iii. regarde toi comme si tu n'étais pas toi

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         la nuit venue, azadée et soren firent l'amour en pensant l'un à l'autre. pourtant leurs corps se trouvaient à environ une heure de marche — un quart d'heure en métro — et rien entre eux n'avait la prétention de vouloir exister. le jeune homme était électrique, ne savait comment réagir à la présence d'uriel si pressante autour de lui, dans son propre studio. iel était assis.e sur le lit, simplement vêtu.e d'une culotte noire, le corps libre dans ce que soren ne voulait pas voir. il était fatigué de ses paroles, de ses mains qui jouaient avec les draps défaits par l'amour et se refusait à l'ivresse ; il dansait demain.
        il avait le corps pesant, lourd de tout cet éreintement des sensations. et uriel ne semblait pas comprendre qu'il voulait simplement qu'iel se taise. il désirait rester ainsi étalé sur ses jambes, la tête confortablement déposée dans le creux des cuisses, près du sexe encore chaud et humide. il voulait s'endormir et fermer les yeux sur la splendeur du visage de l'inconnue. selon lui, elle avait l'air de s'appeler alba — soren aimait donner des prénoms aux inconnu.es, les habiller de ce qui les rendrait intimes à ses yeux. alba était un prénom qu'il laissait fondre sur sa langue, s'évanouir avec la même saveur que l'éphémère. il voyait très clairement le prénom se déposer sur les cheveux châtains parsemés de quelques mèches blondes, quasiment blanches et sur les lèvres rosées, délicatement gonflées. le corps de l'inconnue était, en une seconde à peine, devenu une obsession pour soren. et même en sachant que ce bouleversement incongru des pensées ne durerait pas — il y en avait eu assez pour comprendre que l'obsession ne se prolongeait jamais bien longtemps — le jeune homme ne put faire autrement que de s'endormir en pensant à elle et en se demandant comment il allait bien pouvoir faire pour la revoir.

          jusqu'au beau milieu de la nuit noire et tiède, maé et azadée parlèrent du spectacle. elles se murmurèrent le charme des danseurs, notamment de ce beau soliste et la plus jeune fut troublée de laisser sa voix dire ce qu'elle ressentait. elle n'oralisa pas tout, bien sûr, conservant au plus profond d'elle-même l'exaltation dont elle ne parvenait à se défaire ; il fallait qu'elle revoit le danseur. elle avait besoin de l'observer hors de la danse, de le délaisser de ce processus subliminal du mouvement et de l'art. elle souhaitait le voir comme il était, comme s'il était elle-même. pourtant, elle ne proposa pas à maé de retourner voir le spectacle, elle voulait garder cela pour elle-même et ne pas exposer au grand jour les failles de leur amour. et puis, égoïstement et arbitrairement, elle ne désirait les cheveux noirs bouclés, mouillés ou bien plaqués et la force des muscles rien que pour elle. les charmes des corps ne connaissaient pas toujours la rigidité du partage et l'absence de sentiments réprimés.
        azadée s'endormit dans les bras de maé, le souffle court de penser à la présence de quelqu'un d'autre, de se laisser aller à l'éventualité de la fin de son absence. elle dormit mal, le cœur tordu de ce qu'elle ressentait et se leva plusieurs fois dans la nuit afin d'aller boire et de se sortir de sa torpeur. maé ne la rejoignit jamais, grognant simplement lorsqu'elle se retrouvait seule dans le lit, dans des draps qu'azadée avait trempé de sueur. depuis le balcon, bercée par le bruit des voitures qui passaient au loin, elle écrivit quelques mots dans son carnet. et, sans crier gare, se mit à pleurer. les larmes remplirent les pages, les tâchèrent et elle prit la décision de ne pas les arracher. la nuit l'enveloppait comme du velours mais elle se sentait seule, apeurée d'exister et se résigna à retourner dans le lit, se collant le plus possible contre maé, faisant naître des cavités entre leurs deux corps nus, là où les peaux ne pouvaient se toucher. et puis, à l'heure où les oiseaux commencèrent à chanter, elle tomba enfin dans le sommeil, fiévreuse de cette nuit passée à rien et dégoûtée par la moiteur de son corps tout contre celui de sa petite amie.

        le réveil fut dur pour tous les deux, chacun luttant contre ce désir qu'ils avaient en commun — sans peut-être même savoir pleinement ce qu'ils ressentaient. et puis la vie reprit doucement son cours, comme si rien de tout cela n'avait eu lieu, comme si rien n'avait pu exister. il leur semblait qu'ils recommençaient tout à zéro, une nouvelle existence chaque matin. et le soir venu, chacun s'inventa une vie qui n'était jamais venue au monde auparavant. soren prévint uriel qu'il ne pourra pas læ voir ce soir, soirée chill avec des ami.es, il expliqua sans même qu'iel ne lui en demanda la raison. azadée, elle, prétexta une soirée étudiante, à laquelle elle savait que maé ne voudrait pas venir, et alla devant la salle de spectacle tôt. elle paya sa place et le jeune homme qui était au guichet lui sourit — il la voyait depuis trois soirs — ce qui la fit lever les lèvres à son tour. son sourire se propagea aussitôt dans ses yeux lorsqu'elle entra dans la salle et s'assit sur l'un des fauteuils les plus près de la scène. elle avait payé cher pour être là et elle savait qu'elle ne pourrait revenir le lendemain. c'était le soir ou jamais, le moment qui n'existe jamais mais pour lequel elle était prête à tout abandonner. 
          elle prit alors son carnet, relit les quelques mots qu'elle avait écrit la veille et se moqua furieusement d'elle-même en ressentant ses émois comme ceux d'une adolescente timide. il lui semblait qu'elle avait douze ans de nouveau et elle se détestait pour cela. autour d'elle les places se remplissaient peu à peu et elle refusa de se laisser aller aux larmes, bien que celles-ci fleurissaient déjà dans les coins de ses yeux. une angoisse vicieuse et incisive s'emparait d'elle, la faisant se sentir seule dans cette salle pleine. les corps se donnaient à voir, déjà préparés pour la beauté à venir, laissant chaque instant grandir précieusement et léoline se sentit étrangère à cela. elle pensa à maé et revit furtivement son excitation quant à la représentation de la veille. à cet instant elle lui manqua plus que jamais, comme si elle ne lui avait jamais réellement manquée auparavant. 
         le noir mit du temps à s'imposer ce soir-là, et dans les secondes qui les précédaient, soren et azadée pensèrent l'un à l'autre. 

       pour tous les deux, le spectacle fut délicieux, goûtu de ces sensations inoubliables que l'art ne pouvait s'empêcher de faire émerger en eux, à la manière de fleurs de nénuphars. ils se sentaient bien, prêts à affronter l'inconnu, la part de risque qui résidait entre eux et le visage d'une autre personne sentait bon l'orage. alors, une fois qu'il eut quitté la scène et son parquet grinçant sous le poids des corps en transe, soren reproduit à l'identique les gestes de la veille : démaquillage, douche — y compris les cheveux — vêtements propres, tout ça sans parler, dans le silence commémoratif que lui imposait son corps. cependant, cette fois-ci, il se pressa réellement, fit rouler la pulpe de ses doigts baignée dans le savon sur sa peau une seconde seulement et s'habilla dans une simple respiration. il avait choisi ses vêtements tôt le matin, changeant d'avis trop de fois pour oser revenir sur sa décision, il avait donc opté pour un pantalon gris foncé, large, avec de grandes poches et un débardeur noir, mettant en valeur ses épaules carrées et la musculature du haut de son dos. 
         toujours dans la précipitation et la hâte, il entreprit de farder ses yeux avec un crayon noir et d'allonger son regard grâce à un mascara — se démaquiller pour se remaquiller, cela le faisait sourire. et, afin de se plaire davantage, il orna son cou de deux grosses chaînes argentées, dont l'une sur lequel brillait un pendentif en forme de serpent. enfin, pour parfaire son existence, il mit trois bagues qu'il avait glissé dans l'une des poches de son pantalon et, la boule au ventre désormais, sortit de la salle en courant. il ne croisa personne, ne dit au revoir à aucun des autres danseurs mais était déjà prêt à donner une réponse si on lui demandait pourquoi il partait aussi vite — pour pavel et aliaume la réponse aurait été uriel et il les voyait déjà sourire de cet égarement de lui-même. il se rendit finalement au bar, toujours le même, celui dans lequel l'attendait azadée.

       en sortant de la salle, bousculée par la foule pressée et étonnée une fois encore par la beauté de la nuit tombante, la jeune femme avait sourit. elle s'était perdue dans son sourire tout en se dirigeant, sans même l'avoir formulé auparavant pour elle-même vers le bar où elle s'était posée avec maé, la veille. elle s'assit à la même table, commanda un jus d'abricot et, armée de son style rouge, se plongea dans son livre du moment — les corps célestes de nicolas bréhal, livre qu'elle avait trouvé au fin fond d'une boîte à livres quelques jours avant et dont les pages jaunies sentaient la vieillesse consumée. inconsciemment, elle se mit à attendre. elle savait que son danseur viendrait. pourtant, elle doutait de la raison de sa venue, et s'il y avait la personne de la veille pour lui tenir compagnie ? elle haussa les épaules à cette pensée et puis tenta de s'oublier dans son livre, le souffle coupé de ce que les corps avaient à lui offrir. 
        elle n'attendait déjà plus quand soren arriva. il fut alors évident qu'elle ne le vit pas rester immobile un instant, à quelques mètres d'elle, les bras ballants de ce moment de latence infinie. il ne savait plus que faire, l'inconnue était là, un livre à la main, comme uriel quelques jours plus tôt et il eut l'impression que sa vie n'était qu'une boucle éternelle qui le comblerait toujours d'un vide immense, abyssal. dans la contemplation de la jeune femme, il remarqua qu'elle souriait seule devant son livre, annontant par endroit les mots de l'auteur, comme si elle voulait les recouvrir ou les modifier, lui sembla-t-il. il se trompait, azadée ne voulait que mettre en valeur les mots qu'elle n'oublierait jamais, les illuminer par d'autres mots, en faire quelque chose de mémorable. soren la trouva très belle dans les couleurs du soir, simplement éclairée par un lointain réverbère et les guirlandes de led disposées partout sur la terrasse. il se laissa tomber dans le sourire de cette beauté et inspira très fort, de la même façon qu'il le faisait avant de rentrer sur scène et s'avança vers azadée. 

        il s'assit doucement à côté d'elle, s'attendant à une réaction de sa part mais elle resta perdue dans son livre, les yeux frôlant à mille à l'heure les amas de lettres. il ne put s’empêcher de penser qu'elle l'ignorait volontairement, se jouant de lui et de la timidité qui le rongeait à cet instant précis. pourtant, quand il se racla la gorge, annonçant les paroles à venir, la surprise se lut dans son regard et le rouge de son style dérapa sur la page, effaçant sans le vouloir le mot inconnu. elle sourit de cette coïncidence et leva des yeux pétillants vers le danseur — elle savait que c'était lui sans même l'avoir vu. celui-ci se confondait en excuses, le souffle court de cette maladresse qu'il ne se connaissait pas, je ne voulais pas te faire peur, je suis vraiment désolé je ne sais pas ce qu'il m'a pris. et il se trouva idiot de s'excuser de la sorte. elle se surprit à être profondément attendrie par sa voix, qu'elle pensait d'ailleurs moins suave et rauque. 

ce n'est rien ne t'inquiète pas, je suis ailleurs quand je lis, lui dit-elle doucement, dans un demi sourire qu'elle voulait rassurant. mais que me vaut l'apparition de l'artiste principal d'un des plus beaux spectacles qu'il m'ait été donné de voir ? 

       il la regarda fixement, intrigué par la façon dont elle précipitait les choses, allant directement au but comme si elle voulait se débarrasser des sensations qui s'emparaient d'elle. il observa un instant les cheveux fraîchement coupés dans un carré déstructuré et libre rebondissant sur les joues pleines et perlées de quelques tâches de rousseurs et se sentit léger, comme une impression d'être au bon endroit. il rougit une seconde d'avoir été démasqué, reconnu mais se reprit et répondit en essayant d'être le plus naturel possible :

pour être honnête, je ne sais pas. je t'ai vu hier à cette même table, je t'ai vu aujourd'hui et j'aime les gens qui lisent alors je suis venu — et puis tu n’étais pas accompagnée alors je me suis dit que c’était le moment.

          il laissa passer un instant, furtif et doux, une seconde pendant laquelle il chercha les mots au plus profond de lui-même, ne sachant comme expliquer tout ce qu'il avait à dire. il y a des choses qui se font comme ça, sans qu'on sache réellement pourquoi. tu vois ? elle hocha la tête, les yeux éblouis par le nez fin, les lèvres légères et pâles et le front haut, lisse et recouvert par endroit des cheveux noirs, délicieusement bouclés. la jeune femme aussi se savait perdue dans la contemplation de l'autre, de ce qu'il avait à offrir et à promettre. c'est ça, cet enchantement de l'existence qui m'a amené. et puis, ce fut le silence, une intensité terrorisante de silence pendant laquelle ils se regardèrent mutuellement sans même savoir qu'ils le faisaient. les yeux fouillaient tout, les traits du visage, le maquillage — eye liner et fard à paupières dans les tons rouge pour azadée — les mains, délicatement posées sur la table pour soren, marquant encore la page du livre pour la jeune femme, et la posture, la grâce et la chaleur qui se dégageaient de chaque corps.
         et puis un serveur arriva, rompant brutalement cette infime connexion qui venait d'émerger, réduisant à rien tout ce qui flottait entre les deux jeunes. soren commanda une pinte et azadée, bien qu'elle n'avait jamais goûté la bière que son homonyme venait de choisir, lança un la même chose pour moi et se sentit niaise à souhait. cet attendrissement de son âme la poussa à parler, à offrir des mots à soren, à son danseur.

pour être sincère avec toi, j'espérais te rencontrer. 

ah bon ? pourquoi ? il était étonné de cet aveu, n'ayant jamais conscience des pouvoirs de son corps sur les vivants. 

je voulais poser un prénom, une voix et une existence sur ce corps qui m'a tant émerveillé. 

soren, pour le prénom. fracas, pour l'existence et puis pour la voix bah voilà. 

      azadée ne répondit rien, sortit vivement son carnet de son sac et avec le stylo rouge qui avait rompu l'appréhension de l'inconnu, elle écrivit les mots qu'il venait de lui dire. face à l'interrogation dans les yeux de soren, elle ne put s'empêcher de dire je fais ça tout le temps comme si cela expliquait tout. il ne fit rien de cette affirmation, la laissant planer au-dessus d'eux comme un nuage. 

et toi, prénom ? existence ? 

azadée. et comment tu peux résumer une existence en un mot ? enfin, je ne suis même pas sûre d'avoir une seule existence. 

      à l'entente du prénom soren ne put s’empêcher d'afficher une mine déçue, les traits légèrement défaits de cet échec fictif. elle ne lui demanda pas la raison de ce changement d'humeur sur le visage mais il la lui fournit comme si elle l'avait fait. je donne des prénoms aux inconnu.es et je m'étais mis en tête que tu t'appelais alba. 

pourquoi alba ? s'enquit-elle, la tête légèrement penchée sur le côté droit, signe qu'elle était perplexe.

— je ne sais pas, c'est venu comme ça, comme une évidence. mais je crois que azadée te va encore mieux.

ah bon ? je ne sais pas quoi penser de mon prénom pourtant. appelle-moi alba, si tu préfères.

        la jeune femme ne sut jamais pourquoi elle avait fait cette propisition à soren, elle qui aimait que l'on dise son prénom du bout des lèvres. elle y vit la responsabilité des fleurs, des fleurs en bouquets qui ne cessaient de se dresser entre son maé et elle, avec de multiples racines dans lesquelles leur amour se prenait les pieds, semblait prendre fin. elle pensa alors à son amoureuse, au mensonge qu'elle lui avait servi comme une promesse et elle se sentit honteuse de l'envahissement de sa personne par la beauté des choses et des corps. elle savait qu'elle n'aurait pas dû se tenir ici, le visage à quelques centimètres de celui de soren, le regardant avec passion et intensité, comme si elle n'avait jamais regardé quelqu'un d'autre. et à l'instant où elle allait prétexter une excuse, bredouiller un mirage et puis se lever brusquement, sans plus aucun regard et partir lâchement, triste et secouée, soren s'approcha et lit à voix basse le titre du livre. sa voix résonna, plana un instant dans une douceur lourde et honnête et azadée ne put lui résister, cette douceur appelait à l'engouement et au lâcher prise.

je ne pourrai pas exactement te dire de quoi ça parle puisque je viens de le commencer — et que j'ai été interrompue dans ma lecture. elle rit légèrement et il s'abandonna à un petit sourire, à demi honteux et pourtant empli de tendresse. mais ça parle des corps, des corps dans ce que l'amour a de plus beau à offrir et même sans avoir lu je trouve ça magnifique.

quel est le dernier mot ? 

pourquoi tu veux savoir ? 

     soren lui expliqua alors qu'il faisait toujours ça, regarder le dernier mot d'un livre avant de le commencer. pourquoi ? il ne le savait pas, il le faisait, c'était tout. souvent, cela lui permettait de se décider dans l'achat ou non d'un livre. il misait tout sur ce dernier mot, sur quelques lettres qui, peut-être ne voulaient rien dire. azadée était perplexe, regardait soren et ne pouvait s'empêcher de le trouver profondément intriguant, étonnant. elle lâcha d'une voix brève et abrupte c'est bizarre de faire ça. 

dis celle qui écrit au stylo rouge dans ses livres, ricana-t-il et elle rougit délicatement, le regard volontairement dans le vague.

bon, moi je ne veux pas voir le dernier mot du livre, mais toi regarde-le, si tu veux.
 
        il ne se fit pas prier et sourit en voyant le mot en question bleu. il y avait quelque chose de viscéral dans ce mot qui lui plaisait à outrance, qui le rendait purement et simplement heureux. ce mot était un mot qui, pour lui, voulait tout dire, tout signifier et rien ne pouvait échapper à son ampleur folle et immense. tout chez soren était relié au bleu, le bleu du corps, ses ecchymoses et le bleu des villes, bleu de l'océan, bleu du sommeil, bleu de ses draps préférés, bleus des yeux de celui qu'il avait aimé éperdument. chaque bleu avait une saveur différente, des nuances nouvelles et cela confortait soren dans la pluralité des existences. et, ce soir-là, il se sentit intensément lié aux yeux d'azadée, des yeux gris qui laissaient échapper quelques reflets bleus, un bleu féroce et électrique, de ce qu'il aimait le plus. il se mit alors, sans même s'en rendre compte, à détailler la jeune femme. son corps était recouvert par une longue jupe noire, des doc martens grises, une chemise et un corset dans les mêmes tons. il ne connaissait rien de ce corps qui se dressait en face de lui et pourtant il en éprouvait une exaltation infinie, fraîche et nouvelle. il savourait l’incandescence de ces sensations et se complaisait dans la tension qu'il ressentait. il aimait se trouver là à cet instant précis, et se sentit, pour la première fois depuis longtemps, à sa place dans la réalité des existences.
     
      ils parlèrent encore du livre, dans leur ignorance la plus totale et leurs verres se vidaient petit à petit. l'alcool les rendait encore plus soucieux de cette joie qu'ils ressentaient au fond d'eux-mêmes, délicieuse et douce. ils parlèrent longtemps, échangeant sur des choses futiles, dont aucun des deux ne se souviendrait le lendemain matin et aimèrent profondément se livrer à ce rien, à sa terrible brutalité. et puis ce fut la nuit, la vraie, alors il fallut partir, se quitter sans même n'avoir jamais vraiment été ensemble. azadée se leva la première, le cœur battant de rompre ce moment mais elle fut rassurée lorsque soren l'imita. chacun de ses mouvements était magnifique, hypnotisant et elle savait qu'elle ne voulait pas le laisser là, au beau milieu de cette nuit qui n'en finissait pas. ils étaient comme deux inconnu.es qui ne savaient dire à quel moment ils ne le seraient plus. 
       ils ne se proposèrent pas de se revoir, n'en parlèrent pas. ils ne se donnèrent aucun numéro, aucun pseudo de leurs réseaux sociaux, ils ne firent pas cela. ils ne firent rien de tout ce qui aurait pu se produire : se promener dans la nuit noire, la rendre torride dans le petit appartement de soren, la rendre infinie dans le creux des promesses. ils étaient deux inconnu.es qui s'étaient rencontré.es, il n'y avait plus rien à dire, à découvrir entre eux. elle paya pour elle, il paya pour lui et ce fut elle qui partit en premier, le pas lourd de cet abandon volontaire, de cette fin avortée, quasiment bâclée. il la regarde s'éloigner pendant une seconde, à peine, mais l'observa quand même, la démarche légère, presque tremblante et pourtant la tête haute et fière. elle ne se retourna pas pendant qu'il la regardait, pourtant elle se retourna, une seconde, à peine. mais la jeune femme le vit, lui, le beau danseur, partir le pas gracieux, fluide et la silhouette majestueuse, inoubliable. elle sourit et il lui sourit en retour, quelques rues plus loin, sans même la voir ni la regarder.


hey, voilà le 3e chapitre, la — réelle — rencontre entre soren et azadée. j'aime beaucoup ce chapitre, je le trouve grand, d'une façon ou d'une autre
en tout cas, j'espère que tu apprécies ta lecture et les personnages :) <3
fau ☀️

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