Chapitre 3

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Qui aurait cru que je te rencontrerais ainsi ? Pas moi en tout cas : c'était trop improbable ; un peu comme toi.

Sur le coup, je reste un peu sans voix. Je savais que je finirais par la rencontrer : après tout, elle vit ici et c'est la femme de mon père. La bague à son annulaire me le confirme. Je ne sais même pas depuis combien de temps.

Mes parents n'ont jamais été marié, bien que ma mère en ait rêvé pendant des années. Encore aujourd'hui, parfois, quand elle a un peu trop bu, elle se demande pourquoi il ne l'a jamais épousée. Et sincèrement, je n'en ai aucune idée. En général, c'est un sujet dont on évite de parler, car il est source de stress, colère et tristesse pour ma mère. Si elle le mentionne, je sais que le lendemain elle aura oublié. Et même si ça me peine de le dire, j'en remercie l'alcool.

— On dirait que tu n'as pas grandi, commente Helynnah en me détaillant. Tu as les yeux de ton père.

— Les photos que mon père possède sont vieilles et loin d'être fidèles à celle que je suis aujourd'hui.

— Je me doute. Mais tes traits se sont affinés tout en gardant la douceur de ton visage d'enfant. Et oui, je l'admets, tu as l'air d'avoir pris une bonne quinzaine de centimètres.

Elle se met à rire, et je ne peux m'empêcher de l'imiter : c'est contagieux.

— Tu es devenue une belle jeune femme.

— Que pouvez-vous en savoir ? Vous ne m'avez pas vue grandir.

— Je n'ai pas besoin de ça pour constater, mais j'aurais aimé pouvoir le faire. Et s'il te plaît, ne me vouvoie pas. On appartient à la même famille et on va vivre ensemble pendant quelques temps. Il n'y a pas de raison pour que tu ne me tutoies pas.

Je lui aurais bien répondu que je ne la connais pas et que trois semaines ne vont pas y changer grand-chose, mais je me retiens. Elle ne m'a rien fait et elle m'accueille chez elle alors que je ne suis pas sa fille ; dans l'histoire, c'est elle qui devrait m'en vouloir. Alors je lui souris et je me tais. Je me dois de faire un effort pour que tout se passe bien.

— Maman ! s'exclame Maëlys depuis le haut des escaliers.

— Maëlys ! Combien de fois t'a-t-on dit de ne pas courir quand tu descends les marches après avoir pris ta douche ? s'écrie mon père encore à l'étage. Tu risques de glisser et de te faire mal.

Mais elle ne l'écoute plus : elle serre sa mère dans ses bras.

— Comment va le bébé ? demande la fillette en embrassant le bassin d'Helynnah, puis en collant son oreille tout contre.

J'écarquille les yeux. Mon père attend un autre enfant. Je sens ma jalousie et ma colère gronder dans mon ventre. Je ne comprends pas pourquoi il m'a proposé de venir ici alors que sa famille vit très bien sans moi. Je serre les poings et souffle pour évacuer ces mauvaises ondes. Trois semaines et c'est fini.

Pourquoi est-ce que cette histoire m'émeut autant ? Ce n'est qu'un bébé. Mon père a refait sa vie, je le sais parfaitement et je les admis il y a bien longtemps. C'est pour ça qu'il est parti à la base : il est tombé amoureux d'Helynnah et a voulu fonder une famille avec elle. Il est logique qu'ils aient des enfants. Pourtant une part de moi refuse d'accepter cette idée. Peut-être que, naïvement, j'espérais qu'il reviendrait à la maison en me voyant. La petite Cassiopée qui sommeille encore en moi l'aurait aimé. Mais la jeune adulte que je suis maintenant sait que ça n'arrivera jamais. Et en voyant les sourires radieux qu'Helynnah échange avec mon père et Maëlys, je sais que j'ai raison. C'est une famille comblée et le trio de mon enfance n'a jamais été aussi heureux pour un simple bonjour du quotidien. Je commence doucement à avoir des doutes sur la version de l'histoire de ma mère...

— C'est moi ? intervient ma demi-sœur, me tirant de mes pensées au passage.

Elle tient le dessin que j'ai croqué pendant qu'elle faisait son coloriage. J'acquiesce et elle saute de joie en répétant que c'est trooop beau. Oui, avec trois O.

— C'est très réussi, commente mon père avec une pointe de fierté dans la voix et le regard.

Je détourne le mien : ce n'est pas extraordinaire et ce n'est qu'un loisir.

— Je ne savais pas que tu aimais toujours dessiner, ajoute-t-il.

— Il y a plein de choses que tu ne sais pas, dis-je dans un soupir.

— J'espère y remédier.

Je relève la tête et remarque ses yeux braqués sur moi. Je devine une certaine forme de tristesse dans ses iris, ce qui rejoint mes doutes sur toute cette histoire. Pourquoi aurait-il coupé les ponts si brusquement, pour, sept ans plus tard, ressortir des détails qui me caractérisent depuis toute petite ? Pourquoi n'a-t-il pas oublié après tout ce temps ?

— Je peux le garder, Cassie ?

Je cligne des paupières, surprise par l'abréviation de mon prénom. Je ne m'y attendais pas.

— Je peux t'appeler Cassie ? ajoute Maëlys, innocemment. Mon surnom à moi c'est Maë.

— Oui, bien sûr, réponds-je après un instant d'assimilation. Tu peux garder le dessin et m'appeler Cassie.

— Super ! s'exclame-t-elle avant de me sauter dans les bras et de m'éclabousser avec ses cheveux encore mouillés.

Je la serre contre moi. Quand j'étais petite, je rêvais d'avoir une petite sœur, mais je n'en ai jamais eue jusqu'à aujourd'hui.

— Maëlys ? Tu ne veux pas aller l'accrocher dans ta chambre avec Cassiopée pendant que Papa et moi préparons le repas, propose Helynnah.

Elle accepte sans hésiter et sa mère lui rappelle de récupérer ses feutres, ses crayons de couleur et ses coloriages qui traînent sur la table basse.

— Tu veux bien ? me demande alors ma belle-mère.

— Quoi ?

— L'accompagner ? J'aurais peut-être dû te poser la question avant de l'affirmer.

— Il n'y a pas de mal. Je vais l'aider.

Je lui souris et ses épaules se détendent. Après avoir ramassé un crayon abandonné, je sors de la pièce. Alors que je commence à monter les escaliers, j'entends Helynnah et mon père parler de moi.

— Elle est tellement différente de ce à quoi je m'étais attendue, commente-t-elle.

— Tu pensais qu'elle...

— Qu'elle serait plus fermée, voire agressive. Après tout, vous ne vous êtes pas parlé pendant sept ans. Et tu ne l'as pas vue depuis huit.

— Tu sais pourquoi... J'aurais aimé mais...

— Oui, je sais.

Il y a un silence et je devine qu'ils s'embrassent.

— En tout cas, j'espère que vous arriverez à renouer. Elle a l'air d'être une personne sensée, tu pourras lui expliquer.

— Je l'espère aussi, mais pas tout de suite. Elle est encore en colère, même si elle ne le montre pas vraiment. C'est ma fille : même si je ne l'ai pas vue depuis longtemps, je l'ai connue quand elle avait l'âge de Maëlys et je sais deviner quand elle ment.

J'ai un pincement au cœur qui me brûle. Je ne sais pas si je dois être en colère, triste ou heureuse. Alors, pour m'éviter de trop penser, j'inspire un coup et j'entre dans la chambre de ma demi-sœur. Elle est un plein rangement de ses feutres dans une pochette en plastique prévue à cet effet. Ses crayons de couleur se trouvent dans un pot en verre peinturluré.

— Tu en as perdu un en route, lui dis-je en le mettant à sa place.

— Merci ! Tu peux attraper la patafix ? me demande-t-elle en désignant une boîte en fer où se mélangent ciseaux, tubes de colle et stylos.

Quand je l'ai trouvée, je la rejoins face à son mur couvert de dessins.

— Je veux le mettre là ! m'annonce-t-elle en désignant un espace libre, à côté d'un autre portrait d'elle dans les bras de sa mère, en pleine lecture d'un album. C'est Papa qui l'a fait. Il est beau, hein ?

— Très !

Comme elle est trop petite, je suis missionnée de l'accrocher parfaitement, mais ce n'est jamais aussi bien qu'elle le souhaite.

— Tu sais que tu es fatigante, ris-je en la chatouillant.

Elle se tortille entre mes bras et se réfugie sur son lit. On se met à rire de bon cœur. Le sien est tellement enfantin qu'il est musique à mes oreilles. Je finis par la relâcher et lui annonce que j'ai une meilleure idée. Maëlys me regarde de travers tandis que l'attrape par la taille.

— Lâche-moi ! hurle-t-elle en riant.

— Et comment pourras-tu accrocher ton nouveau dessin si je m'exécute ?

Elle cesse de se débattre d'un seul coup et je la laisse attraper la feuille, qu'elle considère mal accrochée, sur le mur pour la replacer. Quand elle a fini, je la dépose sur le sol et elle vient me faire un câlin. Sauf qu'elle atteint à peine ma taille, alors je suis obligée de la porter pour qu'elle puisse serrer ses bras autour de mon cou, ses jambes contre mes hanches. Et on reste comme ça un moment. Jusqu'à ce que mon père débarque en nous annonçant que le dîner est servi. Mais quand j'aperçois le sourire qu'il arbore, je devine qu'il nous a regardées un moment avant de parler. Je lui rends timidement, puis je descends dans la cuisine pour éviter une potentielle remarque.

Le repas est vivant : Maëlys parle de sa journée, Helynnah conte la sienne à mon père, et il les écoute patiemment. J'ai un peu l'impression d'être de trop parfois, alors je me fais toute petite et j'admire leur harmonie. Ils tentent de m'intégrer de temps à autres, mais je réponds brièvement. Je ne me sens pas prête à tisser des liens qui vont se briser trop tôt. Je pense que je dois m'y préparer psychologiquement et surtout, émotionnellement. Mais pas ce soir. C'est trop tôt. Et bientôt, il sera trop tard.

J'y songe encore et encore en me tournant sous mes draps, dans ce lit qui m'attend depuis des années. Aucune brise nocturne ne vient rafraîchir la pièce, et ce malgré la fenêtre ouverte. Alors je finis par me lever et m'installer devant cette dernière pour admirer les étoiles. Le ciel bleu nuit est découvert et les astres illuminent faiblement l'obscurité. Sauf un point, dans le jardin, qui semble être un arbre. Je trouve ça intriguant ; j'attrape donc une veste et glisse mes pieds dans mes sandales. Je descends les escaliers sur la pointe des pieds, mais je réveille quand même mon père puisqu'il me demande si tout va bien.

— Je vais juste prendre l'air.

J'ajoute un sourire pour le rassurer et il retourne se coucher. Je sors dans le jardin où l'air est doux et bien plus agréable que lorsque je suis arrivée. Je repère l'arbre lumineux et m'en approche pour comprendre. Une mélodie parvient à mes oreilles sans que je n'en saisisse l'origine. Puis, sa provenance devient une évidence quand j'aperçois une silhouette perchée dans un cerisier. Une guirlande aux couleurs pastels est accrochée dans les branches et illuminent son visage. Elle ne me remarque pas tout de suite et continue de jouer des notes sur son ukulélé. Ses cheveux blonds, aux reflets bleus, roses et verts grâce à la lueur des boules suspendues autour d'elle, lui arrivent au milieu du cou, sauf une mèche, bien plus longue que le reste et qui est tressée. Elle porte une fleur de cerisiers derrière l'oreille et une autre en tissu sur la gauche. Je la reconnais grâce à sa robe à coquelicots : il s'agit de la fille que j'ai vue en arrivant. Je ne lui demande pas ce qu'elle fait ici quand elle me repère. On échange un sourire, puis elle retourne à sa musique. Je me laisse bercer par la douceur qui émane de ses doigts.

Après quelques minutes à l'écouter, je glisse contre le tronc et m'installe à son pied. Elle ne dit rien, et moi non plus. Elle joue et je l'écoute. Puis, perdue dans mes songes et ses mélodies, je finis par tomber de sommeil.

Marilou is here !!! Une petite musicienne rêveuse que j'adore de tout mon cœur.

J'espère que cette première rencontre vous a plu, que ce soit Helynnah ou Marilou d'ailleurs.

Je vous souhaite une belle semaine

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