Chapitre 1

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- Steven, on peut savoir où tu as passé ta nuit encore ?

J'ignore royalement mon éducateur et pose mon plateau sur la table. Seul au petit-déjeuner, pour ne pas changer. Je commence à manger mes céréales, sans lait parce que c'est dégueulasse, et garde les yeux rivés vers mon bol.

Je me sens incroyablement neutre, comme chaque putain de jour de ma vie. Je ne ressens strictement rien. La colère de mon éducateur commence à se faire ressentir, je sais sans même le regarder que ses yeux me lancent des éclairs.

- Faut que je te le répète combien de fois, encore une connerie et tu te fais virer d'ici, c'est vraiment ce que tu veux ? Être assigné à une famille que tu détesteras comme à chaque fois mais que tu seras obligé d'y rester ? Steven, putain, arrête de jouer aux cons. Pas avec moi putain.

Je continue de manger, comme si de rien n'était. Son poing tape contre la table, signe d'impatience et de colère.

- T'es vulgaire.

- Tu te fous de ma gueule ? T'as rien d'autres à dire là ?

Je soupire, agacé, et lève les yeux vers lui, blasé.

- Je suis allé courir, ça te va ? En même temps qu'est-ce que tu foutais au centre à cette heure-là ?

- Qu'est-ce que tu foutais à courir à cette heure-là toi ?

Je reporte mon attention sur mes céréales et hausse simplement mes épaules.

- J'arrivais pas à dormir.

- Encore ? Sérieux Steven, tu dors combien d'heures par jour ?

Sa voix est remplie d'inquiétude et en jetant un coup d’œil, son visage exprime la même chose.

- Suffisamment faut croire.

Il ne répond rien, trop inquiet pour moi. Je n'ai jamais vraiment dormi de toute manière, mais ça fait onze ans que le sommeil me fuit, attaqué par mes cauchemars.

- Tu as fait tes devoirs ?

Ah ouais, ça. Je ne vais pas au lycée mais j'ai quand même des devoirs, pour « garder le niveau ». Je n'ai pas besoin de ça, mais ils ne sont pas obligés de le savoir.

- Je vais prendre ça pour un non...

Je sais que je le déçois, encore. Mais je ne vois pas l'utilité de me plier à leur règles, alors je ne le ferai pas.

Mon téléphone vibre sur la table et m'indique un nouveau message. Je m'empresse de le cacher afin que mon éducateur ne le lise pas. Mon comportement suspect attire son attention mais il n'insiste pas.

- Le directeur et la psychologue veulent te voir.

Je m'arrête dans mon geste, c'est-à-dire que ma cuillère pleine de céréales est à mis chemin entre le bol et ma bouche et que j'ai l'air d'un con, la bouche grande ouverte, en attente de la-dite cuillère. Mes yeux cherchent les siens mais ne trouvent qu'un homme fatigué de cette situation, les bras croisés sur sa poitrine et le corps avachi sur la chaise peu confortable du self.

S'ils veulent me voir tous les deux, c'est mauvais signe. Ils vont peut-être essayer de me réaffecter à un lycée, encore.

- Si c'est ce que je crois, ils vont perdre leur temps.

- Je sais, c'est ce que je leur ai dit, mais ils sont obligés.

C'est faux.

- À vrai dire, j'ai plus de seize ans, je ne suis plus obligé de suivre un programme scolaire.

- Oui mais tu es dans un centre pour adolescents, ils sont obligés d'inscrire chaque ados au lycée.

Exacte. J'avais légèrement oublié ce détail.

Je laisse finalement la cuillère finir son trajet et réfléchis à comment je vais me sortir de cette affaire.

- J'irai les voir.

Jim semble étonné.

- Vraiment ? Tu ne vas pas fuir le rendez-vous ?

Je secoue négativement la tête.

- Parce que tu as un prix ? Il y a un piège, ce n'est pas possible.

Sa réaction me fait légèrement sourire, je sais que c'est surprenant, mais oui pour une fois je vais sagement obéir. Enfin, c'est temporaire. Il ne faut pas abuser.

Je prends mon temps pour finir mon petit-déjeuner puis débarrasse mon plateau. Comme chaque matin, ou plutôt comme l'exige le règlement du centre, je me dirige vers les douches collectives, en dernier puisque je suis le moins pressé. Évidemment je ne me dépêche pas, quitte à obéir, au temps les faire patienter comme il faut.

Lorsque je toque enfin à la porte du bureau de directeur, c'est un « Entrez ! » agacé qui m'accueille. La main sur la poignée, je pousse alors la porte et entre dans le bureau afin de m'asseoir sur l'un des sièges devant le bureau en bois, sans oublier de fermer derrière moi.

Effectivement, ils m'attendaient tous les deux.

- Eh bien, on a cru que tu ne viendrais jamais !, rétorque ma psychologue.

Je reste impassible et hausse les épaules. Je sais que mon comportement les énerve, et je m'en amuse beaucoup. Je ne veux pas être ici et ils ont en marre de moi.

- Bien Steven, on ne va pas passer par quatre chemins, nous t'avons inscrits dans un lycée. Nous aimerions que tu daignes y aller et ne pas faire de conneries au bout de la première heure. Tu crois que c'est possible ?

Impressionnant. Il a réussi à dire tout ça de but en blanc, sans me lâcher des yeux, peut-être pour me montrer qu'il est très sérieux ?

- J'crois pas.

Au moins, je suis honnête.

- Steven, commence ma psychologue, nous pensons que ça te ferait du bien, de t'intégrer un minimum dans la société, et tu dois passer par l'école pour ça. Tu ne voudrais pas te faire des amis ? Faire de nouvelles rencontres ?

Mon expression reste impassible. Et à leur réaction, je devrais ressentir autre chose que de la neutralité... Mais qu'est-ce que j'en ai à foutre, de me faire des amis ? Je suis très bien seul.

- Ça ne te fait rien, de rester seul ? Je veux dire, tu ne communiques pas beaucoup avec les autres adolescents du centre, et Jim est ton éducateur, ce n'est pas vraiment un ami à qui tu peux confier tous tes secrets...

- Dans ce cas, vous servez à quoi ? Nous sommes censés nous confier à vous, dire ce qui ne va pas, vous raconter nos secrets. Mais vous n'êtes pas non plus notre pote. Donc vous n'avez aucune utilité.

Ma remarque semble faire mouche. Une sensation de malaise croît dans la pièce.

- En plus je fais de la boxe, donc j'essaie de m'intégrer dans la société, comme vous dites.

Steven 2 – les abrutis 0.

- Ce n'est pas faux... Mais ce n'est pas pareil...

Elle l'a cherché, son "argument".

- Au lycée tu seras avec des jeunes de ton âge...

- Quoique je dise, je n'ai pas le choix en fait ?

Avachi sur la chaise, les bras croisés, un sourcil haussé : j'ai l'air de l'adolescent le plus agaçant possible.

- C'est l'idée, réponds sèchement le directeur. Jim t'y emmène, prépare-toi.

Je vais encore retourner en enfer.

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