Chapitre 10 : Menaces et mathématiques

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Je reculais d'un pas pour me mettre hors de portée d'un potentiel coup de pied du garçon qui était toujours étalé par terre, puis je me permis de le regarder pour savoir à qui j'avais à faire.

Il était vêtu de vêtements de marques très coûteux, et portait une montre dont l'écran s'était brisé contre le sol lors de sa... chute, disons.

Je me retins de grimacer. Ne manquait plus qu'il porte plainte et demande un remboursement.

Il cligna des yeux plusieurs fois pour reprendre ses esprits et se passa une main sur le visage, puis se releva, ignorant sûrement sa tête qui devait tourner.

- Sale petit con, cracha t-il.

Son attitude commençait à me rappeler le demi-frère de Lys, le cœur même de mes cauchemars. Mais je réussis à ignorer ce sentiment. Je ne devais pas me laisser déconcentrer par le passé pour être plus attentif à ce moment - pour une fois.

- Tu vas me le payer ! s'énerva t-il en constatant l'état déplorable de sa montre.

Ne pas céder à la panique. Cela serait lui donner le pouvoir.

Il s'avança lentement vers moi et attrapa le col de mon éternel T-shirt noir. Au moindre problème, je savais que je pouvais remonter mon genou dans ses bijous de famille.

Au loin, j'entendis la deuxième sonnerie retentir, signifiant très clairement que j'allais être en retard pour la deuxième heure de mathématiques.

Le type me regardait toujours avec haine, son visage à moins de vingt centimètres du mien.

- Lâche moi, dis-je lentement.

- Pas avant de t'avoir rendu le coup que tu m'as porté, siffla t-il en me poussant en arrière.

J'eus un peu de mal à reprendre mon équilibre, mais y arrivais finalement.

- J'ai fait cinq ans de boxe, m'informa t-il en s'approchant de moi.

- Comment te dire très poliment que je n'en ai rien à faire ? répliquais-je froidement en soutenant son regard. Oh, je sais. Va te faire foutre. Et je suis resté poli.

Sa mâchoire se crispa. Je pus alors constater qu'il devait faire le double de mon poids, deux têtes de plus que moi, et qu'il aurait donc sans problème l'avantage sur moi en cas de bagarre.

Super. Et en plus, j'avais envenimé la conversation en toute connaissance de cause.

Je ne me rendis compte que j'étais en train de reculer que lorsque mon dos heurta l'un des murs blancs qui délimitaient le complexe scolaire.

Le gars afficha le sourire typique du chasseur qui avait trouvé sa proie. Je ne devais pas laisser la panique me gagner. Je ne devais absolument pas céder à la panique.

Je... oh, bordel, il allait me massacrer.

Le type leva le poing, prêt à me frapper. Dans un élan de panique, je me baissais automatiquement. Ses phalanges craquèrent méchamment contre le mur de ciment. Je profitais de son étourdissement pour le repousser de toutes mes forces - qui rivalisaient avec celles d'une crevette, donc le gars ne recula que d'un pas - et me faufilais entre son flanc droit et un banc contre lequel je faillis trébucher.

Je me mis à courir aussi vite que je le pouvais, ne me retournant pas une seule fois pour ne pas perdre de temps, et me heurtais de plein fouet contre deux personnes que j'entraînais dans ma chute.

J'ouvris les yeux après un court moment, presque aussi sonné que le type tout à l'heure. Mon coude s'était écorché contre le bitume et saignait légèrement, et mon genoux gauche avait reçu le même traitement.

Je me rendis compte que j'étais à moitié allongé sur les deux personnes qui avaient causé ma chute. Mon regard remonta jusqu'à leur visage. Je reconnus avec surprise Mélody, qui essayait de me pousser, et les cheveux de Milo, coincé sur le ventre en-dessous de l'autre HC et moi.

Je me relevais de mon mieux, ma panique étant retombée en même temps que moi, et aidais les deux autres à se relever.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? s'alarma Milo dès qu'il fut debout. Tu aurais dû être en cours depuis un quart d'heure !

- Comment tu peux le savoir ? demandais-je simplement.

- La seconde heure de mathématiques du lundi est basée sur des travaux de groupes inter-classes, les binômes changent chaque semaine et Milo est le mien, cette fois, m'expliqua Mélody. Comme ni toi ni ton binôme n'étaient présents, on a jugé bon de venir te chercher, ce qui, visiblement, était plus qu'une bonne idée.

- Moi et... mon binôme ? répétai-je, livide.

- Logan, me dit Milo. Dans ta classe, je crois. Plutôt dans le genre "gros tas de muscle", arrogant au possible, et aimant à fille stupides.

- Tu veux dire, le gars que j'ai plaqué au sol et qui veut se venger ? fis-je en grimaçant, trop bas pour qu'ils ne puissent m'entendre.

- Quoi ?

- Rien, mentis-je. Allez, on est déjà assez en retard.

Hors de question de mêler les deux seules personnes que je pouvais supporter à cette histoire, qui se réglerait de toute façon d'une manière ou d'une autre.

J'espérais juste que Logan se contenterait de me donner un bon coup de poing pour se venger et non pas de me pourrir la vie.

Milo me lança un regard suspicieux que j'ignorais avec un calme olympien, ce qui, tout bien réfléchi, dut l'alarmer encore plus que si j'avais rétorqué par une insulte.

On remonta en salle de mathématiques sans plus attendre. Milo et Mélody me guidèrent un peu, car, je l'avoue, je n'avais pas parfaitement retenu le chemin.

- Encore en retard, s'agaça le professeur, les mains sur les hanches et le regard lançant des éclairs.

- Ce n'est pas de ma faute, me défendis-je.

- Ah bon ? fit-il avec un air faussement étonné. Qui vas-tu accuser ? Une fenêtre ?

Non, mais s'il continuait, j'allais sérieusement envisager de le défenestrer.

- Raison personnelle, répondis-je simplement en baissant les yeux.

Ne s'attendant sûrement pas à une réplique dénuée de moquerie, il fronça les sourcils et n'ajouta rien un long moment.

- Comme tu peux le voir, les tables ont été réorganisées pour que le travail avec vos binômes soit facilité, m'expliqua t-il alors comme si nous ne nous étions jamais disputés. Il faudra les remettre en place à la fin de l'heure, tout le monde fait un effort là-dessus. Compris ?

Je hochai la tête. Ça irait. Logan ne serait mon binôme que pour une heure, puis je ne l'approcherai plus jamais.

- Et, j'oubliais, reprit l'enseignant en sortant une feuille du tiroir de son bureau. Pour ces deux derniers trimestres, la proviseure a changé le principe de binôme. Désormais, vous garderez le même pendant trois mois, jusqu'à la prochaine remise de bulletins.

Je me sentis pâlir mais essayai de ne laisser aucune émotion paraître sur mon visage. Le professeur me désigna une place vide dans le fond de la classe à laquelle j'allais m'assoir sans discuter.

Il utilisa le vidéo-projecteur pour afficher les énoncés des exercices sur le tableau blanc. Alors que les autres binômes se mirent à travailler ensemble, chuchotant pour échanger leurs idées, quelqu'un frappa à la porte et entra sans attendre de réponse. Le professeur se tourna vers le nouvel arrivant, croisa les bras et dit sèchement :

- Logan. Vingt-trois minutes de retard. Va chercher un coupon à la vie scolaire.

Cela ne m'accorda que 107 secondes de sursit, car Logan s'était visiblement dépêché d'obéir. Il entra à nouveau et balaya la salle du regard à la recherche de sa place. Quand il se rendit compte qu'il était à côté de moi, son regard se durcit et il vint s'assoir sans un mot.

- Hé, la tapette, m'insulta t-il en me mettant "involontairement" un violent coup de coude. Je me vengerai, pour ma montre et pour l'humiliation. Tu t'en sortiras pas comme ça une seconde fois.

Je me concentrai sur la lecture des exercices affichés au tableau pour ne pas paniquer inutilement. Logan ne pourrait rien me faire. Pas vrai... ?

- J'ai pas envie de travailler, déclara t-il. Démerde toi tout seul. Et je veux au moins un B.

Je sortis ma trousse et la posai sur mon bureau avec une violence inutile, faisant retourner quelques élèves devant nous qui détournèrent bien vite le regard. Logan eut un rictus moqueur qui fit disparaître ma combativité aussi vite qu'elle était apparue.

J'ouvris mon cahier encore neuf, laissai la page de couverture pour plus tard et me mis à résoudre les exercices, qui étaient d'une simplicité enfantine.

- Fini, déclarai-je.

Le professeur écarquilla les yeux, surpris, et remonta les allées séparant les tables jusqu'à arriver à mon niveau. Il attrapa mon cahier et parcourut rapidement du regard les trois pages que j'avais utilisé pour tous les exercices requis.

- C'est un sans-faute, murmura-t-il, ébahi.

Je haussai les épaules et manipulai nerveusement mon stylo entre mes doigts pour essayer de faire abstraction des regards des élèves qui s'étaient tous tournés vers moi, y compris Milo et Mélody.

- Logan, as-tu seulement lu les consignes, en revanche ? finit-il par demander.

Le concerné, qui somnolait, se redressa d'un bon et dit :

- Oui, bien sûr que je les ai lus !

- As-tu aidé Noah à les réaliser ?

- Oui, bien...

- Non, le coupai-je. Il ment. J'ai tout fait seul car il n'avait pas envie de travailler.

Je regrettai d'avoir parlé à la seconde où je croisai le regard furibond de Logan. Le professeur reposa mon cahier sur mon bureau, et ordonna à la classe de reprendre leurs travaux. Ils obéirent sans discuter - cet enseignant était vraiment particulier.

- Tu resteras à la fin de l'heure, me dit à voix basse le professeur.

À part Mélody, grâce à son ouïe améliorée, personne d'autre, pas même Logan, ne devait l'avoir entendu. J'acquiesai en silence, nerveux. Cette journée battait des records en panique. D'abord le cas de Logan, puis un professeur qui voulait me parler sans oreilles indiscrètes - ce qui, en général, n'annonçait jamais rien de bon pour le lycéen concerné. Qu'allait-il me reprocher ?

Comme avant de regagner son bureau, l'enseignant me donna quelques pages d'exercices visant à évaluer mon niveau, l'heure passa extrêmement vite. Je prêtai à peine attention à Logan qui quittait notre table ou encore à la classe qui se vida à la sonnerie, trop occupé à finir un problème complexe.

[NDA : en vrai, j'imagine tellement bien Noah super concentré sur des exercices, cette image rend tellement bien dans ma tête]

- Noah, m'appela le professeur.

Je me forçai à délaisser la dernière partie de l'exercice pour reporter mon attention vers l'enseignant. Il récupéra mon cahier et prit rapidement connaissance de mes réponses, puis releva la tête vers moi.

- C'est impossible. Même un génie des mathématiques n'aurait pas pu résoudre tellement d'exercices complexes en seulement une heure.

Il tira la chaise de la table en face de la mienne et s'assit dessus à califourchon, face à moi.

- T'estimes-tu aussi doué dans d'autres matières ? me questionna-t-il.

- Doué ? répétai-je avec perplexité. Je ne suis pas particulièrement "doué".

- Bon sang, ton niveau de mathématiques est largement supérieur au mien, Noah ! s'exclama t-il. Comment peux-tu ne pas t'en rendre compte ?

- Vous êtes bizarre, fis-je simplement. Je trouve juste les mathématiques simples, pas la peine d'en faire tout un plat.

Il resta longuement sans rien dire, bouche bée, puis rigola.

- Tu es vraiment un phénomène, Noah. Cela faisait longtemps que je n'avais pas vu d'élèves aussi particulier et je n'ai que trente ans. Honnêtement, tu es presque aussi surprenant que Milo, à première vue.

- Milo ?

- Milo est, à mon avis, le meilleur élève de littérature que j'aie jamais rencontré - c'est la seconde matière que j'enseigne. Et je peux également affirmer qu'il est très complexe, car je suis apparement de si bonne compagnie que la plupart des élèves me considèrent comme un psychologue scolaire et viennent me raconter leurs soucis.

- C'est bien ce que je disais. Vous êtes bizarre. Aucune personne normale n'enseignerait les mathématiques et la littérature tout en ayant des bases en psychologie !

- Je suis plutôt polyvalent, s'amusa t-il. Et comme mon père était psychologue, il a pu m'enseigner quelques bases qui, étonnamment, se révèlent fort utiles dans le domaine de l'éducation.

Un long silence s'ensuivit, durant lequel j'eus l'impression qu'il voulait que je comprenne quelque chose d'important. Je réfléchis quelque secondes, avant de tilter sur un fait qui aurait dû retenir mon attention mais que j'avais jugé insignifiant sur le moment.

- Vous m'avez demandé de rester après les cours avant d'être sûr que j'étais bon en mathématiques, déclarai-je en le regardant droit dans les yeux. Vous me l'avez demandé après avoir surpris le regard haineux que me portait Logan, alors vous avez fait le lien avec nos retards simultanés et sa montre qu'il n'avait plus contrairement à l'heure précédente.

Il hocha lentement la tête, une lueur de fierté brillant dans son regard.

- Vous avez failli vous battre, ce qui explique pourquoi son pull est légèrement sali dans son dos mais pourquoi ni lui ni toi n'êtes blessés. J'en déduis donc que tu as réussi à le faire tomber, puis qu'il a mal visé et frappé une surface dure en pensant t'atteindre puisque sa main gauche est bandée.

Comprendre qu'il avait remarqué et analysé ces détails en partant d'un regard me fit froid dans le dos. Il aurait dû devenir profiler pour la police, pas enseignant dans un lycée.

- Noah, reprit-il plus doucement. Je suppose que tu as remarqué à quel point je peux être attentif. Alors tu as sûrement compris que je ne suis pas sans ignorer que Logan en a après toi mais que tu ne veux pas y mêler tes amis pour les protéger.

J'avalai difficilement ma salive, ne pouvant retenir un mouvement de recul. Si même Milo ne devait pas être au courant, je ne souhaitais pas qu'un enseignant mette la direction dans le coup.

- Tant que je vois qu'il ne te fera rien, reprit le professeur profiler, je ne te forcerais pas à le dénoncer pour agression. Je sais bien que t'obliger à quoi que ce soit ne ferait qu'empirer les choses.

Je jetai presque ma trousse et mon cahier dans mon sac, signifiant que je ne voulais pas en entendre plus, mais il continua :

- Si jamais tu veux en parler, je...

- Merci mais non merci ! criai-je en me levant, passant en vitesse mon sac sur mes épaules.

Je sortis de la salle en courant presque, ma confiance cédant du terrain à l'angoisse. Je détestais l'idée qu'on puisse lire en moi comme dans un livre ouvert. Je détestais l'idée que Logan veuille me frapper pour se venger. Je détestais le fait de devoir cacher ces deux éléments à Milo, qui faisait tant d'efforts pour supporter mon comportement pourtant insupportable.

Après avoir tourné dans plusieurs couloirs différents, je sortis mon emploi du temps de ma poche. Mes mains tremblaient tellement qu'il m'était presque impossible de déchiffrer les minuscules écritures indiquant en quel cours je devais me rendre.

Je me rendis compte que si je ne trouvais pas de numéro, c'était car la case était vierge, signifiant une heure d'étude, de sortie ou bien de CDI. Suivaient deux heures pour le repas. Le lundi de la semaine A était visiblement la journée la moins chargée de la semaine. J'inspirais longuement pour me calmer, et le rangeais dans ma poche.

J'allais passer cette heure dans les couloirs, même si c'était à la base interdit. Je n'aurais qu'à me cacher si quelqu'un arrivait. Je n'étais pas d'humeur à sortir dans la cour, j'avais besoin de silence pour me calmer.

Je m'assis pas terre, contre un mur, et posai mon sac à côté de moi avant d'en sortir un cahier de brouillon ainsi qu'un stylo. Je me mis à tracer tout ce qui me passait par la tête ; aussi bien un œil marron au regard apaisant que les deux J entrecroisés de John Johnson, ou bien un ballon de basket qui côtoyait des fleurs de tailles et formes diverses et variées.

Alors que je commençais à tracer les contours du téléphone portable de Milo, quelqu'un m'arracha brutalement mon carnet des mains. Mon stylo retomba un bon mètre plus loin, et roula encore un peu sur le sol avant de s'immobiliser. Enfin, j'osai croiser le regard de celui qui me détestait.

- Salut, le petit con, fit sèchement Logan en jetant mon carnet par terre, s'en désintéressant totalement. Je crois qu'on a encore des comptes à régler.

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