Louna n'arrive pas à dormir. Tout à l'heure, Rose a posté une photo d'elle et Noé. Les deux étaient mignons dessus et la brune a même hésité à commenter quelque chose, comme pour prétexter un soutien artificiel.

Sur le coup, elle n'y a pas trop pensé. Mais la photo a fait comme un déclic en elle.

Avant de dormir, Lou' s'est ressassée tous ces mois passés à apprendre à le connaître, tout ce rapprochement mis en arrière-plan par leur mise en couple.

Elle n'arrive pas à comprendre comment ils ont pu se plaire aussi vite, concrétiser leur relation avec autant de facilité et de naturel.

Qu'est-ce qui manque à Louna à chaque fois ? Pourquoi n'arrive-t-elle jamais à franchir l'amitié ? Elle manque toujours de premiers pas, de tremblotements, d'histoires concrètes dans ses coups de cœurs. C'est toujours la même chanson, la même langueur.

Est-ce qu'elle a peur ? Si oui, de quoi a-t-elle peur ?

En sortant du lit, Louna vérifie qu'elle n'a pas réveillé Alice. Elle attrape sa doudoune, sa pochette, sort dehors et sous la petite lumière automatique du jardin, se roule une cigarette.

Soudainement, une lumière l'aveugle. C'est Ilyes, qui sort sa tête de la fenêtre, portable à la main.

— Encore en train de divaguer ? lance-t-il en chuchotant assez fort pour qu'elle l'entende.

Louna l'invite à le rejoindre. Son ami lui explique que c'est un peu mort, que ça va réveiller Léon. Elle sourit. « Balec », répond-elle à haute voix.

Quelques minutes plus tard, Ilyes apparaît dans la cuisine. Il sort avec un paquet de miel pops et s'assoit sur la même marche que Louna. Les deux se tapent une barre.

— Tu fumes vraiment à cette heure ?

Elle hausse les épaules et attrape avec sa main gauche assez de céréales pour se rassasier. Il est à peine deux heures du matin.

— J'arrivais pas à dormir.

Il hoche la tête, calmement.

— Moi non plus.

Silencieusement, ils regardent le ciel. On n'y voit rien avec tous ces nuages. Sa clope est mal roulée et la brune vient de réaliser qu'elle a laissé son briquet dans une autre veste. Tant pis.

— T'as l'air paumée Lou' en ce moment, remarque-t-il en soupirant.

Elle le regarde. Ouais, je suis totalement perdue, se répète-t-elle intérieurement.

— T'es sûre que ça va ?

Silence. L'image de Noé et Rose réapparaît en gros quelque part dans sa tête. Elle se maudit de ne pas avoir fait un pas vers lui plus tôt. Ça l'effraie de réaliser à quel point elle est attachée à lui, à quel point ce sentiment s'agrippe à son cœur. Louna ne comprend pas pourquoi avec Noé, c'est différent... pourquoi elle n'arrive pas à se décoller de lui comme avec tous ses anciens crushs... pourquoi elle l'aime autant.

— Non, murmure-t-elle tristement.

Ilyes grimace. Louna essaie de sourire, mais trop tard, elle est prise de vertige.

— Hé... Lou', pleure pas.

Oh, elle pleure ? Elle ne s'en était même pas rendue compte dans le noir.

— Je peux avoir des miel pops ? demande-t-elle en essuyant ses joues le plus rapidement possible.

— Prends tout. Te dérange pas. Je peux même aller chercher les Coco pops.

Elle ne peut pas s'empêcher de rire. Ilyes est génial.

— Tu veux que j'aille réveiller Léon ?

— Mmh... non, c'est bon.

— T'es sûre ? T'as pas l'air bien.

Lou' ne sait pas trop. Elle hésite, puis se ressaisit.

— Ça va passer, c'est toujours comme ça de toute façon.

Un haut, puis un bas. Un bas, puis un haut. Elle sent qu'elle plonge vers le bas.

Mais au fond, Louna aimerait juste que tout redevienne stable comme avant.

— J'ai pas trop envie d'en parler, avoue-t-elle concrètement.

Ilyes la rassure : il comprend. Les deux discutent alors de la vie, des projets d'avenir et de la Normandie. La brune se sent un tout petit mieux.

Un relent de tristesse surgit toutefois lorsqu'elle se relève pour aller dormir. Lou' tient le coup, même si son cœur s'émiette à chaque pas.