La platine 

I

    Drago vivait dans un silence presque religieux. La plupart du temps tout était endormi autour de lui, les endroits où il choisissait de transplaner n'étaient bien entendu pas du tout fréquentés. Malgré tout, le calme lui allait. Il contrastait grandement avec l'agitation et l'atmosphère glaçante du Manoir. Mais parfois le manque de bruit et de voix humaine lui serrait le coeur, il avait l'impression que le monde lui même se fichait de son existence, qu'il pouvait parvenir à mourir, à s'éteindre sans que quiconque ne le remarque. Cette perspective était effrayante mais Drago y était maintenant habitué.

Il y avait des matins où, lorsqu'il se réveillait, il ne se rappelait plus de l'endroit où il se trouvait. Dans ces moments là, la panique s'emparait de tout son corps et il bondissait hors du lit en un sursaut pendant que de grandes vagues de chaleur l'engloutissaient.

Ou était-il ? Était-il mort ? Vivant ? L'avait-on retrouvé ? Allait-il être puni ?

Toutes ces questions l'assaillaient, lui faisaient tourner la tête jusqu'à ce que ses yeux se posent sur cet objet particulier, et enfin son rythme cardiaque ralentissait et un poids incroyablement lourd, qui l'avait auparavant accablé, semblait se volatiliser en un flash.

Le matin, dans le froid persistant de sa tente, il se dirigeait habituellement vers l'étrange objet qui captait toute son attention : une platine vinyle. Il tombait alors dans une profonde réflexion, quel disque allait-il bien pouvoir écouter ? Ils se trouvaient tous dans une caisse qui avait été rafistolée par Drago, le bois était agréable au toucher et le garçon pouvait passer de longues minutes à chiner entre les différents disques vinyles. Il sortait la pochette et l'observait, toujours avec une grande précaution, et traçait les contours des illustrations, faisant attention à chaque petits détails. On pouvait facilement penser que ces pochettes étaient la chose la plus précieuse que possédait le blond, et c'était vrai.

Après avoir fui, Drago avait tout perdu, il avait été privé de tout bien matériel, de toute affection et de chaleur humaine. Ce qui était plutôt ironique dans un sens était le fait que Drago aimait auparavant posséder dans l'unique but de se vanter. Il n'accordait pas vraiment d'attention à l'objet car il voulait juste qu'on le remarque, c'était un moyen comme un autre d'attirer les regards. Cependant en agissant de la sorte il ne s'était jamais vraiment intéressé à quoi que ce soit. Pourtant, alors qu'il était retiré dans la grise et froide campagne anglaise il avait finalement réalisé à quel point un simple objet pouvait devenir précieux dans la vie d'un homme. La seule et unique raison étant la symbolique qu'il renfermait, souvenirs, sensations, histoire...

Drago avait beau être seul mais la musique lui donnait cette impression d'être entouré, réconforté dans une douce tiédeur qui lui faisait oublier pendant quelques instants ce qu'il avait fui et ce qui l'attendrait un jour. Durant ces longues semaines d'exil, il avait pris le temps d'écouter chaque morceaux de tous les albums qu'il détenait, mémorisant les paroles, écrivant les plus touchantes sur de vieux parchemins, fredonnant lorsque le vent sifflait avec perfidie. Il sortait rarement, le monde extérieur l'effrayait et il s'était enfermé dans une sorte de bulle, de cage bien protégée dont il était le seul possesseur de la clé. Et dans cet endroit si rassurant il se laissait bercer par les différentes notes de musique, par les chauds accords de guitare et par les couplets qu'il avait appris par coeur.

Une fois sa décision prise il retirait le disque vinyle avec précaution de sa pochette — en faisait toujours attention de ne pas mettre ses doigts sur les sillons — et il le plaçait sur la platine.

Souvent, alors qu'il écoutait les morceaux qui s'enchaînaient d'une seule oreille, il s'inquiétait de ce qui pouvait se passer dehors, et parfois il essayait même de se persuader que, peut-être, quelqu'un viendrait le chercher. Il s'évertuait réellement de ne nourrir aucun espoir concernant son possible sauvetage, de toute façon la vérité se présentait tous les jours cruellement en face de lui : sa disparition ne faisait aucune différence, il était inéluctablement seul et c'était mieux ainsi, même si de temps en temps il avait l'impression de vivre dans un tout autre monde. Maintes fois il se plaisait à se perdre dans une certaine folie : le monde des sorciers n'existait plus et n'avait jamais existé, il se réveillerait bientôt dans un lit confortable et se reprocherait lors de son petit déjeuner — où il serait entouré de sa gentille petite famille — qu'il abuserait moins sur les scones au prochain goûter pour ne pas revivre une telle nuit.

Mais de telles fantaisies ne pouvaient même pas subsister en rêve. Il n'était pas un petit garçon et il n'avait plus de famille et jamais pris la peine de se faire d'amis. La réalité a toujours plus tendance à tendre vers le noir que le blanc.

Cette matinée Drago n'avait pas vraiment les idées claires mais plutôt embuées, oui c'était le mot. Il ne savait plus vraiment pourquoi il avait choisi de fuir mais savait pertinemment que vivant il ne retournerait pas au Manoir. La liberté avait était plaisante au début même si la paranoïa l'avait laissée éveillé de nombreuses nuits. Malheureusement les jours se ressemblaient de plus en plus et bien que Drago n'ait jamais vraiment vécu de grandes aventures et bien.. il s'ennuyait. Il essayait d'étudier, se renseignait le plus possible sur les potions et sur la défense contres les forces du Mal, mais tout cela manquait amèrement d'un but. D'un autre côté il ne voulait pas que sa vie change, il voulait se faire oublier, ne plus se rappeler lui même de sa propre existence. Il s'infligeait en quelque sorte sa propre punition, celle qu'il pensait avoir mérité. Seule la musique le faisait se sentir vivant, cruellement vivant.

Il avait finalement choisi l'album Rubber Soul des Beatles, il possédait tous leurs vinyles et se souviendrait pour toujours du jour où il les avait acquis. En buvant son thé beaucoup trop tiède pour être appréciable, il écoutait les différents titres s'imaginant ailleurs, à un concert par exemple, oui cela devait vraiment être merveilleux de pouvoir entendre ses chansons préférées en direct, de pouvoir observer les instruments, les visages et les différentes expressions derrière ces voix.

Son regard était perdu dans une étendue de beige, la paysage ne changeait jamais, sa tente arborait toujours la même couleur fade. Les différentes vues de Poudlard lui manquaient, il se sentait incroyablement bête de ne pas en avoir plus profité.

L'heure de sa première ronde arrivait à grands pas sans que le garçon ne s'en préoccupe, il n'avait rien dans le ventre et n'avait aucune envie de faire face au froid humide d'automne. Le simple fait de se lever et de commencer une activité ne le réjouissait jamais, il n'avait certainement pas la flemme mais s'occuper de sa propre personne lui semblait bien inutile. Sans se l'avouer, car cette vérité était bien trop amère à avaler, Drago s'était abandonné.

Il finit par recueillir ses pensées sombres et se redressa, puis partit enfiler un pull bleu marine bien trop grand pour lui mais relativement chaud, ainsi qu'un pantalon noir qui avait une allure étrange avec tous les ourlets qu'il avait dû faire pour ne plus s'entraver dans le tissu. Bien que sa fugue avait été préméditée, Drago avait quelque peu oublié que ses costumes ne seraient pas adaptés à sa nouvelle vie de solitaire, il s'était donc débrouillé comme il le pouvait en achetant quelques habits dans des magasins Moldus reclus. Il enfila d'énormes gants, des bottes en cuir noir à lacets, sans oublier son bonnet en laine de la même couleur qu'il enfonça jusqu'à ses oreilles. Il était méconnaissable du Drago Malefoy qui se pavanait dans les couloirs de Poudlard. Quelques mèches d'un blond éclatant ressortaient du bonnet détonant avec l'allure morne de sa tenue. Drago ne l'avouerait jamais mais il chérissait particulièrement ses nouveaux vêtements car ils étaient confortables et par dessus tout ils ne correspondaient pas du tout à ce qu'il aurait pu porter auparavant. Il n'avait plus rien à prouver, aucunes attentes et obligations à remplir, il était libre. Mais la liberté avait toujours un prix avec le nom qu'il portait.

Dehors, il s'assit tranquillement sur un tas de feuille mortes, posant son menton sur ses genoux. Le temps était déplorable, mais les teintes d'automnes donnaient l'illusion d'une faible luminosité dans un paysage délavé où tous les arbres étaient dénudés, métaphore de la guerre qui faisait déjà rage. Il avait augmenté le son de sa chaîne hi-fi pour être sûr d'entendre les prochains titres qui provenaient d'un son lointain et étouffé. Un sourire triste se dessina sur son visage pâle et habituellement de marbre lorsqu'il entendit les premières paroles d'une chanson qu'il ne connaissait que trop peu.

He's a real nowhere man,

sitting on his nowhere land,

making his nowhere plans for nobody.

Il était un homme venant de nul part, un gamin perdu et bien trop seul. Dans ce genre de moment Drago ne pouvait s'empêcher de sourire de sa misérable situation. Seulement on est jamais seul bien longtemps.

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Bonjour à tous, je suis vraiment contente de pouvoir enfin publier le premier chapitre de ma nouvelle fanfic !! J'ai longtemps médité s'il s'avérait judicieux d'en écrire une autre ou non, mais étant donné que ça me plaît toujours, pourquoi pas se lancer ! Ce chapitre est en quelque sorte une préface, j'ai donc hâte de poster les autres. ^^

L'univers d'Harry Potter est vraiment quelque chose qui me fascine et bien sûr je suis au courant que tous les personnages et l'histoire appartiennent à J.K Rowling. Je voulais aussi rajouter que le contexte auquel va se prêter la fic prend place durant l'histoire qui est contée dans les livres, le dernier.  Mais bien entendu je l'ai modifiée pour l'ajuster à ma propre intrigue. Donc si vous remarquez que certains détails et actions divergent du texte original c'est normal ( sinon ça n'aurait pas grand intérêt  ), ne vous inquiétez pas j'ai lu  t o u s  les livres donc don't come AT ME ( pardon pour mon franglais )

Pour finir et aller à l'essentiel, j'espère vraiment que cette histoire vous plaira ( on est sur du Drarry je le mets juste au clair au cas où ! ). Je ne vais pas m'avancer sur un rythme de publication mais j'essaierai le plus possible d'être régulière sans massacrer mon objectif !!

 *Aussi les temps sont assez difficiles donc je vous souhaite bon courage durant ce confinement et prenez bien soin de vous et des gens que vous aimez.

Lou <3