Chapitre 22

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La nouvelle tomba, telle une averse rafraîchissante par une chaude journée d'été : Isabella, princesse des vampires, honorerait la Nuit des Bagues par sa présence. Les villageois étaient partagés entre un immense soulagement et une déception perverse. Même si peu osaient l'admettre, ils auraient trouvé un malin plaisir à trembler devant le roi. Certains étaient froissés par le fait que le vampire le plus légendaire de l'Histoire — dont la seule mention du nom suffisait à faire trembler les plus hardis — ne se donnait pas la peine de venir pour une célébration lycanthrope.

Pour une personne, en revanche, cette annonce n'inspirait qu'un profond apaisement. Dame Miranda avait relâché un imperceptible soupir lorsqu'elle avait reçu la missive du comité des vampires du village. À peine l'avait-elle faite partager à ses deux filles que Kristal avait bondi de son siège et s'était écriée :

— Alors cela veut dire que nous pourrons nous rendre à la soirée ?

Sa prétendue mère avait lentement hoché la tête, ce qui avait déclenché l'hystérie complète chez la petite rousse. Alisée n'avait presque pas réagi, relevant à peine le nez de son livre pour observer la fièvre de Kristal avec exaspération.

Tout cela faisait bien les affaires de Lyssandra. Si les vampires allaient à la Nuit des Bagues, alors elle pourrait partir à pied quelques minutes après le départ de leur carrosse. Restait le problème de ne pas les croiser à la soirée... Mais elle traiterait chaque obstacle un par un. Pour le moment, son unique objectif était de trouver sa bague.

Danser avec Julian pendant des heures était bien amusant, il n'empêchait que ce ne serait pas uniquement ça qui lui permettrait de devenir une Louve du Topaze. Cela constituait juste l'une des conditions pour que son rêve prenne vie. Or la liste des exigences pour que ce supposé espoir devienne réalité était encore bien longue... et la plus importante de toutes concernait sa bague.

Heureusement, Kristal contribuait malgré elle à sa réussite : elle voulait se rendre presque toutes les nuits au village, afin de se trouver une robe parfaite pour la soirée. Cette fois, les enjeux étaient trop importants pour qu'elle se risque à confectionner une tenue elle-même. Une invitation au palais du Grand Alpha ne s'était jamais présentée en ses soixante ans de vie, et elle ne pouvait se permettre le moindre faux pas. Sa splendeur devrait marquer les esprits, et seul un couturier du village pourrait la lui garantir.

Ne parvenant pas à décider lequel réussirait à la mettre le plus en valeur, la vampire rousse écumait une nouvelle boutique chaque soir, entraînant avec elle Dame Miranda et Alisée. Tout cela arrangeait bien Lyssandra. Pendant deux nuits d'affilée, elle avait pu fouiner à sa guise dans la chambre de la vieille vampire. Cependant, elle avait eu beau retourner chaque placard, soulever chaque étoffe, il n'y avait pas l'ombre d'une bague sertie d'une pierre bleu ciel.

Désormais, c'était la troisième nuit qu'elle passait à gratter dans la chambre. Elle prenait garde à conserver sa minutie pour ne pas éveiller les soupçons de l'occupante des lieux, mais la frustration et l'énervement prenaient parfois le dessus. La Neutre venait de fouiller le tiroir d'une commode pour la troisième fois, sans succès. Dans un élan de rage, elle le referma vivement et coinça ses doigts qui étaient restés trop près du meuble. Elle poussa un cri et secoua sa main douloureuse.

À bout de nerfs, elle se laissa tomber contre un mur et s'assit à même le sol. Laissant aller sa tête en arrière jusqu'à se cogner contre la paroi, elle ferma les yeux tout en poussant un long soupir. Jamais tu ne retrouveras cette foutue bague. Autant chercher un vampire en plein soleil. Comment avait-elle pu croire qu'elle parviendrait à retrouver un objet d'à peine deux centimètres dans une chambre qui recelait plus de mille cachettes potentielles ? Tu n'es même pas certaine qu'elle soit dans cette pièce, pensa-t-elle, accablée.

Il lui restait moins d'une semaine avant la Nuit des Bagues. La pleine lune approchait et tout ce dont elle avait connaissance, c'étaient de quelques pas de valse et des bribes de cours théoriques de quadrille, une autre danse se pratiquant à plusieurs apparemment très en vogue chez le Grand Alpha. Ce n'est pas avec ça tu vas aller bien loin. Pourtant, ce n'était pas le moment de flancher. Lyssandra avait vécu trop de choses pour laisser un simple anneau se mettre en travers de son chemin. Si elle baissait les bras maintenant, alors elle n'aurait plus jamais le droit de se plaindre. Si elle laissait passer sa chance, elle devrait en supporter les conséquences en ne pouvant s'en vouloir qu'à elle seule.

Elle serait choisie par le Grand Alpha. Mais pas seulement. À minuit pile, elle aurait sa bague et sentirait tous ses os craquer jusqu'à devenir le même animal fascinant qu'elle avait croisé dans la forêt lors de la dernière pleine lune.

Ce n'était pas un rêve ou un espoir, mais un objectif.

Bien décidée à se reprendre en main, elle ouvrit les yeux et croisa son reflet dans l'un des nombreux miroirs muraux de Dame Miranda. De fines mèches blondes s'échappaient de son chignon lâche. Si ses cheveux étaient décidés à se laisser aller, son regard indiquait tout le contraire. Une petite étincelle de détermination brillait dans ses yeux marron. Elle resta quelques secondes à observer l'image que lui renvoyait le miroir, jusqu'à remarquer un léger détail...

Le cadre doré qui entourait la plaque de verre n'était pas droit.

Il était légèrement de travers, penché de quelques infimes centimètres vers la gauche. Cela aurait été sans importance pour n'importe qui, sauf que cela constituait un outrage pour la vieille buveuse de sang. Elle ne l'aurait jamais laissé comme cela, et Lyssandra était persuadée de ne pas y avoir touché.

Guidée par une force lui hurlant de s'approcher du miroir, la jeune fille se leva et fit un pas prudent vers l'objet. Celui-ci était de forme rectangulaire et s'étendait presque du bas jusqu'en haut du mur. Un rapide coup d'oeil circulaire sur l'ensemble de la chambre confirma à la Neutre que c'était bel et bien le plus grand miroir parmi les dizaines exposés. Elle chercha d'abord à le soulever pour voir si quelque chose se cachait derrière, mais elle ne réussit pas à le faire trembler d'un millimètre. De peur de le briser au sol en mille éclats, elle n'osait pas trop forcer. Néanmoins, on aurait dit qu'il était soudé avec la cloison.

Lorsqu'elle tenta de le faire pivoter pour le remettre droit, le miroir tourna docilement, sans émettre la moindre résistance. On pouvait donc le tourner, mais pas l'enlever du mur. Lyssandra ne savait pas vraiment pourquoi elle s'obstinait ainsi. Sans doute parce qu'elle avait inspecté toutes les cachettes possibles et qu'il ne lui restait plus qu'à essayer les endroits les plus tirés par les cheveux. Avec toute la douceur dont elle était capable, elle fit pivoter le miroir vers la gauche, jusqu'à ce qu'il soit complètement à l'horizontale.

D'abord, elle ne vit rien. Le pan du mur au niveau de ses yeux que venait de découvrir la partie supérieure de l'objet était tout à fait ordinaire. Ce n'est qu'en baissant la tête vers ce que cachait le bas du miroir qu'elle comprit.

Une trappe était encastrée dans la paroi.

Les doigts toujours crispés sur le cadran entourant la glace, Lyssandra n'osait pas desserrer sa prise. Même si la plaque de verre était visiblement reliée à un système rotatif soudé au mur, elle n'était pas du tout rassurée. Détendant légèrement les muscles de ses mains, elle s'assura que le miroir restait en place avant de le relâcher complètement.

Elle se baissa ensuite avec vivacité vers la trappe. Celle-ci était de forme carrée et assez étroite. Elle se confondait parfaitement avec le rouge foncé de la cloison et c'était à peine si l'on remarquait la démarcation entre les deux. La jeune fille dut approcher une bougie pour entrevoir une minuscule serrure. Il n'y avait cependant aucune poignée.

La Neutre comprit que si ce qu'elle recherchait existait vraiment, alors son butin se trouvait de l'autre côté de cette petite porte. Elle sortit son tournevis, et les mains tremblantes d'excitation, elle entreprit de triturer la serrure... sauf que la pointe métallique de son outil ne logeait même pas dans le conduit. La clé nécessaire devait être de la taille d'une aiguille. Ou alors ce n'est pas une clé ordinaire. Lyssandra était à deux doigts de défoncer la trappe avec le plus gros marteau qu'elle trouverait, mais repris vite ses esprits. Dame Miranda ne devait pas remarquer quoi que ce soit. Si le cadran n'était pas droit tout à l'heure, c'était parce que la vampire s'était servie de la cachette juste avant de partir pour le village. Elle devait y attacher d'autant plus d'attention.

Il ne restait plus beaucoup de temps avant le retour des buveuses de sang. La jeune fille ravala son enthousiasme et replaça doucement le miroir exactement de la même façon qu'elle l'avait trouvé. Elle prit ses bougies et quitta la pièce, pressée d'y retourner le plus vite possible. Avec un peu de chance, Kristal n'aurait pas trouvé sa robe cette nuit-là...

Une fois la porte refermée à l'aide de son tournevis, elle se retourna et poussa un hoquet de surprise en découvrant Alisée, plantée au beau milieu du couloir. Les yeux écarquillés, la magnifique jeune femme semblait aussi surprise qu'elle de la trouver ici.

— Tu m'as fait peur ! s'exclama-t-elle en portant une main à sa poitrine, comme si c'était Lyssandra la créature sanguinaire s'abreuvant chaque jour de son sang. Qu'est-ce que tu fais ici ?

— Vous êtes toutes rentrées du village ? demanda la Neutre, pétrifiée à l'idée de voir Dame Miranda débarquer d'un instant à l'autre.

Elle remarqua qu'Alisée n'avait pas l'air plus à l'aise qu'elle. Son regard se faisait fuyant et elle froissait le tissu de sa robe jaune entre ses doigts.

— Je n'y suis pas allée, déclara-t-elle en prêtant attention au tournevis que la jeune fille tenait toujours entre ses doigts. Qu'est-ce que...

Elle ne mit pas plus de temps avant de comprendre. La vampire était très intelligente, même si Dame Miranda faisait toujours tout pour la réduire au silence. Elle n'avait pas besoin d'explications pour saisir ce que Lyssandra fabriquait. Cette dernière avait envie de se frapper la tête contre les murs. Elle n'avait pas remarqué que seules deux vampires étaient parties au village.

— Alisée, commença-t-elle doucement comme si elle s'adressait à un animal sauvage dont les réactions étaient impossibles à prévoir, je suis désolée pour tout ce que Dame Miranda t'a fait subir à cause de moi. Je te remercie de m'avoir aidée et je ne te demande pas d'en faire plus, mais s'il te plaît...

— Je ne dirai rien, la coupa-t-elle un peu froidement. Ne t'inquiète pas pour ça. J'étais en train de lire dans ma chambre quand j'ai entendu du bruit. J'ai d'abord cru que c'était une souris ou je ne sais quoi qui grattait, mais j'ai voulu aller m'en assurer... Je ne m'attendais pas à te tomber dessus.

La Neutre ne savait pas quoi dire. Alisée s'était fait transpercer la main à cause d'elle et il aurait été compréhensible qu'elle ne veuille plus prendre de risques en la protégeant.

— Je te remercie, balbutia Lyssandra sans savoir quoi ajouter d'autre.

La vampire hocha la tête et son regard se posa sur la porte close de Dame Miranda.

— Tu as vraiment réussi à entrer ? s'étonna-t-elle, impressionnée.

— J'étais assez motivée...

C'était peu dire. La jeune fille aurait été prête à passer par la fenêtre pour accéder à la chambre, quitte à se casser la jambe au passage.

— Et tu as trouvé quelque chose ?

— Rien d'intéressant pour moi, répondit la Neutre en haussant les épaules.

Elle hésitait à lui parler du titre de propriété qu'elle avait trouvé. Alisée devait déjà être au courant de son existence, mais savait-elle ce que contenaient les "mentions spéciales" ?

— Tu as trouvé mon titre d'achat, c'est ça ? la devança l'intéressée en esquissant un sourire triste. Moi aussi, j'ai un jour fouillé la chambre de Dame Miranda.

Son interlocutrice ouvrit la bouche pour la questionner au sujet de la trappe derrière le miroir, mais s'interrompit. Pouvait-elle vraiment lui faire confiance ? Certes, la vieille vampire lui avait également fait du mal, mais elle était restée passive pendant dix-huit ans, à regarder souffrir la petite fille qu'était Lyssandra sans prendre sa défense. Combien de fois as-tu espéré qu'elle te propose de fuir avec elle, lorsque tu étais enfant ? Même aujourd'hui, ne pourrait-elle pas faire davantage pour toi ? La Neutre fit taire cette voix égoïste.

— Tu n'aurais pas une épingle à cheveux ? se hasarda-t-elle en repensant à la minuscule serrure de la trappe.

Elle préférait lui demander ainsi plutôt que d'être obligée d'en dérober une dans sa coiffeuse. Alisée en enleva aussitôt une de son chignon et une mèche de cheveux frisés s'en échappa. Elle ne posa aucune question quant à l'usage que comptait en faire la Neutre.

— Je n'ai pas besoin de te dire de faire attention mais... Reste sur tes gardes quand même. Si Kristal t'avait trouvée à ma place, je ne sais pas ce qu'elle aurait fait.

La jeune fille acquiesça tout en se faisait la promesse intérieure d'être moins stupide à l'avenir.

— Il est l'heure pour toi d'aller un peu dormir, lui conseilla la vampire tout en faisant quelques pas en arrière. Elles vont revenir d'un instant à l'autre et il ne vaut mieux pas que Dame Miranda te voie avec ce magnifique tournevis à la main.

Elle ponctua sa phrase d'un petit sourire complice et Lyssandra rangea machinalement l'objet dans sa poche, bien à l'abri avec l'épingle à cheveux. Juste avant de rentrer dans sa chambre, Alisée lui lança d'un air désinvolte :

— Si c'est ta bague que tu cherches, je ne vois vraiment pas pourquoi tu te donnes toute cette peine...

— Euh... Pardon ? fit la Neutre, le visage empreint d'incompréhension. Pourquoi dis-tu cela ?

Les lèvres rouges de la sublime buveuse de sang s'étirèrent davantage.

— Parce que tu l'as déjà, bien sûr.

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