Chapitre 31 (partie II)

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Je me redresse, massant mes tempes tout en faisant les cents pas dans ma cellule, attendant le prochain souvenir qui me forcera à m'asseoir. J'ai perdu le fils des heures, peut-être même des jours. Combien de temps est-ce que j'ai passée allongée ? 

Vu la douleur dans mes muscles qui peinent à s'étirer, je dirais plus de dix heures, mais je ne peux pas être plus précise. Le plateau repas est toujours là mais la nourriture est froide et ne me fait aucunement envie. 

Je me demande combien de temps je peux rester là sans manger, juste à revivre des souvenirs en continu, comme si je regardais un film. Probablement plusieurs jours. Je colle mes mains un petit peu plus contre mes oreilles, entendant presque le bruit de l'Intelligence Artificielle qui travaille quelque part dans mon cerveau. 

Puis je relâche la pression, soupirant un grand coup pour évacuer le poids qui me pèse sur la poitrine, sans grand succès. Je doute pouvoir le retirer aussi facilement, même s'il me plaît de le croire. 

Je me laisse choir sur le matelas qui me sert de lit et fixe le mur d'en face sans vraiment le voir, mon regard se perdant dans le vide qui nous sépare. Seize ans de vie effacée qui me semble désormais à la fois étranger et si familier, me laissant confuse et dévastée. 

Et s'il n'y avait que les souvenirs, je pourrais peut-être, avec le temps, apprendre à les accueillir, à les choyer. Mais il n'y a pas qu'eux... Je déglutis lentement, posant une main froide sur ma gorge, m'envoyant des frissons partout dans le corps. 

Est-elle revenue, elle aussi ? Sera-t-elle capable de remonter à la surface malgré le blocage que semble faire mon cœur près de ma trachée ? Ma main retombe mollement le long de mon corps tandis que mes yeux se ferment. 

J'inspire longuement, éloignant toute pensée négative de ma tête –du moins j'essaye-. Je n'entends plus le bruit de l'I.A dans ma tête. A-t-elle fini de tout trier ?

« J'attends simplement que ton rythme cardiaque retombe à au moins 65 pulsations par minutes. Pour l'instant, tu es à 115 », répond-t-elle simplement tandis que je continue d'expirer et d'inspirer lentement. J'ouvre les yeux à nouveau, amenant également ma main une nouvelle fois près de ma gorge, allant chercher ma carotide afin de surveiller mes battements de cœur. 

Seconde après seconde je les entends diminuer, jusqu'à finalement atteindre les 65 pulsations par minutes désirées par l'Intelligence Artificielle. Je retombe même à exactement 59 pulsations après pratiquement sept minutes et quarante-trois secondes d'attente et d'expirations lentes. 

De nouveau, je me surprends à venir me masser les tempes avec vigueur, comme si cela avait un impact quelconque sur mon cerveau. Hormis me faire après quelques minutes si je force trop, évidemment. 

Mais je n'ai pas besoin de m'infliger plus de douleur, je crois que j'ai plus qu'atteint mon quota pour la prochaine décennie. Après tout, je suis en train de rattraper seize ans d'isolation et de douleur, avec, heureusement, de nombreux moments de bonheur en famille pour égayer mes journées, sans quoi j'aurai probablement déjà arrêté de ressasser mes vieux souvenirs pour me contenter de les enfermer très loin dans ma tête et ne plus jamais y revenir. 

J'attrape distraitement un petit bout de pain trouvé à côté de l'assiette de soupe froide, dans laquelle flotte des morceaux orange et vert sans que je ne parvienne à mettre un nom dessus. Probablement des légumes, mais lesquels ? 

Il y a au moins huit types de légumes orange et trente-neuf types de légumes verts. Et le nombre de combinaison possible est...beaucoup trop grand et pourtant insignifiant à ce moment précis pour que je me donne la peine d'essayer de le calculer. 

Alors j'avale mon bout de pain et repousse le bol un peu plus loin, rompant tout contact visuel avec les couleurs qui y nagent paisiblement.

« Ton cerveau a besoin de huit heures et sept secondes de repos avant de recommencer un nouveau cycle de visualisation de souvenirs. Ne pouvant impacter sur ton sommeil, je ne peux que te recommander de t'endormir maintenant afin de retrouver tes souvenirs en seulement six semaines et trois jours », termine l'Intelligence Artificielle avant que je n'entende les rouages de ma mémoire cesser de fonctionner. 

Au-delà de ça, le reste de mon cerveau distribue et digère les informations, les redistribuant là où elles sont attendues. Un souffle lent passe la barrière de mes lèvres tandis que je ferme mes yeux, cherchant à retrouver un semblant de calme intérieur. 

J'ai beau savoir les informations de l'Intelligence Artificielle scientifiquement correctes, je ne peux m'empêcher d'être sidérée devant les chiffres donnés et la nonchalance de l'androïde à leurs propos. 

Seize ans de ma vie peuvent être compris, analysé et retrouvé en seulement six semaines et quelques jours, supposant donc qu'une bonne partie d'entre-eux, considérés comme « moins important » probablement, ont été définitivement effacés, oubliés, écartés de ma mémoire au fil du temps. Et je ne sais pas si c'est moi, en pleine conscience, qui ait choisi de les retirer, ou si c'est l'œuvre du robot que j'ai en tête afin de ne pas m'infliger seize ans de visionnage non-stop. 

Mais en même temps, me dire que je peux voir en six semaines seize ans de ma vie me donne une sorte de vertige et de tristesse, réalisant que peut-être, sur seize ans, je n'ai vraiment vécu que six semaines d'évènements importants. 

Que le reste de ma vie n'a été constituée que de choses futiles, que je ne vivais que par obligation, par habitude. Et je ne sais pas si je dois être attristée par ce constat, ou heureuse de savoir que ça ne sera plus jamais le cas, pas avec la vie que je mène actuellement en tout cas.

Je pense que dans cette nouvelle vie, chaque moment est un souvenir précieux, compilé dans un nouvel album intitulé « Felidae 3018 –», faisant donc suite à l'album « Felidae 3002 – 3017 » qui est d'une durée de sept semaines environ, si je compte les heures déjà passées à regarder certains de mes souvenirs. 

Est-ce que chaque personne présente dans ce bâtiment pense la même chose ? Pense d'elle-même comme étant deux personnes qui ont été brutalement forcées de cohabiter dans le même corps à un moment fatidique de leurs vies, jusqu'au jour où elles se sont tellement mélangées qu'elles sont devenues une seule et même personne ? 

A l'extérieur de ces murs, d'autres enfants continuent de vivre la même torture, se voyant retirer leurs souvenirs, leurs identités, pour endosser celles d'une autre personne qui élimine définitivement la cohabitation. 

Et chaque minute que je passe enfermée ici à larmoyer sur mon sort, mon cerveau défaillant et l'Intelligence Artificielle qui occupe mon cerveau, un nouvel enfant se voit retirer son humanité et son identité. 

Je ne peux plus continuer à faire profil bas, à essayer de m'intégrer au groupe et fermer les yeux sur ce qui se passe dehors. Maintenant que mes souvenirs sont revenus, je peux aider les Survivants au mieux. 

Je dois essayer de faire bouger les choses, les mentalités, faire de mon mieux pour venir en aide à ceux qui n'ont pas encore réussi à fuir. Je ne sais pas combien de temps Ethel a prévu de me garder dans cette cellule, mais je ne compte pas y rester plus longtemps. 

Je sais que je dois d'abord dormir afin récupérer le reste de mes souvenirs mais je ne ferais pas ça ici. Déjà parce que je n'ai nullement envie de m'endormir après tout ce que je viens de voir, apprendre et réaliser, mais aussi parce que le lit est pourri et que mon dos me fait mal à force de dormir sur cette fichue plaque de métal. Il est largement temps de s'en aller.

M'approchant de la porte de la cellule, je reste quelques secondes sans rien faire, ne faisant qu'observer. Le mécanisme d'ouverture est de l'autre côté et la vitre qui nous sépare est trop épaisse pour que je puisse la casser. 

La seule chose que je possède est un plateau-repas sur lequel sont posé un bol de soupe froide, un verre en métal et des couverts fait de ce même métal, mais trop fin pour être utilisé pour autre chose que manger sans qu'ils ne cassent. 

Autrement dit, je n'ai pas vraiment de moyen de m'en sortir hormis attendre que quelqu'un ne vienne chercher le plateau ou m'en donner un autre, pour un autre repas. Et ce n'est pas une perspective amusante du tout. Il faut que je sorte ! 

Je n'en peux plus d'être enfermée dans cette boîte depuis des jours maintenant, j'ai besoin de respirer un autre air et surtout d'éviter tout contact humain, au moins jusqu'à ce que je me sente prête à faire face à une autre personne et son jugement interne. 

Mon regard est attiré par le coin gauche de la porte, celui qui se trouve à ma gauche, qui est également le côté duquel la porte vient se fermer. L'espace entre la porte et le mur est fin, presque invisible, mais il est tout de même présent. 

Si je parviens à faire passer peut-être le plateau, cela me donnera une ouverture assez large pour y glisser mon bras et potentiellement pouvoir faire quelque chose. J'inspire et vais chercher le plateau, mon cerveau continuant de tourner à toute vitesse. 

Lentement, je glisse le début du plateau et commence à forcer l'ouverture avec des petits mouvements secs et rapides, jusqu'à ce que la moitié du plateau soit passé. Ensuite, je commence doucement à incliner le plateau afin d'ouvrir un petit peu plus, jusqu'à ce que je parvienne à glisser mon bras dans l'ouverture.

J'inspire longuement une nouvelle fois et lève mon bras, ignorant tant bien que mal la pression appliquée par la porte sur mon bras et le plateau, cherchant à se refermer. 

Je lève mon poignet et ferme un œil, fixant mon regard sur le mécanisme d'ouverture qui se situe dorénavant face à moi, à bonne distance. Mais si je parviens à lancer la fourchette dans les rouages, alors j'ai une chance d'ouvrir cette fichue porte... 

Je raidis mon bras et vise ma cible, prenant une nouvelle inspiration longue. Au moment où je commence mon expiration, mon bras se détend telle la corde d'un arc et je regarde la fourchette s'envoler, le cœur battant. Lorsqu'elle se plante dans les rouages et que la porte commence à s'ouvrir, je souris. 

J'en oublie mon stress, me demandant vraiment comment j'ai pu penser que cela pouvait rater alors que j'avais calculé l'angle, la vitesse et les possibles obstacles, ainsi que la force qu'exerçait la porte sur mon bras. Je me faufile hors de ma cellule, récupère ma fourchette et actionne l'autre mécanisme, priant pour qu'Ethel ne soit pas dans son bureau. 

Heureusement pour moi, c'est bien le cas et je traverse le hangar vide pour retrouver les escaliers et descendre le plus vite possible. Je cours, avalant les marches les unes après les autres sans regarder ni où je vais ni qui je croise. 

Personne ne m'arrête, trop plongés dans leurs discussions ou leurs pensées pour voir quoi que ce soit, de toute manière. Je ne m'arrête que lorsque j'entends la porte claquer dans mon dos, me retrouvant plongée dans l'obscurité pendant une demi-seconde, le temps que les capteurs se rendent compte que je suis là.

J'avance dans le noir afin de m'écarter de la porte, heurtant plusieurs objets avant de me laisser tomber dans un espace vide, le souffle court. Mon cœur commence doucement à décélérer et je peux sentir ma carotide pulser de moins en moins fort sous mes doigts. 

C'est à ce moment précis que la lumière s'allume d'un seul coup, me forçant à plaquer mes mains sur mes yeux quelques secondes pour ne pas me faire brûler la rétine. 

Lorsque je les retire, j'observe mon entourage avec les sourcils froncés. Je pensais m'être arrêtée à l'étage médical pour retrouver la chambre que j'avais eu lors de la Cure, histoire qu'on ne vienne pas directement me retrouver quand Ethel se rendra compte que je ne suis plus en cage... Mais là c'est sûr, le Laboratoire est probablement le premier endroit où elle viendra regarder. 

En même temps, la seule chose que j'avais en tête au moment de quitter la cellule était d'aider les Survivants, donc je suppose que mon cerveau a simplement suivi cette directive au lieu de trouver un endroit improbable où personne ne serait venu nous chercher. 

Je suis même surprise qu'il n'y ait personne d'ailleurs, où est Aksel ? Je le pensais tout à fait incapable de quitter le Laboratoire s'il n'était pas forcé... Et comme je doute qu'il ait trouvé quelqu'un d'autre à mettre à ma place en si peu de temps, il n'a pas été forcé de partir. 

Ce qui veut donc dire... Je tourne la tête vers l'horloge accrochée au mur, un cadeau des Artistes. Trois heures vingt-deux. Un nouveau soupir m'échappe tandis que je détourne la tête, un sourire aux lèvres.

Il doit être en train de dormir. Voilà pourquoi le Laboratoire était éteint. Personne ne viendra me chercher à cette heure-là. Personne n'est debout à cette heure-là. 

Ce qui explique le bureau vide d'Ethel et le peu de personne croisées dans les couloirs. Je n'ai même pas remarqué que le soleil était couché lorsque je suis passée dans le hangar, trop anxieuse à l'idée de me faire rattraper par quelqu'un et remettre dans cette cellule... 

Ce qui est ironique, puisque je suis la seule responsable de cette incarcération. Aksel était contre et Ethel a accepté uniquement parce que je le lui ai proposé. Autrement dit, je me suis mise dans cette cellule de la même manière que je m'en suis sortie. 

D'une certaine manière, je suis tout de même sortie avec un petit peu plus de classe que quand je suis rentrée. Et avec des souvenirs en plus, ce qui n'est pas négligeable. Les capteurs de mouvement finissent par éteindre la pièce, me faisant remarquer que je n'avais pas bougé depuis plusieurs minutes. 

Mes yeux balayent l'endroit dans le noir, réussissant tout de même à voir certaines choses grâce à la réflexion d'un pauvre rayon de lumière sur plusieurs tubes en verre, posés un peu partout dans le Laboratoire. 

Il faudra vraiment que je recommence à ranger quand je serais autorisée à reprendre le travail avec Aksel –en espérant que cela soit le plus tôt possible, les Survivants ont besoin de toute l'aide qu'on peut leur apporter-. 

Je soupire, levant les yeux vers le plafond et priant pour qu'aucune lumière ne se rallume suite à ce bruit, avant de me souvenir que les capteurs cherchent le mouvement et non le son.

Je ferme les yeux et me laisse bercer par le silence présent dans la pièce, avant qu'une nouvelle pensée ne vienne fracturer le peu de paix intérieure que je venais de trouve. Le Laboratoire était éteint, certes... Mais pas fermé ? Pour entrer, il faut avoir sa clé, mon collier ! Et je n'ai pas le mien, Ethel me l'a repris pour éviter que je ne « tente quoi que ce soit avec ». 

Autrement dit, je n'avais aucun moyen d'ouvrir cette porte et je ne pense pas y être arrivée avec une fourchette cassée –deux de ses dents sont restées coincées dans le mécanisme d'ouverture de ma cellule- ! Mon regard glisse vers ladite porte, les battements de mon cœur repartant de plus belle, surtout lorsque des bruits de pas se font entendre de l'autre côté. 

La lumière se rallume aussitôt, trahissant ma présence dans la pièce puisque je peux entendre la présence reculer afin de probablement observer la bande de lumière qui éclaire désormais le dessous de porte. La personne s'arrête alors devant la porte, attend quelques secondes et entre, son regard trouvant directement le mien. 

L'un de ses sourcils remontent tandis qu'un sourire en coin vient étirer ses lèvres, ses bras venant se croiser sur son torse pendant qu'il s'adosse au mur de l'entrée pour finir le tableau. La porte claque dans son dos, nous isolant alors du monde extérieur. J'esquisse un petit sourire, soulagée de voir un visage familier.

— Salut Aksel, je lance d'une petite voix.

Tandis que j'ouvre de grands yeux face au fait que je vienne de parler pour la première fois depuis plus de cinq ans, Aksel se contente de sourire un petit peu plus grand jusqu'à ce qu'une lueur de fierté vienne s'allumer dans ses prunelles brunes. 

Je sais que ma mâchoire est légèrement entrouverte car je peux sentir ma langue se rétracter vers mon palais, mais mon choc ne semble vraiment pas faire réagir le jeune scientifique.

— Salut, petit tigre, répond finalement le jeune homme, me faisant sourire.

Salut tout le monde ! 
Quoi de neuf ?
Que me racontez-vous ?

Aaaaaaaaaaaaaaaah Felidae a aussi retrouvé sa voix ! Et Aksel est la première personne au courant (en même temps que Felidae).... ^^ Est-ce que vous en doutiez ou pas du tout ?
Selon vous, que va-t-il se passer ensuite ?
Comment vont réagir les autres ?
Benny va-t-il être enfin de retour ?
Felidae en a-t-elle appris plus sur ses souvenirs ?

Donnez-moi toutes vos théories, j'ai hâte de vous lire ! 
Désolée du retard, en ce moment c'est un peu la galère chez moi. Si vous me suivez sur Instagram, vous savez que ma mère vient d'annoncer, ce matin, que nous partions en vacances demain [j'ai donc moins de 24h pour faire ma valise et choisir mes lectures, yeepee !], sachant que mes deux parents ont actuellement...........le COVID ! Ma soeur et moi sommes négatives pour le moment, prions pour que ça ne change pas.
Sur ce...........à mardi prochain ! 
Gros bisous <3

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