2) Lise

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Elle tapote du bout des doigts sur la table, le regard fuyant. Elle arbore une moue exaspérée, soutient le regard d'une femme qui la dévisage mais s'offusque qu'on lui rende la politesse. Ce café, cette cantine trop sélecte, lui tape sur les nerfs.

Elle se fout qu'on juge de son look, elle emmerde le monde, et les pétasses BCBG qui se croient au-dessus de tous plus encore. Mais là, c'est derrière son bar, à essuyer une dernière fois le plan de travail avant d'aller ouvrir qu'elle serait le mieux. Certainement pas à attendre cet abruti qui...

Avant qu'elle ne termine sa pensée, un petit brun à l'air aussi sérieux qu'épuisé derrière ses lunettes passe la porte du café. Sans hésitation, il s'avance jusqu'à la table où elle l'attend depuis dix trop longues minutes, laisse tomber une petite mallette en cuir à côté de l'autre siège, puis dans ce dernier, lui-même.

En silence, elle sirote le contenu de sa tasse. Un garçon de café arrive, bien habillé dans son livrée noir. Il prend la commande de son vis-à-vis, « Comme d'habitude. — La formule midi avec un double espresso sans sucre, c'est bien cela Monsieur ? — Oui ». C'est rapide. Il s'en va après cela, et le silence les entoure de nouveau. Un silence entrecoupé par les bruits de couverts, des cuisines en plein coup de feu, des conversations alentours, mais eux ne parlent pas.

Ils n'échangent pas un mot avant que le plat du brun n'arrive, et qu'il se décide enfin à dire le premier en découpant un morceau de steak.

« Ludovic m'a demandé plus, hier. Je suppose que ça sous-entendait exclusivité, déclarations gerbantes et d'autres stupidités. »

À partir de cet instant, le silence cède sa place à un flot de paroles ininterrompu. Lise fronce vaguement les sourcils et fini son café pour ne pas avoir à s'interrompre.

« Ça t'étonne ?

— Non, je suppose que non... J'espérais simplement avoir encore un peu plus de temps.

— Tu as eu des années !

— J'sais Lise, j'sais bien. Il reste que ça ne m'emballe pas.

— Ça te terrifie oui, tu peux bien me le dire. Et donc ? T'es lâche au point de risquer de le perdre, Xavier ? »

Il se racle la gorge, se gratte la tête, détourne le regard.

« Je ne demande que ça, qu'il parte. Ce serait le plus simple.

— Ça te ferait un mal de chien.

— Toujours moins que quand il le fera vraiment, que ce soit dans une semaine, un mois, des années. Quand j'aurais fini par croire à toutes vos sottises, d'amour éternel et autres conneries. Je ne sais pas si je me relèverai à nouveau Lise...

— T'es d'un mélodramatique, Xavier. Si jamais il venait à te quitter, même si c'est dans dix ans, tu t'en relèveras. Parce que c'est ce qu'on fait après une rupture, c'que tout le monde fait. Même si ça fait un mal de chien, et que tout ce que tu veux pour le moment c'est de crever.

— T'y crois toi, à ces conneries ? C'est un truc d'hétéro et de lesbiennes, tu dois bien y croire.

— Bien sûr, je rêve de me marier dans une jolie robe blanche et d'adopter trois gosses et un labrador. Ne sois pas stupide, Xavier. C'est pas une relation plate et chiante bon chic bon genre, une vie bien sous tout rapport calquée sur les hétéros que te demande Ludo. Juste de faire des efforts.

— Ouais, je suppose que je vois. On a joué à MK hier, et on n'a même pas baisé après.

— Tu as vu ton mec pour autre chose que coucher avec ? Eh bah putain, tu vois que t'es déjà sur la bonne pente. Bientôt, t'achète avec Ludo un logement décent, qui sait.

— Rêve pas trop non plus. Puis, on avait couché ensemble avant, j'dois admettre. Mais... ouais, ouais c'était pas si mal.

— Souviens toi que c'était lui, ton meilleur pote avant. Bien sûr que vous pouvez faire autre chose que baiser ensemble et que c'est pas si mal, tu t'en es contenté pendant des années. Bon, sur ce, moi j'ai l'ouverture de l'AR et je suppose que tu ne dois pas tarder non plus, alors... »

Elle se lève, laisse de quoi régler sa consommation sur la table, et s'éloigne. Il distingue ses Dr. Marten's sous son boyfriend taille basse, remonté au-dessus des chevilles par un large ourlet, sa veste qu'elle balance sur son épaule en passant la porte du café, et la fumée de la clope qu'elle s'allume une fois dehors. Il n'y a pas à dire, s'il était hétéro, sa meilleure amie serait à son goût. Heureusement qu'il ne l'est pas, c'est déjà suffisamment compliqué avec Ludo, et pourtant il a un caractère bien moins dégueulasse.

On lui apporte son café et bientôt, il retourne se noyer dans cette foule de cadres dépressifs auxquels il ressemble de plus en plus avec les années. Il disparaît dans les méandres du métro parisien pour une station.

Lise émerge d'une bouche de métro une longue dizaine de station plus loin, elle a parcouru la ligne presque de bout en bout. Encore un bus et elle arrive sur le campus de Paris-Saclay, elle se sent déjà mieux dans la banlieue étudiante. Un soupir, un sourire, et elle avance. L'air chaud, lourd et humide qui suit l'orage frappe son visage au rythme de son pas, et elle est face à l'AR en moins d'une poignée de minutes.

Pourtant, là où elle aurait dû se détendre en arrivant chez elle, elle fronce les sourcils. Parce que la porte du garage est relevée, parce que quelqu'un tape du pied nerveusement devant, parce qu'à l'odeur elle peut dire qu'il n'y a pas que du tabac dans ce que fume Barbara.

« Putain, mais où t'étais ? Ça fait presque une heure qu'on t'attend. »

Elle fronce davantage les sourcils, aussi énervée que soucieuse du ton de la plus jeune. Elle s'était promise d'arrêter définitivement, mais là elle attrape le joint fumant et prend une taffe salvatrice, sans prendre compte de l'exclamation outrée de son amie.

« Bon, tu m'expliques ce qui te prend ?

— C'est Ev', elle est à l'intérieur. Elle voulait te voir, y'a un truc qui n'va pas. L'AR était fermée, alors elle est venue me chercher, parait que tu lui as filé mon adresse au cas où. Je lui ai ouvert, on t'attendait.

— Je vois. »

Elle soupire, lance un dernier regard à Barbara avant d'entrer. La brune éteint le joint, puis la suit, et lui désigne d'un geste vague la silhouette qui sanglote dans un grand fauteuil en velour parme style Belle Époque.

D'un pas lent, comme pour ne pas effrayer un animal blessé, Lise rejoint la jeune fille qui tente de maîtriser ses pleurs en l'apercevant. Sans un mot mais avec des gestes doux, elle caresse sa joue, et glisse une mèche de cheveux humide de larmes derrière son oreille. Elle lui sourit légèrement, et lui fait signe de la suivre. Elle l'emmène dans l'appartement qu'elle a aménagé derrière le bar, et d'un hochement de tête appuyé d'un regard Barbara lui fait comprendre qu'elle se charge de l'ouverture le temps de.

« Je... Je suis désolée, je ne voulais pas te déranger mais... Je ne savais pas à qui en parler, et, et, ...

— Ne t'excuse pas princesse, viens par là. Voilà, assieds-toi, shhh. Tu vas boire ce verre d'eau, doucement, puis tu m'expliqueras d'accord ? »

En regardant Lise de loin, ce n'est pas ce qu'on penserait d'elle. On l'imaginerait certainement dure, un peu vulgaire — ça, ce n'est pas complètement faux —, froide. Pourtant, dans sa tanière et pour ses habitués, elle est la louve qui défend ses petits becs et ongles, et veille sur eux avec tendresse. C'est ce à quoi songe Barbara alors qu'elle ne peut s'empêcher d'épier la scène par la porte entrebâillée. Mais bientôt, trois garçons entrent en riant fort, et elle va les voir pour savoir ce qu'ils veulent. Assidûment, elle propose la formule déjeuner, une nouveauté de l'AR qui fait désormais Snack depuis six mois maintenant. C'est aussi pour ça que Barbara s'était étonnée que Lise ne soit pas là dès onze heures, comme elle en avait désormais l'habitude, ou qu'elle n'ait pas au moins prévenu Lyu qu'elle avait besoin d'être remplacée. Et si elle ne le dirait pas à la plus vieille, elle s'était inquiétée.

De l'autre côté de la porte, Evangeline a reposé son verre, et triture maintenant ses doigts. Elle doit s'y reprendre à deux fois avant de pouvoir parler d'une voix faible et enrouée.

« Je ne savais pas à qui en parler, je suppose que j'aurais du appeler Andreas mais... J'avais peur de voir la déception dans ses yeux, je...

— Et de quoi Andreas aurait dû être déçu, selon toi ?

— J'ai... Enfin, j'avais un suivi psy, pour, tu sais, l'opération. Il... Il m'a déclaré inapte, il estime que je suis trop jeune, trop influençable, et trop faible mentalement. Il, il... »

À nouveau, les larmes lui montent aux yeux, et elle s'interrompt en reniflant. D'une main douce, Lise caresse les cheveux roses coupés au carré, et bientôt la jeune fille enfouit son visage froissé par les larmes dans son épaule.

« Là, shhh. C'est qu'un con, tu le sais parfaitement. C'est juste un contre temps, tu vas refaire les démarches, en voir un autre, et puis ça se passera différemment. Tu es jeune, et ça n'a rien d'une obligation... Là, calme toi ma belle. Ça va te laisser plus de temps pour économiser, ce n'est pas plus mal. »

Elle essaye de répondre, mais est étouffée par ses propres sanglots et fini par se contenter de tremper la veste de son amie, qui continu de lui caresser tendrement les cheveux. Ça dure un moment, de pleurs bruyants et de compréhension muette, mais ça lui fait du bien. Au bout d'une poignée de minute, elle se dégage de l'étreinte avec un sourire contrit, et essuie ses yeux du bout de ses doigts avant que Lise ne lui tende un mouchoir. Pudiquement, elle détourne le regard pendant que lentement, Evangeline revêt son petit sourire insouciant qui cache son mal-être au monde la plupart du temps.

« Pourquoi ne pas en avoir parler à Andreas, Ev' ? Il s'est passé quelque chose ? »

Elle se triture les doigts, se mordille la lèvre, ses joues rougissent doucement alors qu'elle détourne les yeux. Un voile se dépose sur son regard, et puis finalement elle dit :

« J'aurais sûrement pu lui dire mais... Tu sais, il est hétéro, et même s'il me dit que ça ne le dérange pas...

— ...Tu n'es pas suffisamment à l'aise avec ton corps pour lui montrer. Non, Ev', ne m'interromps pas ! Je le connais ton Andreas, maintenant. Et je peux te garantir que quand il dit que ça ne le dérange pas, c'est la vérité. Il n'en a strictement rien à foutre. Mais toi, tu as peur, tu penses qu'il pourrait changer d'avis en voyant ce qu'il sait depuis le début... Fais lui un peu confiance. Tu n'as pas à attendre ton opération pour pouvoir pleinement vivre ton couple, Ev. »

Elle soupire et ses épaules tombent, comme si elle se dégonflait brutalement, ballon de baudruche fuyant. La main pâle, calleuse de Lise accroche rapidement la sienne, fine et douce, et elle lui retourne un pauvre sourire.

« Je lui en parlerai, je te le promets. C'est juste...

— Difficile, c'est normal. Tu peux lui envoyer un message, ce sera peut-être plus simple si tu l'écris, t'en dis quoi ? »

Elle hoche la tête et se saisit de son portable presque aussitôt. Un rire rauque fait doucement vibrer sa gorge, et Lise s'éloigne alors que la fille aux cheveux roses tape à toute vitesse sur son clavier, avant de s'arrêter, d'effacer trois phrases et de recommencer. Rapidement, elle rejoint Barbara derrière le bar, jette un regard à la salle déjà à moitié remplie sans remarquer celui de la plus jeune.

« J'ai envoyé leur commande aux trois gars juste là, et au couple là-bas. Il me reste les commande des tables 7 et 9, et la 5 ils viennent de s'installer. Lyu n'est que du soir aujourd'hui ?

— Ouais, c'est ça. Je vais voir la 5, finis les deux autres et puis laisse, je vais m'en sortir. »

Avec un soupir, elle s'accoude au bar et la regarde s'affairer. Quand il devient évident que face à la masse d'étudiants fraîchement rentrée mais pas encore en cours, elle ne tiendra pas seule, elle attrape un plateau, le carnet qu'elle utilisait déjà une heure plus tôt, et commence à slalomer entre les tables pour récupérer les commandes. Plus sèchement qu'il n'aurait fallut, elle indique à Lise de retourner derrière le bar, et de lui préparer trois formules repas. Elle lui laisse un bout de feuille arrachée, s'attache les cheveux en un demi-bun pour arrêter de les avoir dans les yeux, et repart d'un pas vif. Avec un soupir, la barmaid s'avoue vaincue et retourne finalement dans son territoire, sans pouvoir s'empêcher de lâcher du regard la brune athlétique qui la seconde à la perfection. Pouvoir se reposer sur quelqu'un fait du bien de temps à autre, et en l'absence de Lyu...

Une heure passe encore, et le coup de feu du déjeuner s'essouffle ; c'est un interlude bien mérité et elles peuvent enfin souffler. Avec un petit sourire en coin, Barbara vient s'adosser au comptoir, elle s'éponge doucement le front de sa manche. Elle est en nage, mais ça n'est pas dérangeant.

« J'suppose que tu ne m'accorderas pas une clope ici, et que tu ne m'accompagneras pas dehors ..?

— Non, mais tu peux très bien aller dehors comme une grande. »

Barbara soupir et secoue la tête, décochant un regard vaguement amusé à la plus vieille dans son dos.

« Toujours si pragmatique, Lise... Dis, ça te dirait de me teindre les cheveux ?

— Pourquoi c'est à moi que tu demandes un truc pareil ? Va voir ta coiffeuse, ou tes potes.

— Eh t'es méchante, j'croyais qu'on était pote nous aussi ! Et puis, tu l'as bien fait pour Evangeline.

— C'était facile. Elle est arrivée avec quelque chose de tellement bancale que je ne pouvais pas empirer les choses.

— Ça veut dire que tu penses que mes cheveux sont déjà magnifiques ?

— ...Ils sont bien comme ça. »

Un rire échappe à la brune et elle coule un regard moqueur à la barmaid qui soupire, blasée mais amusée malgré elle.

« Ils sont très bien comme ça, contente ?

— Parfaitement, oui ! Mais en rouge, ce serait fun aussi, t'en dis quoi ? »

Elle ferme les yeux sans répondre — elle en dit que ce serait putain de sexy, oui. Elle les rouvre et regarde rapidement la salle ; à peine quatre tables d'occupées et toutes déjà servies grâce à l'aide de la doctorante. Elle jette le torchon qu'elle avait à la main sur le plan de travail, se redresse et sort de derrière le bar.

« J'ai peut-être le temps d'une pause clope, finalement.

— C'est ça esquive la question ! Tu trouves que je serais absolument magnifique comme ça, n'est-ce pas ? »

Pour toute réponse, elle reçoit un regard torve qui lui tire un éclat de rire, et elle emboîte le pas de la plus vieille qui se dirige vers la sortie de ce garage réaménagé en bar (et maintenant snack !) étudiant. Dehors, elle s'assoit dans un renfoncement du mur, en équilibre précaire et allume sa clope alors que Lise s'adosse contre le crépi juste à côté d'elle. Elle lui tend son briquet et la barmaid au crâne rasé se penche, sa cigarette entre les lèvres, pour l'allumer directement. Elles ne se lâchent pas du regard et la plus jeune frémit imperceptiblement, toujours trop sensible au charisme de son aînée.

Les paupières à demi-closes, cette dernière exhale lascivement la fumée, profitant de sa première taffe avec allégresse. C'est frustrant et exaltant, ce jeu entre elles, mais Barbara commence à s'en lasser. Elle sait qu'elle ne doit pas, qu'après tant d'années elle est sûrement plus proche du but que jamais... Mais si elle se trompait, et que Lise ne la voyait que comme une amie un peu jeune, un peu niaise ? Et si cela prenait encore des années ?

Lise, c'est un peu son coup de cœur de jeunesse, au début elle a voulu coucher avec mais face à son refus, elle s'est obstinée. Elle s'est montrée plus subtile, au moins un peu, avec les années il lui semble qu'elles sont devenues amies. Maintenant elle ne veut plus d'une seule nuit, mais d'une multitude, et ça l'effraye autant que ça l'enivre. Elle a envie de jouer avec la fumée qui s'étire en paresseuses volutes entre les lèvres charnues, elle voudrait prendre une bouffée contre celles-ci directement. Alors un peu nerveusement, elle tire sur sa cigarette, sans lâcher son aînée d'une regard.

« Je sais à quoi tu penses Barb, arrête... Et oui, pourquoi pas, je peux t'aider pour faire ton rouge. »

Elle sursaute, détourne le regard. Se mordille la lèvre, prend une taffe. Regarde le ciel, sourit tristement.

« Merci, c'est sympa de ta part...

— Tu seras à croquer en rouge, je vais éviter de me rater. »

Elle rit doucement, gênée, un sourire sincère fleurit sur ses lèvres alors qu'elle s'empourpre face au compliment. Lise lui décoche un regard, un brin moqueur.

« Ouais, vraiment pas mal en rouge, ça te va au teint. »

Et elle écrase sa clope avant de s'engouffrer à nouveau dans l'AR, sans laisser le temps à Barbara d'aligner deux mots.

Quand Barbara fini son rouleau de nicotine et entre à nouveau dans le bar, c'est sur les pas d'Andreas. Ce dernier marche vite, lance un regard circulaire à la salle avant de se diriger rapidement vers une masse de cheveux barbe à papa. Lise, qui discutait avec Evangeline, s'éloigne rapidement en voyant le jeune homme arriver, un sourire en coin jouant à la commissure de ses lèvres. Et dire que la jeune fille s'inquiétait de son absence de réponse des dix dernières minutes, après plus de deux heures à échanger des SMS sans discontinuer dans son appart'... Ça la faisait doucement rire.

Après plus d'un an à le jauger, Lise peut dire qu'elle apprécie Andreas, et lui fait confiance pour rendre Eva aussi heureuse qu'elle le mérite. Le jeune homme est prévenant, attentif. Assez réservé et studieux, il semble pourtant toujours émerveillé par le grain de folie de leur Luna Lovegood à eux. En discutant avec Rayenne, elle a appris qu'il n'y connaissait pas grand chose tant à la transidentité qu'à l'ensemble de l'arc-en-ciel. Cependant, elle l'a rarement vu commettre un impair, et il s'en excuse dès qu'il s'en rend compte lui-même — ou qu'Eva lui en fait la remarque. Il parvenait à ménager la sensibilité d'Eva, ainsi que sa faible estime d'elle-même, la confortant lentement dans l'amour de soi. C'était plaisant à voir, une relation saine comme la leur. Parfois, ça lui donnait envie...

Son regard dérive vers Barbara alors qu'Ev' enlace étroitement le torse d'Andreas, qui referme son étreinte sur elle avec un rire attendri. Avec des gestes efficients, elle prépare un Cosmopolitain qu'elle dépose sur le bar à son égard, avant de décapsuler une Leffe. Barbara la dévisage, hausse un sourcil.

« Il est pour moi ?

— Pour qui d'autre ? Je me suis dit que tu avais peut-être besoin d'un verre, histoire de te rafraîchir les idées.

— Avec de l'alcool ?, elle se saisit du verre avec un sourire moqueur, prend lentement une gorgée. Tu as envie de les embraser, ne t'en caches pas.

— C'est beau de croire en ses rêves. »

Elle recule d'un pas, puis deux. Elle s'adosse au plan de travail derrière elle et porte le goulot de sa bière à ses lèvres alors que Barbara s'accoude au bar, sa boisson reposant nonchalamment dans sa main droite.

Évidemment, il fallut que ce soit le moment que choisisse Lyu pour arriver, un air aussi moqueur que blasé au visage.

« On ne drague pas sur son lieu de travail, et jamais des clients, Lise. C'est un des premiers trucs que tu m'as dit, tu te rappelles ? »

Asiatique androgyne, Lyu assistait déjà Lise l'année passée mais ça c'était officialisé alors que la clientèle augmentait et que l'idée de faire également snack faisait son bonhomme de chemin dans l'esprit de la patronne. Rapidement, un contrat avait été signé et Lyu l'assistait désormais à mi-temps, pour une somme modique qui l'aidait pourtant bien avec ses études.

En temps normal, Lise l'appréciait beaucoup ; là, elle haïssait son arrivée impromptue. Alors elle lui renvoie un regard noir, et Lyu ne se prive pas de rire. Barbara sourit doucement, un sourire en coin discret, satisfait. Tranquillement, elle porte le verre à ses lèvres, prend une gorgée, se dit que la vie est quand même belle. Et qu'elle n'a pas attendu si longtemps pour abandonner maintenant.

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