~5~ Confessions

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« Vivre est la chose la plus rare. La plupart des gens se contente d'exister »
-Oscar Wilde

-Aller, viens! Je suis certain que ce sera super, me supplie Denki.

C'est la millième fois qu'il m'invite à sortir au bar samedi, mais je refuse toujours. Le bar Best Jeanist est le lieu branché du moment, l'unique endroit qui laisse entrer sans carter les jeunes. De la façon que les élèves le décrivent, ça ne semble pas être du tout mon genre. Musique trop forte, danse... je déteste danser. C'est une activité qui ne sert à rien, qui n'a pas de but. Surtout quand comme moi on a autant le rythme qu'une morue. Aujourd'hui Denki insiste encore plus, étant donné le groupe de musique célèbre qui vient y jouer. Cela risque d'être grandiose, me répète-t-il. Pour moi, groupe célèbre rime simplement avec foule. Et je hais les foules.

-Ma réponse reste non, grognai-je.

J'arrive à mon casier où comme chaque vendredi et mardi à cette heure, une magnifique rose et un message m'attendent. Je m'empresse de l'ouvrir et découvre avec découragement le mot qui s'y cache: "J'espère te voir t'amuser ce soir au Best Jeanist". Décidément, tout le monde s'est donné le mot pour y aller. Hors de question qu'un inconnu me dicte ma conduite. S'il croit que je vais y aller parce qu'il me le demande, il peut se mettre un doigt dans l'œil.

Denki me tire le bout de papier des mains et le lit un sourire aux lèvres avant que je puisse lui reprendre.

-C'est personnel, tonnai-je.

-Je vois que ce cher Anonyme continu son manège. Tu as vu? Même lui veut que tu sois là. C'est peut-être l'occasion de savoir qui il est?

Je mords ma lève inférieure. Quand il a raison, je déteste ça, surtout quand cela me concerne. Qui sais, peut-être qu'en allant au Best Jeanist il viendra me parler et je connaitrai enfin son identité? Pourtant est-ce que j'ai vraiment envie de le connaître? Alors que je suis pour répondre, notre conversation est interrompue par l'arrivée de Izuku qui me sourit.

-Hey, Shinsou, aurais-tu ton livre d'histoire? Le mien est chez moi et je n'ai personne à qui l'emprunter, s'enquiert-il joyeusement.

Étrangement, mon premier reflex est de cacher la rose dans mon sac. Je n'ai pas envie qu'il me pose des questions là-dessus. Izuku ne parait pas la voir, car il attend ma réponse avec patience. Depuis notre sortie au cinéma, nous nous voyons souvent à l'école. J'admets que ça me plaît, car pour moi il est maintenant un ami.

-Je vais te le prêter, un instant.

Je m'apprête à sortir mon livre, quand Denki en profite pour ramener notre ancien sujet sur la table.

-Tiens, Izuku, tu viens au Best Jeanist ce soir voir les Cowboys Fringants? J'espère, ce n'est pas tous les jours que ça arrive!

Je n'ose pas me retourner. Il commence trop à m'énerver avec ça...

-J'irais bien, avoue Izuku en rougissant, mais je n'ai personne avec qui y aller et je ne veux pas être seul, comme un bizarre. Yuga a son club de cinéma ce soir.

-Justement, moi et Shin y allons, tu n'as qu'à venir avec nous! Je sais que Shin est retissant à l'idée d'être juste avec moi, Kyoka et Hanta.

Je sens mon cœur se serrer. Il n'a pas osé... Avec colère, je me retourne vers lui, le livre que je viens juste de trouver dans les bras. Mes yeux lui lancent des éclairs alors qu'il me sourit l'air triomphant.

-J'adorerais, s'exclame Izuku avant de reprendre le contrôle sur sa joie, j'adore les Cowboys Fringants et je ne serais plus seul... si je ne vous dérange pas? Je ne veux pas jouer l'intrus...

Il a l'air si heureux que je ne peux juste pas briser sa joie en lui disant que je refuse d'aller là-bas. Izuku ne semble pas habitué de se faire inviter, ou juste à être le bienvenu quelque part. Si ça peut lui faire plaisir, pourquoi pas? Denki a encore une fois gagné.

-Ne t'inquiète pas, tu es le bienvenu, lui confirmai-je.

Je lui tends le livre qu'il prend avec plaisir. Quand je pense que je vais devoir aller à un endroit pareil... Mon ami nous confirme l'heure et nous informe qu'il passera nous chercher. Étant le plus près du bar, je serai le dernier à être cueilli. Tant mieux. Cela me fera plus de temps pour assimiler cette idée.

Le soir, j'attends à la dernière minute pour me préparer. Hanta m'a recommandé de m'habiller sur mon 31, mais je n'y vois pas l'intérêt. Contrairement à certains garçons, je ne vais pas là pour draguer, mais juste parce que j'y suis obligé. C'est donc mes vêtements d'école que je revêts, essayant tout de même de peigner mes cheveux indomptables.

-Ça me surprend que tu ailles là-bas, s'étonne ma mère alors que j'attends mes amis.

-Moi aussi.

Vêtue de son habit d'infirmière, elle a été appelée et s'apprête une nouvelle fois à partir travailler. C'est la troisième fois cette semaine et les cernes sous ses yeux m'inquiètent. Depuis un certain temps, elle a beaucoup maigri. Trop même. Cela doit être l'un des désavantages à avoir un bon travail et un bon salaire.

-C'est bien Denki qui te ramène? S'inquiète-t-elle, il ne boit pas? Tu sais que tu ne dois pas embarquer avec n'importe qui. J'ai déjà vu des accidents avec des jeunes et...

Elle s'arrête en plissant les sourcils, pensive. Elle n'a pas à me faire ce discours, je sais tout ça.

-Ne t'inquiète pas, maman.

-N'accepte rien à boire d'un inconnu, ajoute-t-elle, et ne suis pas quelqu'un dans un coin sombre. On ne sait jamais qui sont réellement les gens.

Par chance, cette conversation est coupée par l'arrivée de la camionnette de Denki qui se gare dans la cour. J'embrasse rapidement la joue de ma mère, puis je sors les retrouver. Mon ami a déniché ce véhicule à un prix ridicule et il l'aime comme son bébé. L'arrière a entièrement été aménagé avec des coussins pour que ce soit confortable, bien que très illégal pour les passagers. J'ouvre la portière arrière pour monter et tout le monde me salue alors que je me laisse tomber dans un gros coussin moelleux près de Jirou et face à Izuku.

-Tu sais que si la police nous arrête on est tous fait comme des rats, rigolai-je.

-Ho, mais je suis la loi, réplique Denki avec un sourire.

Nous entreprenons le chemin et je reste dans le silence, à écouter Hanta parler des jolies filles qu'il va y avoir au Best Jeanist ce soir. Je ne suis pas le seul à ne pas dire un mot. Izuku semble quant à lui plus que gêné de se trouver là, avec nous. J'admets que cela doit être étrange pour lui, car excepté moi, il a l'habitude de ne parler à personne d'entre nous.

Le bar Best Jeanist est un endroit étrange et mal placé près de la route passante. Denki réussit après plusieurs minutes à nous trouver un stationnement où sa fourgonnette rentre. Nous descendons de la voiture et je regrette aussitôt d'être venu. L'endroit est bondé de gens. Juste à l'extérieur, une foule de jeunes discutent trop bruyamment, en fumant. Le vacarme qui provient de la bâtisse est déjà assourdissant. Rien qui me donne envie d'aller plus loin. Pourtant je me résigne à suivre les autres jusqu'à l'intérieur.

Nous pénétrons sans nous faire demander nos cartes, ce qui est normal étant donné la moyenne d'âge qui pour la majeure partie ne dépasse pas 18 ans. Le groupe de musique a déjà commencé à jouer sous les hurlements hystériques des groupies. Je déteste entendre hurler... La foule est si dense que mon cœur s'accélère lorsque mes bras touchent à tous ces inconnus, lorsque j'éprouve de la difficulté à me faufiler entre tous ces gens. Je me sens trembler de tout mon corps... Il fait si chaud... Je déteste tant les gens, me sentir enfermer telle une souris, que je ne remarque pas que j'ai cessé de suivre les autres, piquée debout tel un poteau effrayé. Ma respiration est de plus en plus difficile à reprendre...

-Shin, ça va?

Izuku, qui a dû remarquer mon absence, est venu me rejoindre. Comment lui dire que je déteste cet endroit?

-Je n'aime pas les foules, articulai-je.

Je dois lui parler au creux de l'oreille pour qu'il m'entende.

-Veux-tu que nous partons?

-Non, on vient tout juste d'arriver.

Il regarde autour de lui et me pointe une table où il y a des chaises de libres. Le problème reste de se frayer un chemin jusque-là... Comme s'il a lu dans mes pensées, Izuku m'agrippe la main afin de me guider à travers les gens. Cela me permet d'arriver plus facilement à la table où je m'empresse de m'assoir. Même si l'endroit est toujours terrible, je me sens déjà beaucoup mieux.

-Tu veux quelque chose à boire, s'enquiert-il, je vais aller te le chercher?

-Je ne dirais pas non à une orangeade, souris-je.

Il acquiesce et s'en vas. Heureusement qu'il est là, sinon jamais les autres ne seraient venues voir comment j'allais. Même pas Denki, qui connait pourtant ma phobie pour les foules denses...

J'écoute en solitaire les Cowboys Fringants chanter leur classique « au sommet ». J'aime beaucoup leurs chansons. Les paroles de chacune font passer un message ou racontent une belle histoire, contrairement à certaines chansons populaires qui semblent écrites par un enfant de 10 ans.

Izuku revient avec une canette de Crush orange qu'il me tend en souriant avant de s'assoir près de moi sur l'une des chaises. La table devant nous est un peu collante, surement à cause de maladroits qui renversent leurs bières partout.

La soirée est tellement ennuyante... Je suis heureux d'avoir au moins Izuku pour me tenir compagnie, bien que je sois déçu que le bruit nous empêche de communiquer pleinement. Il faut toujours crier et s'approcher de l'oreille de l'autre pour se faire un minimum entendre. Comment des gens peuvent-ils vraiment aimer ce genre d'ambiance?

Lorsque le groupe prend une pause, mes amis se décident enfin à venir nous voir.

-Il y a un type sur la piste de danse qui m'a donné une bière pleine, rigole Denki en me la montrant.

Je me contente de lui sourire, puis je remarque que Hanta n'est pas là. Jirou explique que ce dernier est resté avec une fille, ce qui ne me surprend absolument pas. Pourquoi est-il aussi obsédé par la gent féminine? Pendant tout le temps que le couple est avec nous, ils parlent seulement entre eux. Je me sens exclu, sans importance...

La soirée s'empire lorsque plus tard, Neito Monoma vient prendre place à notre table. Je ne l'avais pas vue depuis mon coup de pied et à vrai dire, sa présence ne me manquait aucunement.

-Je rêve ou je vois Shinsou au Best Jeanist? Ce ne doit pas être lui. Il est bien trop coincé pour sortir. Avec le tacheté vert en plus! On aura tout vu.

Je grimace. Il n'a rien de mieux à faire celui-là? Même si je sais que ce n'est qu'un connard, l'entendre me parler de la sorte me fait quand même mal.

-Tu n'as rien de mieux à faire que nous embêter, répliquai-je agacé.

-Je ne vous embête pas. Tu ne sembles pas tout à fait de bonne humeur. L'endroit ne te plaît pas? Est-ce la foule? Le bruit?

-Va-t'en, Monoma.

Il sourit de plus belle.

-Tu vas encore me donner un coup de pied dans les parties, c'est ça? La violence ce n'est pas bien, Shin, et tu en as des antécédents. J'ai entendu parler pendant que j'étais à l'infirmerie. Est-ce vrai que tu as été en psychiatrie un moment?

Mon cœur s'arrête de battre. Comment peut-il savoir ça... Je n'en parle jamais à personne. Ceux qui savent que j'ai été absent longtemps croient que j'étais dans un centre de jeunes. Je vois du coin de l'œil Izuku me lancer un regard d'incompréhension. Que va-t-il penser de moi maintenant?

Je me lève de ma chaise sous le regard amusé de Neito. S'il le répétait... Déjà que tout le monde me trouve bizarre, cela va juste confirmer les rumeurs.

Je tourne les talons et sors comme une flèche de la bâtisse, bousculant certaines personnes sur mon passage. J'ai les yeux pleins d'eau... Salopard! Comment a-t-il osé lancer ça? Comment peut-il même être au courant? De toutes les personnes, c'est probablement le pire qui puisse le savoir.

Je me fiche pas mal de tout ce qui m'entoure alors que je marche à pas rapides vers chez moi. Je me sens mal, terriblement mal.

-SHINSOU, ATTENDS !!

C'est la voix de Izuku, mais je n'ai aucunement envie de me retourner, de lui donner des explications. Alors que je suis pour accélérer le pas, je sens sa main m'agripper le poignet. Depuis quand court-il aussi vite? Obligé, je me retourne vers lui, le dévisageant méchamment.

-Lasse-moi partir, Izuku, je n'ai pas de compte à rendre.

Il me regarde le souffle légèrement haletant.

-Pourquoi tu t'enfuis comme ça? Demande-t-il.

Cette question me prend au dépourvu. Les joues rosées sous la colère, j'arrache mon poignet de son emprise. Je n'ai pas envie de le planter là.

-Je ne suis pas fou, soufflai-je simplement.

-Je n'ai jamais dit le contraire.

-Mais c'est ce que tu dois croire avec ce que cet imbécile a dit. Moi, c'est ce que je penserais de toi en tout cas.

Il penche la tête pour mieux me jauger, ce qui me fait baisser les yeux.

-Je vois un garçon saint d'esprit devant moi. Pourquoi est-ce que je penserais que tu es fou? Parce que tu as été en psychiatrie? J'imagine que tu as eu de bonnes raisons pour y aller.

S'il savait... Est-ce que je suis cinglé? Moi-même je l'ignore, alors comment peut-il dire le contraire? Nous ne nous connaissons pas depuis longtemps, alors il n'a en aucun cas son mot à dire sur ma santé mentale.

-Tu ne me connais pas, Izuku.

-Mais j'essaie. Donne-moi une bonne raison de penser que tu es fou.

Je lève à nouveau mes yeux vers les siens d'un vert pénétrant. Vais-je répondre? Les gens à savoir qui je suis réellement sont si peu nombreux... Est-ce que je vais laisser Izuku rentrer dans mon intimité?

-J'ai tué mon père, soufflai-je.

Il garde son calme, uniquement plus curieux.

-Et comment?

-Quand j'étais gamin, j'avais toujours ce que je voulais. Une soirée, je voulais un jeu. J'avais été magasiner avec mon père et il avait pour une rare fois refusé. J'étais tellement en colère... Sur le chemin du retour, il faisait tempête. J'ai pleuré tout le trajet pour qu'il retourne me le chercher. Il a essayé de me calmer... Ce dut être trop longtemps, car il n'a pas vu la voiture qui arrivait, qu'il était du mauvais côté... 

Je marque une pause, surpris par mon propre aveu. Je n'ose pas regarder l'expression d'Izuku. Il doit me juger... Pourtant il ne dit pas un mot, mais je sens le contact de sa main chaude sur mon épaule.

-Et ensuite? J'imagine que ce n'est pas pour cette raison qu'on t'a envoyé en psychiatrie?

-Je m'en suis sortie avec uniquement quelques blessures, mais mon père a été moins chanceux que moi. Je me suis mis à le voir partout, le voir chez moi, à l'école. Puis les cauchemars ont embarqué... Toujours le même sur l'accident. Je me sens tellement responsable. J'ai parlé de mon père à l'une de mes enseignantes, puis on m'a envoyé deux mois à l'hôpital, disant que j'avais un sévère traumatisme.

-Est-ce que tout a cessé ensuite?

Je hoche négativement la tête, essuyant au passage une larme. Depuis quand suis-je si ouvert?

-Un moment... Mais récemment, il recommence à venir me voir. Je ne veux même plus dormir. Jamais je ne veux retourner là-bas, en enfer! Promets-moi de ne rien répéter de ce que je t'ai dit.

-Shin, je te promets que tout ce que tu me dis reste entre nous. Nous ne sommes pas si différents en un sens.

C'est étrange comme lui parler m'a fait du bien. J'ai un sentiment curieux de paix qui m'enveloppe alors que nous nous fixions dans le noir, dans un silence délicieux. Comment a-t-il fait pour me faire parler? Je frissonne de froid après un moment. Jusqu'à maintenant, je n'avais pas fait attention à la température.

-Tu veux qu'on rentre chez moi, proposai-je, j'en ai assez de cette soirée.

Izuku semble surpris, mais il accepte. Je n'habite pas très loin et pendant le trajet du retour, je repense sans arrêt à la conversion que nous venons d'avoir et je réalise avec stupeur que je ne me suis jamais autant ouverte à quelqu'un. Bien sûr, Denki sait tout ça à mon sujet, mais il l'a appris par étape, avec le temps alors que je viens de tout livrer à Izuku en quelques minutes seulement.

Une fois chez moi, je le fais monter à ma chambre. Pas que j'ai quelques idées, mais simplement, car il s'agit de mon petit lieu tranquille pour discuter. Les autres pièces de la maison me semblent si ennuyantes, sombres et sans vie. Elles pourraient très bien appartenir à une autre famille que ça me serait égal.

Izuku ne fait aucun commentaire sur l'endroit et entreprend d'explorer ma chambre, comme si voir ce qui s'y trouve est passionnant. Je le regarde en silence, songeant que jamais personne d'autre que ma mère et Denki n'a eu droit d'entrer à ce point dans mon intimité. Cet endroit est ma vie, un reflet de mon âme. J'y garde mes films favoris, les livres qui sont parvenus à me toucher et tous les objets qui gardent une place dans mon cœur. J'ai tout peinturé de ma couleur préférée, vert, car comme moi il s'agit d'une sous-estimée. Le vert n'est pas un ton ni une couleur primaire. Elle est créée avec la patience. Souvent associé à l'étrangeté, je l'aime surtout pour son lien avec la nature. Une couleur naturelle qu'on peut aimer autant que détester, qui me représente.

Izuku regarde mes films avec un sourire, comme s'il est fier de ce qu'il découvre. Son regard passe sur les affiches qui tapissent l'un des murs. C'est surtout des célébrités ou des affiches de cinéma. Son observation se termine sur les roses de mon admirateur que j'ai laissé sur mon bureau avec tous les messages. C'est le moment où je dois intervenir avant qu'il pose des questions.

-Maintenant, tu sais qui je suis, affirmai-je, c'est à toi de me dire qui tu es.

Izuku me lance un sourire et vient s'assoir près de moi sur mon lit. J'attends patiemment, avec une curiosité grandissante.

-Qui je suis selon moi ou selon les autres? Finit-il par demander.

-Pourquoi pas les deux?

Le garçon semble réfléchir à une bonne réponse. À la suite d'une grande inspiration, il entreprend son discours :

-Selon les autres, je dois être un raté trop timide. Un type ennuyeux sans intérêt et comme les gens de notre école le disent si bien : « Un rejet ».

-Et selon toi?

-Selon moi, je dois être la même chose. Un minable qui est stressé à l'idée de dire plus de deux mots à un étranger. Tellement ennuyeux qui personne ne l'aime ou simplement se souci de lui. Bref, le genre de personne qui passe totalement inaperçu par les personnes gentilles, mais qui subit sans arrêt les moqueries des méchants. Un faible qui n'arrive jamais à ses fins et qui est incapable de s'affirmer.

Le voir se rabaisser ainsi me fend le cœur. Ce n'est tellement pas ce que je vois chez lui. Il est si gentil et attentif. Il y a longtemps que je n'ai pas vu quelqu'un avec un cœur aussi grand que le sien. En voyant qu'il prend une pause, je presse sa main dans la mienne pour le réconforter et l'inciter à continuer. Izuku observe le contact de ses petits yeux verts avant de croiser mon regard que je soutiens.

-Je pense que tu te sous-estimes, affirmai-je, je pense que tu es mieux que ce que tu crois.

-Tu crois? Pas moi. Je n'ai jamais rien fait d'important ou d'utile. J'ai seulement Yuga comme ami... mais c'est différent. J'entends les gens parler, raconter une foule d'histoires sur des aventures qu'ils ont vécues et moi je suis là, à connaitre par cœur le nom des acteurs et actrice de certains films. Je suis tellement tanné de vivre des journées sans but, répétitives. Écœuré de fréquenter les mêmes personnes qui me font souffrir, de vivre ma vie par procuration. Je n'en peux plus d'avoir mal en solitude, d'être qu'une ombre.

-Et si je te disais que tu as maintenant un autre ami?

Izuku marque une nouvelle pause et me sourit. Ses yeux sont luisants, j'ai peur qu'il commence à pleurer, mais j'estime ne pas être mieux.

-Si je te raconte quelque chose, tu me promets de ne pas changer ta façon de me voir, souffle-t-il.

Son regard est devenu perçant, comme un couteau qui cherche à me pénétrer au plus profond de mon âme pour s'assurer de mon sérieux. Je serre sa main encore plus forte. Après ce que je lui ai avoué, comment peut-il trouver pire?

-Jamais.

-Shin, il y a un moment cette année où je n'allais vraiment pas. J'étais très seul et les moqueries sur moi augmentaient de jour en jour. Je n'en pouvais plus... C'était trop dur. Dans ma tête, jamais mes problèmes n'allaient s'arranger, j'étais pris dans un gouffre sans fond. J'avais beau tenter de m'accrocher aux rochers qui m'entouraient, mais rien à faire. Je tombais toujours plus bas, me blessant davantage à chaque mètre. J'en avais assez, donc j'ai commencé à envisager le pire. J'avais tout prévu, écrit une lettre pour que mes parents sachent qu'ils n'y sont pour rien... c'était stupide. Je crois que je ne l'aurais jamais fait. 

Il s'arrête et je cède à cet aveu. Je ne peux m'empêcher de m'élancer vers lui et le serrer dans mes bras. Izuku me rend l'étreinte avec plus de force. Je me sens triste, mais bien. On dirait que pour la première fois de ma vie j'ai trouvé une personne capable de me comprendre, qui vit ce que je vis. Voir que je ne suis pas seul dans mon monde crée chez moi une libération immense. Izuku est avec moi, il est là, je le sens dans mes bras. Il est là...

Lorsque je m'éloigne de lui, des larmes ont coulé sur mes joues. En temps normal, je m'empresserais de les cacher, mais en ce moment, je ne veux que laisser le méchant sortir de moi.

-Et pourquoi tu ne l'as pas fait finalement, demandai-je après un long silence.

-Cette fin-là je préférerais la raconter une autre fois si tu le veux bien.

J'acquiesce et serre à nouveau Izuku dans mes bras. Il est vraiment tard, mais je n'ai pas envie de rester seul ce soir. Je l'invite à rester, ce qu'il finit par accepter. Nous décidons d'écouter un film pour nous détendre, une bonne comédie. Même si je n'aime pas mon salon, c'est là que nous allons le visionner puisqu'il s'y trouve la seule télévision de la maison. Couché sur le divan à mon bout, Izuku est de l'autre côté et me joue après les pieds. Je finis par m'endormir avant la fin.

Étrangement, cette soirée est la plus belle de ma vie.

Je pense que j'ai un peu abusée la longueur de ce chapitre... Oups? J'espère que ça vous plaît quand même X)...

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