Chapitre 6

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« Tu ne peux pas m'aider au lieu de rester assise dans ton coin, à lire ton bouquin, râla une voix féminine près d'elle. »

La jeune brunette releva légèrement la tête pour tomber dans le regard brun d'une femme à la chevelure d'or, les bras chargés par des vêtements. L'adulte âgée de vingt-huit ans fixait avec mécontentement la plus petite qui se trouvait posée au sol, dans un coin, tenant dans ses mains un livre à la couverture rouge et noire. 

Ne prêtant pas vraiment attention à ce que son interlocutrice lui disait, elle retourna à sa lecture sans prononcer le moindre mot, ce qui tendit d'agacement la blonde.

« Kana, je te parle, grogna-t-elle en fronçant les sourcils. 

- Et moi je lis, répliqua-t-elle du tac au tac comme si c'était une évidence. Tu me déranges Misha... Est-ce que tu pourrais refermer le rideau, termina-t-elle en la fixant du coin de l'œil. »

Misha Shirotsu était la dirigeante d'une boutique de vêtements, qui était effectivement, la même femme qu'ils avaient rencontrée lors du premier jour. Elle qui pensait s'être débarrassée de ces garnements, un an après ils s'étaient pointés devant la porte de son commerce juste avant l'ouverture, pour après ne plus la lâcher et ce, depuis maintenant quatre ans... 

Si elle avait su que de les rencontrer allait lui apporter une vague de problèmes, elle les aurait chassé avec plus de force de sa boutique. À ce jour, elle était devenue une autre femme par le biais de leurs retrouvailles. En effet, très rapidement ils lui avaient appris qu'ils faisaient partie d'un groupe qui se prénommait les Brebis - nom qui ne lui était pas inconnu -, et sans lui laisser le temps d'assimiler l'information, ils lui avaient demandé - enfin c'était pas réellement une demande mais plus un ordre - de devenir leur informatrice. 

Au départ, elle n'avait pas compris pourquoi ils avaient choisi de l'entraîner là-dedans, puis, la réponse lui vint d'un coup après une phrase de la part d'Akame : "les langues sont bien pendues par ici." En réalité, s'ils l'avaient choisie, c'était parce que sa boutique était à une place stratégique. Elle se situait en ville, proche du pont qui amenait vers le centre-ville de Yokohama. Les personnes qui venaient acheter ses vêtements étaient de tout genre et surtout, adorait parler. Ainsi, elle entendait toutes sortes de choses. De plus, qui se méfierait d'une simple boutiques de fringue ? Elle était la personne parfaite pour agrandir leur réseau d'informations. 

Mais pourquoi avait-elle accepté de les aider ? Tout simplement parce qu'elle n'avait pas senti qu'elle avait le choix. Ces enfants âgés de huit ans étaient réapparu comme le plus grand de ses cauchemars et comme à leur rencontre, ils étaient toujours aussi effrayants - même s'ils étaient maintenant propres et bien habillés. Elle savait que ce jour-ci, elle aurait dû écouter son instinct qui lui soufflait de rester à la maison... 

Cependant, après avoir passé quatre ans avec eux, elle pouvait ressentir de la pitié pour eux. Ils étaient si jeunes et pourtant, ils étaient plongés dans le monde sombre. Privés de jeunesse, obligés de se forger une force pour survivre... Ce n'était pas une vie pour des enfants de leur âge. 

Elle soupira discrètement avant de s'appuyer contre le cadre de la cabine d'essayage, ses prunelles brunes fixant la silhouette assise de la jeune fille. Comment pouvait-elle lire avec ses cheveux qui lui tombait dans les yeux ? 

« Kana, commença-t-elle doucement. 

- Misha, répliqua-t-elle aussitôt sans relever son visage. 

- Arrête de m'appeler par mon prénom. Tu n'as vraiment aucun respect pour tes aînés ? Râla-t-elle en se redressant. 

- À ce que je sache, tu ne m'as jamais appelée par mon nom de famille, releva-t-elle simplement sans s'arrêter dans sa lecture. »

Encore une fois, elle avait perdu à ce duel de paroles. La fillette était aussi douée pour manier les mots que le couteau... Désespérée à l'idée de ne pas pouvoir la faire sortir d'entre ces murs de bois, l'adulte passa sa main sur sa nuque en expirant longuement par la nez. 

« Tu m'expliques pourquoi tu es ici ? La questionna-t-elle finalement. 

- J'attends Chuuya, répondit-elle en tournant une page de son bouquin. 

- Et tu ne pouvais pas faire ça à votre habitation ? Répliqua l'aînée en posant ses mains sur ses hanches. 

- C'est d'un ennui d'être là-bas, laissa-t-elle entendre avec un bâillement forcé. 

- Et donc tu viens traîner dans mes pattes... Bon j'accepte que tu restes ici, mais va lire sur les fauteuils de la boutique, ordonna-t-elle en s'écartant du passage. 

- Pas envie. Veux voir personne. 

- Alors va dans la réserve, proposa-t-elle en commençant à perdre patience. 

- Trop sombre. 

- Va dans mon bureau mais ne touche à rien ! S'exclama-t-elle en serrant ses poings d'agacement. »

Ce fut à ce moment qu'elle parvint à s'attirer les prunelles de la plus jeune sur elle, qui pourtant semblait ne pas vouloir se décrocher de sa lecture. Quelques secondes plus tard - peut-être même trop tard - elle se rendit compte qu'elle venait de donner inconsciemment ce qu'attendait la brunette. Et elle en eut la confirmation lorsqu'elle la vit se remettre habilement sur ses pieds, claquant dans un geste simple les deux parties du livre pour le refermer. Le sourire de malice qui se dessinait sur le coin de ses lèvres la fit rouler des yeux. Encore une fois, elle s'était fait avoir... 

« Merci pour cette proposition plus qu'alléchante, lança Kana sur un ton amusé. 

- File... articula-t-elle fatiguée. »

Un énième soupir s'échappa de la bouche de la vingtenaire qui fixait le dos la brune qui s'éloignait en direction de son bureau. Au moins, elle avait libéré la cabine d'essayage. Sur cette dernière pensée, elle reprit son boulot avec une attitude parfaitement professionnelle. 

Du côté de l'adolescente de douze ans, elle referma la porte après être entrée dans la pièce de treize mètres carrés. Lumineuse de part la grande fenêtre qui prenait plus de la moitié d'un mur, elle était composée du meuble qui donnait son nom, d'une bibliothèque et d'un buffet où se trouvait des petites merveilles alcoolisées. Comment le savait-elle ? Elle avait déjà tout simplement fouillé en compagnie de son partenaire. 

Elle vint s'installer dans le fauteuil en cuir noir, tourna sur elle-même trois fois avant de s'arrêter et de poser ses pieds sur la table en reprenant sa lecture du livre intitulé "L'histoire des divinités du monde entier". Elle avait acheté ce bouquin en espérant trouver des réponses à ses questions, mais malheureusement, depuis qu'elle avait entamé sa lecture, elle n'avait pas beaucoup avancé dans ses recherches. 

Alors qu'elle tournait lentement une page tout en terminant de déchiffrer une ligne en bas, la porte s'ouvrit doucement avant de laisser apparaître une silhouette d'une taille similaire à la sienne, approchant le mètre quarante, une chevelure flamboyante dont les mèches tombaient maintenant sur son front. Le garçon qui venait d'arriver porter ses iris d'acier vers sa camarade avant d'esquisser un sourire en voyant la posture qu'elle avait adopté. Il referma le battant avant de s'adosser contre ce dernier, croisant par la suite ses bras sur son buste. 

« Elle a tenu combien de temps avant de te virer dans son bureau ? Demanda-t-il en se retenant d'avance de rire. 

- Moins de cinq minutes, répondit-elle avec la même expression que lui. C'était presque trop facile. 

- Je parie que je peux faire la faire craquer en une minute, lança-t-il en gardant son rictus rempli de malice. 

- Pari tenu ! Accepta-t-elle en reposant ses pieds sur le sol tout en refermant le livre. »

L'attention du jeune homme fut happée par le bouquin qu'il remarqua enfin. Cette prise de conscience de sa présence effaça son sourire, tandis qu'il se rapprochait de son amie pour lui prendre délicatement l'objet rectangulaire. Cette dernière se laissa faire, observant sa réaction avec minutie et sérieux. Elle le vit feuilleter les pages de l'ouvrage, froncer de temps à autres les sourcils lorsqu'il voyait certaines marquées par la pliure du coin par les soins de la jeune fille aux prunelles émeraude. 

« Je n'ai rien trouvé de vraiment intéressant, lâcha-t-elle finalement, brisant ce silence devenu pesant. Arahabaki reste un véritable mystère que même les livres ne traitent pas... 

- Je vois ça. Ça serait trop simple d'avoir toutes les réponses à nos questions, râla-t-il avant de fixer un passage particulier. C'est qui Lyssa ? Fit-il en relevant la tête. 

-  Une déesse grecque qui représente la rage et la furie, répondit-elle en se rapprochant de lui. 

- Et pourquoi elle t'intéresse ? Elle a un rapport avec Arahabaki ? 

- Quand tu es apparu le premier jour, tu avais détruit dans une rage meurtrière plus de la moitié de Suribachi. Même si ce n'est pas la divinité que nous cherchons, peut-être qu'elle s'en rapproche ou bien qu'elle ne possède pas le même nom, expliqua-t-elle en regardant par dessus son épaule la page concernée. 

- Il est dit que lorsque sa colère se transforme en rage, elle perd le contrôle et devient avide de sang, fit-il remarquer en traçant de l'index la phrase. Ça ne me ressemble pas ça... 

- Ce n'est pas pour ça que j'ai gardé cette page. C'est surtout ça qui m'a intriguée... Finit-elle en pointant du doigt un autre passage. 

- "La déesse de la rage et de la furie se retrouve souvent dans d'autres écrits, sous une autre apparence et parfois, aux côtés d'une autre entité qui se rapproche de son goût pour le sang et le chaos qu'il crée sur son passage", lit-il avant d'écarquiller les yeux. Tu crois qu'ils parlent d'Arahabaki ?! 

- Les seules informations qu'on a sur lui pour l'instant, c'est que c'est l'incarnation du Chaos. Alors, on peut supposer qu'ils parlent de lui, laissa-t-elle entendre en haussant les épaules. »

Alors que le rouquin ouvrait la bouche pour répondre à sa partenaire, la porte du bureau s'ouvrit à la volée sur la gérante de la boutique dont les lèvres rosées étaient tordues en une grimace d'agacement. 

« Qu'est-ce que vous fichez tous les deux dans mon bureau ?! S'écria-t-elle avant de les choper par le bras et de les sortir de la pièce. »

Les deux adolescents se laissèrent traîner hors de la salle, une lueur d'amusement brillant dans leur regard, sachant que le pari allait pouvoir commencer.  Alors qu'ils se faisaient entraîner vers le hall d'entrée, Kana releva la manche de sa veste pour découvrir la petite montre qui décorait son poignet, et surtout chronométrer son ami. 

« Tu vas nous virer de la boutique comme ça Misha ? Fit Chuuya sur un ton faussement offusqué. 

- D'une, arrêtez de m'appeler par mon prénom. De deux, je n'ai pas signé pour vous avoir dans les pattes toute la journée, répliqua-t-elle en lâchant finalement leur bras. Maintenant laissez-moi travailler tranquillement... 

- Mais on est bien ici, rétorqua-t-il en feintant l'innocence. 

- Dehors Chuuya, dit-elle en pointant la porte du doigt. 

- Tu es vraiment sans cœur Misha. Je plains l'homme qui voudra vivre avoir toi... C'est peut-être pour ça que tu es encore célibataire à vingt-huit ans, termina-t-il avec un sourire en coin. »

Le rouquin sentit un frisson se propager dans tout son corps lorsque les prunelles brunes de l'adulte se posèrent sur lui, dans un regard parfaitement meurtrier. Pour l'avoir énervée, il l'avait bien fait. En quelques secondes, elle l'agrippa par le col de sa veste et le tira vers la sortie, faisant littéralement traîner ses talons sur le parquet. Une fois dehors, elle le relâcha et se tourna vivement vers la seconde enfant. Cette dernière leva les mains en l'air en signe d'abandon, se dirigeant par elle-même vers la porte. 

« J'espère que la prochaine fois vous aurez appris le respect ! Et Kana ! Cache mieux ton couteau ! Cria-t-elle en abaissant le bas de son sweat sur l'arme qu'elle gardait au creux de ses reins. »

Suite à ses paroles, elle fit claquer le battant. Nakahara grimaça au son désagréable qui vint vriller dans ses oreilles, tandis que sa partenaire gardait un air parfaitement neutre. Ils attendirent quelques secondes avant de se tourner l'un vers l'autre, un sourire amusé prenant place sur ses lèvres. 

« Combien ? Demanda le roux avec impatience. 

- Une minute et vingt secondes. Tu as perdu ! 

- Non... J'y étais presque ! Se plaignit-il en passant ses mains dans sa chevelure de feu. 

- En tout cas, sa réaction était épique ! Attends-toi à recevoir son courroux la prochaine fois, tu as tout de même osé remettre sur le tapis son célibat, termina-t-elle en lui donnant gentiment un coup sur l'épaule. 

- Même pas peur, plaisanta-t-il. Bon, tu as gagné le pari. Qu'est-ce que je te dois ? 

- Ton dessert. 

- Quoi ?! Oh non ! Tout sauf ça ! Je refuse ! S'exclama-t-il en écarquillant les yeux. 

- Tu n'es pas en mesure de refuser, c'est toi qui a lancé le pari, répliqua-t-elle malicieusement. En plus, je crois que ce soir c'est... fraisier, non ? Lâcha-t-elle en faisant mine de réfléchir. 

- Oui... Tu sais que j'adore ça ... Je t'en supplie... 

- C'est encore mieux quand tu me supplies ! Rit-elle. Ta part sera encore plus délicieuse ! »

Estomaqué par ses paroles, il la regarda partir en courant avant de reprendre ses esprits et tenter de la rattraper - sans utiliser son pouvoir bien sûr. Lorsqu'il la rattrapa aux alentours de la base des Brebis, la jeune fille avait retrouvé son sérieux et fixait le reste de chemin qui leur restait avec gravité. Chuuya n'était pas idiot, même si elle ne le disait pas, il savait qu'elle n'appréciait pas - mais ne détestait pas pour autant - ce groupe qui les avait recueillis. 

Et il savait que ce qu'il allait devoir lui annoncer n'allait pas lui plaire... 

« Kana, l'interpella-t-il doucement. Il faut que je te prévienne que Laito veut nous voir, avoua-t-il en évitant de la regarder. »

Elle se stoppa d'un coup dans sa marche et il manqua de la percuter, ne s'attendant pas à un geste aussi prompt de sa part. Décidé à comprendre ce qu'elle ressentait, il zieuta dans les moindres détails les traits de son faciès. Seulement, comme à son habitude, on ne pouvait rien y lire. 

Akame ne montrait jamais ses sentiments. Le seul privilégié à pouvoir voir de la joie - donc un sourire - sur son visage, c'était lui et personne d'autre. Les membres des Brebis chuchotaient souvent sur sa capacité à rester neutre, et même disaient qu'elle était morte de l'intérieur, tant elle ne laissait entrevoir aucune émotion. 

À ce moment-là, il aurait aimé qu'elle laisse libre court à ces derniers. Il s'en fichait qu'elle se mette en colère, tant qu'il pouvait comprendre à quoi elle pensait là. 

« Très bien, lâcha-t-elle d'un coup, le faisant sursauter de surprise. Je vais déposer mon livre dans notre chambre, et je vous rejoins, annonça-t-elle avant de se remettre en route. »

Le rouquin la regarda s'éloigner sans trop savoir comment interpréter la situation. Dans un soupir de consternation, il se remit à son tour en marche. Il entra dans le petit bâtiment composé d'un rez-de-chaussée et d'un étage seulement, et gravit les marches pour par la suite se rapprocher du bureau du leader du groupe. 

Il frappa deux coups au battant se trouvant devant lui, annonça sa présence par un simple "c'est moi" avant d'attendre qu'on l'autorise à pénétrer dans la pièce. Ce qui arriva rapidement. 

Délicatement, il abaissa la poignée avant d'entrer dans l'espace entre ses quatre murs, apercevant la seconde suivante le noiraud à la queue de cheval en train d'écrire quelque chose sur une feuille. Il le vit plier le papier avec minutie avant de le glisser dans une enveloppe parfaitement blanche et d'y inscrire quelques mots. 

« Tu es tout seul ? Remarqua l'aîné en arquant un sourcil. 

- Kana va arriver. Elle passe par notre chambre avant, expliqua-t-il en croisant docilement ses bras derrière son dos. 

- Bien. Alors je vais profiter de son absence pour te parler d'une chose... »

Le jeune Nakahara fut étonné par ses mots prononcés comme si quelque chose de fatidique allait se passer. Il avait l'habitude de rester en compagnie de Laito, de faire des missions à ses côtés, au plus grand désespoir de la brunette qui se plaignait qu'il essaye de les séparer. Chuuya appréciait l'homme qui était devenu un adulte depuis le temps. Il leur avait sauvé la vie comme il l'avait promis et il lui en était reconnaissant. C'était pour cette raison qu'il exécutait tout ce qu'il pouvait lui demander, sans rien dire, sans protester. 

Mais, le roux pouvait aussi affirmer qu'il apprenait beaucoup de choses aux côtés du noiraud. Lui qui était un jeune garçon en quête de savoirs, en quête de compréhension sur lui-même, il absorbait les paroles de son aîné avec avidité. 

« La Mafia Portuaire devient de plus en plus dangereuse et nos missions, de ce fait, plus périlleuses, commença-t-il gravement. À tout moment, je risque de ne pas rentrer vivant et je pense qu'il est temps que j'assure la prospérité éternelle de notre groupe. 

- Tu parles comme si tu allais mourir demain. Les Brebis ne peuvent survivre si tu n'es pas là Laito, répliqua le plus jeune en fronçant les sourcils. 

- Bien sûr que si elle survivra. Parce que j'ai trouvé qui sera capable de les guider convenablement et les protéger de nos ennemis, assura-t-il avec un léger sourire. Et cette personne, c'est toi. »

Le cœur de l'incarnation de la colère d'Arahabaki se serra à l'entente de sa déclaration. Ses muscles se tendirent tandis qu'il assimilait avec effroi ce qu'il venait de dire, et sans pouvoir s'en empêcher, il se rapprocha du bureau de son leader pour venir y plaquer bruyamment ses paumes. 

« Je ne peux pas m'occuper d'eux ! S'exclama-t-il plus par peur de décevoir que par colère. 

- Je t'en sens tout à fait capable Chuuya. Je porte en toi tout ma confiance, peut-être même plus que le membre qui m'a toujours accompagné depuis la création de ce groupe, dit-il gentiment. 

- Je n'ai que douze ans ! Je ne suis pas ... 

- Je n'ai jamais dit que cela serait pour aujourd'hui, rigola-t-il en le coupant dans sa phrase. Je voulais juste te prévenir que je te voyais comme mon successeur et que s'il m'arrivait quelque chose de fatidique... Cette lettre que je viens d'écrire fera de toi le Roi des Brebis, termina-t-il plus sombrement en montrant l'enveloppe qu'il tenait entre ses doigts. »

Chuuya observait l'objet rectangulaire comme si c'était une malédiction. Il ne voulait pas de telles responsabilités sur ses épaules, il ne se sentait pas du tout prêt à guider des brebis égarées... 

« Chuuya, tu ne seras pas seul. Tu sais que tu pourras toujours compter sur Kana pour t'épauler, souleva l'aîné avec un sourire en coin. Mais ne t'inquiète pas, je n'ai pas l'intention de mour... 

- T'es encore en train de lui retourner le cerveau ? Intervint une voix extrêmement froide. »

La discussion cessa aussitôt avec l'apparition fracassante - de part la porte qui vint s'éclater contre le mur - de la brunette. Cette dernière releva les mèches qui lui tombaient devant les yeux, afin que son regard émeraude particulièrement intimidant soit bien visible. Elle avait l'habitude de faire ça quand elle se trouvait avec Laito, afin de pouvoir le déstabiliser à tout moment. Parfois cela fonctionnait et parfois non, à son plus grand mécontentement. 

« Kana, ravi de te voir, lança joyeusement le leader. 

- Un plaisir non partagé, répliqua-t-elle dans un soupir. 

- Kana, chuchota son ami en faisant les gros yeux. »

Cette dernière l'ignora complètement. Ici, dans cette pièce, tout le monde savait qu'elle ne portait pas le noiraud dans son cœur. Alors que lui la respectait et faisant en sorte qu'elle se sente bien, ce n'était pas du tout le cas dans le sens contraire. Toujours à désobéir, à faire la sourde oreille quand il lui demandait un service, à l'envoyer bouler quand il lui proposait de lire un livre qu'il avait apprécié - sachant qu'elle partageait la même passion que lui pour la lecture -, Kana était invivable en sa compagnie. Et bien sûr, le fait qu'elle ne montre aucune émotion laissait penser que ses actions étaient parfaitement innocentes... 

« Tu ne veux pas le laisser tranquille un peu ? Reprit-elle en venant s'adosser contre le mur. Il enchaîne les missions et n'a pas le temps pour se reposer convenablement. 

- Désolé ma chère, mais la Mafia Portuaire s'étend trop rapidement, argumenta-t-il avec un sourire peiné. Bientôt, vous aurez le droit à des jours de repos bien mérités. 

- Ha, rit-elle faussement. Comme si t'allait te priver de la lourdeur pendant quelques jours, continua-t-elle avec un sourire qui n'annonçait rien de bon. »

Chuuya ne grimaça pas parce qu'elle avait encore utilisé ce surnom de son pouvoir qui l'horripilait, mais parce qu'il savait que si Akama souriait à une autre personne que lui, ce n'était pas par joie. En temps normal, un rictus se dessinait sur ses lèvres lorsqu'elle se trouvait face à ses ennemis... Qu'elle réduisait au silence en une fraction de seconde par la suite. 

« Ka... Tenta-t-il de l'appeler pour apaiser les tensions. 

- Vas-y. Dis-nous ce que tu nous veux, le coupa-t-elle en s'adressant à leur chef. 

- En vérité, je ne vous veux rien. Je souhaitais juste vous transmettre des informations sur ce que vous cherchez en ce moment. Un lieu où vous pourrez trouver des informations sur Arahabaki, les informa-t-il en ouvrant un tiroir de son bureau. 

- Quoi... tilta-t-elle, son sourcil tressautant sans qu'elle puisse le retenir. Tu lui as parlé de nos recherches ? S'adressa-t-elle soudainement à son compagnon, les iris plus glacials que jamais. 

- Pas du tout ! Enfin... J'ai juste dit qu'on faisait des recherches dessus, mais je n'ai pas expliqué pourquoi, se justifia le rouquin en se préparant à recevoir un soufflon de la part de son amie. 

- Je n'y crois pas... Ce sont nos recherches. Elles ne concernent que nous et tu lui en parles, fit-elle si bas qu'il dut tendre l'oreille pour l'entendre. 

- Kana. Il ne m'en a pas parlé en détails. De plus, je n'interfère pas dans vos recherches, je veux juste ... intervint doucement le jeune homme aux cheveux noirs. 

- Toi, mêle-toi de tes affaires, trancha-t-elle sèchement. Je sais ce que tu essayes de faire et ça ne marchera pas. Tu n'arriveras pas à nous séparer, termina-t-elle sur le même ton. 

- Tu te trompes ma chère. Je n'y gagnerai rien à vous séparer alors que vous êtes tous les deux mes éléments les plus prodigieux, répliqua dans un petit rire. 

- Kana, ça suffit, essaya vainement à nouveau son compagnon. 

- Arrête d'essayer de nous manipuler. Chuuya a peut-être baissé sa garde, mais ce n'est pas mon cas... L'ignora-t-elle royalement. 

- Kana arrête ! S'écria soudainement le concerné. Laito a des informations pour nous, on peut peut-être enfin avancer dans nos recherches ! Alors maintenant, on va l'écouter, imposa-t-il en serrant les poings d'agacement. »

Les yeux de la jeune fille s'écarquillèrent légèrement face au haussement de ton de son ami. C'était bien rare qu'il le fasse sur elle - parce qu'il était connu pour sauver gueuler - alors, elle savait qu'elle devait se stopper là et ne plus rien dire. Ce qu'elle fit en baissant la tête et en évitant ses prunelles d'acier, qui pourtant avaient rapidement récupéré leur douceur en voyant qu'elle s'était calmée. 

Le rouquin se tourna alors vers leur leader et lui fit signe de continuer, attendant avec impatience qu'il lui donne l'adresse de ce fameux endroit qui renfermerait apparemment des secrets sur sa mystérieuse apparition dans ce monde. 

« D'après certaines sources, des écrits sur Arahabaki se trouveraient dans un quartier de Yokohama, plus précisément, les ruines d'une ancienne maison, expliqua-t-il en se levant de sa chaise. 

- Avons-nous l'autorisation de nous y rendre ? Demanda poliment Chuuya, impatient de partir maintenant. 

- Bien sûr. J'allais d'ailleurs vous accompagner, lâcha-t-il avec un sourire. »

Contre toute attente, Kana ne refusa pas. Elle se contenta de lâcher un simple "fais ce que tu veux" avant de quitter le bureau. En vérité, elle avait compris dès le début que c'était son intention première de les suivre. Seul un idiot aurait pu ne pas s'en rendre compte. Un idiot du nom de Chuuya Nakahara... 

Les dents serrées de colère, elle avançait dans les couloirs avant de descendre le petit escalier en bois et de quitter l'habitation. Elle savait qu'ils allaient la rejoindre rapidement. Comme elle s'y attendait, ils apparurent quelques minutes après et ensemble, ils se mirent en route. 

════ ∘◦❁◦∘ ════

« Est-ce que maintenant tu te rends compte qu'il te manipule ? Chuchota Kana en attrapant par la manche son partenaire, le faisant ralentir pour qu'ils puissent parler tranquillement. 

- Ça fait une heure qu'on marche et ce n'est que maintenant que tu t'exprimes ? Souffla-t-il. Tu as passé tout ce temps à ruminer dans ton coin ? 

- Contrairement à toi, je fais travailler mon cerveau, répliqua-t-elle en fronçant les sourcils. 

- Faut vraiment que tu arrêtes de le suspecter de nous vouloir du mal. Il nous a sauvé la vie Kana, tu ne peux pas lui être reconnaissante un peu ? 

- Il ne m'a pas sauvé la vie. C'est ce médecin qui m'a sauvée et pas lui. Lui, il s'est juste servi de ma maladie pour te faire du chantage afin que tu rejoignes ses rangs, argumenta-t-elle froidement. 

- Tu n'as pas tout à fait tort, mais il nous a tout de même sauvé la vie. On mange tous les jours à notre faim, on dort dans un lit, on peut prendre une douche chaude tous les jours. Ce luxe, on ne l'aurait pas sans son aide ! Termina-t-il avec conviction. 

- Il se sert de la lourdeur, Chuuya. 

- Non, il m'apprend à m'en servir correctement. C'est-à-dire en venant en aide à nos membres, rectifia-t-il en fronçant les sourcils. 

- Les Brebis. Un groupe de mineurs qui se serrent les coudes... Il n'est même plus mineur depuis longtemps ! 

- On s'en fout ! C'est lui qui a créé les Brebis ! 

- Tu sais quoi. Puisque tu l'aimes tant que ça ton Laito au point de vouloir partager ton histoire concernant Arahabaki, chose en passant qui ne concernait que nous au départ, et bien je te laisse avec lui, déclara-t-elle avant de lui tourner le dos. 

- Kana ! Attends, c'est idiot comme réaction... Kana ? »

Elle s'était figée sur place, les iris fixant au loin quelque chose. Le rouquin ne comprenait pas ce qui lui prenait et lorsqu'il se rapprocha d'elle - suivi de Laito qui s'était rendu compte qu'ils s'étaient arrêtés - il constata qu'elle semblait réfléchir. 

« Kana ? Ça va ? Question l'adolescent en posant sa main sur son épaule. 

- Je connais cet endroit... murmura-t-elle pensivement. Je... je suis déjà venue ici, il y a longtemps. »

Alors qu'elle fouillait sa mémoire pour savoir pourquoi elle avait ce sentiment de déjà-vu, elle finit par réaliser. Son cœur fit un bond contre sa cage thoracique. Elle se souvenait. 

Sans rien dire aux autres, elle s'élança dans une direction, ignorant les cris de son partenaire dans son dos. 

« Suivons-la Chuuya ! Elle se dirige exactement où on doit se rendre ! Le prévint Laito en se mettant à courir. 

- Quoi ?! »

Elle avait l'impression que ses veines brûlaient d'un feu impossible à voir à l'œil nu. Pourquoi avait-elle peur ? Pourquoi appréhendait-elle la vision qu'elle aurait très bientôt ? Habilement, elle glissa sur les graviers tout en changeant de direction, prenant un tournant sec dans une nouvelle rue. Peu de temps après, elle arriva à destination. Devant elle s'étendait un grand portail ouvert, qui cachait derrière une immense propriété naturelle et surtout, un amas gigantesque de bois calciné et de cendres. 

Les respirations éreintées de ses compagnons de voyage se firent entendre dans son dos, mais elle les ignora, posant simplement sa main sur la séparation métallique qui ne protégeait plus les terres présentes ici. Nakahara observa les alentours avec surprise, ne comprenant pas comment leurs pas avaient pu les amener ici et comment, Kana avait pu connaître cet endroit assez reculé dans le quartier. Les voisins se faisaient rares ici. 

Tout en soupirant longuement, il s'approcha de la boîte aux lettres figée dans le mur de pierre, puis passa son pouce sur les écritures gravées pour essayer de voir qui vivait dans cette demeure détruite par les flammes. Il sentit une sueur froide dégouliner dans son dos lorsqu'il déchiffra les lettres : Suho Akame et Émilia Leblanc Akame. 

Pris d'une soudaine d'inquiétude, il voulut retrouver la brunette qui devait être plongée dans des souvenirs sombres, mais il ne la trouva pas à côté d'eux. Elle était déjà entrée et s'avançait vers les décombres d'un pas assuré. 

« C'était chez elle, c'est ça ? Le questionna calmement Laito. 

- Je crois... »

Sur ces deux mots, il s'engagea à son tour sur le chemin de terre pour aller retrouver son amie. Les mains plantées dans les poches de sa veste, il détaillait avec attention le paysage qui l'entourait, essayant sans pouvoir s'en empêcher de s'y imaginer avec la famille Akame. Cela aurait été une vie paisible, il en était certain... 

Il retrouva la jeune fille agenouillée à l'endroit où devait se trouver le porche, en train de caresser un chat tricolore avec un maigre sourire. Il s'approcha d'elle sans dire un mot et s'agenouilla à ses côtés, attendant qu'elle prenne la parole la première. Mais voyant qu'elle ne montrait aucune réaction, il ouvrit la bouche pour la questionner : 

« Comment tu te sens ? Demanda-t-il en venant glisser une mèche de cheveux brune derrière son oreille. 

- Comme une inconnue qui recherche ses souvenirs sur les décombres du passé d'une autre, murmura-t-elle sans arrêter de flatter le pelage de l'animal. Mais je vais bien, ne t'inquiète pas pour moi, ajouta-t-elle avec un petit sourire. »

Mais il n'arrivait pas à la croire. Comment pouvait-elle aller bien en revenant là où tout s'était terminé ? Il voulait bien croire qu'elle était forte mentalement, bien plus forte que lui, mais là il ne pouvait pas la croire. Pourtant, elle ne montrait aucune trace de tristesse, de regret ou bien de colère. Comme à son habitude, elle laissait le néant habiter son regard. 

« C'est ici que nous trouverons des réponses sur l'histoire d'Arahabaki, intervint le leader des Brebis en s'approchant d'eux. 

- Tu te trompes. Mes parents ne travaillaient pas sur les divinités, réfuta-t-elle en se redressant, s'attirant un miaulement de mécontentement du félin. 

- Tu es certaine ? Ne le prends pas mal mais tu sembles être séparée d'eux depuis longtemps, fit-il en retour en croisant les bras sur son buste. 

- Cela fait peut-être six ans que je ne les ai pas vus, mais mes souvenirs sont intacts. Petite, je ne connaissais pas le nom de leur métier, mais maintenant je peux les spécifier. Ma mère était biologiste et mon père astrophysicien, termina-t-elle avec certitude. Alors, je ne sais pas d'où tu tiens tes informations mais ils se sont plantés. Et... »

Elle se coupa elle-même dans sa phrase, ses sourcils se fronçant tout d'un coup tandis qu'elle laissait ses prunelles émeraude parcourir l'horizon. Très rapidement, elle reporta son attention sur l'aîné avec un sérieux à faire pâlir n'importe qui, tant son regard était gelé. 

« D'où tiens-tu ces informations ? Demanda-t-elle sèchement. 

- Je te les dis, de mes informateurs. Cependant, je ne sais pas d'où ils les tiennent, répondit-il sincèrement. »

Elle sentit tout son système sanguin se refroidir d'un coup alors que son cœur ratait un battement. Vivement, elle se tourna vers son partenaire et se jeta sur lui, le plaquant au sol tandis qu'un coup de feu résonnait autour d'eux. Une fraction de seconde suivante, elle se redressait et tout en tenant son couteau fétiche entre ses mains, elle observait les alentours maintenant empiétés par la présence d'hommes armées, vêtus de vêtements de combat - gilet par balles, habits de camouflage, etc. - et un être masculin qui se détachait du groupe. 

Ce fut sur lui qu'elle se concentra. C'était un homme d'une grande taille, fin dans son costume taillé à la perfection aux couleurs crèmes. Ses épaules drapées de sa veste de costard dont il n'avait pas enfilé les manches, lui donnait une apparence autoritaire. Ses longs cheveux blonds réunis en une couette basse par un nœud bordeaux, ses yeux d'un bleu perçant, sa peau d'un blanc d'ivoire, il n'était pas japonais et ça, elle en avait la certitude. 

« Mais qui voilà. Le petit oisillon égaré est finalement retourné à son nid ? Lança l'inconnu dans un rire mesquin. 

- T'es qui ? Grinça des dents Chuuya qui s'était remis sur ses pieds. 

- Pardonnez-moi mon manque de civilité, je m'appelle Alexandre. Alexandre Dumas et je fais partie d'une organisation qui se prénomme Pandora, fit-il avec une courbette exagérée. 

- Pandora ? Répéta Laito en fronçant les sourcils. Je n'ai jamais entendu parler de vous. 

- C'est normal. Nous sommes une organisation qui agit dans l'ombre, dont l'unique but est de trouver l'être suprême en ouvrant la boîte de Pandore, expliqua-t-il. Votre très chère amie ici présente, nous a déjà rencontré par le passé. C'est d'ailleurs une bonne surprise, mais surtout agréable, de voir que tu as survécu... Akame, termina-t-il malicieusement. 

- Où sont mes parents ? Que leur avez-vous fait ? Lâcha soudainement la concernée, sur un ton étrangement calme. 

- Aucune idée. Il y a tellement de scientifiques dans notre organisation, je n'en croise même pas un dixième ! Rigola-t-il. Après, j'ai entendu dire que beaucoup d'entre eux qui avaient perdus leur enfant... s'étaient suicidés, finit-il avec un rictus malveillant. »

Son sang ne fit qu'un tour dans ses veines et sans que ses compagnons ne s'y attendent, elle s'élança vers l'homme en serrant fortement dans sa main le manche de l'arme blanche. Étrangement, aucun de ses subordonnés ne fit de mouvement pour le protéger, laissant l'adolescente s'approcher dangereusement de leur supérieur. Même ce dernier semblait serein et ce fut à ce moment que Nakahara comprit qu'il était doté d'une chose que le rendait dangereux par rapport à son amie. Une capacité surnaturelle. 

Malheureusement pour lui, il ne s'en rendit compte que trop tard. Kana se trouvait déjà proche de son adversaire, et alors qu'elle s'apprêtait à abattre sa lame sur son buste, il la repoussa simplement d'un coup plat de sa paume au niveau de son cœur. Pourtant, cela l'envoya valser quelques mètres plus loin, et cela aurait été plus si son partenaire ne l'avait pas rattrapée. 

« Kana ! Tu vas bien ? S'inquiéta ce dernier en la détaillant du regard avec attention. »

Elle répondit positivement d'un hochement de tête et se redressa avec l'aide du rouquin. Ce Alexandre avait mis tant de force dans un coup qui paraissait pourtant anodin... Quel était son pouvoir ? 

« Je dois t'avouer Akame, que je m'attendais particulièrement à ce que tu tentes cela, ricana le blond. Et pour information, j'ai l'intention de te ramener à Pandora. 

- Moi ? Et pourquoi donc ? Laissa-t-elle entendre en arquant un sourcil. 

- Parce que tu as les gènes neurologiques de tes brillants parents. Nous sommes certains que tu pourras apporter des choses à notre organisation. 

- Ça sent le mensonge à plein nez. Dites-moi réellement ce que vous me voulez, répliqua-t-elle dans un soupir. 

- Démasqué ! Et bien... C'est un secret, termina-t-il avec amusement. 

- Tu peux tout de suite oublier ! Intervint soudainement Laito. »

Il sortit rapidement une arme à feu de son étui se trouvant au creux de ses reins et visa aussitôt l'homme avant de lui tirer dessus. La balle ne frôla que partiellement sa joue, écorchant cette dernière sur son passage sans installer une expression de peur sur le faciès de ce dernier. Cependant, une plainte s'éleva par la suite. Celui d'Akame. 

Elle venait de ressentir une vive douleur au niveau de sa pommette et la surprise avait alors emporté sa voix. Du bout des doigts, elle vint toucher sa peau et découvrit ces derniers écarlates. Elle saignait sans raison. En voyant ça, Chuuya fronça les sourcils et activa aussitôt son pouvoir, voulant protéger son amie. Seulement, ce fut à ce moment que les soldats se mirent à bouger et à les viser de leurs armes. 

« Chuuya, occupe-toi d'eux avec Laito. Je me charge de Dumas, annonça la brunette en posant sa main sur son épaule. 

- Mais il a un pouvoir, refusa-t-il de la laisser seule. 

- Si ma déduction est bonne, son pouvoir permet de relier deux vies entre elles. Ainsi, si on le blesse, l'autre l'est tout autant, expliqua-t-elle posément. 

- Donc on ne pourra pas le tuer... 

- Si tu en as marre de moi, c'est l'occasion pour te débarrasser de moi, plaisanta-t-elle avec un sourire en coin. 

- Pourquoi tu te mets toujours à plaisanter lorsqu'on est tous les deux en galères, râla-t-il en roulant des yeux. 

- Parce que tant que je te sais à mes côtés, je ne crains rien, répondit-elle avec sérieux. Je pense que je peux trouver un moyen de contrer son pouvoir et le faire annuler son lien avec moi. Tu me fais confiance ? »

La question ne se posait pas. Il pouvait la suivre les yeux fermer, lui donner sa vie. D'un hochement de tête, il lui fit comprendre qu'il allait faire ce qu'elle lui demandait, puis il partit prêter mains fortes au leader des Brebis. De son côté, Kana porta ses iris verts vers son adversaire qui patientait calmement. 

Elle n'avait que des hypothèses sur son pouvoir, elle devait en apprendre plus et le comprendre, avant de pouvoir mettre une stratégie en place. Décidée à lui faire mordre la poussière, un sourire d'amusement étira ses lèvres tandis que Dumas semblait surpris par cette réaction de sa part. Méfiant sur ce qu'elle manigançait, il écarquilla tout de même les yeux lorsqu'il la vit s'élancer à nouveau vers lui, plus rapide que précédemment et surtout, son aura meurtrière plus percutante. 

« Tu ne peux rien contre moi Akame, fit-il en évitant un coup de sa part. Tu le sais. »

Elle ne répliqua rien à cela, feintant vouloir lui écorcher le buste alors qu'en réalité, elle s'attaqua à sa cuisse gauche. Un sifflement de douleur s'échappa de ses badigoinces sans pour autant qu'elle ne se stoppe dans ses attaques. Les coupures se succédèrent, laissant le sang s'étaler sur les vêtements des deux individus et seulement une expression de souffrance sur un faciès. 

Et elle comprit le poing faible de son adversaire. 

« Décidément, votre pouvoir est ridicule, déclara-t-elle avec un sourire en coin. 

- Dit celle qui souffre à mort, ricana-t-il. 

- Peut-être mais j'ai trouvé la faille, finit-elle sombrement. »

Et pour prouver ses dires, elle planta son couteau dans son propre avant-bras gauche sans aucune hésitation. Et elle ne ressentit rien, au contraire d'Alexandre qui hurla soudainement sa douleur. 

« Le transfert de douleur. Nos vies sont peut-être reliées mais la souffrance est transférée à l'autre par le lien tissé par votre pouvoir. Et pour vous lier à quelqu'un, vous avez besoin de frapper du plat de votre paume son cœur. Ainsi, vous garantissez votre survie puisque personne n'est capable de mettre fin à sa propre vie, dit-elle en faisant tournoyer entre ses doigts son poignard. 

- C'est pour ça que tu continuais à m'attaquer, même si tu souffrais... grogna-t-il en se tenant le bras sanguinolant. 

- Vous pensez vraiment que j'aime avoir mal ? Ricana-t-elle. 

- Comment as-tu compris que c'était équivalent pour toi ? Le fait de ne pas ressentir tes propres blessures ? Demanda-t-il en fronçant les sourcils. 

- Je vais vous exposer mon raisonnement avec un petit schéma. Prenez par exemple un pont. Nous construisons des ponts pour pouvoir joindre deux rives. Même si ce n'est que pour pouvoir aller dans un sens, ce pont peut servir pour revenir sur nos pas, et en aucun cas, il ne change de forme. Ce pont, c'est notre lien. Il est identique mais surtout équivalent. Un aveugle aurait pu comprendre cela, je suis juste déçue d'avoir mis tant de temps pour m'en rendre compte, termina-t-elle dans un soupir. 

- Personne n'avait réussi à comprendre le fonctionnement de mon pouvoir ! 

- Sûrement parce que personne n'avait osé se blesser soi-même. Malheureusement, vous vous êtes attaqué à la mauvaise personne et je vais... vous tuer. 

- Ne te pense pas victorieuse Akame. Je n'ai pas dit mon dernier mot... »

Sur ces dernières paroles, il s'écarta rapidement de quelques pas avant de tirer de l'intérieur de sa veste une arme à feu qu'il pointa dans une direction autre que celle de la jeune fille. Kana comprit qu'il était en train de viser Chuuya qui se battait contre plusieurs soldats, inconscient du danger qui le guettait. 

« Chuuya ! »

Interpellé par la voix de sa partenaire, il pivota vivement vers elle avant d'écarquiller les yeux. Il ne comprenait pas pourquoi elle l'avait appelé, cependant, ce qu'il vit le terrifia. Dumas avait son arme pointée vers le crâne de la brunette qui ne semblait pas s'en rendre compte, trop préoccupée à prévenir le rouquin d'un danger qui n'existait pas en réalité. 

La peur s'étendit comme un poison dans ses veines. Et si leur adversaire avait arrêté son pouvoir et donc pouvait tuer l'adolescente sans risquer sa propre vie ? Cette pensée parasita soudainement son contrôle sur la lourdeur et une colère immense s'empara de son frêle corps. Peu de temps après, la raison s'effaça, ne laissant que rage et chaos. 

De l'extérieur, toutes les personnes appartenant à l'organisation Pandora se figèrent avant de sentir leur corps s'alourdir douloureusement et s'enfoncer dans le sol avec brutalité. Kana, surprise par cela observa son ami et découvrit pour la première fois des tatouages sombres s'étendre sur son corps, tandis que ses pupilles laissaient place qu'à un regard vide et fou. 

Peu après, des sphères pourpres se formèrent à ses paumes et sans hésitation, il les jeta sur ses adversaires qui alors, disparurent complètement. Stupéfaite par une telle capacité, la brunette comprit que quelque chose n'allait pas. Arahabaki était de retour et il faisait un carnage. 

« Chuuya ! Chuuya calme-toi ! S'écria-t-elle en se rapprochant de lui effrayé par l'état second qui l'avait pris. »

Nakahara se tourna vers elle, ses yeux dénués d'iris la fixant sans lucidité et simplement envie de meurtre. Il se figea quelques secondes et elle crut qu'il allait reprendre ses esprits. Seulement, elle avait tort. Un sourire carnassier habilla ses lèvres tandis que son pouvoir destructeur reprenait de l'ampleur, prêt à s'abattre sur la jeune fille. 

« Kana ! S'écria une voix. »

Elle se sentit percutée et tomba durement sur le dos, son souffle se coupant sous la chute. Lorsqu'elle rouvrit ses paupières, elle croisa le regard sombre de Laito avant qu'il ne disparaisse d'un coup, sous l'attaque dévastatrice de Chuuya. 

Elle n'en revenait pas. Il... Il venait de lui sauver la vie... Mais surtout, il était mort. N'ayant pas le temps de ressentir quoi que ce soit, elle se remit sur ses pieds et tenta de faire un pas vers son ami mais elle se sentit retenue par le poignet. 

« Ne pense même pas à aller le voir ! Articula froidement Dumas en la tirant vers lui. 

- C'est votre faute tout ça ! Vous l'avez fait perdre le contrôle ! 

- Tu vas te faire tuer si tu te rapproches de lui ! 

- Ce qui vous fait peur, c'est que vous mourriez avec moi, répliqua-t-elle en retirant sèchement son bras de son emprise. Retirez votre pouvoir sur moi ! 

- Non, tu vas m'accompagner à Pandora, refusa-t-il. 

- Je m'y attendais, soupira-t-elle. » 

Elle devait gérer deux problèmes en même temps et ça, ça ne l'arrangeait pas... Elle prit une grande inspiration avant de serrer plus fortement le manche de son couteau dans sa main, se rendant compte que le corps de Chuuya s'affaiblissait en voyant les traînées de sang sur son visage. Elle n'avait pas le droit d'hésiter. 

Rapidement, elle exécuta un geste qui fit hurler de douleur Alexandre, lorsqu'elle enfonça sa lame dans son propre abdomen dans l'intention de le clouer sur place. Ne sentant pas de souffrance, simplement le liquide chaud du sang couleur sur son ventre, elle s'élança vers son ami avant de le prendre dans ses bras, ignorant qu'à tout moment, elle pouvait mourir. 

« Kana ! Hurla le blond. 

- Retirez votre pouvoir ou mourez avec moi ! Ordonna-t-elle en serrant fortement le rouquin contre elle. »

Elle voyait la main de ce dernier se rapprocher fatidiquement d'elle. Elle resta droite, ne relâchant pas la force qu'elle appliquait dans cette étreinte, pas désespérée mais se voulant réconfortante. Ce fut que lorsqu'elle sentit son corps souffrir de ses blessures qu'elle comprit que le lien avait été brisé. Maintenant, elle devait ramener son partenaire parmi eux... 

« Chuuya... C'est moi... fit-elle en enfouissant son visage dans son cou. Reprends-toi, je t'en prie... Ne laisse pas Arahabaki prendre le contrôle... »

Elle sentit à travers la tension de ses muscles que ses paroles n'étaient pas entendues par un sourd. Il était encore là, elle le sentait. 

« Tu peux le faire Chuuya, je crois en toi... 

- K-Kana... va-t'en... articula-t-il difficilement avant de tousser une vague de sang. 

- Jamais. Jamais je ne t'abandonnerai. Je resterai là pour t'aider, sinon, je mourrai avec toi. Je t'aime Chuuya et je ne partirai jamais sans toi... Termina-t-elle en prenant son visage entre ses mains. Chuuya, reviens... »

Alors qu'elle pensait qu'il allait la tuer, toujours pris par la furie du dieu du Chaos, elle vit avec soulagement ses iris d'acier reprendre leur place dans leur orbite, avant qu'ils ne se remplissent de larmes. Il savait. Il savait ce qu'il avait fait d'irréparable. 

Il savait qu'il avait manqué de la tuer et aussi... qu'il avait provoqué la mort de Laito. 

Son corps fut secoué par de terribles sanglots tandis qu'il s'effondrait de fatigue dans les bras de son amie, pleurant à chaudes larmes dans le creux de son cou. Quant à elle, sa main droite vint se perdre dans sa chevelure de feu pour la caresser en douceur, espérant le soutenir bien mieux qu'avec des mots. 

« Qu'est-ce que j'ai fait... Je... Je l'ai tué ... articula-t-il avec difficulté. 

- Ce n'était pas toi Chuuya... 

- Je suis un monstre... 

- Non ! S'exclama-t-elle en le serrant avec plus de vigueur. Tu es loin d'être un monstre Chuuya ! 

- Ce sont mes mains... Ce sont mes mains qui l'ont tué... continua-t-il sans l'écouter. 

- Chuuya regarde-moi ! Commença-t-elle en le forçant à lever la tête vers elle. Laito est mort à cause de moi, parce qu'il a décidé de me sauver. Tout est de ma faute et non de la tienne. Tu as le droit d'être triste mais ne souille pas ton âme d'une mort dont tu n'es pas responsable... »

Il savait qu'elle avait tort. Bien sûr qu'elle était en rien coupable de la mort du leader des Brebis et voir qu'elle était prête à porter sur son dos la culpabilité de ce meurtre le rendait plus mal. Doucement, son front revint se poser sur son épaule tandis que ses pleurs recommençaient. Kana savait qu'elle ne pouvait pas le réconforter, pas maintenant. Ce qu'elle ne savait pas, c'était que le jeune Nakahara était bouleversé par autre chose : il était destiné à devenir le nouveau leader des Brebis. Lui, l'assassin de Laito. 

« Tristesse souillée, laissa entendre soudainement Akame. 

- Hein ? Fit-il en reniflant.

- Je trouve que c'est un meilleur nom pour ton pouvoir... 

- Je ne veux plus l'utiliser... il... il me rend inhumain, murmura-t-il. 

- Non, tu vas continuer à l'utiliser. Tu es un humain Chuuya et si tu refuses de l'utiliser, alors Laito sera mort en vain. Il avait confiance en toi, et ça me tue de dire ça mais... Il avait peut-être raison de nous faire entrer dans son groupe et de montrer les prouesses de ton pouvoir. Je vais être horrible en disant cela, mais si tu abandonnes ton pouvoir, alors tu seras condamné à n'être que l'incarnation d'Arahabaki. Nous en avons la certitude maintenant... il vit en toi, termina-t-elle en se tournant pour vérifier si Dumas était encore là, mais il avait bel et bien disparu. »

Une chose était certaine, elle n'abandonnerait pas Chuuya. S'il fallait, elle allait le forcer à utiliser son pouvoir, car il faisait partie de lui et que renier cette partie allait que le blesser plus. Pour elle, il n'y avait pas plus humain que lui. 

Le rouge de la vie


Cela fait bien longtemps que je n'avais pas posté de chapitre... Et pourtant, celui-ci est écrit depuis l'année dernière. 

Ma publication est lente malheureusement, mais j'avais besoin de me changer les idées en reprenant l'écriture. Entre mon mémoire et mon stage qui se déroule à l'étranger, je n'ai pas beaucoup de temps pour moi... 

Retravailler cette idée m'a fait le plus grand bien. En espérant que son retour vous plaise. 

Nous avançons petit à petit dans l'histoire, déjà le sixième chapitre et nous voyons comment j'ai imaginé le moment où Chuuya est devenu le leader des Brebis. 

J'ai également aimé montrer les relations entre Kana et Laito, l'inaccessibilité de la part de Kana qui se montre toujours plus froide avec les inconnus. Mais ce que j'ai le plus aimé, c'est le retour de Misha Shirotsu (personne très important) et l'introduction de l'organisation Pandora avec Alexandre Dumas. 

Je vous dis à bientôt avec le chapitre 7 qui annonce également un tournant dans l'histoire. Je pense que cela peut être un chapitre qui vous plaira ! 

Ciao ! 

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