Chapitre 33

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17 novembre 2020
77 jours. 

Abandonnée. Il m'avait laissée à un autre homme, sans remords, sans hésitation. Comment avait-il pu me faire ça après avoir passé une telle journée ensemble ? Qu'avais-je fait de mal ? Était-ce parce qu'il regrettait de me voir vouloir devenir une femme libre ? Tant de questions sans réponses qui tournaient encore, inlassablement et douloureusement dans ma tête.

Assise sur une chaise dans un coin du salon, sous l'ordre de mon nouveau Maître, je ne pouvais que pleurer en silence tout en repassant l'événement le plus déchirant de ma vie. J'avais l'impression que mon cœur se brisait en mille morceaux, que dans mes veines coulaient un poison acide atroce qui me brûlait chaque partie de mon corps.

Je souffrais d'un mal sans nom.

J'avais du mal à respirer à cause de mes sanglots, mon maquillage avait coulé sur tout mon visage, mes cheveux étaient en désordre à force d'avoir tiré sur mes mèches avec mes doigts. Je tremblais sans pouvoir m'en empêcher, mais pas de froid, plutôt de peur.

Oui, j'étais terrifiée à l'idée de vivre chez cet homme que je ne connaissais pas.

La soirée était maintenant terminée. Tous les invités étaient rentrés chez eux et ils ne restaient que les Dolls qui s'affairaient à ranger la demeure pour la rendre impeccable. Mais je ne bougeais pas de ma chaise, toujours dans mon état de désespoir, me pinçant sans cesse pour vérifier que je ne faisais pas un mauvais rêve. La réalité était bien plus douloureuse à chaque fois que je rouvrais les yeux en me disant que j'allais me retrouver dans le lit de Monsieur Jeon et que ce n'était qu'un cauchemar. Seulement, ce n'était pas le cas.

Quelque chose couvrit soudainement la lumière et je compris que quelqu'un s'était arrêté devant moi. Tout en reniflant disgracieusement, je me rendis compte que c'était mon nouveau Maître qui se trouvait là, la main tendue dans ma direction et un sourire qui se voulait être rassurant sur ses lèvres.
« Ne pleure plus Crystal, dit-il simplement en venant essuyer le reste de larmes sur mes joues. Viens avec moi. Je vais te montrer où tu dormiras à partir de maintenant. »

Il me représenta sa paume, comme une invitation à la prendre, mais je ne la pris pas. Je me levai en évitant son regard, me pinçant les lèvres qui tremblaient comme des feuilles. Il ne sembla pas vexé par mon comportement, et même, il passa devant moi en me demandant gentiment de le suivre. Je m'exécutai. Je n'avais pas le choix de toute manière... Nous montâmes à l'étage où je pus voir les six florissantes rejoindre leur chambre commune. D'un rapide coup d'œil, je constatai qu'il y avait que cinq portes et en analysant vivement les habitants, il y devait y avoir une chambre appartenant à Monsieur Graham, une salle de bain, ce qui me laissait deux pièces inconnues.
« C'est le coin nuit ici. Il y a la chambre des florissantes comme tu as pu le voir et à côté c'est leur salle de bain. Au bout du couloir c'est ma chambre et là, sur ta gauche c'est la chambre de Saphir. Ta chambre se trouve à côté de la sienne et tu as une salle de bain privée tout comme Saphir. Personne n'a dormi dans ta chambre, elle sera tout à toi, déclara-t-il en coinçant délicatement une mèche de cheveux derrière mon oreille. »

Mes muscles se tendirent d'appréhension sous son geste, ce qui m'empêcha d'écouter réellement ce qu'il me racontait. Je hochai malgré tout de la tête pour lui donner une réponse, ne voulant pas l'énerver avant même d'être à son service.
« Si tu as le moindre problème, n'hésite pas à venir me voir dans ma chambre, ajouta-t-il tout bas.
- Merci beaucoup pour votre gentillesse Monsieur Graham, me forçai-je à articuler malgré ma gorge serrée.
- Peut-être que Jeon te demandait de l'appeler Monsieur Jeon, mais moi je préférerais Maître, me corrigea-t-il doucement.
- Bien Maître...
- Profite de la nuit pour te remettre de tes émotions Crystal. Je n'aimerais pas devoir te ramener à Domination's scent pour une remise à zéro. »

Mon cœur rata un battement tandis que je relevais vivement la tête. Ses mots avaient été prononcés doucereusement, mais ils représentaient une véritable menace.

Non.

Je ne pouvais pas perdre les souvenirs que j'avais fabriqués depuis que j'avais quitté la boutique.

Je ne pouvais pas l'oublier...

Je ne voulais pas l'oublier même s'il m'avait abandonnée...

J'acquiesçai dans un murmure tout en m'inclinant respectueusement, et lorsqu'il partit rejoindre sa chambre, je fis de même avec réticence. J'arrivai alors dans une pièce décorée simplement mais surtout dans les teintes blanche et bleu cristallin, comme si elle avait été préparée juste pour moi, pour qu'elle s'accorde à la couleur de mes prunelles. Prise d'un haut-le-cœur, je courus jusque dans la salle de bain, relevai hâtivement la cuvette des toilettes avant de régurgiter le vide se trouvant dans mon estomac, puisque je n'avais pas mangé depuis le midi. La gorge déchirée par le passage de la bile, je toussai en tenant fermement mon pendentif dans la main. Je tirai la chasse et me redressai pour faire face au miroir. Je ne ressemblais à rien. Je n'avais plus aucune once de beauté. Lorsque mes yeux regardèrent mes lèvres qui contenaient encore les traces du rouge à lèvres rouge, une forte colère me prit et j'ouvris aussitôt le robinet pour me mouiller les mains avant de les passer sur ma bouche pour enlever maladroitement le maquillage.

Je ne pouvais pas le voir.

Tout me rappelait qu'il m'avait abandonnée.

J'arrachai ma robe, déchirant la dentelle qui était si belle avant. Je libérai sauvagement ma chevelure de ses tresses avant de tomber à genoux, plaquant mes paumes sur mes croissants de chair pour retenir ce hurlement de colère, de désespoir et de douleur qui voulait s'échapper. Je ne devais pas montrer mes émotions à mon nouveau Maître... Les gouttes d'eau salée se remirent à dévaler mes pommettes. Je me mis à frapper de mes poings le carrelage blanc, préférant cette douleur à celle que je ressentais à cause de ... de cette trahison.

Oui c'était ça, je me sentais trahie.

Je sentais encore ses lèvres sur ma peau. J'entendais encore ses promesses qui n'étaient que des mensonges. Il m'avait promis de ne jamais m'abandonner le soir où j'avais failli mourir à Fem. Et bien, il avait menti comme il le faisait à chaque fois. J'aurais dû le savoir. Jungkook Jeon mentait comme il respirait et on m'avait pourtant prévenue. J'aurais dû écouter « A » et Ava... Ils avaient totalement raison à mon sujet.

Dans un profond soupir pour reprendre contenance de moi-même, je me relevai tout en retirant mes sous-vêtements. Je m'allumai la douche en la mettant au plus froid et entrai par la suite dans le petit espace afin de me mettre sous le jet d'eau. J'avais besoin de penser clairement. Qui était Damien Graham ? Pourquoi Saphir n'avait pas voulu me parler amplement de ce qu'elle vivait avec lui ? Pourquoi Iris semblait effrayée à ce point ? Une chose était certaine. Pour ma propre survie, je devais redevenir une parfaite Doll. Il ne fallait plus compter sur Jungkook pour venir me sauver si j'avais des problèmes, ou bien pour me voir autrement que comme une poupée.

Je ne devais compter que sur mes sœurs et moi-même.

Frigorifiée mais propre, je sortis de la douche avec une serviette entourant mon corps nu. Je me rendis dans ma chambre et ouvris l'armoire pour découvrir sans grande surprise qu'elle était remplie de vêtements à ma taille. J'attrapai une chemise de nuit en coton blanc et l'enfilai pour ensuite étendre ma serviette humide avant d'aller m'installer sur le lit. Le matelas était trop mou pour moi... Il était loin d'égaler le confort de celui de Monsieur Jeon. J'expirai longuement par le nez tout en m'adossant contre le cadre du lit, l'arrière de mon crâne reposant sur le mur et mes jambes ramenées contre mon corps. Qu'avais-je fait pour en arriver là ? Ou plutôt, qu'est-ce que je n'avais pas fait pour empêcher cela...

Je redressai soudainement la tête lorsque j'entendis trois coups contre le mur. Je me tournai légèrement et posai ma main dessus avant de frapper à mon tour le même nombre de fois.
« Crystal, c'est moi, reconnus-je aussitôt la voix de Saphir.
- Saphir, fis-je en sentant de nouveau les larmes affluer dans mes yeux, tout en posant mon front contre la surface lisse.
- Je suis vraiment désolée de ce qu'il t'arrive... dit-elle doucement. Comment tu te sens ?
- Comme une idiote qui a été échangée contre un stupide contrat. Vide, brisée, honteuse... Que voudrais-tu que je ressente d'autres, soupirai-je en essuyant rageusement mes perles lacrymales.
- Je comprends ta colère Crystal, mais ne le laisse pas te détruire, laissa-t-elle entendre.
- C'est facile à dire ! Tu ne sais pas ce que j'ai vécu avec lui ! M'écris-je avant de serrer les dents d'énervement.
- Doucement Crystal, chuchota-t-elle. Il ne doit pas nous entendre...
- Saphir... Prononçai-je son prénom en retenant de justesse un sanglot. Je ne sais pas quoi faire. Je ne sais pas si je pourrais survivre sans lui...
- Tu vas survivre, assura-t-elle avec certitude. Je ne te laisserai pas tomber. Jamais. Je serai ton soutien, je sécherai tes larmes et je ferai en sorte que tu restes debout. Je ne laisserai pas Jeon te briser, termina-t-elle en posant sa main sur le mur, du moins c'était ce que je supposais selon le bruit que j'entendis.
- J'ai tellement mal Saphir... J'ai tellement mal... Sanglotai-je.
- Je sais... Et la peine se transformera en haine et cette haine te permettra de survivre.
- Il était toute ma vie, j'étais même prête à lui donner la mienne pour le protéger...
- C'était l'éducation des Dolls, soupira-t-elle.
- Non, je le voulais vraiment. Saphir... Je... Je l'aimais et je l'aime encore, avouai-je, ce qui me fit encore plus souffrir. Et ce qui me fait le plus mal, c'est que je voulais tellement l'entendre me dire "je t'aime"... Je voulais juste qu'il me le dise une fois... »

Cette fois-ci, mes pleurs furent trop intenses pour moi. Je soulevai la couverture et me cachai sous elle pour pleurer sans me faire entendre, tenant contre moi mon coussin de plumes. Saphir ne disait plus rien, mais je savais qu'elle m'entendait, elle. Et avant que la fatigue causée par les récents événements ne me prenne, je l'entendis murmurer ces mots :
« Oublie-le Crystal ou il te fera souffrir par son absence. »

18 novembre 2020
78 jours

Je me retournai dans le lit, expirant longuement par le nez tout en fermant plus fortement mes paupières, prise d'une sensation dérangeante que quelqu'un m'observait. Émergeant lentement de mon sommeil, j'ouvris les yeux avant de découvrir une silhouette debout à côté de mon lit. Je me redressai d'un coup, ma couverture volant au bout du matelas, le cœur battant de surprise en reconnaissant la chevelure blond platine de Narcisse et ses iris verts. Elle ne portait pas son masque et je pus alors remarquer avec effarement qu'elle avait la joue gauche tuméfiée.
« Le Maître t'attend dans la cuisine, annonça-t-elle simplement, les bras croisés dans son dos.
- J... Je m'habille tout de suite et j'arrive, répondis-je avec appréhension. »

Elle acquiesça dans un hochement de tête et finit par quitter ma chambre sans dire un mot de plus. Je m'assis dans le lit tout en ramenant mes jambes contre moi, la respiration se faisant de plus en plus rapide, tant la peur s'immisçait en moi. Que me voulait-il ? Je passai nerveusement mes mains dans mes cheveux, essayant de calmer les furieux battements de mon organe vital. Il fallait que je me reprenne. Si mes émotions m'échappaient à nouveau, il allait me ramener à Domination's scent pour une remise à zéro et j'allais tout perdre. J'inspirai profondément et expirai par la suite longuement.

Une Doll.

Je devais redevenir une parfaite Doll.

Après avoir repris contenance de mon corps, je sortis de mon lit pour aller récupérer au hasard une tenue dans mon armoire. Sans surprise, je vis qu'il n'y avait que des robes longues à col roulé et manches longues d'un bleu cristallin. J'en enfilai une rapidement et attachai aussi vite mes cheveux en un chignon parfait. Après avoir fait mon lit à la va-vite, je quittai à mon tour ma chambre dans l'intention de rejoindre la cuisine. Je découvris alors Monsieur Graham assis sur une chaise en cuir noir, une tasse de café dans sa main et un journal qu'il était en train de lire dans l'autre. Il porta aussitôt son regard sur moi lorsque je fis mon entrée dans la pièce.
« Bonjour Maître, articulai-je soigneusement avec une belle courbette.
- Prends place, m'invita-t-il à m'asseoir d'un geste de la main. »

Sans attendre une seconde, je m'exécutai pour m'installer sur la chaise en face de lui, quant à lui, il se leva pour aller préparer quelque chose au niveau du plan de travail. Quelques minutes après, il déposa une tasse contenant une boisson caféinée brûlante.
« Le café est interdit aux Dolls, dis-je en observant le récipient.
- Je suis ton nouveau Maître, tu as le droit maintenant d'en boire, répliqua-t-il en posant sa main sur mon épaule.
- Ce sont les règles de Domination's scent, je ne peux m'en soustraire, insistai-je en me retenant de retirer mon épaule de son emprise.
- Tu ne buvais que de l'eau avec Jeon ? Me questionna-t-il en se penchant à ma hauteur, ce qui me força à porter mes prunelles sur lui.
- Oui, mentis-je sans hésitation. »

Il ne devait pas savoir que mon ancien Maître avait essayé de faire de moi une femme libre. Je devais garder cela secret coûte que coûte et donc, je devais être convaincante avec mes mensonges. Pour cela, je ne m'inquiétais pas réellement. J'avais pu apprendre avec le meilleur des menteurs du pays.
« Que voulez-vous que je fasse aujourd'hui ? Demandai-je pour changer de sujet subtilement.
- Rien. Les autres se chargent des corvées donc tu peux en profiter pour visiter le domaine, laissa-t-il entendre en revenant se placer sur sa chaise à ma plus grande joie.
- Je suis une Doll... J'aimerais pouvoir participer à l'entretien de la maison, fis-je en retrouvant ma voix platonique.
- Tu es la favorite d'Hans Kerberton. Tu n'as pas à devoir t'abaisser aux niveaux des autres avec les corvées. J'ai prévu d'autres choses pour toi donc profite de cette journée pour te familiariser avec ton nouvel environnement, déclara-t-il en se remettant à feuilleter son journal.
- Très bien Maître, acceptai-je en me remettant sur mes pieds. »

Je m'inclinai une seconde fois avant de m'excuser pour sortir de la cuisine. Une fois hors de son champ de vision, je m'adossai contre le mur tout en me permettant de souffler difficilement l'air qui se trouvait dans mes poumons. Notre échange, pourtant si court, m'avait paru interminable et pesant. J'avais eu peur à tout moment de dire une chose qui ne fallait pas, à ne plus savoir comment me comporter comme une poupée. Mais bon, mon éducation me revenait rapidement en mémoire. Pour certains, on n'oubliait pas notre capacité à faire du vélo ; pour les Dolls, on n'oubliait pas notre enseignement drastique.

Il n'avait pas tort sur une chose, il fallait que j'apprenne les moindres recoins de cette demeure. Je me lançai alors à la découverte de toutes les pièces. Contrairement à la villa de Jeon, cette maison était décorée avec beaucoup d'œuvres d'art abstrait et surtout, de photos de lui joliment encadrées. Alors que je marchais lentement dans un des couloirs habillés de ces cadres extravagants, je m'arrêtai devant l'un d'eux qui ne se trouvait pas être une photo mais une simple phrase : la vie est la voie de la mort, la mort est la voie de la vie. Je fronçai les sourcils en lisant ces mots mais sursautai d'un coup lorsque j'entendis un raclement de gorge dans mon dos. Je pivotai vivement pour faire face au noiraud qui me surplombait de sa taille, son regard bleu plongeant dans le mien et me prodiguant des frissons d'inquiétude, de mal-être.
« Tu étais en train de lire ce proverbe ? M'interrogea-t-il avec un calme qui me fit d'autant plus peur.
- Je ne sais pas lire, répondis-je en restant d'un stoïcisme contrôlé.
- Et tu n'aimerais pas lire ? Continua-t-il en se rapprochant de moi, m'obligeant à reculer jusqu'à ce que mon dos rencontre le mur.
- Monsieur Kerberton disait que c'était inutile pour nous de savoir lire, articulai-je les mots que j'avais déjà sortis à Jungkook.
- Je pourrais t'apprendre, proposa-t-il en plaçant son bras au-dessus de mon crâne et en se penchant vers mon visage.
- C'est interdit Maître...
- Tu es maintenant ma Doll, c'est moi qui décide des interdits, indiqua-t-il en attrapant doucement mon menton entre ses longs doigts. »

J'avais peur. Il n'y avait aucune animosité dans ses gestes, pourtant, je me sentais étrangement en danger. J'ouvris la bouche inconsciemment, cherchant à répondre n'importe quoi pour me sortir de ce piège qu'il me tendait pour vérifier si je ne savais réellement pas lire, mais je fus coupée dans mon élan par un bruit strident. Quelque chose venait de se briser. Il fronça les sourcils et s'écarta aussitôt de moi avant de se diriger en direction du son. Sans savoir pourquoi, je le suivis pour voir ce qu'il venait de se passer. Nous nous trouvâmes alors devant Jacinthe agenouillée, pressée de récupérer les morceaux de porcelaine d'un vase qu'elle venait sûrement de casser.
« Qu'est-ce qui s'est passé ici ? Articula froidement Damien en se rapprochant de la brunette qui se remit soudainement sur ses pieds.
- Je... Je suis désolée Maître. J'ai été prise d'une maladresse, s'excusa-t-elle en s'inclinant respectueusement.
- Tu crois que tes misérables excuses répareront ce vase qui m'a coûté des milliers d'euros ?! S'écria-t-il en l'attrapant violemment par les cheveux. »

Je la vis se retenir de crier sa douleur, serrant les dents discrètement sans quitter du regard l'homme qui semblait pris d'une forte colère. De mon côté, mon sang pulsait dans mes oreilles tandis que j'étais témoin de cette scène sans savoir quoi faire. J'étais paralysée par la stupeur.
« Tu mériterais que je te punisse pour ta gaucherie !
- Maître...
- Ferme-la ! La coupa-t-il en la giflant soudainement. »

Mon souffle se coupa instinctivement, comme si j'avais pris moi-même cette claque. Jacinthe n'avait pas émis un seul son, encaissant le coup en silence et sans grimace alors que sa lèvre inférieure se mettait à saigner, tant il avait été violent. Il tira une nouvelle fois sur ses cheveux avant de la jeter au sol, en plein milieu des morceaux du vase brisé qui écorchèrent sa peau découverte malheureusement de la robe au niveau de ses genoux.
« Nettoie-moi ça en vitesse puis retrouve-moi dans la cave, ordonna-t-il en lui mettant une dernière tape derrière la tête.
- Oui Maître, murmura-t-elle avant de se pincer les lèvres.
- Crystal, va voir ailleurs, s'adressa-t-il sèchement à moi lorsqu'il se rendit compte que j'avais été présente tout au long de la scène. »

Je ne voulais pas partir et laisser Jacinthe seule avec lui, seulement, mon instinct fut plus fort que moi et prit le contrôle de mon corps, m'obligeant à détourner les talons et à partir dans la direction opposée de celle de Monsieur Graham. Mes pas au début lents pour ne pas trahir ma panique, furent de plus en plus rapides lorsque je fus certaine qu'il ne me regardait plus ou plutôt, qu'il ne pouvait plus me voir. Je courus en dehors de la maison, arrivant dans le grand jardin du domaine. Mes pupilles repérèrent aussitôt la silhouette de la personne que j'avais voulu voir dès mon réveil : Saphir. Je m'approchai d'elle qui était en train de couper la pelouse au ciseau et vint m'agenouiller à côté d'elle, relevant ma robe pour ne pas la salir avec l'herbe. Elle leva légèrement son visage pour me regarder avant de reprendre le cours de son activité.
« J'imagine que tu as vu qui il était, dit-elle en faisant référence à notre Maître.
- C'est un monstre, chuchotai-je les yeux grands ouverts d'horreur.
- C'est un Maître normal Crystal. Ils sont tous comme ça. Je ne sais pas comment était Jeon mais si ça te choque tant que ça, c'est qu'il ne se comportait pas comme un véritable Maître de Dolls, répliqua-t-elle dans un soupir. »

La souffrance et la tristesse revinrent à l'assaut lorsqu'elle prononça le nom de famille de mon ancien Maître. Je serrai les dents en attrapant le tissu de ma robe puis soufflai pour essayer de me détendre. Je ne voulais plus entendre parler de lui...
« Jacinthe a cassé un vase et le Maître l'a frappée avant de lui demander de la rejoindre dans la cave, la prévins-je tout bas.
- Hum, fit-elle simplement en continuant à couper les brins d'herbe.
- Comment ça hum ? Ça ne te fait rien de savoir qu'une de nos sœurs vient de se faire battre ? Qu'est-ce qui va lui arriver dans la cave ? Demandai-je durement en fronçant les sourcils.
- Tu ne devrais pas te mêler de ça Crystal, murmura-t-elle après un coup d'œil jeté par-dessus son épaule.
- Comment ça ne pas m'en mêler ! J'ai passé près de quinze années à dénoncer mes sœurs à la moindre erreur et je n'en peux plus. Elle était terrifiée et je ne peux pas la laisser souffrir sans rien faire ! M'exclamai-je en me retenant tout de même de crier. D'ailleurs où sont les autres ? Il en avait acheté quatorze et vous n'êtes que six florissantes et une précieuse, continuai-je en attendant une réponse coûte que coûte.
- Tu sais très bien où elles sont, souffla-t-elle avant de se pincer les lèvres.
- Non je ne sais pas !
- Tu veux réellement savoir ? S'agaça-t-elle à son tour.
- Oui ! »

Son regard se fit plus dur et elle posa brusquement le ciseau qu'elle tenait dans l'herbe, avant de se lever tout en m'attrapant le poignet pour que je me remette sur mes pieds moi aussi. Sans me lâcher, elle me tira dans une direction précise, vers le fond du jardin. Plus nous semblons nous approcher de la destination, plus l'air se faisait pesant, même difficile à respirer à cause d'une odeur nauséabonde. Nous nous arrêtâmes à quelques pas d'une fosse et elle retira enfin sa paume de mon bras avant de m'inviter d'un geste de la tête à m'avancer. Après l'avoir regardée une dernière fois, je réduisis la distance entre le bord et moi, avant de plaquer ma main sur ma bouche en retenant de justesse un haut-le-cœur. Des cadavres. Certains en décompositions, grouillant de vers et de mouches qui dévoraient la chair avec plaisir. Ancolie, Eustoma, Daphné, Hibiscus, Lotus, Orchidée, Pensée et Sureau. Je les reconnaissais toutes, toutes ces sœurs qui avaient vécu avec moi.
« Voilà où elles se trouvent. Elles sont mortes parce qu'elles ont déçu le Maître pour certaines, et pour d'autres, c'est parce qu'elles ont voulu défendre leur sœur, expliqua mon aînée en me rejoignant, une grimace de dégoût et de tristesse sur les lèvres.
- Pourquoi ne sont-elles pas enterrées ? Demandai-je la gorge serrée.
- Pour qu'elles nous servent d'exemples. Il refuse qu'on les enterre et nous oblige à venir ici dès qu'on commet une faute, répondit-elle en se détournant de la scène morbide. Crois-moi Crystal. J'ai voulu aider nos sœurs mais j'ai très vite compris que seule l'individualité te fait survivre, termina-t-elle en commençant à partir. »

Je jetai un dernier regard aux pauvres jeunes poupées qui avaient perdu la vie, puis me détournai à mon tour de la fosse avant de marcher plus rapidement pour rejoindre Saphir. Mon cœur battait fortement dans ma poitrine, de peur mais surtout d'une nouvelle énergie produite par la colère. J'attrapai vivement son poignet et la força à me faire face.
« Nous sommes toutes des sœurs et les sœurs se soutiennent toujours, se souhaitent le meilleur et jamais elles ne s'oublient et oublient leur passé commun. Nous sommes toujours unies même dans la distance. C'est toi-même qui m'a dit ça un jour ! Je refuse de faire comme toi et de laisser les nôtres vivre dans la souffrance ! Je me battrai, pour toi, pour elles, pour moi. Je nous sortirai d'ici et s'il faut le tuer, je le ferai, assurai-je froidement.
- Tu ne comprends pas Crystal ! C'est que même si on se débarrasse de lui, on va se faire traquer parce qu'on est des Dolls ! S'énerva-t-elle en retirant sèchement son poignet de mon emprise.
- Je connais quelqu'un qui pourra nous aider. Il s'appelle « A » et il se bat pour notre cause. Si on arrive à échapper à Graham, il pourra nous protéger, répliquai-je avec certitude.
- Crystal tu viens à peine d'arriver ! Tu ne sais pas à quel point il est mauvais ! Bordel tu... tu ne sais rien ! Voilà de quoi il est capable ! »

Elle attrapa le bas de sa robe bleu océan et la souleva d'un coup, laissant à l'air libre ses jambes nues. Mon sang ne fit qu'un tour dans mes veines lorsque je remarquai finalement les immenses brûlures au niveau de l'intérieur de ses cuisses. Elles étaient encore rosées et en pleine cicatrisation, ce qui prouvait qu'elles avaient été réalisées plutôt récemment. Je levai mes prunelles cristallines vers le visage de mon aînée dont les traits tendus ne reflétaient que sa peine.
« J'ai été punie pour avoir pris la défense de Lotus. Il m'a forcé à m'asseoir sur une chaise pendant qu'il faisait chauffer une barre de fer dans la cheminée. Il l'a posée sur ma peau et m'a menacé de tuer Lotus si je faisais le moindre bruit. Au début, je me suis retenue de crier mais au bout d'un moment, j'ai hurlé... Il ne fait pas de menaces en l'air Crystal. Il l'a réellement tuée parce que j'avais crié durant sa torture, raconta-t-elle en abaissant sa robe pour cacher ses blessures. Maintenant, tu sais de quoi il est capable, ajouta-t-elle dans un murmure avant de me laisser seule. »

Je la regardais partir sans la retenir cette fois-ci, les mains tremblantes mais pas de peur. C'était de la haine. Dans quoi étais-je tombée ? Même Monsieur Kerberton ne nous punissait pas ainsi. La respiration se faisant de plus en plus rapide, je passai mes paumes sur mon visage en tournant sur moi-même. Je ne savais plus quoi faire. Comment pouvais-je les aider sans aggraver notre situation ?

Saphir avait raison sur une chose, je ne savais rien.

Il fallait alors que j'apprenne à connaître Damien Graham.

J'avais passé toute la journée à faire le tour du domaine afin de connaître tous ses secrets. J'avais observé les Dolls travailler pour comprendre quelles missions pouvaient leur être assignées. J'avais visité de fond en comble la maison, notant mentalement toutes les pièces secrètes que je n'avais pas pu visiter puisqu'elles étaient fermées à clé. J'avais essayé de trouver Jacinthe pour savoir comment elle allait, seulement, elle n'était pas remontée de la cave et cela m'inquiétait sur son état. J'espérais juste qu'elle soit encore en vie.

Douchée, vêtue de ma chemise de nuit, je me trouvais assise dans mon lit, comme la veille, la tête contre le mur et attendant que la nuit passe. Les jambes contre moi, le visage levé vers le plafond, je laissais mes larmes couler sur mes joues silencieusement. Encore une fois, je me demandais pourquoi Jungkook m'avait abandonnée. Et encore une fois, cela me faisait souffrir tout en me redonnant de la force pour me battre. En vérité, je commençais à le haïr autant que je l'aimais.
« Crystal ? Entendis-je derrière le mur.
- Hum...
- Jacinthe va bien. Elle vient tout juste de rentrer dans sa chambre, m'apprit-elle tout bas.
- Merci.
- Je suis désolée aussi... D'avoir été aussi sèche avec toi aujourd'hui, ajouta-t-elle en soupirant. La vie est stressante ici et je ne voulais pas que tu te lances dans une guerre déjà perdue d'avance. J'ai déjà perdu trop de sœurs, je ne veux surtout pas te perdre toi, continua-t-elle d'une voix tremblante.
- Je sais. Et je ne veux pas te perdre non plus, répondis-je doucement. Saphir ?
- Oui ?
- Comment as-tu pu rester ainsi ? Je veux dire... Comme une femme libre tout en étant une Doll ? Osai-je lui demander.
- Je n'ai jamais pris sa pilule. Kerberton a créé ses pilules à partir d'éléments chimiques proches du GHB. C'est une drogue de soumission qui occasionne une amnésie. Avec cette drogue et son enseignement, il crée de parfaites poupées éduquées et obéissantes, dénuées de leur libre arbitre. Dès qu'on a nos règles, il nous fait prendre cette pilule et j'ai compris dès le début que je ne devais pas la prendre au risque de me perdre. Je suis désolée Crystal, mais pour te protéger, je devais te laisser la prendre pour ne pas attirer l'attention sur toi, avoua-t-elle presque avec honte.
- Je ne t'en veux pas. Je suis devenue la favorite de Monsieur Kerberton et ce que j'ai pu apprendre me servira. Tu m'as tout de même aidée Saphir, je m'en souviens par fragments.
- Quand tu retrouveras tous tes souvenirs, tu pourras comprendre le pouvoir que tu détiens entre tes mains.
- Je sais déjà des choses importantes sur beaucoup de personnes. »

Et cela aura été la plus grande erreur de Jeon de m'avoir raconté des passages de son passé et des éléments sur Monsieur Kerberton.

18 novembre 2020
78 jours

Cela faisait un jour que je vivais dans la demeure du démon. Étrangement, j'avais un traitement différent des autres Dolls. Je ne faisais pas de tâches ménagères, pas de cuisine, rien. Je devais parfois tenir compagnie à mon Maître mais la plupart du temps, il me laissait faire ce que je voulais. Cela m'arrangeait. J'avais pu discrètement protéger mes sœurs en les aidant parfois à faire leurs corvées, à réparer leurs erreurs ou bien à les consoler lorsque la peur les prenait par surprise. J'avais essayé d'entrer secrètement dans son bureau, mais contrairement à Jungkook qui laissait la porte ouverte, lui la gardait verrouillée. Je n'avais pas encore découvert ses points faibles, des moyens de l'attaquer mais je travaillais toujours dessus sans en parler à Saphir. Je ne voulais pas l'inquiéter.

J'entendis soudainement un bruit sourd se passer au rez-de-chaussée. N'hésitant pas une seconde, je sortis en courant de ma chambre pour rejoindre la poupée qui venait sûrement d'avoir fait tomber quelque chose. Mais ce ne fut pas le cas. Non. Alors que j'arrivais précipitamment dans le salon, je me stoppai net, manquant de rentrer dans l'homme de la maison qui se tenait droit devant l'entrée, bras croisés sur son torse. Derrière lui se trouvait Tulipe au sol, étendue parmi des morceaux de verre, un plateau pas trop loin d'elle qui devait lui avoir servi pour transporter la vaisselle propre.
« Que viens-tu faire ici Crystal ? M'interrogea-t-il froidement. »

Je me reculai instinctivement de quelques pas, le dos parcouru par des frissons d'inquiétude. Mes yeux alternaient entre sa figure et celle couchée et inconsciente de ma petite sœur. Je respirai bien trop rapidement pour feinter le calme et je savais déjà que je m'étais trop dévoilée. Seulement, si je faisais marche arrière, Tulipe allait souffrir.
« Elle saigne, laissez-moi m'occuper d'elle, le suppliai-je en serrant les poings.
- Tu sais ce que déteste le plus Crystal ? C'est que les Dolls pensent qu'elles peuvent faire des choses dans mon dos, commença-t-il sur un ton menaçant. Je refuse que vous vous parliez, que vous vous aidiez, et pourtant, tu t'obstines à vouloir défier mon autorité, continua-t-il en réduisant l'écart entre nous.
- Peut-être parce que je ne suis pas d'accord avec votre manière d'agir, pris-je le courage de dire. »

Je vis la fureur s'installer dans son regard et la seconde d'après, il m'attrapait violemment par la mâchoire et me rapprochait aussitôt de lui.
« Je ne suis pas Jeon. Peut-être qu'il te laissait faire ce que tu voulais, moi ce n'est pas le cas ! Cria-t-il si proche de mon visage qu'il postillonna dessus.
- Non... Vous n'êtes pas Jungkook Jeon. Lui au moins je le respectais, répliquai-je les dents serrées et sans faillir dans notre duel visuel. »

Dans un cri de rage, il me balança au sol, au milieu des éclats de verre, juste à côté de Tulipe. Un gémissement de douleur s'échappa de mes lèvres lorsque je sentis le cristal s'enfoncer dans ma chair. Mais lorsque je soulevai mes paupières fermées instinctivement, je vis que la jeune fille n'était pas inconsciente mais tétanisée par la peur. Ses pupilles tremblaient tant elle n'osait pas faire un seul mouvement. Mes cheveux cachant mon faciès, je lui murmurai de ne pas bouger. C'était la meilleure chose à faire pour elle. Alors que je tentais de me redresser, Graham, qui n'en avait pas fini avec moi, vint me donner un coup de pied au flanc gauche qui me cloua de nouveau à terre. La douleur fut soudaine et elle se diffusa rapidement dans tout mon corps, coupant même ma respiration. Il continua en enchaînant un autre coup, puis un troisième. À plat ventre, je gémissais pitoyablement tout en crachant une salive écarlate sur le parquet. Il se rapprocha de moi et alors que je m'apprêtais à recevoir un autre coup, il agrippa mes cheveux et tira si fortement dessus que cela m'obligea à me redresser. Ce fut à ce moment-là que je remarquai que toutes les autres poupées étaient arrivées dans le salon, alertées par les bruits. Je vis les yeux écarquillés de Saphir et lorsqu'elle croisa mon regard, je pus même voir qu'elle souffrait presque autant que moi.
« Prenez-la et cassez-vous, ordonna Damien en désignant du menton Tulipe toujours étendue au sol. »

Je vis Lavande et Aster se précipiter pour récupérer leur amie, puis toutes quittèrent la pièce, Saphir en dernière, ayant du mal à détacher son regard océan de ma misérable figure. Une fois seuls, il me balança dans le canapé, réveillant rapidement les hématomes qui s'étaient déjà formés sur ma peau.
« Maintenant que nous sommes seuls, je pense qu'il est grand temps que je mette les points sur les i, Crystal, déclara-t-il en passant sa main dans sa chevelure d'ébène. Ose encore me tenir tête, me manquer de respect, et tu vivras le pire des cauchemars. Je ne savais pas que Jeon m'avait vendu un animal sauvage mais ne t'inquiète pas, je vais te dresser, articula-t-il sadiquement en passant sa main sur ma cuisse, fort heureusement couverte par ma robe. Tire-toi, prononça-t-il en s'écartant du passage, les yeux remplis de folie. »

La respiration difficile à cause de la douleur que me procuraient mes côtes, je pris un temps d'hésitation, n'étant pas certaine qu'il souhaite réellement me laisser partir. Mais ne pouvant pas rester plus longtemps près de lui, mon instinct me soufflant que j'étais en danger, je me levai du canapé et me dirigeai vers la sortie sans qu'il ne m'arrête.
« Juste une chose Crystal ! M'interpella-t-il, me stoppant dans ma marche. Tu es peut-être prête à supporter la douleur, mais je ne pense pas que cela soit le cas de tes amies, me menaça-t-il avant de quitter lui-même le salon. »

Mon corps tremblait entièrement. C'était bon, j'étais terrifiée. Ce n'était pas un monstre, c'était pire que ça et je ne savais pas comment m'en sortir. Les filles avaient peur de lui, ce que je comprenais, et malheureusement, je ne pouvais pas me battre seule... Je montai difficilement dans ma chambre et me dirigeai directement vers ma salle de bain. Mon apparence faisait peur à voir. Mes cheveux étaient en bataille, mon visage écorché par les éclats de verre, du sang commençait à sécher aux commissures de mes lèvres. Alors que j'étais en train de retirer en grimaçant ma robe, j'entendis la porte de ma pièce personnelle s'ouvrir puis des pas précipités dans ma direction. Je ne fis plus aucun geste, restant sur mes gardes mais je me détendis d'un coup en reconnaissant le reflet de Saphir dans le miroir.
« Tu es complètement inconsciente ! S'exclama-t-elle sans crier pour autant, voulant rester discrète puisqu'elle n'avait pas le droit de venir me voir.
- Comment va Tulipe ? Ignorai-je sa remarque en continuant de me déshabiller.
- Elle va bien. Plus de peur que de mal et quelques égratignures, répondit-elle en venant m'aider pour retirer mon habit. Et toi, comment te sens-tu ? Me questionna-t-elle en observant mes bleus déjà visibles.
- Mal, dis-je sincèrement.
- Je t'avais dit de rester loin de lui... Moins tu l'agaces et mieux tu t'en sors, soupira-t-elle en mouillant d'eau froide une serviette pour venir la poser doucement sur mon flanc droit.
- Saphir. Je ne suis plus la parfaite Doll qui ne disait rien et qui était même prête à dénoncer ses semblables. Jeon m'a fait changer et maintenant, je le hais de m'avoir fait ça, grognai-je de colère mais aussi de douleur.
- Il t'a fait changer ? Répéta-t-elle en arquant un sourcil.
- Il voulait faire de moi une femme libre, expliquai-je en prenant de l'onde en coupe pour la passer sur mon visage.
- Faire de toi une femme libre ? Mais pourquoi ?
- Va savoir. Arrêtons de parler de lui, ça m'énerve plus qu'autre chose, marmonnai-je en baissant la tête.
- Dis plutôt que tu l'aimes encore et que ça te fait souffrir, rétorqua-t-elle en posant sa main sur mon épaule.
- Que veux-tu que je te dise ? M'agaçai-je. Que je suis folle de lui au point de ne pas réussir à totalement lui en vouloir ? Que j'appréciais les moments passés avec lui, même s'il y avait des hauts et des bas ? Que ses lèvres me manquent ? Que j'étais prête à lui donner ma virginité ?! Oui je suis dingue de lui et je suis surtout dingue d'être tombée dans son piège. Il s'est bien servi de moi et maintenant, je paye le prix de ma naïveté. Tous ceux qui ont essayé de me prévenir avaient raison et je ne les ai pas écoutés... Je ne peux que m'en vouloir.
- Crystal, murmura-t-elle mon prénom en lovant ma joue dans le creux de sa paume. On ne commande pas l'amour que l'on porte à une personne. L'amour, c'est magnifique et c'est aussi douloureux, mais c'est en se battant pour lui qu'on en ressent le plus de plaisir, de joie et de satisfaction... Tu aimes Jeon et tu le regrettes, mais tu ne choisis pas qui tu aimes, c'est ton cœur qui choisit. On dit que le cœur a ses raisons que la raison ignore, à toi de trouver ce qui t'a attiré chez lui et si cela ne te plait pas, tu aviseras. Ne regrette jamais le fait que tu puisses ressentir de l'amour, parce que cela veut dire que tu es vivante, termina-t-elle en caressant ma pommette de son pouce. »

Les larmes se formèrent entre mes paupières et je les laissai glisser sur ma peau tandis que mon aînée me prenait dans ses bras. Je m'écartais soudainement d'elle en repensant à certains mots que m'avait dit Jungkook. Il avait osé me dire que je ne devais plus embrasser Saphir ? Il n'avait qu'à se faire foutre. Je pris en douceur son visage entre mes mains et vins connecter nos lèvres ensemble, doucement, frivolement tout en imaginant la colère du directeur de Jeon's Industrie.

19 novembre 2020
79 jours

Deux jours. Cela faisait deux jours que je vivais dans cette prison. J'avais passé une nuit des plus horribles à cause de la douleur que je ressentais, couchée dans n'importe quelle position dans mon lit. Ma journée n'avait pas été plus facile. J'avais fait en sorte de m'occuper de la maison tout en évitant le plus possible Graham afin de ne pas l'énerver, pour préserver mes sœurs. Pourtant, pas une seule fois je n'avais arrêté de penser à lui. Pas une seule fois je ne m'étais pas imaginée en train de l'étrangler ou bien de le poignarder. Jamais je n'avais ressenti des envies de meurtres, car les Dolls se devaient d'être inoffensives, seulement, je me sentais maintenant parfaitement libérée des chaînes de Domination's scent et alors, je pouvais ressentir parfaitement l'envie de vengeance.

Je ne pouvais que remercier la trahison de Jungkook.

J'étais devenue un danger, une bombe à retardement.

Je n'avais plus aucune pitié pour les hommes, c'était terminé.
N'arrivant pas à dormir, je soupirai en sortant du lit, décidant d'aller me servir un verre d'eau dans la cuisine. Pied-nus, je marchais à pas de loup dans le couloir puis les escaliers, pour rejoindre la pièce qui m'intéressait. Seulement, à quelques mètres de ma destination, je perçus des sanglots et des supplications.
« Je vous en prie... Laissez-moi partir...
- Pas avant que tu ne me fasses plaisir, reconnus-je la voix grave de notre Maître. »

La poupée qui l'accompagnait émit une plainte étouffée et mon sang se figea dans mes veines. M'armant de courage, je rejoignis la cuisine et tombai des nues en voyant l'homme en train de déshabiller Lavande, une main posée sur sa bouche pour l'empêcher de crier et son corps contre le sien pour l'empêcher de bouger. Je ne pouvais pas supporter cela. Je ne pouvais pas supporter le regard terrifié et suppliant de la brunette sur moi. Je savais que je commettais une grave erreur, mais à cet instant, j'avais refoulé mon instinct de survie pour venir en aide à ma grande sœur - puisqu'elle était plus âgée que moi -.
« Elle vous a dit de la laisser tranquille, intervins-je en me rapprochant de quelques pas.
- Encore toi... râla-t-il en penchant la tête en arrière. Tu n'es vraiment pas la plus futée des Dolls, laissa-t-il entendre en me regardant par-dessus son épaule.
- Prenez-moi à sa place, dis-je sans réfléchir lorsque je vis la main de Damien entourer la gorge de Lavande.
- Tu veux vraiment prendre sa place ? Fit-il en arquant un sourcil. J'ai l'intention de la tuer, tu veux vraiment prendre sa place ? Continua-t-il avait un sourire en coin tandis que la concernée se mettait à gémir de douleur et de peur.
- Votre corps dit autre chose ! Me précipitai-je à articuler. Je suis une Doll de la gamme précieuse... Nous sommes plus douées pour le sexe que les florissantes... L-laissez-moi vous satisfaire à sa place, insistai-je sans pouvoir quitter ses yeux cette main qui enserrait son cou. »

Un silence pesant, voire même angoissant, s'installa entre nous. Mais finalement, il relâcha mon amie et lui fit signe de partir, et elle s'exécuta rapidement. En passant à côté de moi, elle me regarda avec peine et murmura des mots qui me nouèrent l'estomac : je suis désolée. Il n'y avait plus de retour en arrière, je n'allais pas pouvoir fuir sinon il allait clairement s'en prendre à Lavande. Graham s'adossa contre le mur en me regardant de la tête aux pieds, puis me fit signe avec son index de me rapprocher. Je ne le fis pas attendre et comblai l'espace entre nous, la respiration rapide et le cœur battant enfin d'angoisse.
« À genoux, m'ordonna-t-il froidement. »

Je déglutis difficilement puis m'abaissai pour m'agenouiller au sol, sans jamais le regarder dans les yeux. Je n'osai pas, j'étais bien trop terrifiée pour avoir le courage de le fixer droit dans ses iris. J'entendis le cliquetis de sa ceinture puis le zip de sa braguette, et j'eus la mauvaise idée de baisser légèrement les prunelles. Il venait de retirer son pantalon ainsi que son sous-vêtement et présentait juste devant mon visage son sexe tendu.
« Suce-moi, m'imposa-t-il sèchement.
- Maître je suis désolée, commençai-je à dire, le sang pulsant dans mes oreilles.
- Suce-moi ! Cria-t-il en me faisant sursauter. Tu as intérêt à être aussi bonne que tu le prétends Crystal la favorite de Kerberton, sinon je m'en prendrai à Lavande, ajouta-t-il en agrippant mes cheveux. »

Je ne voulais pas... Je ne voulais vraiment pas faire ça... Que quelqu'un me vienne en aide... Personne ne pouvait protéger les filles à part moi... Je ne devais pas me défiler maintenant... Ce n'était qu'une fellation, on avait appris à les faire à Domination's scent. J'étais capable de le satisfaire. J'étais capable de feinter le plaisir afin de lui en donner. Oui, j'étais capable.
Essayant de me persuader de cela pour me donner du courage, je portais mes mains à son membre pour commencer à le masser de haut en bas en douceur, lentement tout d'abord, puis avec plus de rythme. Une fois que je l'entendis gémir, j'y portai mes lèvres en faisant abstraction du dégoût qui me prenait. Je les fis glisser sur son gland, fébrilement, comme des caresses. Ses doigts dans mes cheveux tiraient douloureusement mes mèches, m'imposant de passer à l'étape supérieure tandis que ses iris bleus ne me quittaient pas une seconde. N'ayant pas le choix, je fis glisser ma langue sur sa longueur, restant sur la pointe de son sexe quelques secondes en effectuant des cercles avant de redescendre à nouveau. Cette fois-ci, il s'accorda plus de grognements de plaisir.
« Prends-moi entièrement, m'ordonna-t-il soudainement. »

Je fermai les yeux quelque temps avant de m'effectuer en ouvrant la bouche et me mettant à le sucer véritablement. Seulement, je ne contrôlais rien. Ses mains sur ma tête m'empêchaient de bouger, c'était lui qui faisait les va-et-vient dans ma cavité buccale avec son bassin. Il y mettait toute sa longueur, allant presque jusqu'au bout de ma gorge, ce qui me donnait des soubresauts. Après un temps interminable, rempli de douleur et de honte, il se déversa dans ma bouche à mon plus grand dégoût. Alors qu'il se retirait de cette dernière, il attrapa mes joues pour que je le regarde dans les yeux et pour pas que je crache.
« Avale. »

J'écarquillai les yeux d'horreur mais me pliai aussitôt à sa demande, parce que j'étais fatiguée de lutter. Je me mis à tousser lorsque le liquide âcre et poisseux s'écoulait dans mon œsophage.
« Bien, dit-il simplement en me faisant signe de me lever. »

Alors que je pensais qu'il allait m'autoriser à partir, maintenant qu'il avait obtenu ce qu'il voulait, je m'apprêtais à me retourner pour partir, seulement il m'attrapa violemment par le bras avant de me plaquer sur le ventre sur le plan de travail.
« Tu pensais vraiment que j'avais terminé avec toi ? Ricana-t-il, sa main relevant ma robe de chambre dans une lenteur prédatrice.
- Maître, je vous ai fait plaisir ! S'il vous plaît laissez-moi ! Le suppliai-je en comprenant ce qu'il voulait faire.
- Oh non ma jolie. On ne va pas s'arrêter maintenant alors qu'on commence tout juste à s'amuser. »

Son rire était la pire chose que je pouvais entendre. Plaquée contre la surface de la cuisine, j'étais immobilisée par son corps tandis que sa main attrapait le rebord de ma culotte en dentelle. Il l'arracha, ce qui me fit crier. L'instant d'après, je le sentais contre mes fesses nues, toujours aussi excité et ce n'était pas du tout le cas pour moi. Il allait me violer. À cette idée, je me mis à pleurer en sentant mes muscles se décontracter. Je n'allais pas pouvoir fuir ceci, j'étais condamnée. Moi qui avais attendu de donner ma virginité à celui que j'aimais, j'allais subir un viol pour protéger une de mes sœurs. Je sentis son sexe se positionner juste au bord du mien et mes pleurs redoublèrent d'intensité tandis que je le suppliais encore et encore de ne pas le faire. Mais j'étais seule face à ce prédateur sexuel. J'étais seule.
« Jungkook... Aide-moi... »

Bonsoir tout le monde ! 

Je n'ai pas grand chose à dire à part que ce chapitre a été très difficile à écrire émotionnellement. J'ai trouvé aussi très difficile de mettre en place les sentiments de Crystal donc j'espère que vous avez réussi tout de même à comprendre ce qu'elle ressentait... 

Mettez-moi votre ressenti ici les loulous !

Je tiens à vous prévenir que les chapitres suivant seront plus sombres, donc préparez-vous mentalement. 

Je vous souhaite une bonne nuit ou une bonne journée ! À très bientôt !

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