Chapitre 5

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Elle ne sentait plus la dureté et le froid du trottoir sur sa joue écorchée. Elle n'entendait plus les pas des passants qui ne faisaient pas attention à elle, se fichant de son sort. Non, ce qu'elle ressentait, c'était la chaleur d'une couverture remontée sur son corps, la douceur d'un matelas sous son dos. Chacun de ses membres lui rappelait qu'elle était en vie à travers les signaux de douleur qui se propageaient dans tout son être. 

Mais... Rien de tout ce qu'elle percevait ne lui indiquait qu'elle était dans la bicoque. Était-elle finalement de retour chez elle ? Toute cette souffrance, cette misère, tous ces meurtres qu'elle avait commis pour survivre... Tout ceci n'était que des images d'un cauchemar auquel elle avait été victime ? Si c'était le cas... Cela voulait dire que Chuuya n'existait pas et ça, elle ne pouvait pas l'accepter. 

La jeune fille tenta de soulever ses paupières, seulement un poids sur ses yeux l'en empêchait, la gardant dans une obscurité imposée. Où était-elle ? Où était Nakahara ? 

Kana chercha à bouger ne serait-ce qu'un doigt, mais elle avait l'impression d'être complètement figée, comme si elle n'avait pas fait le moindre mouvement depuis bien longtemps. Encore dans les vapes, la brunette essayait de distinguer des sons qui pourraient lui donner des indices sur la situation dans laquelle elle se trouvait. Une chose était certaine, ses poumons étaient encore atteints par la maladie, même si elle se sentait un peu mieux. Son mal de tête quant à lui avait disparu, à son plus grand bonheur. 

Un bruit soudain la fit sursauter. C'était une porte qui venait de s'ouvrir et de se fermer aussitôt. Suite à ça, ce fut le grincement d'une chaise à roulettes qui se rapprochait de l'endroit où elle reposait. Sur ses gardes malgré son état comateux, elle essaya de se redresser mais une main vint se poser en douceur sur son épaule, pour la forcer à se recoucher. 

« Doucement, tu n'es pas encore en état pour te relever, lâcha une voix grave. »

La tonalité masculine qu'elle distinguait ne portait aucune trace de malveillance, bien au contraire, elle était douce et chaleureuse. Cependant, il y avait tout de même une chose qu'elle n'arrivait pas à analyser, ce qui ne lui permit pas de se détendre. 

Déjà, le simple fait d'être aveugle, allongée dans un lit, avec un inconnu à côté d'elle ne lui permettait pas de baisser sa garde. Comment s'était-elle retrouvée ici... Comme s'il avait lu dans ses pensées, l'homme prit de nouveau la parole pour s'expliquer, sûrement ayant vu l'inconfort chez la fillette. 

« Je t'ai trouvée dans la rue au bord de la mort, donc je t'ai ramenée chez moi. Avant que tu ne t'inquiètes plus, je suis médecin, et en réalité j'appelle ça chez moi parce que je passe plus de temps dans mon cabinet que ma propre maison, termina-t-il avec une touche de plaisanterie. 

- Que... »

À peine avait-elle tenté de prononcer un mot que sa toux lui écorchait de nouveau la gorge. Mais cette fois-ci, elle n'eut pas le goût désagréablement métallique du sang en bouche. S'il était médecin, cela voulait donc dire qu'il lui avait donné un médicament qui l'aidait, non ? 

« Évite de parler quelque temps, pour que tu laisses tes poumons et ta gorge se reposer. Je t'ai diagnostiqué une pneumonie virale sacrément robuste. Depuis combien de temps es-tu malade ? La questionna-t-il en faisant grincer à nouveau sa chaise. »

Étant dans l'incapacité de répondre oralement, la jeune fille se concentra pour réussir à faire bouger son bras. Elle l'extirpa de dessous la couverture, avant de montrer le chiffre deux avec ses doigts. 

« Deux jours ? Fit-il avec surprise, recevant un signe négatif de la part de sa patiente. Deux semaines ?! Je comprends pourquoi tu étais dans cet état... finit-il dans un soupir. »

Elle l'entendit se lever et tenta de le retenir, ne voulant pas qu'il la laisse seule alors qu'elle avait encore des questions à lui poser. Sa main n'attrapa que du vide, avant de retomber sur le matelas dans un bruit sonore. Et cela sembla attirer l'attention du médecin qui revint près d'elle dans un petit rire. 

« Tu sais, tu devrais plutôt te reposer, dit-il mi-amusé mi-sérieux. »

Mais elle ne pouvait fermer l'œil sans avoir des réponses. Et la plus importante, c'était de savoir à qui elle s'adressait. Alors doucement, elle leva à nouveau son bras pour pointer de son index une direction, en espérant que cela soit le médecin devant elle. 

« Moi ? Que veux-tu savoir sur moi ? »

Comment lui faire comprendre sans mot qu'elle voulait qu'il se présente ? Elle émit un petit soupir fatigué, marqué aussi par l'agacement. 

« C'est mon nom que tu veux savoir ? Demanda-t-il soudainement avec douceur. »

Elle hocha vigoureusement de la tête, regrettant rapidement son action lorsqu'un étourdissement la prit. 

« Bon, je te propose quelque chose, commença-t-il en expirant longuement. Je te donne mon nom et après tu te reposes encore un peu. Et promis, à ton réveil je répondrai à toutes tes questions. Ça te convient comme marché ? »

Continuer à se reposer ? Bien sûr qu'elle aimerait pouvoir dormir à nouveau puisqu'elle se sentait épuisée, mais était-ce une bonne idée de s'endormir à nouveau avec cet homme qu'elle ne connaissait pas ? 

Elle avait dormi jusqu'à maintenant et se trouvait toujours en vie grâce à son aide. De plus, dans l'état dans lequel elle se trouvait, elle était incapable de se défendre. Alors, elle ne pouvait qu'accepter. Elle espérait juste pouvoir s'en remettre le plus vite possible de cette pneu-machin pour pouvoir rejoindre Chuuya qui, s'il s'était rendu compte de son absence, devait être en train de paniquer. 

Cette fois-ci, elle acquiesça dans un mouvement lent de la tête, son visage tourné en direction d'où provenait la voix masculine sans avoir la possibilité de le voir. 

« Bonne décision, laissa-t-il entendre en venant remonter la couverture sur son corps. Je me présente rapidement, je m'appelle Ōgai, enchanté de te rencontrer petite. Maintenant repose-toi, je reviendrai te voir. »

Sur ces derniers mots, il dégagea avec douceur le front de la jeune fille puis se leva, avant de quitter la petite pièce. Un prénom. Elle n'avait obtenu qu'un prénom qui ne lui disait absolument rien. Au moins, elle n'avait jamais entendu ses opposants prononcer un tel pseudonyme, ce qui la rassurait un peu sur un point : elle n'était peut-être pas tombée sur une mauvaise personne. 

════ ∘◦❁◦∘ ════

Elle ne savait pas combien de temps elle avait dormi, mais à son réveil, elle se sentait bien mieux. La pression dans ses poumons se faisait moins dérangeante, les chatouillements dans sa gorge avait disparu et ses maux de tête l'avaient enfin quitté. Elle se sentait toujours faible, mais il y avait tout de même du positif dans l'évolution de sa guérison. 

Le seul bémol, lorsqu'elle avait repris connaissance, elle était toujours plongée dans l'obscurité. N'entendant aucun son l'informant d'une autre présence dans la pièce dans laquelle elle se trouvait, elle attendit avec impatience que Ōgai revienne. Comme s'il avait compris qu'elle s'était réveillée, il entra dans la salle et vint s'asseoir à côté d'elle en faisant rouler sa chaise jusqu'à son lit. 

« Je vois que tu viens de te réveiller. Comment te sens-tu ? L'interrogea-t-il gentiment. »

Sa voix était toujours douce malgré cette petite tonalité grave, seulement, cette bienveillance qu'elle percevait la mettait mal à l'aise. C'était comme si elle masquait autre chose qui l'empêchait de faire confiance au docteur. 

N'en pouvant plus d'être allongée, la jeune fille tenta de se redresser pour se mettre en position assise, et fut contente de voir qu'il ne l'en empêchait pas et qu'au contraire, il l'aidait à bien placer son oreiller derrière son dos. Ses lèvres s'entrouvrirent dans l'intention d'articuler ses questions qu'elle avait, cependant, sa gorge refusa, se trouvant bien trop sèche. 

Sa toux reprit alors à son plus grand malheur, plus tranchante et aride. Sa main droite se plaqua aussitôt sur ses badigoinces, avant qu'elle ne se mette à froncer les sourcils en sentant une surface lisse et froide contre sa paume libre. 

« C'est un verre d'eau, déclara posément l'homme. Ça fera du bien à ta gorge. »

La fillette se pinça quelques secondes les lèvres avant de porter le récipient à ses narines pour en humer l'odeur du liquide. Rien, comme la caractéristique olfactive liée à l'eau. Il existait sûrement des poisons inodores, mais elle était tellement assoiffée qu'elle préférait croire qu'elle ne risquait rien à boire le contenu du verre. 

Ce fut alors peu de temps après qu'elle avala l'onde, qui apaisa les tiraillements de sa gorge comme il lui avait dit. C'était un soulagement. Elle termina d'une traite la boisson, tendant à nouveau le récipient en quémandant silencieusement qu'il la resserve. Ce simple geste le fit rire et il s'exécuta aussitôt. 

Apaisée de ses douleurs, elle soupira longuement avant de tourner son visage vers le docteur, toujours aveuglée par le bandeau sur ses yeux. Elle aurait aimé voir à qui elle avait affaire, mais sa conscience lui disait qu'elle ne devait pas essayer de retirer le tissu. S'il était là, il devait y avoir une bonne raison. 

« Tu te sens mieux ? L'interrogea à nouveau Ōgai en récupérant doucement le verre de ses mains.  

- Oui... »

Elle préférait limiter l'utilisation de ses cordes vocales, ne voulant pas être prise à nouveau par une crise de toux. Elle était enfin réveillée et surtout, elle n'avait pas oublié le marché qu'il avait passé. Elle voulait des réponses. 

Sa première question fut posée sans qu'un mot ne soit oralisé. De son index, elle pointa le bandeau sur sa vision et attendit qu'il comprenne ce qu'elle lui demandait. La réponse ne se fit pas attendre à son plus grand bonheur, puisqu'il sembla avoir compris en une fraction de seconde son interrogation. 

« Pourquoi ce bandeau ? Je t'avoue que je préfère garder cet endroit secret... Des personnes me veulent du mal, dit-il dans un soupir. 

- Tu... tu as fait de mauvaises choses toi aussi ? Le questionna-t-elle d'une voix rauque et tremblante dû au fait qu'elle ne l'eût pas beaucoup utilisée récemment. 

- Plus ou moins, répondit-il sincèrement dans un rire. Si je te cache les yeux, c'est parce qu'une fois que tu seras sur pied, je voudrais que tu oublies cet endroit. 

- Hum... »

Il ne savait pas si elle avait compris l'enjeu de sa demande, mais à en voir l'air calme chez la gamine, il se dit qu'elle avait sûrement assimilée la chose mieux qu'il ne le pensait. Cette pensée laissa apparaître un sourire en coin sur ses lèvres, il la trouvait intrigante cette petite. 

« Combien.... dormi ? Continua-t-elle en limitant ses paroles. 

- Trois jours. »

Son cœur manqua un battement en entendant ce qu'il venait de dire. Trois jours. Elle avait réellement bien perçu ces mots. Ses pensées se portèrent vivement vers son ami qui devait être en totale panique face à son absence. Elle devait le retrouver au plus vite. 

Ses mains suivirent son raisonnement interne en repoussant vivement la couverture qui était remontée jusqu'à sa poitrine. Sûrement ayant compris ce qu'elle s'apprêtait à faire, le médecin la stoppa dans ses mouvements en la retenant par les poignets. Voulant tout de même comprendre ce qui semblait la stresser, il lui demanda tout d'abord de se calmer avant de lui expliquer pourquoi cette agitation. 

« Mon ami... mon ami attend... tenta-t-elle d'expliquer. 

- Ton ami ? Répéta-t-il surpris. Petite... Est-ce que tu as des parents ? L'interrogea-t-il par la suite, recevant une réponse négative de la part de la brunette. Du coup, tu vis seule avec cet ami ? 

- Oui... »

Orpheline. Voilà pourquoi il l'avait trouvée dans cet état, les vêtements sales et aux portes de la mort, emportée par la pneumonie qui rongeait ses poumons. Mais, même en voyant que cette personne à laquelle elle tenait inquiétait la jeune fille, il ne pouvait pas lui permettre de quitter son cabinet maintenant. Même si elle semblait se sentir mieux, il devait faire des examens pour être sûr qu'elle était sur la voie de la guérison. 

« Ōgai. Il faut... que je le vois, articula-t-elle avec une grimace qui peignait sa culpabilité. S'il te plaît... »

Son ton suppliant lui permettait d'oublier la familiarité qu'elle employait en parlant avec lui. D'accord, il ne lui avait donné que son prénom pour une certaine raison, mais elle aurait pu le traiter avec plus de respect. Ça ne l'arrangeait pas qu'elle parte aussi tôt, mais bon, il était certain qu'elle satisferait sa curiosité très bientôt. 

« J'ai besoin de vérifier ton état avant de te laisser repartir. Après ça, je te raccompagnerai chez toi, laissa-t-il entendre sur un ton autoritaire. 

- D'accord. 

- Et tu répondras à quelques questions que j'ai à te poser, ajouta-t-il en faisant grincer sa chaise, signe qu'il s'était levé. 

- D'accord. »

Elle s'en fichait des questions qu'il pouvait lui poser, tant qu'elle rejoignait au plus vite Chuuya. De plus, qu'est-ce qu'il y avait d'intéressant à savoir sur elle, une fillette des rues ? 

Elle l'entendit revenir vers elle et il lui demanda d'ouvrir la bouche pour inspecter l'intérieur de sa gorge. Elle s'exécuta sans rechigner, tirant la langue aussitôt. Plus vite elle répondait à ses demandes, plus vite elle retrouverait son partenaire. 

« Comment t'appelles-tu petite et quel âge as-tu ? L'interrogea soudainement le médecin.

- Kana et j'ai huit ans, répondit-elle une fois qu'il l'autorisa à refermer la bouche. 

- Et ton ami ? 

- Pourquoi tu veux savoir ça ? Répliqua-t-elle suspicieuse. 

- Par curiosité, dit-il simplement. 

- Je n'ai pas envie de répondre à ça, refusa-t-elle en fronçant les sourcils. 

- D'accord. Alors la prochaine question tu seras obligée d'y répondre. As-tu un pouvoir ? »

Elle fut surprise par cette interrogation. Qu'est-ce qui pouvait lui faire penser qu'elle possédait une quelconque capacité ? Alors qu'il posait un objet froid dans son dos, la prévenant que c'était pour écouter ses poumons, elle lui répondit qu'elle n'avait pas de super-pouvoir, ce qui fit rire doucement l'adulte. Pourquoi ? Ça, elle n'en avait aucune idée. 

« Tu as un pouvoir ? Demanda-t-elle en retour. 

- Et non ! Je ne suis qu'un simple médecin, avoua-t-il sur un ton amusé. Je suis soulagé, tu te remets plus rapidement que je ne l'aurais pensé de ta pneumonie, changea-t-il de sujet subitement. 

- Tu vas me laisser partir du coup ? Fit-elle en toussant par la suite un coup seulement. 

- Oui. Au fait... J'ai dû relever ton tee-shirt pour voir si tu n'avais pas de blessures, comme j'ai vu du sang autour de toi quand je t'ai trouvée, commença-t-il sur une tonalité plus que sérieuse. »

En l'entendant, la main de la petite vint instinctivement se poser au centre de sa poitrine. Elle espérait qu'il n'allait pas parler de cette chose qui souillait sa peau, même si elle avait peu d'espoir. Même si elle était tous les jours confrontée à la vue de cette horreur, elle faisait en sorte de ne pas la regarder. Elle voulait l'oublier même si cela lui était impossible. 

« Comment as-tu eu cette étrange cicatrice sur la poitrine ? Posa-t-il la fatidique question. »

Elle sentit un nœud douloureux enserrer son estomac. Seul Chuuya était au courant de son histoire et était le seul à pouvoir voir cette cicatrice. Pourquoi devait-elle répondre à ce médecin ? Même si elle ne voulait pas expliquer la naissance de cette dernière sur sa peau, elle savait que si elle ne disait rien, il ne la laisserait pas partir. Elle l'avait senti dans sa voix que c'était un manipulateur... Voilà, elle venait de comprendre ce qui la gênait dans sa gentillesse. 

Alors, pour toute réponse, elle tendit la main devant elle avant de replier son auriculaire, son annuaire et son majeur, gardant son pouce et son index tendus pour former un pistolet. 

« On t'a tiré dessus ? Fit-il surpris. Mais...»

Il ne continua pas sa phrase, car il allait lui demander comment elle avait pu survivre à ça. Son examen terminé, il s'écarta de la brunette pour se rapprocher de son armoire à pharmacie pour préparer les médicaments qu'il laisserait à Kana, afin qu'elle continue à se soigner jusqu'à la fin de son traitement. Étant aveugle, elle ne pouvait voir le sourire loin d'être bienveillant qui habillait maintenant les lèvres du docteur. 

Il était heureux. Oh que oui. Cette rencontre était fortuite mais bien intéressante. 

« Ōgai ? L'appela-t-elle, inquiète du fait qu'il ne parle plus. 

- Je vais te ramener chez toi. Où habites-tu ? La questionna-t-il en se rapprochant d'elle. 

- À Suribachi, murmura-t-elle presque. 

- Dans les bas-fonds ? Quelle question, c'est logique, termina-t-il avec un triste soupir. Allez viens, tu vas retrouver ton ami.

- Vraiment ?! S'exclama-t-elle en balançant ses jambes hors du lit, s'apprêtant à retirer son bandeau. 

- Attends ! Garde-le... Je vais te guider jusque chez toi, puis, une fois que je serai parti, tu pourras l'enlever, quémanda-t-il gentiment. »

Elle ne pouvait qu'accepter si elle voulait retrouver le rouquin. Sans plus de réflexion, elle descendit du lit et se retint de justesse au matelas lorsque ses jambes manquèrent de céder sous son poids. Déjà que le fait d'être indisposée visuellement temporairement portait atteinte à son sens de l'équilibre, mais à cela, il fallait rajouter qu'elle était restée au lit durant trois jours entiers. 

D'autres mains vinrent la soutenir en se plaçant sous ses aisselles, mais disparurent très vite en sentant la soudaine tension dans tout le corps d'Akame. 

« Tu te sens de marcher ? L'interrogea doucement Ōgai. 

- Oui, assura-t-elle en essayant de faire un pas en avant pour prouver ses dires. »

Malheureusement, elle manqua de tomber à nouveau, s'il n'était pas intervenu pour arrêter sa chute. Sans dire un mot, s'accompagnant simplement d'un long soupir, il attrapa la petite dans ses bras, la faisant s'asseoir sur son côté droit sous les plaintes de cette dernière. À nouveau, il se rendit compte qu'elle était en état de maigreur. Elle était loin d'avoir le poids attendu pour une gamine de son âge... 

« Laisse-moi descendre, ordonna-t-elle en tapant le dessus de son crâne. 

- Aïe ! S'exclama-t-il. Si on attend que tu puisses à nouveau marcher, tu ne seras pas rentrée chez toi rapidement, lâcha-t-il avec une pointe de malice dans la voix. »

Touchée. Sachant qu'il avait totalement raison, la brunette croisa les bras sur sa poitrine juvénile en faisant la moue, laissant entendre par la suite un "bah mets-toi en route" qui, au lieu d'énerver l'adulte par son manque de respect, le fit rire sincèrement. Sans plus attendre, il se mit en marche, récupérant sur son bureau la petite poche contenant le traitement de la fillette, puis il quitta son cabinet. 

« Ton ami t'attend chez toi ? La questionna-t-il innocemment. 

- Bien sûr qu'il m'attend, répondit-elle avec assurance, alors qu'elle essayait en réalité de se convaincre elle-même qu'il serait là à son retour. Ōgai, tu dis que des gens te veulent du mal et que c'est pour ça que tu m'as mis ce bandeau... Ça veut aussi dire que je ne te reverrai plus ? Demanda-t-elle à son tour plus calmement. 

- C'est plutôt l'idée. Pourquoi ? Tu aimerais me revoir ? La questionna-t-il avec un petit rire. 

- Non, laissa-t-elle entendre sans hésitation. 

- Ouch... Ça fait mal... marmonna-t-il avec une grimace qu'elle pouvait percevoir sans la voir. »

Elle ne savait pas ce qu'elle avait dit de mal pour qu'il réagisse ainsi. Elle avait été sincère, elle ne voulait pas le revoir. D'accord, il lui avait sauvé la vie et elle lui en était reconnaissante, mais il n'y avait pas plus. Pour elle, son monde se résumait à Chuuya et elle n'acceptait personne d'autre. Elle n'avait besoin de rien de plus pour être heureuse, voilà pourquoi elle n'était pas enthousiaste à faire de nouvelles connaissances. 

Le reste du trajet se fit en silence. Les oreilles de la jeune fille percevaient diverses choses qui lui donnaient des informations sur la personne qui l'avait soignée, et ceux, grâce aux femmes qui murmuraient à son sujet. 

"Tu as vu sa blouse, c'est un médecin je crois" prouvait qu'il ne lui avait pas menti sur sa profession. "Quel bel homme, tu ne trouves pas ?" sur le fait qu'il devait être attirant, donc que son visage attisait la sympathie. "Je n'ai jamais vu des yeux aussi hypnotisant et cette couleur grenat !" un autre indice sur son physique. "Brr qu'il est ténébreux ! C'est tout à fait mon style d'homme !", pour avoir entendu un bon nombre de pintades parler ainsi, elle faisait souvent référence aux hommes avec une chevelure sombre. Avec ces maigres indices, elle arrivait à se dessiner mentalement une image de lui, sûrement loin de la réalité. 

« Je me disais... Commença-t-il tout à coup. Tu es tombée malade parce que tu as attrapé froid ou bien, parce que tu as côtoyé quelqu'un qui était déjà malade ?

- J'ai enterré il y a deux semaines le cadavre d'un malade, répondit-elle, sa main tapotant dans un rythme simple le dessus du crâne de l'adulte.

- Ah... Fit-il avec une grimace. Tu es sûre d'avoir huit ans ? Continua-t-il avec un petit rire.

- Pas trop sûre mais ça doit s'en rapprocher.

- Tu es d'un sérieux... Allez, parlons d'autre chose ! Quel serait pour toi le plus beau cadeau qu'on pourrait te faire ?

- Pourquoi cette question ? L'interrogea-t-elle suspicieuse.

- Parce que les enfants aiment qu'on leur offre des cadeaux, répondit-il comme si c'était une évidence.

- Je vis dans la rue, tu crois qu'on s'offre des cadeaux quand on en a envie ? Répliqua-t-elle sèchement.

- Ah oui, c'est déplacé... »

La discussion était difficile à tenir avec elle... C'était presque gênant de chercher un sujet de conversation, car à tout moment, il risquait de la contrarier...

« Un manteau, entendit-il d'un coup.

- Un manteau ? Répéta-t-il sans comprendre.

- Ma mère avait un magnifique manteau noir avant et je rêvais de l'avoir... Maintenant, j'en veux un parce que j'ai sans arrêt froid le soir ... »

Il ne dit rien, se contentant d'acquiescer d'un hochement de tête qu'elle pouvait percevoir puisque sa main se trouvait toujours sur le dessus de son crâne. La vie pouvait être cruelle, et elle ne faisait pas de distinction entre les adultes et les enfants.

Soudainement, elle sentit l'homme s'arrêter avant de la descendre doucement. Il garda ses mains sur ses épaules pour s'assurer qu'elle n'allait pas tomber, puis caressa le dessus de ses cheveux avec une étrange tendresse. 

« C'est la fin du voyage Kana, plaisanta-t-il. Je t'ai préparé des médicaments à prendre pendant quelques jours encore. Prends un cachet matin, midi et soir pendant cinq jours, puis tu seras guérie. À condition que tu te reposes bien sûr ! Termina-t-il sur une touche faussement autoritaire tout en mettant dans sa main le petit sac en papier. 

- Merci de m'avoir trouvée et de m'avoir sauvée, dit-elle avant de se pincer les lèvres, espérant regarder au bon endroit. 

- Remercie plutôt le hasard de t'avoir mis sur ma route, rigola-t-il. Peut-être que ce hasard fera qu'on se retrouvera à nouveau, qui sait ? J'espère juste que tu ne m'oublieras pas si cela se passe dans plusieurs années, continua-t-il joyeusement. 

- Je t'oublierai... Je n'ai pas une bonne mémoire si je n'ai pas vu le visage de quelqu'un, avoua-t-elle sincèrement. Bon, tu devrais y aller avant que je n'enlève ce bandeau, prévint-elle en lui tournant le dos. »

Elle l'entendit acquiescer dans un murmure, puis ses pas s'éloigner après qu'il l'ait saluée. Elle compta une trentaine de secondes avant de retirer le bout de tissu de devant ses yeux. Elle ne souleva pas ses paupières rapidement, ses pupilles n'étant plus habituées à la plus faible luminosité, alors elle fit en sorte de les accoutumer avant de réellement regarder autour d'elle. 

Elle se trouvait devant l'escalier d'entrée du bidonville qu'elle habitait. Étrangement, elle ressentit un pincement au cœur en percevant à nouveau les doigts froids de l'hiver contre sa peau, les tiraillements de son estomac vide. Elle aurait dû lui demander à manger avant de partir... 

Mais, toute pensée négative fut chassée lorsqu'elle se souvint que Chuuya l'attendait sûrement. L'impatience s'écoulant dans ses veines, elle se mit en marche en direction de leur bicoque, sans manquer de tomber puisqu'elle n'avait pas encore retrouvé son équilibre. Se tenant à tout ce qu'elle trouvait pour l'aider à avancer sans trébucher, elle avançait à un rythme bien trop lent pour elle, son organe vital battant avec force et impatience dans sa cage thoracique. Elle voulait le voir, le serrer dans ses bras, lui dire qu'il lui avait manqué même si elle n'avait pas vu ces trois jours passer. 

Il était toute sa vie et son absence se faisait ressentir. 

Elle prit un embranchement sur la gauche, marcha plusieurs mètres avant d'arriver à un nouveau petit escalier. En bas de ce dernier, elle devait continuer encore une dizaine de mètres avant de se stopper à destination. Sur sa droite se trouvait la maison de bois. Mais une chose était étrange : c'était cette atmosphère vide. 

Les sourcils froncés d'inquiétude, elle s'élança dans la bicoque avant de se figer sur place. Personne, il n'y avait personne. La couverture se trouvait en boule sur la couche qu'ils partageaient, le panier qu'ils prenaient à chaque fois qu'ils partaient à la rechercher de quelque chose à se mettre sous la dent était rangé à sa place. Elle s'approcha d'un coin où, creusé dans le bois et recouvert de métal, avait été placé un foyer improvisé. Ce dernier n'avait pas servi depuis plusieurs jours et la réserve de bois qu'ils avaient n'avait pas bougé d'un poil. 

Personne n'était venu dans cette habitation depuis qu'elle l'avait quittée. Affolée à l'idée de ne pas retrouver son partenaire, elle pivota vivement sur ses talons, les yeux écarquillés d'horreur. Instinctivement, elle porta ses prunelles émeraude vers un mur et se rendit compte que son couteau fétiche avait disparu. Est-ce que Nakahara l'avait récupéré ou bien... lui avait-on volée ? 

Est-ce qu'il la cherchait ou bien... l'avait-il abandonnée en rejoignant ce Laito et sa bergerie ?

Elle manqua de flancher à cette idée. Non. Il lui avait promis... 

Kana sortit vivement de la cabane, ses iris détaillant chaque espace pour repérer un indice sur la possible venue de son ami ici. Elle tourna sur elle-même, ses mains maltraitant ses longs cheveux bruns et l'horrible sensation qu'elle allait se mettre à pleurer assaillant ses yeux. 

« K-Kana ? Entendit-elle soudainement derrière elle. »

Ses muscles se tendirent d'un coup en percevant cette voix, avant qu'elle ne fasse volte-face rapidement. Elle se calma d'un coup lorsqu'elle reconnut la silhouette devant elle. Il était là, différent mais bien là. Ses vêtements semblaient neuf, son jean et son sweat devaient bien lui tenir chaud. Mais ce qu'elle remarquait plus, c'était l'humidité présente dans son regard. 

Elle le vit courir jusqu'à elle, ne pouvant plus se retenir, pour venir l'enlacer avec force mais tendresse. Il plongea son visage dans son cou tandis qu'une de ses mains se logeait dans son dos et que l'autre remontait jusqu'à l'arrière de son crâne, se perdant dans sa chevelure. 

« Dis-moi que tu es bien là devant moi... murmura-t-il la gorge serrée. 

- Chuuya... je suis bien là, assura-t-elle en répondant aussitôt à son étreinte. 

- Mais où tu étais ? Demanda-t-il en s'écartant légèrement, venant par la suite prendre son visage en coupe. Je t'ai cherchée partout ! Et il y a eu ce sang ! J'ai cru t'avoir perdue mais je... non... Kana tu vas mieux ? »

Il se perdait dans ses mots tant il était rassuré de la voir là, en meilleure condition que lorsqu'il l'avait quitté. Suite à cela, il se mit à s'excuser, disant que c'était sa faute et qu'il n'aurait pas dû partir. Prise de culpabilité pour ce qu'il pouvait ressentir, et surtout ne lui en voulant pas du tout d'avoir tout fait pour lui sauver la vie, elle le reprit contre elle et vint embrasser sa tempe avec douceur. 

« Je t'aime Chuuya, dit-elle simplement. »

Ces simples mots brisèrent ses vaines tentatives à retenir ses larmes et le rouquin se mit à sangloter de soulagement sur l'épaule de sa partenaire. Ces trois jours à la chercher, avec cette horrible voix qui lui disait qu'elle était morte quelque part, avaient été un cauchemar. Mais elle était là, dans ses bras, et plus jamais il ne la lâcherait. 

« Où est-ce que tu étais ? Je t'ai cherchée dans tout Yokohama, on ne t'a pas trouvée ! L'interrogea-t-il impatient qu'elle s'explique. 

- J'étais... Comment ça on ? Lâcha-t-elle en fronçant les sourcils. 

- Laito et les Brebis m'ont aidé à te retrouver... Tu sais... C'était le marché entre nous. On les rejoignait et ils te sauvaient, expliqua-t-il en se reculant de quelques pas, appréhendant la réaction de son amie. 

- Mais ils ne m'ont pas sauvé la vie, on n'a aucune raison de les rejoindre, répliqua-t-elle sombrement. 

- Je sais mais... Kana, on n'aura plus à vivre ici ! On n'aura plus froid et on mangera à notre faim ! Se précipita-t-il à argumenter en voyant le regard de la fillette s'assombrir de plus en plus. 

- Si on le voulait, on pourrait nous-même faire les choses pour qu'on ait à manger et chaud, rétorqua-t-elle en croisant les bras. 

- Tu as failli mourir parce qu'on vivait dans la misère ! Je ne veux plus jamais que cela recommence ! S'écria-t-il en s'énervant. 

- Et à quel prix Chuuya ?! Devenir leur pion ?! Ils se servent de ton pouvoir et tu te laisses faire ?! S'agaça-t-elle à son tour. 

- Si cela me permet de rester avec toi, alors je m'en fous ! »

Alors c'était de sa faute s'il s'enfermait lui-même dans la prison de ces Brebis ? Elle s'en voulait... Elle baissa la tête en se mordillant la lèvre inférieure, incapable de soutenir ses prunelles grises. Jamais ils ne s'étaient disputés et ça lui faisait mal que leur première fois soit le jour de leurs retrouvailles. Mais d'un côté, elle comprenait pourquoi il avait décidé de les rejoindre, c'était même le meilleur choix à faire. Elle ne voulait juste pas qu'on la sépare de lui...

« Kana... On... On peut s'y plaire. Moi je m'y plairais que si tu es avec moi, avoua-t-il doucement. S'il te plaît, viens avec moi. 

- Chuuya, soupira-t-elle en lui faisant face. Ça me blesse que tu penses que je ne te suive pas où que tu ailles, fit-elle avec un sourire. »

Peut-être qu'elle prenait la mauvaise décision, mais tant qu'elle faisait l'erreur à ses côtés, elle s'en fichait. 

∘◦❁◦∘ Le rouge de la vie ∘◦❁◦∘

Enfin j'ai réussi à poster ce chapitre ! Le chapitre 7 m'a pris beaucoup de temps à écrire et se trouve plus long que je ne le pensais... En plus, mon Master me prend énormément de temps, du coup j'avance à une lenteur d'escargot... 

En tout cas, j'ai réussi à introduire un second personnage de Bungo Stray Dogs (sans compter Chuuya bien sûr hehehe) ! Qu'est-ce que vous en avez pensé ? 

Chuuya et Kana n'ont pas été séparés très longtemps haha, mais cela ne veut pas dire qu'ils ne vont pas vivre d'autres choses difficiles ! Hâte de vous faire découvrir la suite ! 

Le prochain chapitre est très long (si ma mémoire est bonne, il doit faire environ 8500 mots...) et il marquera un grand tournant dans l'histoire ! Vous comprendrez plus tard haha !

Sachez que chaque détail dans cette histoire a son importance, car il explique de futurs mystères ou bien en introduit déjà certains ! 

J'espère que ce chapitre vous aura plu et que je ne mettrai pas autant de temps pour poster le prochain ! 

Merci beaucoup de lire cette fiction qui me tient à cœur ! Je vous dis à très bientôt !

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