Je marche, debout, mais avec des béquilles. Ce sont des grands bouts de boit qui sont sous mes bras et qui m'aident à marcher. Je m'appuie laborieusement sur elles pour pouvoir avancer. Je regarde ma jambe. Elle est dans un bandage, et me fait souffrir. Il y a une tache rouge dessus. Devant moi, des personnes habillées en tenues de soldats bleus, avancent comme ils peuvent. Certains ont des béquilles, d'autres sont portés par les plus valides, certains sont amputés, d'autres justes bandés. On dirait que l'on sort de l'enfer.

Je marche.

On passe à côté d'un grand lieu plat, sans arbres, et je découvre un endroit dévasté, il y a au moins 5 fosses par mètres carrés, des corps, des barbelés, des armes, des objets, des casques... Je vois un homme qui quitte le rang, et qui part prendre quelque chose. Il ramène une boite, qui ressemble à celle du téléphone. Il m'explique qu'elle a appartenu à Jean son ami, et qu'il compte la ramener à sa femme. Je déplace ma béquille pour avancer mon pied, mais je trébuche, et le noir m'envahi.

Et là, je me retrouve dans la même pièce de lumière. La jeune fille est là, et son ventre est plus arrondi qu'avant. Elle pleure, et devant elle se trouve l'homme de tout à l'heure. Mais là il est propre et mieux habillé. Il lui tend une lettre, et la boite. Il lui dit:

- Tenez, je suis désolé, Voici le téléphone dont il devait s'occuper. Et une lettre qu'il m'a demandé de vous donner s'il venait à mourir.

La femme ouvre la lettre, va s'asseoir, et commence à lire. Tout en lisant, des larmes coulent sur son visage. Puis étant arrivée à la fin de la lettre, elle la prend, la déchire et la jette dans le feu. Par contre, elle prend le téléphone et le range précieusement. Puis elle s'explique à l'homme présent :

- Si j'ai brûlé cette lettre, c'est que ...

La sonnerie revient.

Cette fois ci, je ne réfléchis pas, et je décroche.

- Ici le soldat Jean du 1..e régiment d'infanterie. Nous avons battu les allemands! Battu, pas vraiment... Ils ont arrêté l'offensive. Ils ont battu en retraite. Mais nous nous attendons à une nouvelle offensive dans trois jours environ.

- Hein ? Tu parles de quoi ????

- Ben de l'offensive des allemands Mon Capitaine !

- Mais quelle offensive ?

- Celle du 1er juillet 1916 Mon Capitaine !

- Mais arrête de m'appeler mon capitaine. Je ne suis pas gradé.

- Mais alors, comment as-tu pu être en possession de ce téléphone?

- Si je t'explique, tu ne t'effraie pas?

- On verra...

- Si je te dis, que je vis en 2016? Tu me crois?

- NON!

- Pourtant c'est vrai, je vais tout te raconter.

Alors je lui dis tout, mais pas mes rêves. Et à ma grande stupéfaction, il m'écoute sans poser de questions... Il m'explique ensuite qu'il a 17 ans, et qu'il est au front depuis peu. A mon avis, s'il ne dit rien, c'est qu'il rêve de mon histoire et que ça lui permet de passer le temps, le front doit être horrible pour lui... Comme pour tous les autres...

À la fin, il me dit qu'il doit me laisser et que l'on reparlera demain. J'arrive enfin à me rendormir, après que le téléphone ait sonné. Pour une fois.

...

Ça fait une semaine que le téléphone n'a plus sonné. La dernière fois, on parlait du monde d'aujourd'hui par rapport à son époque. Je suis content, qu'il ne se soit pas effrayé, et qu'il ne m'ait pas raccroché au nez. On est devenus amis. Mais là ça fait une semaine. Sept jours sans des nouvelles de lui. Et je m'inquiète. J'ai continué mes recherches sans succès... Je n'en ai parlé à personne... Mais ça fait sept jours, sans arrêter de penser à lui, à sa voix, la seule chose que je connais de lui. Je ne veux pas qu'il meure... Je me suis attaché amicalement à lui...

...

Le soir, je dors, je rêve, je rêve de lui, de sa petite amie dont il m'a parlé... Il ne m'a pas dit son nom... Dans mon rêve, j'entends la sonnerie du téléphone. Je finis par me rendre compte, que ce n'est pas dans mon rêve que ça sonne, mais dans la réalité...

Je saute de dessous mon lit, et décroche.

- Ici le soldat Jean du 154e...

- Jean, je suis content que tu sois là ! Le coupais-je. Je me suis fait du souci pour toi.

- Lucas?

- Oui c'est moi, lui répondis-je tout content...

- Mais j'ai essayé de t'appeler à plusieurs reprises, mais je tombais toujours sur le capitaine.

- J'ai réfléchis, et je pense que c'est qu'à 01:00 que l'on peut se parler...

- C'est vrai que je les ai toujours appelés en journée...

- Bon sinon, comment ça va au front??

- Moyen... Je suis fatigué, j'en ai marre...

- Je te comprends...

On parle comme ça pendant longtemps, jusqu'à ce qu'il me dise qu'il risque de se faire repérer par ses camarades... Je le laisse...

...

Et pendant plusieurs mois, on parle, ça arrive, qu'il ne puisse pas m'appeler pendant plusieurs jours, mais je ne m'inquiète plus, ou moins qu'avant, comme la rentrée de septembre est arrivée, et que les devoirs occupent mon temps libre...

...

On est début octobre. Ça fait trois jours que Jean ne m'a pas appelé. En ce moment je ne m'inquiète plus... C'est les aléas de la guerre. La dernière fois, il me disait que tout allais bien, qu'ils battaient les allemands, qu'il se faisait des amis, mais qu'ils mourraient au combat, il me parlait de sa petite amie, et il m'avait dit son nom, Marie, et expliquait qu'il lui tardait de la retrouver car elle était enceinte... Il m'avait lu la lettre qu'elle lui avait envoyée. Mais j'étais trop fatigué pour penser, et je ne me suis pas dit que la lettre, je l'avais déjà lue... On avait fini par raccrocher...

...

C'est aujourd'hui, en cours de maths, quand le prof nous donne des devoirs pour demain, c'est-à-dire le 11 octobre, que tout s'illumine. Et ça me fait peur... On est le 10 octobre.

Jean a une petite amie.

Elle est enceinte.

Il m'a dit qu'elle s'appelait Marie.

Mais Marie, c'est le diminutif de Marianne.

Il m'a dit quoi la dernière fois ? «Ici le soldat Jean du 154e régiment d'infanterie ».

Pourquoi je n'ai pas fait le rapprochement plus tôt ?

Le Jean du téléphone, est le Jean Germain Léon Dormeau de mon voisin.

Et celui-ci est mort le 11 octobre.

Donc demain.

Je me lève brusquement. Je veux courir chez moi, et le prévenir, mais ça ne servira à rien. Il faut que j'attende la nuit.

- Monsieur Lucas, Veuillez-vous asseoir, s'il-vous-plait ! M'ordonne mon prof de maths.

Le soir, quand une heure du matin arrive, je l'appelle pour la première fois. Je ne sais pas si ça va marcher... J'entends que ça sonne au bout. Quelqu'un décroche, mais le son est pire qu'avant.

- Ici ... soldat ...an du 154e r...ment d'infanterie.

- Jean, il faut que tu sache, demain, tu vas mourir, j'ai fait le rapprochement, tu es le père de mon voisin, celui sur lequel je faisais des recherches. Et ben il a une femme, Marianne, et je ne pensais pas que ta Marie était la Marianne de mon voisin. Pars loin du front ! Va-t'en, ne meurs PAS !

- ...

- Jean ??? Tu es la ??? Jean répond !!! Tu m'as entendu ??? S'il-te-plait...

Je repose lentement le téléphone. M'a-t-il entendu ? A-t-il compris ? Va-t-il le faire ? Je ne sais plus, je ne sais pas... Et je n'aime pas ne pas savoir. Tout le long de la journée, j'attends avec impatience le soir, pour savoir s'il est vivant. Je ne veux pas qu'il meure.

...

Le soir, à 01 : 00, je prends le combiné, et appelle Jean. Ça sonne une fois, personne, une deuxième fois, toujours rien, et à la troisième fois quelqu'un répond enfin.

- Ici le soldat Paul du 154e régiment d'infanterie.

- Bonjour, dis-je d'une voix tremblante, je pourrais parler à Jean Dormeau?

Un silence rempli l'espace entre nous. Il répond ensuite d'une voix neutre:

- Il est mort monsieur.

FIN !

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