Chapitre 18

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Les plans de Lyssandra se retrouvèrent vite contrariés : Alisée descendit dans le salon et s'installa dans son fauteuil sans lui jeter un regard. Elle ne leva même pas les yeux vers elle lorsque la Neutre lui tendit son poignet. Elle y planta doucement ses canines et prit une dose de sang minime. La jeune fille ne put rien faire pour attirer son attention, Dame Miranda n'étant qu'à quelques mètres, étendue sur sa méridienne dorée.

Elle aurait voulu pouvoir transmettre un message à Alisée, lui faire comprendre qu'elle avait besoin d'elle, mais la vampire semblait tout faire pour l'ignorer. Lyssandra ne mit pas longtemps à comprendre : Dame Miranda avait dû la réprimander sévèrement pour avoir pris sa défense l'autre soir. Elle ignorait comment la vieille buveuse de sang s'y était prise, mais Alisée avait retenu la leçon.

Elle pouvait donc l'écarter de ses projets. Tout comme Kristal, qui malgré son agacement montant envers Dame Miranda, ne serait certainement pas assez folle pour l'aider.

Lyssandra était seule pour retrouver sa bague. Seulement si cette bague existe réellement. Mais il lui fallait y croire. Elle se s'autoriserait pas à s'apitoyer sur elle-même si elle ne faisait pas son possible pour mettre toutes les chances de son côté. Julian lui avait assuré qu'elle pourrait entrer au palais du Grand Alpha, c'était désormais à elle de jouer. Elle devait savoir si ce bijou était au manoir.

— Nous n'avons toujours pas de nouvelles pour la Nuit des Bagues ? demanda Kristal dans un grognement. La Terre des Vampires n'a toujours pas fait savoir qui viendrait la représenter ?

Tressant distraitement quelques mèches de ses cheveux roux, sa vie paraissait tenir à ce verdict. Kristal adorait les sorties en société et la Nuit des Bagues se profilait comme une de ses meilleures opportunités pour briller. Lyssandra avait même remarqué qu'elle gribouillait quelques croquis de vêtements sur un carnet. Pourvu qu'elle ne se lance pas dans la confection d'une nouvelle robe, pensa-t-elle en imaginant le carnage que cela donnerait.

— Comment pourrais-je le savoir ? répliqua Dame Miranda sans lever le nez de ses ongles qu'elle était en train de limer. Je ne suis pas la secrétaire particulière de Sa Majesté.

— Un messager du comité des vampires du village est venu quelques heures plus tôt. Ce n'était pas pour ça ?

Kristal ne prenait pas la peine de dissimuler sa curiosité. Alisée était focalisée sur son livre et ne bougeait pas d'un cil. Elle n'avait même pas l'air de respirer, le corsage de sa robe jaune ne se soulevant pas au rythme de sa respiration. Lyssandra la fixait avec insistance tout en dépoussiérant inutilement le rebord d'une large fenêtre dont les volets étaient clos. Elle voulait rester le plus possible dans le salon afin de grappiller la moindre information sur la Nuit des Bagues.

— Je croyais qu'après toutes ces années, tu avais enfin appris à te mêler de tes affaires, répondit Dame Miranda en braquant son regard glacial sur la petite vampire rousse.

Cette dernière haussa les épaules, telle une innocente poupée de cire. La Neutre songea alors que c'était bel et bien ce qu'était Kristal. Une poupée de cire. Il suffirait de la laisser au soleil pour qu'elle fonde ou plutôt, qu'elle brûle. Tout comme ses deux autres acolytes.

— Le comité des vampires voulait simplement nous faire savoir que nous pouvons revenir passer des nuits au village, déclara finalement la vieille vampire en contemplant un instant ses ongles.

Elle dut estimer que le résultat n'était pas tout à fait parfait car elle recommença à les limer. On n'entendait plus que le frottement de sa lime contre ses griffes tant les deux autres créatures de la nuit restaient muettes d'étonnement. Alisée n'avait cependant toujours pas levé les yeux de son livre, au grand désarroi de Lyssandra.

— Nous pouvons vraiment revenir au village ? se réjouit Kristal tout en bondissant sur ses pieds, prête à lever le camp. Pourquoi ne pas l'avoir dit plus tôt ?

Cette nouvelle lui fit perdre toute notion de bienséance car elle se mit à sautiller sur place et à frapper frénétiquement des mains. C'était comme si cela faisait des années qu'elle était enfermée dans un cachot moisi et que l'on sonnait enfin la fin de sa pénitence. Elle ressemblait vraiment à une jeune fille de douze ans et non à une vampire de soixante ans.

— Ce n'est pas parce qu'ils disent que nous pouvons y retourner que nous devons le faire, la tempéra Dame Miranda, excédée par cette attitude. Les loups-garous ont peut-être calmé leurs ardeurs mais nous ne sommes pas à l'abri d'une émeute.

— Peu importe, ils peuvent bien organiser autant d'émeutes qu'ils le souhaitent. Nous sommes enfin libres d'aller au village ! Je vais pouvoir choisir moi-même mes robes, mes bijoux, mes perles, plutôt que de demander à cette incapable de Lyssandra !

L'intéressée ne retint pas la remarque. Dans un état second, Kristal faisait le tour de la pièce en dansant d'un pied sur l'autre et en riant. La Neutre ne croyait pas l'avoir déjà vu dans un tel état. On aurait dit qu'elle avait bu du sang euphorisant. Dame Miranda avait l'air de faire tous les efforts possibles pour se retenir de l'empaler avec un pied de chaise.

— Assez, Kristal ! gronda-t-elle après que la vampire ait fait trois fois le tour de la pièce en chantonnant. Tu me donnes le vertige à tourner ainsi comme une bourrique que tu es !

S'arrêtant net, la rousse se laissa tomber lourdement sur l'accoudoir du fauteuil d'Alisée, ce qui fit voleter les pages de son livre. Agacée, la belle jeune femme semblait prête à fracasser l'ouvrage sur le crâne de Kristal. Seule la crainte d'érafler la couverture devait la retenir.

— Mes mises en garde pour tes dépenses tiennent toujours, rappela sévèrement Dame Miranda. Si nous allons à la Nuit des Bagues, je te donnerais l'autorisation de t'acheter une nouvelle robe, mais uniquement si nous allons à cette soirée. Tu as bien assez de tenues comme ça, surtout pour la piètre vie que tu mènes.

Kristal parut sur le point de rétorquer quelque chose, mais Alisée lui pinça discrètement le coude. Lyssandra fut la seule à le remarquer car la vieille vampire était déjà repartie dans l'inspection de ses ongles.

Son enthousiasme retombé aussi vite qu'il était apparu, la rousse revint sur son siège d'un pas traînant, puis recommença à gribouiller sur son carnet. Sentant que le moment était venu de s'éclipser, Lyssandra longea les murs tout en essayant une dernière fois de capter le regard d'Alisée. Cette dernière ne lui jeta pas un seul coup d'oeil.

La jeune fille monta les escaliers et arrivée à l'étage qu'occupaient les vampires, elle s'arrêta. Le couloir était faiblement éclairé par des chandelles qu'elle avait allumées environ une heure plus tôt. Elle aurait dû regagner sa chambre immédiatement, or elle fit un pas pour s'avancer vers les portes aux poignées dorées.

Si sa bague avait un jour vraiment existé, elle devait être en la possession de Dame Miranda. Soit elle s'en était débarrassée, soit elle l'avait précieusement cachée quelque part. Il y avait un certain nombre de pièces dans le manoir. Lyssandra ne pourrait pas toutes les fouiller de fond en comble, surtout qu'une petite bague ne devait pas être évidente à trouver. Mais si elle devait commencer quelque part, ce serait dans la chambre de Dame Miranda.

Si les occupantes du manoir se rendaient au village durant l'une des prochaines nuits, ce serait une aubaine. La Neutre pourrait en profiter pour s'introduire dans le repaire de la vieille vampire. Elle faisait régulièrement le ménage dans cette chambre, mais n'avait le droit d'ouvrir aucun tiroir, ni de déplacer le moindre objet. D'ailleurs, c'était toujours sous la surveillance de Dame Miranda qu'elle passait le balai et dépoussiérait les meubles sans toucher les bibelots. C'était peut-être une preuve que cette pièce renfermait des choses précieuses que la vampire aurait préféré que Lyssandra ne découvre pas.

Penchée vers la poignée, la jeune fille observa la serrure. La clé n'était pas dessus. Dame Miranda devait la garder sur elle en permanence. Il était impossible de la lui subtiliser mais un tournevis ou une broche devraient permettre à la Neutre de forcer la serrure. Étant donné qu'elle n'avait pas de broche, elle se contenterait d'un tournevis.

— Qu'est-ce que tu fais ici ?

Lyssandra se retourna si vivement vers la voix qu'elle manqua de se prendre les jambes dans sa robe. Kristal l'examinait de ses yeux verts perçants, les mains sur les hanches.

— J'ai perdu un chiffon. Tu ne l'aurais pas vu, par hasard ?

Pour une fois, elle trouva qu'elle avait plutôt bien menti. Elle n'avait même pas balbutié. Mais la vampire n'était pas née de la veille.

— À part celui qui se trouve devant moi et qui te sert d'accoutrement, je n'en vois aucun, fit-elle sans cesser de la dévisager avec attention.

— Et toi, qu'est-ce que tu fais là ? Tu retournes déjà te coucher ?

Lyssandra n'avait guère envie de bavarder avec Kristal, surtout quand elle la toisait de cette façon, mais elle lui barrait le passage pour rejoindre l'escalier.

— Contrairement à toi, je n'ai pas à te rendre de comptes, rétorqua la petite rousse en triturant son collier de perles. Que fabriques-tu réellement dans ce couloir ? Tu mijotes un sale coup pour la Nuit des Bagues, c'est ça ?

À croire que les vampires avaient la faculté de lire dans les pensées... C'était la seule chose qui manquait pour parfaire le cauchemar des Neutres.

— Quel coup veux-tu que je prépare ? se défendit Lyssandra en croisant les bras sur sa poitrine. Je ne suis même pas certaine que mon père était un Loup du Topaze...

Elle savait qu'elle n'obtiendrait rien de Kristal. Prêcher le faux pour savoir le vrai ne fonctionnerait sans doute pas, cependant, elle pouvait tenter de glaner quelques petites informations. Par miracle, la vampire mordit à l'hameçon comme si ce dernier avait été enduit de sang frais. 

— Pourquoi t'aurions-nous menti à ce sujet ? Au contraire, si ça n'avait tenu qu'à Dame Miranda et moi, tu serais persuadée d'avoir été trouvée dans une fosse à purin. Tu peux remercier cette pleurnicharde d'Alisée.

Une fosse à purin. Ce que l'imagination de Kristal pouvait être florissante.

— Ça ne change rien puisque de toute façon, je n'ai pas de bague du Topaze, lança Lyssandra d'un air résigné censé duper la petite fille.

Elle n'était pas une excellente actrice mais espérait au moins paraître convaincue de sa défaite. Cela n'était pas très compliqué, sachant à quel point ses chances de "remporter" la Nuit des Bagues étaient maigres.

— Qui t'a parlé de tout ça ? Comment sais-tu qu'il te faut ta bague ? la questionna Kristal en plissant les yeux. C'est Alisée ? Elle ne t'a pas dit où elle se trouve, au moins ? À l'époque, j'avais dit à Dame Miranda de ne pas l'impliquer, mais comme personne ne m'écoute jamais...

Lyssandra retint un sourire triomphal. Elle avait obtenu ce qu'elle voulait. Elle avait la confirmation que sa bague existait.

— J'ai entendu des villageois en parler, se contenta-t-elle de répondre. Alisée n'y est pour rien.

— C'est sûr qu'après le savon que lui a passé Dame Miranda pendant ton absence, elle n'est pas prête de recommencer à t'aider.

Une pointe de satisfaction transparaissait dans la voix de la vampire. La Neutre n'aurait pas dû être étonnée par ce sadisme mais un frisson lui parcourut l'échine.

— Qu'est-ce qu'elle lui a fait ? demanda-t-elle avec appréhension.

Elle n'était pas certaine de vouloir connaître la réponse. Kristal fut pourtant bien trop heureuse de la lui livrer.

— D'après le remue-ménage que j'ai entendu cet après-midi, badina-t-elle comme si elle racontait une douce histoire, je dirais qu'elle est entrée dans sa chambre, s'est disputée avec elle avant de la gifler, puis lui a cloué la main sur le mur avec un piquet en bois.

Lyssandra sentit son estomac se retourner. C'était impossible. La petite rousse lui disait juste cela pour se jouer d'elle, il ne pouvait en être autrement. D'ailleurs, comment aurait-elle pu le savoir ? Ce n'était pas quelque chose que l'on devinait simplement en écoutant depuis l'autre côté d'une cloison.

— Tu mens. Dame Miranda n'aurait pas fait ça à Alisée rien que parce qu'elle a suggéré l'idée que je puisse me rendre à la Nuit des Bagues.

Mais elle ne croyait pas en ses propres mots. Bien sûr que Dame Miranda en était capable.

— Elle nous a fait bien pire et tu le sais, trancha Kristal en perdant sa fausse légèreté. Alisée n'avait qu'à se mêler de ses affaires.

La Neutre se massa la paume de la main sans s'en rendre compte. Elle n'avait remarqué aucune cicatrice sur la peau de la belle vampire mais c'était parfaitement normal. Elle avait dû cicatriser en quelques minutes. Désormais, Lyssandra ne pourrait plus rien escompter de sa part, ce qui était compréhensible. Alisée avait voulu l'aider et sa main en avait payé le prix.

— Pourquoi restez-vous ici ?

La question avait échappé à la jeune fille. La rage avait fait sauter le filtre qui l'empêchait de poser de telles interrogations. La petite rousse pinça ses jolies lèvres roses mais un voile indéchiffrable troubla son regard. Lyssandra n'en saisit pas le sens.

— Et toi, pourquoi ne t'enfuies-tu pas ? répliqua Kristal.

La réponse fusa machinalement. Une Neutre solitaire se repère vite et Dame Miranda lancerait un avis de recherche à travers toute la Terre des Loups. C'était l'excuse que Lyssandra s'était toujours trouvée. Elle était prête à participer à la Nuit des Bagues sans l'accord de la vampire, mais elle ne se sentait pas capable d'affronter sa vengeance si une tentative de fuite échouait.

— Nous sommes toutes les trois engagées dans le même combat, déclara finalement la petite rousse avec un sang-froid étrange qui lui était inhabituel. Sauf que ce n'est pas parce que nous affrontons le même ennemi que nous sommes dans le même camp.

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