4. Grace - Discussions de vestiaire

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Hello ! Nouveau chapitre qui j'espère va vous plaire !

Pour être certaine de ne pas vous perdre : BDL = brûleurs de loups (équipe de hockey de Grenoble) / Bruins = équipe de hockey de Boston !

Bonne lecture !

4. Grace – Discussions de vestiaire

— Vous avez vu les nouvelles recrues des BDL ?

Positionnée devant le grand miroir central, occupée à resserrer l'élastique autour de ma queue de cheval, je n'écoute que d'une oreille les bavardages des autres patineuses. Je déteste avoir des cheveux rebelles qui me tombent sur les yeux pendant l'entraînement et j'ai l'habitude des potins, pas besoin de participer à la discussion, c'est la même histoire à chaque saison. On se partage la patinoire avec l'équipe de hockey et ils ne passent pas inaperçus. Grands, bruyants, ils s'approprient la glace comme si c'était leur royaume. Je ne peux pas leur en vouloir, ils remplissent les tribunes à chaque match. Ce sont de véritables vedettes par ici. Leur premier entraînement a eu lieu hier et certaines filles ont traîné un peu dans les parages pour les observer.

— J'ai surtout vu le brun, plutôt baraque, regard vert. Dur de ne pas le quitter des yeux.

Je cherche dans mon sac ma trousse à maquillage de poche. Je n'ai pas eu le temps de faire mon trait d'eyeliner et ce n'est pas le genre de choses qu'on fait en urgence avant de partir de chez soi. Je m'applique sur le trait, même si on n'est qu'en entraînement. C'est la seule extravagance que je m'octroie, avec un peu de gloss goût citron pour nourrir mes lèvres et les préserver du froid. C'est plus sympa qu'un simple baume à lèvres et j'adore cette légère note acidulée.

— C'est vrai qu'il a tout ce qu'il faut là où il faut.

Je ne peux m'empêcher de lever les yeux au ciel à leurs commentaires tout en commençant mon échauffement. Quelques étirements pour ne pas brusquer les muscles, des sauts sur place, exercices de souplesse, tout pour me mettre en jambe et me préparer à la longue session qui m'attend. J'ai des yeux moi aussi, je sais voir ce qui est beau, j'ai juste du mal avec le fait qu'on puisse parler d'eux comme de vulgaires bouts de viande. Je devrais être habituée pourtant. Une part importante est vouée au culte du physique dans les sports de haut niveau. Les athlètes aiment leur corps. C'est notre outil de travail alors on en prend soin. On le bichonne, on le soigne. Et si nos standards de beauté ne sont pas les mêmes que le reste de la population, ils existent. On se scrute, se critique, s'épie, s'envie.

— Ça promet encore une belle saison. Pas vrai, Grace ?

Je hoche la tête plus pour me débarrasser de cette discussion que par réel accord tout en me rasseyant sur le banc pour placer un élastique sous mon pied et tirer ma jambe, l'étendant avant de la ramener vers moi. Les hockeyeurs ne m'intéressent que peu. Pas parce que je ne les aime pas mais parce que je n'ai pas le temps pour ça. Le patinage occupe une place trop importante dans ma vie. Entre les entrainements, les répétitions les compétitions et les galas, je n'ai pas une minute pour moi.

Ce n'est pas non plus comme si le hockey m'intéressait. Je ne connais les règles que parce que je suis née à Boston et que mon parrain a tous les maillots des Bruins. C'est arrivé plusieurs fois qu'on se regarde des matchs alors que je me remettais d'une blessure ou, parfois, le soir, quand il était nostalgique, qu'il avait le mal du pays. On faisait ça aussi avec mon père, quand j'étais plus vite et puis, très vite, je n'ai juste plus eu le temps de me poser devant la télévision. Quand je pouvais le faire, les matchs de hockey n'étaient pas ma priorité. Mes connaissances sur ce sport s'arrêtent là, autant dire qu'elles ne sont pas bien grandes.

Je n'écoute pas la suite de la conversation, à la place sors mes patins de mon sac, leur enlève leurs protections en tissu pour passer celles en plastiques jaune fluo sur les lames. Même si j'ai hâte de quitter les vestiaires, je prends le temps de serrer les lacets de manière à ce que mes pieds soient bien tenus. Je ne veux pas prendre le risque de me faire une entorse en tombant, par négligence.

Lewis m'attend à l'entrée de la patinoire, les mains dans les poches de sa doudoune, casquette des Bruins sur la tête, soi-disant pour protéger ses oreilles du froid. Tu parles, il veut surtout faire rager l'entraîneur des BDL s'ils se croisent. Je ne sais pas trop pourquoi ils se détestent, il n'a jamais voulu m'en parler. Quand j'arrive à sa hauteur, je fronce le nez en sentant l'odeur froide de la cigarette.

— Je croyais que tu avais arrêté.

— Me semble qu'on a déjà eu cette discussion, Grace. Tu es ma filleule, je suis ton parrain, n'inverse pas nos relations.

Je n'insiste pas. Je sais très bien que plus l'année avance, plus il est stressé. Les grandes compétitions ne le réussissent pas. Même si ce n'est plus lui qui patine, ça ne l'empêche pas d'avoir des insomnies, se refaisant des saisons entières de patinage pour me proposer de nouvelles figures le lendemain. Il mange mal, fume plus. Il oublie toutes ses bonnes résolutions de début d'année. Pourtant, c'est le meilleur entraîneur qui soit et je ne me vois pas en changer. J'irais aux mondiaux avec lui, oui je n'irais pas.

Je l'écoute me répéter la routine du matin, tout en mettant mes gants et en retirant les protections plastiques de mes lames, les laissant sur le rebord. Je répète mot pour mot ce qu'il vient de me dire pour lui assurer que j'ai bien compris ce qu'on faisait aujourd'hui et je m'élance sur la glace, le dos droit, les bras tendus. Je fais plusieurs tours de piste, croisant et décroisant mes jambes pour prendre de la vitesse, l'air froid me fouettant le visage. Certains rêvent de se prélasser au soleil, sur un transat, sur une île paradisiaque quand je pourrais passer des heures ici, sans ressentir la moindre fatigue. J'évite les autres patineurs en chassé-croisé et pour la première fois de la journée, je me sens enfin dans mon élément, comme un poisson dans l'eau. Comme si on me libérait de mes chaînes. La glace est peut-être refaite plusieurs fois par jour mais j'ai l'impression d'en connaître les défauts par cœur.

Au fil des tours, je rajoute de la complexité, réalisant quelques figures simples pour me remettre dedans. Chaque mouvement réalisé avec succès me conditionne positivement pour la préparation de mon programme pour les championnats. Jambe tendue en arrière, je me laisse glisser sur la piste, les bras en avion avant de me redresser et d'effectuer plusieurs pirouettes en diagonale. Je tourne jusqu'à avoir un peu le vertige, j'effectue une dernière rotation sur moi-même, telle une toupie qui reste sur place, fléchissant les genoux pour descendre au sol.

Quand je me relève, Lewis, les bras contre la poitrine, me regarde avec intensité. Il capte mon regard et lève son pouce en l'air. J'en oublie la cigarette et les échecs de la veille. Je lui souris avant de glisser vers lui. Il me tend mon casque sans fil que je place autour de mon cou, le temps d'écouter ses recommandations.

— Bien, maintenant que tes muscles sont chauds, on va pouvoir commencer le programme. On n'a pas beaucoup de temps sur la glace aujourd'hui alors on va en profiter pour le répéter plusieurs fois. Pas de nouvelle figure aujourd'hui, on s'en tient à ce qu'on connaît.

La base est définie depuis plusieurs semaines maintenant. Il reste encore des enchainements à revoir, des liaisons à améliorer et sans doute certaines pirouettes à complexifier mais le but de la plupart de mes entraînements est que je connaisse le programme sur le bout des doigts et qu'il me vienne par réflexe. Il faut parfois exécuter mille fois un mouvement pour qu'il devienne naturel et ce n'est pas toujours une partie de plaisir.

Pourtant, je rejoins le centre de la glace, place le casque sur mes oreilles et hoche la tête dans sa direction. La musique emplit mes oreilles et je répète les débuts de ma routine. J'enchaine les sauts, boucle piqué, flip, axel, liés par des croisés et des chassés. Je m'approprie la glace et l'espace, me grandissant. Mes muscles se tendent à chaque pirouette, mes bras accompagnent mes rotations, guidés par une force plus grande qu'eux, qui les garde contre moi. A chaque silence, je me remets en place, au début. J'ai pris l'habitude de ne pas faire un enchainement en complet, mais de l'effectuer par bout tant qu'il n'est pas parfait. Je reprends, me concentrant sur mes erreurs, essayant de ne pas les reproduire de nouveau. La technique n'a jamais été mon fort, alors j'essaie de m'appliquer. Mon truc à moi, c'est l'interprétation. Le show, le spectacle, les émotions. Dans une autre vie, je serais devenue actrice.

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