Dans le chapitre précédent :

« Luc t'a dit quelque chose par télépathie ? »

Il mordilla ma marque pour que je cesse de rire, et cela marcha. Je poussai un gémissement qui me surprit.

« Gabriel ! » le réprimandai-je alors qu'il souriait contre ma peau.

« Oui, c'est lui. Il vaudrait mieux qu'on se dépêche d'y aller. »

J'hochai la tête et commençai à me déshabiller tranquillement.

« Que... Qu'est-ce que tu fais ? » demanda Gabriel d'une voix étranglée.

Une fois nue, j'allai dans la baignoire, ouvris l'eau et dirigeai le pommeau vers lui. Il se couvrit le visage de ses mains, mais le liquide transparent l'aspergea tout de même. J'éclatai de rire en lui rappelant qu'il fallait se dépêcher. Il rit puis enleva aussi ces vêtements mouillés. Nous prîmes une douche sous les baisers et les rires qui fusèrent.

C'était une sensation étrange. Je n'avais pas peur. Il y a encore quelques jours, je ne lui aurais jamais montré mon corps parsemé de petites cicatrices. Mais aujourd'hui, c'était différent. Je me rendis compte qu'il avait beaucoup plus de cicatrices que moi. Et beaucoup plus profondes et grandes.

Je traçai du doigt ces blessures tandis qu'il fit la même chose avec les miennes. Nos corps apprenaient à se connaître, et c'était plaisant. Rien de sexuel, juste de la confiance. Une confiance que j'avais cru ne jamais pouvoir donner à un homme. Mais Gabriel était différent. Il était mon âme-sœur, et ce pour toujours. Je l'avais enfin compris.

***

Après notre moment dans la chambre, nous nous dépêchâmes de descendre pour rejoindre Luc. J'avais spécifié qu'il valait mieux que nous ne soyons pas nombreux si nous voulions voir le Verndari. Luc était de mon avis. Peut-être que cet homme ne voulait pas encore partager son existence et le lieu où il vivait avec tout le monde. De plus, cela ne servait à rien de se précipiter à dix devant sa porte.

Je laissai Gabriel donner ses instructions et surtout vérifier l'état des réparations. Cet après-midi nuageux me laissait songeuse. Jonas avait dit qu'il reviendrait me chercher. Et j'étais convaincue de ses paroles. Pour moi, cela sonnait comme une promesse qu'il ne tromperait jamais. Le connaissant, il ne me lâcherait pas avant de m'avoir à ses côtés et avec un pouvoir illimité que je pourrais faire couler dans ses veines.

À l'extérieur du manoir, je soupirai en attendant Gabriel. Soudain, je sentis des yeux me transpercer. Un regard lupin me fixait à travers les bois. Curieuse, je me rapprochai du loup qui restait derrière le tronc d'un arbre. Je marchai doucement pour éviter de l'effrayer et surtout pour éviter que je prenne peur et l'attaque dans un mécanisme de défense. J'étais toujours appréhensive face à ces créatures même en sachant qu'ils ne me feraient pas de mal. La faute à ces loups solitaires qui avaient saccagé mon enfance.

Enfin devant le loup qui faisait presque ma taille humaine, je le fixai avec curiosité. Il ressemblait à quelqu'un. À un ami que j'avais perdu.

« Jack, » chuchotai-je.

Je vis les oreilles de l'animal se redresser et ses yeux briller d'une nouvelle lueur. Je savais que j'avais en face de moi un loup-garou que je ne connaissais pas, mais il me semblait tellement familier que mes yeux devinrent larmoyants.

« Je suis désolée, Jack était un ami très cher et vous lui ressemblez beaucoup. Vous avez ses mêmes yeux un peu dur et sombre. »

Il hocha doucement la tête, puis la releva pour regarder au loin derrière moi.

« Kelly, viens. Nous devons y aller, » annonça Gabriel en me tendant la main alors qu'il était à plusieurs mètres de moi.

« Il ressemble à Jack tu sais, » évoquai-je en marchant vers mon âme-sœur.

L'émotion dans ma voix se ressentit. Et pour eux, ces loups-garous, ils devaient bien la percevoir.

Avant que je puisse atteindre la main de Gabriel, le loup grogna et vint se placer devant moi. Je me stoppai net. Par réflexe, j'avais déjà en main le couteau qui était caché dans ma ceinture. Le loup continuait de me montrer son dos. Il semblait furieux contre Gabriel. Celui-ci le regardait de toute sa puissance. Une force que je pouvais même sentir.

« Gabriel, qu'est-ce qu'il se passe ? »

« Pars, » ordonna l'Alpha au loup.

Après m'avoir regardé une dernière fois, il s'enfonçait de ses quatre pattes vers la forêt. Je regardai la queue du loup droite presque fier disparaître derrière un tronc d'arbre.

« C'est un loup qui vient de muter il n'y a pas longtemps, » dit Gabriel en passant un bras autour de ma taille.

« Muter, c'est-à-dire ? »

« On naît loup-garou et on apprend à se transformer vers l'âge de six ans. La première transformation s'appelle une mutation. Mais il arrive que certains loups-garous n'y arrivent jamais. Ce loup a réussi à se transformer après qu'on ait réactivé son sang en lui donnant un peu du mien. Bien sûr en partageant mon sang, il est entré dans ma meute. Il ne se contrôle pas bien, et a beaucoup de mal avec l'autorité. Mais avec le temps, il s'y fera. »

J'hochai la tête, mais sa ressemblance avec Jack me laissait ce souvenir. Ce corps inerte sur le lit et cette culpabilité de l'avoir laissé partir sans lui avoir dit la vérité qu'il avait déjà trouvée. Je savais que je n'aurais jamais dû le laisser partir alors que nous étions énervés. Les Dieux m'avaient bien fait payer cette erreur.

« Emily et Ethan vont bien ? » demandai-je alors qu'il se déshabillait.

« Oui, tes amis vont bien. On les a transférés chez ton père pour éviter qu'ils ne soient trop exposés. Une armée de loups-garous les protège donc tu n'as pas à t'en faire. »

Il me caressa tendrement la joue tout en me regardant avec cet amour qui me troublait. Et il était nu, ce qui ne m'aidait pas du tout. Il se penchait pour m'embrasser, mais il fallut que Nahel se racle la gorge. Un geste et un bruit bien familier qui me rappelaient un certain Raphaël. Gabriel grogna doucement en lançant un regard noir à Nahel, mais celui-ci fit bien attention de baisser son regard pour ne pas croiser celui de son Alpha.

Nous étions enfin ensemble et il y avait toujours un prétexte pour nous séparer. J'espérai bien qu'on serait enfin heureux et sauf après toute cette histoire.

J'éclatai de rire, tandis que Gabriel, vexé, se passa la main dans les cheveux. Il commença ensuite sa transformation. Sa peau se recouvrit d'une fourrure noire et ses os craquèrent dans un bruit que je détestais. J'avais l'impression que c'était une torture.

Gabriel transformé en loup, il s'ébroua et se laissa enivrer par les sons et odeurs de la nature. Je laissai Luc et les deux autres loups-garous qui nous accompagnaient partir devant. Le fait qu'ils soient partis me donnait un peu de temps pour souffler. Je ne pouvais pas vraiment admirer mon loup noir, mon regard s'attachait au mouvement des autres. Un loup-garou pouvait attaquer à tout moment. J'en avais fait les frais quand ils avaient tué mes parents.

« Kelly, calme-toi. Je ne te ferais rien. »

Malgré ses mots apaisants, je continuai de fixer le loup noir en face de moi. Il était clairement plus grand que le loup que je venais de voir. Gabriel devait bien faire deux mètres. En fait, il était aussi grand qu'en étant sous forme humaine. Je me rapprochai et posai avec hésitation ma main sur son flanc. Sa fourrure était douce. Il laissa échapper un petit grognement de plaisir qui me fit sourire.

Le loup noir s'accroupit, ce qui me permit de monter sur lui. Je m'agrippai à sa fourrure tandis qu'il se remettait sur ses pattes. Gabriel ne voulait pas que j'utilise ma vitesse. Il ne voulait pas que j'utilise mes pouvoirs du tout. Après m'être retrouvée à moitié mourante à cause d'un excès de pouvoir, je lui laissai ce privilège. Mais dès que je serais seule, je me ferais un plaisir de me dégourdir les jambes pour utiliser mes dons.

L'Alpha trottina au début pour que je m'habitue. Je pouvais sentir ses muscles travailler sous mon corps, et ce n'était pas déplaisant. Je lui intimai d'accélérer, ce qu'il fit avec joie.

Nous rattrapâmes Luc qui était en tête de notre groupe. Il nous conduisait vers le phare de ses souvenirs. J'espérai ne pas tomber sur des loups solitaires en chemin ou pire, sur des chasseurs.

Le vent fouettait mon visage avec cet air frais qui me détendit. À part la présence d'animaux, je ne sentais rien d'autre de suspect. Un soulagement pour l'instant.

Après plusieurs pauses et des heures de course, je vis au loin le haut d'un phare. Nous nous arrêtâmes à plusieurs mètres pour que les loups-garous repassent sous forme humaine et se rhabillent.

J'étais impatiente de rencontrer le Verndari. Je pouvais déjà sentir sa présence dans la tour bleue. Il avait sûrement dû sentir la nôtre aussi. Gabriel prit ma main puis nous avançâmes avec Luc toujours en tête. Je ne pensais pas que c'était nécessaire qu'il marche devant. Le Verndari avait dû repérer notre présence avec le son de nos pas ou en écoutant nos conversations.

Soudain, un tourbillon laissa place à un homme. Il s'était téléporté devant nous avant même que l'on atteigne son vieux logis.

Personne ne dit rien et restait figer. Ses yeux noirs me fixaient avec une certaine intensité.

« Kelly ? » demanda-t-il. « Kelly Tunglio ? »

« Comment connaissez-vous mon nom ? » demandai-je méfiante.

Il était impossible qu'il sache mon vrai nom de famille. J'avais fait attention à ne jamais le prononcer et à toujours le cacher pour éviter que les chasseurs qui avaient envoyé les loups solitaires à notre poursuite ne me retrouvent pas.

« Tu n'as pas changé, » dit-il sans répondre à ma question. Il avança vers nous avec curiosité. Il semblait presque heureux de me voir ou revoir...

Gabriel se mit devant moi et grogna vers l'étranger. « N'approchez pas. »

L'homme de carrure aussi imposante que Gabriel s'arrêta. Presque chauve, et avec ses yeux perçants, on pourrait le prendre pour un assassin en quête de sang. Mais son aura reflétait sa gentillesse. Il n'y avait aucune raison de le craindre, à part si nous étions des chasseurs.

Luc regardait notre interaction silencieuse sans broncher tandis que les deux autres loups-garous restaient en retrait, mais sur leurs gardes en cas d'attaque.

Mon regard dériva sur son collier. Il avait une pierre, comme tous les Verndari, mais cette pierre me rappelait quelque chose. Chaque pierre était de forme différente même si leur couleur rouge les définissait. Cette forme était similaire à une pierre dans mes souvenirs. Soudain, j'ouvris grand les yeux face à la reconnaissance de cet objet précieux.

« C'est vous, » stipulai-je, choquée. « Vous êtes l'homme qui m'avez sauvé des loups solitaires quand j'étais petite. C'est vous. »

« C'est bien moi, » dit-il avec un doux sourire. Je transposai sa carrure et son visage sur l'homme qui était apparu quand j'étais petite alors que j'allais mourir. Enfin, je pouvais voir à quoi ressemblait mon sauveur.

J'ai l'impression d'écrire bizarrement. Je veux dire pas comme avant.. ça me gêne. Peut-être qu'écrire plusieurs fictions à la fois n'est pas une très bonne idée :/

Bref, merci beaucoup de lire cette histoire qui semble interminable ! x) J'ai encore prévu des petites choses à faire subir à Kelly (héhé) du coup je pense que cette histoire sera clairement plus longue que La Promesse. Mais bon, je suppose que ça ne vous dérange pas hein ;)

Bon prochain chapitre pendant les vacances ! Je suis bourrée de contrôle jusqu'aux vacances, donc je n'écrirais pas beaucoup d'ici là...