Chapitre XIV

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« Votre Altesse ! Vous tombez bien, j'avais besoin de votre aide. »

Je secouais la tête, sortant d'un songe floral éveillé, pour voir le visage bourru d'un soldat à l'encadrure de la porte du jardin. Il me fallut un instant pour mettre un mot sur cet inconnu, qui n'en n'était finalement pas un : c'était un homme que j'avais aidé suite à une dispute entre lui et un de ses amis à la dernière saison des neiges.

Mon ami se leva solennellement et, dans toute sa grâce, répondit à l'appel :

« Que me vaut votre visite en cet endroit ?

-Eh bien, commença le soldat, c'est un petit peu délicat... Voyez Monseigneur, votre conseiller est de plus en plus dur dans nos entraînements, les hommes se plaignent dans les dortoirs, certains sont si épuisés à force de taper contre le bois qu'ils s'écroulent tant ils n'ont plus de force... Je ne sais point à quoi il nous prépare, ni s'il compte lancer une nouvelle offensive d'ici peu, mais personne ne tiendra le coup bien longtemps. Je vous en prie, Votre Grâce, au nom de toute votre armée, faites quelque chose pour nous épargner ceci... »

Nous restâmes silencieux un moment, ne sachant que faire. Il y avait tant de temps que la dernière offensive sur le village avait eu lieu, presque une année entière, pourquoi s'acharner tant sur de pauvres soldats maintenant ? Je senti ma gorge se serrer d'angoisse, tandis qu'une boule pris place au creux de mon estomac, comme à chaque fois que la menace d'une attaque planait sur le village. Je paniquais à la simple idée que quelqu'un ne meurt, que les meilleurs et les artisans ne tombent, que personne ne puisse plus se défendre, que notre maison ne finisse par disparaître...

Je secouai doucement la tête, espérant chasser ces pensées sombres, quand je vis le regard compatissant de Elyes, et celui plus perplexe du soldat.

« Je vais tenter d'arranger cela, déclara mon ami autant pour moi que pour l'homme. Je ne peux pour autant promettre quoi que ce soit.

-Merci Votre Altesse ! »

Le roi s'avança vers la porte, comme toujours prêt à aider ses sujets, mais il se tourna vers moi avec un sourire pour me lancer :

« Attends-moi dans ta chambre, nous n'avions pas fini notre discussion et il serait imprudent de rester plus longtemps dehors avec ce temps qui se rafraîchit. »

Je hochai simplement la tête tandis que les deux hommes s'éloignaient en direction de la salle du trône, où devait certainement se trouver le conseiller royal, mon fameux double... Comme l'avait expressément demandé mon ami, je me redressai lentement et m'étirai un peu avant de me diriger vers ma chambre, traversant un dédale de couloir auquel j'avais toujours du mal à m'habituer. Je dus d'ailleurs m'égarer car je finis par arriver devant les appartements royaux, reconnaissable à l'abondance de richesse sur les murs, où je ne m'étais jamais rendu encore ; Elyes était assez intransigeant à ce sujet, il n'y avait aucun problème à ce que l'on soit proche, mais par mesure de sécurité il valait mieux ne pas nous retrouver à deux dans ses appartements. Il m'avait avoué que les gardes étaient assez farouches quand ils patrouillaient, et il arrivait qu'ils entrassent au moindre bruit alors que ce n'était parfois que le roi qui se déplaçait de la chaise au matelas...

Souriant au souvenir de cette discussion, je fis demi-tour dans l'espoir de retrouver mon chemin quand mon regard se croisa avant de dévier vers le sol. Que faisait le conseiller ici ? Quoique, j'étais sûrement le moins à même de me retrouver devant cette porte...

« Que fais-tu ici ? cracha-t-il d'un ton à geler les rivières.

-Je... marmonnais-je. »

J'étais incapable de prononcer un mot sans trembler, tant l'aura qu'il dégageait me terrifiait. Je n'étais pourtant plus un enfant, avec ces dix-sept printemps, mais il y avait quelque chose entre lui et moi qui me paralysait dès que je le voyais. Prenant une grande inspiration, je finis par me lancer avec tout le courage que j'avais :

« J'étais dans le jardin a-avec son Altesse, qui est partie à votre rencontre dans la salle du trône s-si je ne m'abuse. J-je voulais retourner dans mes appartements, mais je me suis m-malencontreusement égaré dans ces couloirs... Veuillez m'excuser, j-je m'en vais de ce pas... »

Rapidement, toujours la tête vissée vers le sol, je contournais l'homme et filais dans le prochain tournant. J'eus juste le temps d'entendre un vague « pitoyable comme les autres » avant de m'engouffrer dans un autre couloir, où enfin je relevais la tête en soupirant. S'il y avait bien un inconvénient à vivre ici, c'était bien cette personne... Je ne comprenais toujours pas sa haine envers moi, personne ne la comprenait d'ailleurs. Si l'on ne faisait que l'écouter, je serai encore dans un cachot à croupir dans la moisissure...

Mes réflexions m'avaient conduites dans une autre aile du palais que, cette fois, je reconnaissais ; j'approche de ma chambre ! Cette fois, je ne me perdis pas et pus rentrer dans cet espace familier en attendant mon ami. J'étais tellement soulagé d'entrer dans cette pièce, d'échapper à l'aura de mon double, que je me suis presque rué à l'intérieur pour me jeter sur le matelas. Soufflant un bon coup, je me rendis compte que mon cœur battait à vive allure et que j'avais très chaud, à cause de ma presque course. Je pouffais intérieurement en me disant que, décidément, il me sera compliqué de continuer à croiser son regard.

Je restai allonger un moment, pensant à tout et à rien en attendant Elyes. Je m'étais mis à repenser à cette mission qu'on me disait investi autrefois ; cela fait si longtemps que je n'en ai pas entendu parler... Je m'étais presque mis à l'oublier, avec le temps, tant je tentais d'effacer de ma mémoire ma vie passée pour faire mon deuil et ne pas souffrir – bien que ce ne fus jamais très efficace –.

En y réfléchissant, je n'avais toujours aucune idée du pourquoi moi, du quoi faire, voire du qui suis-je... Après tout, j'avais été recueilli au village par Mahyru qui m'avait trouvé dans la forêt. Venais-je d'un village plus éloigné ou de l'autre bout du monde ? Qui m'a laissé là, abandonné, mon sort entre mes mains ? Je ne m'étais jamais posé ces questions, pourtant aujourd'hui elles me paraissaient primordiales. Mais dans tous les cas, je serais mort sans eux, sans Aypierre.

Aypierre... Il me manque tant...

Nous avons passé de bons moments ensemble... Nous étions amis, de très bons amis, et sûrement rien de plus... Si jeunes, et pourtant si sûrs de nos sentiments... Maintenant je le sais, nous n'étions qu'amis, deux amis s'étant trompés sur leur amitié... J'étais aveuglé par celui qui m'avait sauvé, de mes yeux d'enfants il était mon héros, et il le restera toujours, mais je comprends maintenant que ces sentiments étaient ceux dirigés à un frère... Et pour lui alors ? Peut-être m'aimait-il vraiment... Ou alors il a mal interprété son cœur... Nous étions si proches, les seules autres jeunes gens aussi proches que nous s'aimaient... Il a dû s'imaginer que c'était ceci qu'il ressentait, tout comme moi...

Aypierre... J'espère que tu es heureux là où tu es...

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