Chapitre 1

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Quand j'ouvre les yeux, j'arrête de faire les cent pas. Je me demande encore une fois ce que je fais là. Et quel sera le prix à payer. Parce qu'il y aura forcément un prix à payer.

Je regarde tout autour de moi. Cette antichambre m'a toujours mis mal à l'aise. Mes yeux me brûlent en reconnaissant chaque vase, chaque bibelot de valeur, chaque lame de parquet, chaque tapisserie sur les murs.

Rien n'avait changé et tout était aussi hideux que dans mes souvenirs. Tout était trop vieillot, trop impersonnel, trop tape-à-l'œil, trop tout ce que je détestais dans ma vie. Moi qui avais espéré ne plus jamais remettre les pieds dans cet endroit...

J'avais mis le plus de distance possible entre eux et moi. Obtenu un emploi par mes propres moyens, sans piston. Trouvé un équilibre. Adopté un nouveau style de vie qui me correspondait parfaitement. Changé de numéro de téléphone, d'adresse mail. Fait le mort pendant des années en ne donnant de nouvelles à personne. Et le plus atroce est que je pensais naïvement qu'il en serait ainsi pour toujours.

Quel imbécile.

Je m'effondre sur une des quatre chaises de l'antichambre et fais de mon mieux pour respirer normalement. Je ne suis pas stressé. Juste en colère. Je sais ce qui m'attends et je sais très bien que je ne sortirai pas indemne de cette journée. Tous ceux que j'ai désespérément tenté de fuir vont me mettre en pièces. Suis-je inquiet à la simple idée de les revoir ? Absolument pas. Je suis déjà en pièces depuis hier. J'ai un objectif, j'ai pesé le pour et le contre à chaque pas que je faisais en me rendant dans cet hôtel particulier de malheur. Peu importe ce qu'ils pensent, je sortirai victorieux. Je n'ai plus rien à perdre.

Une porte s'ouvre doucement et Frédéric, le majordome, entre dans le vestibule. Je me redresse aussitôt, comme pour répondre à un signal.

- Monsieur.

Il était droit comme un piquet. Les mains jointes dans son dos et le menton relevé. Son ton était glacial, son regard l'était tout autant. Je ne reconnaissais pas celui qui m'avait vu grandir, qui veillait sur moi et m'accordait son attention quand d'autres dont c'était le rôle oubliaient tout simplement mon existence lorsque je ne leur étais d'aucune utilité. J'aurais dû m'en douter et je ne peux retenir un rictus.

Même pour lui, j'étais devenu un étranger. Un inconnu tout aussi inconnu qu'un plombier venu réparer un robinet qui fuit ou un employé GRDF se pointant pour relever le compteur. Pas étonnant qu'il m'ait laissé patienter dans l'antichambre comme toute autre personne lambda. Je n'étais plus rien à ses yeux. L'ai-je déjà été ? N'était-ce pas son travail de prendre soin de moi quand j'étais petit ? Je m'étonne de ne ressentir aucun ressentiment face à son hostilité. En réalité, je ne ressentais rien. Frédéric était également un inconnu pour moi. Sa chaleur calculée et dictée par son chèque tombant tous les mois ne me manquera pas.

- Madame Brisebois de Fussac a consenti à vous recevoir, déclare Frédéric avec froideur.

Tu m'en diras tant. Bien entendu que la très distinguée Môadaaaaame Brisebois de Fussac n'allait pas rater une occasion de m'humilier. Mais je n'avais rien à perdre, une fois de plus. Juste mon temps à devoir croiser son regard de sorcière.

N'oublie pas pourquoi tu es là, Vince. Ne l'oublie surtout pas. N'oublie pas pourquoi tu es là.

Je plonge mes mains dans mes poches, m'empare de cette bague que j'aime tant et la serre dans mon poing. Frédéric me tourne le dos vers la porte.

- Si vous voulez bien me suivre.

Je ne vais pas lui donner le plaisir de lui répondre et me contente de lui emboîter le pas en silence. Nous nous rendons vers une autre antichambre – bien que ce n'en était pas une –, l'antichambre de la mort. Là où mon bourreau m'attendait.

La route se fait en silence. Frédéric n'était pas disposé à échanger des banalités avec moi et moi... je n'étais pas d'humeur à causer avec lui. Il ne méritait pas que je gaspille mes forces et ma salive à tenter une approche amicale. Je n'avais même pas fini ma guerre intérieure qu'une autre se profilait devant moi. Mais le chemin menant au champ de bataille s'avérait plus long que prévu. Je ne prête pas attention aux murmures scandalisés des autres domestiques et quelques-uns pointaient carrément leur doigt vers moi. Je serre encore plus la bague en quête de courage. Je n'étais pas une bête de foire mais il semblerait que les employés de maison étaient en quête de distraction. Cela ne me surprendrait pas qu'ils tentent d'écouter aux portes et de voir à quelle sauce je serai mangé. Mais je ne leur accorderai pas ce plaisir. La prochaine fois qu'ils me verront, ils me verront victorieux.

Frédéric et moi parvenons enfin devant l'antichambre de l'enfer, fermée bien entendu. Pour entretenir le suspense. Certainement dans l'optique de me mettre encore plus de pression. Dommage pour eux car je ne ressens pas une once de pression dans mon corps. Frédéric frappe doucement à la porte avant de l'ouvrir tout aussi doucement, me dévoilant une vision d'horreur que j'avais espéré ne plus jamais voir dans ma vie.

Un bureau froid, stérile et ridiculement gigantesque. Les armoiries de la famille Brisebois de Fussac partout, absolument partout. Du blanc et encore du blanc, les murs blancs, le sol en marbre blanc, les rideaux blancs, le lustre blanc. Le tapis – blanc - exagérément onéreux et les tapisseries – encore – qui me donnent envie de craquer une allumette et d'y foutre le feu. Oh, j'ai tellement envie d'y foutre le feu...

Mais ce n'était pas le pire, loin de là. Le pire était sous mes yeux, derrière le bureau.

Je pensais qu'il n'y aurait qu'un bourreau. Au lieu de ça, l'exécutrice et ses sbires étaient là pour se délecter de ma chute.

Personne ne parle. Ni eux ni moi. Je savais qu'il fallait que je parle car il était certain que la matriarche n'allait pas s'abaisser à ouvrir le bal des monstres. Je déglutis donc pour me donner de la force et lance d'un ton très calme :

- Bonjour, Mère. 

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