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*Newtiteuf*

Je sentais la main de Perrine, étonnamment petite, dans la mienne, alors que ses doigts se serraient à m'en faire mal. Je n'en dis rien à mon amie, et me contentai de marcher droit devant moi, l'entraînant à ma suite, en lui jetant quelques regards en coin. Elle avait baissé la tête, laissant ses longs cheveux bruns dissimuler son visage ; mais j'entendais son souffle court et entrecoupé de petits hoquets, et la voyais trembler comme un tas de gelée dans lequel on aurait shooté. Ou comme une feuille. Mais je n'aimais pas vraiment les expressions trop courantes.

Au terme d'un temps qui me parut une éternité, à me demander si Pepper me suivrait jusqu'au bout, sans s'effondrer, nous parvînmes enfin devant l'épicerie crasseuse à l'étage en-dessous de mon appartement. J'eus une pensée inquiète.

Est-ce qu'elle montera les escaliers sans tomber ? Elle tremble tellement qu'elle pourrait carrément perdre l'équilibre, à tous les coups...

Mon amie, voyant que je m'arrêtais, indécis, lâcha difficilement ma main ; puis elle me contourna pour venir se poster devant moi, le visage toujours baissé.

- Oui ? fis-je, un sourcil arqué.

En guise de réponse, elle s'écrasa brusquement contre moi, crochetant mon cou de ses bras et m'arrachant un glapissement de surprise. Sans me laisser le temps de me remettre de mes émotions, Perrine, s'agrippant avec ses bras, sauta pour venir entrecroiser ses jambes en bas de mon dos, et j'eus la présence d'esprit de la rattraper sous les fesses pour ne pas qu'elle glisse.

- Porte-moi, ordonna-t-elle d'une voix éteinte.

Paaaaaardon ?

Je poussai un long soupir désespéré.

- C'est pas censé être ta sœur, la « princesse » ?

- Teuplé...

- Bon, bon, d'accord, capitulai-je.

Comme si je pouvais lui refuser quoi que ce soit, dans l'état dans lequel elle était...

Je montai donc les escaliers, trimballant Perrine accrochée comme un koala, ne la lâchant que d'une main pour ouvrir mon appartement. Je bénis la mauvaise habitude que j'avais prise de ne pas le fermer à clé ; trouver la clé dans ma poche et m'en servir pour ouvrir, le tout d'une seule main, bonjour la galère.

Appuyant sur le loquet du bout des doigts, achevant d'ouvrir la porte d'un bon coup de pied, je rentrai pour aller dans mon coin salon. Là, je voulus poser Perrine sur le canapé, pour pouvoir partir préparer quelque chose à manger.

Voulus seulement. Elle n'avait pas l'air d'accord pour me lâcher.

- Perrine, soupirai-je. Décroche, s'il te plaît, que je puisse nous préparer le repas.

- Juste un peu... chuchota-t-elle à mon oreille.

Avec la ferme impression de ressembler à un ballon de baudruche, me dégonflant à chaque soupir, je m'assis sur le canapé, et Perrine desserra un peu les jambes, toujours bien cramponnée à mon cou cependant.

- J'ai peur... couina-t-elle plaintivement.

J'ai vu ça.

- C'est pas toi qui disais à ta sœur que tout irait bien ? tentai-je de la rassurer.

- Tout n'ira pas bien.

- Ne te laisse pas abattre... tu es plus forte que ça, tu sais...

- Non ! hurla-t-elle.

Je grimaçai. Argh, mon tympan... je venais de perdre vingt points d'audition d'un coup, là. Mais Pepper continua, hystérique, désespérée :

- Mon petit ami, mon amour est mort ! Un autre gars innocent est mort ! Le copain de ma sœur, que j'admirais beaucoup, il est mort aussi ! On est dans une ville avec une saloperie de psychopathe qui a tué deux mecs, dont son propre copain ! Et maintenant, ça se trouve, on a en plus un mec qui collabore avec les testeurs qui nous ont foutus dans cette merde ! Et puis ce jeu... le mal ne frappe plus à midi, il ne tue pas, le temps part en c*uilles... j'en peux plus, Julien, j'en peux plus, c'est trop. Je suis pas forte. Je ne peux plus être forte avec ça.

Elle enfouit encore plus son visage dans mon cou, déjà baigné de ses larmes.

- J'en viens à me demander si, au fond, il ne vaudrait pas mieux que je crève. Juste que je crève. Ça fera déjà un joueur en moins, s'il doit n'en rester qu'un au final... et puis, peut-être que je reverrai Maxime ?

C'en fut trop pour mes oreilles. J'attrapai Perrine sous le derrière juste le temps de me relever et de faire demi-tour ; puis, je la lâchai tout net. Surprise, elle n'eut pas le temps de se raccrocher, et tomba sur le canapé, assise sur les fesses. Elle commença à relever la tête vers moi...

Et je lui envoyai une belle claque.

Pepper écarquilla les yeux alors que ses pupilles se rétrécissaient drastiquement, jusqu'à ne devenir presque qu'un point dans l'immensité bleue de ses iris. La paume encore brûlante - je n'y étais pas allé de main morte, littéralement - et me retenant de cogner le canapé en prime, je lâchai :

- Ne répète jamais ça en ma présence. Ou jamais, tout court.

- Ju...Ju...

Elle tenta de parler, n'y arriva pas. Sa poitrine tremblait par spasmes, ses poumons peinant visiblement à reprendre de l'air ; je commençai à regretter d'y être allé si fort avec elle. Le visage de Pepper rougissait à vue d'oeil, jusqu'à ce qu'elle se laisse tomber sur le côté, le souffle toujours irrégulier. De lourdes larmes roulaient sans discontinuer sur ses joues, alors qu'elle se débattait avec l'asthme qui l'avait prise.

- Merde, Perrine, désolé ! m'écriai-je. Je voulais pas faire ça ! Je voulais juste que tu comprennes... tu peux pas dénigrer ta vie comme ça... mais désolé, j'aurais pas dû te frapper.

Je m'accroupis à ses côtés, priant pour qu'elle ne tourne pas de l'œil ; heureusement, après quelques minutes, son souffle revint à la normale. Elle avait les paupières entrouvertes, l'œil embrumé, mais au moins, elle paraissait toujours consciente.

Note à moi-même : elle a le droit de me rendre ma baffe dès qu'elle veut.

Soulagé d'avoir échappé à une probable catastrophe, je me levai, époussetai mon jean pour la forme, et partis dans la cuisine, préparer des pancakes. Non, ce n'était pas un repas du soir. Mais je lui devais au moins ça. Mon rythme cardiaque se calma doucement.

Quelques minutes plus tard, j'entendis des pas derrière moi, qui se rapprochaient. Sans me retourner, je lançai :

- Relevée ? Tu peux me gifler, Perrine. Quand tu veux.

- « Perrine » ? Hé, j'ai pas de vagin, moi !

Je lâchai directement le saladier plein de pâte à pancakes, ne manquant pas d'en faire gicler quelques gouttes sur le plan de travail, et fis volte-face. Mon cœur rata un battement, et mon cerveau manqua griller instantanément.

Unster, là, dans mon appart', dans le coin cuisine, appuyé contre un plan de travail, les bras croisés et un regard moqueur qui m'était adressé. Pas la voix d'Unster, cette fois. Unster, p*tain.

Sur le coup, si j'avais eu la vessie pleine, je me serais vraiment pissé dessus de surprise. Mais non.

Je me contentai d'un simple pet. En bonne et due forme.

Unster hoqueta de surprise, puis éclata de rire - alors que je rougissais terriblement.

- C'est... c'est pas drôle !

- NT, je te fais péter ? Sérieux ?!

- La ferme ! T'es plus un collégien, pour te marrer à cause de ça !

- Pardon, mais là... là...

Il n'eut même pas le temps de finir sa phrase qu'il repartit dans son fou rire, se tenant les côtes, achevant de me faire m'empourprer jusqu'aux racines des cheveux. Cheveux dans lesquels je passai la main, vraiment mal à l'aise, avant de dire enfin :

- C'est bien joli... mais sérieusement, Unster, qu'est-ce que tu fais là ? Et pourquoi es-tu là ?

- C'est pas vraiment une façon polie d'accueillir son chéri, Julien, me fit-il remarquer d'un ton moqueur. Tu me déçois beaucoup.

- Unster... soupirai-je.

Cependant, mon exaspération eut tôt fait de s'évaporer, pour laisser un sourire prendre place sur mes lèvres. Unster était revenu, là, dans ce monde, en personne... au comble de la joie, je m'avançai vers lui, ouvrant les bras.

Sauf que lui recula de deux pas, l'air gêné. Mes bras retombèrent tous seuls le long de mon corps, et je soufflai :

- Tu... tu ne veux pas de moi ?

À cette simple pensée, ma gorge se noua, et j'en eus presque les larmes aux yeux.

- C'est pas ça, répondit Unster. Juste que... je peux pas, c'est tout.

- Tu déconnes, grondai-je.

- Je suis sérieux.

Unster sursauta quand je cognai du poing contre mon plan de travail, faisant même trembler le saladier plein de pâte. J'éclatai :

- C'est comme ça que tu me traites ? Comme une merde ? Mais c'est quoi ton problème, au juste ? Dans Mineworld, ça t'amusait de me traiter comme un jouet, comme un petit animal de compagnie - tu crois que je n'ai pas remarqué ça, toquard ? Et là quoi ? C'est un autre de tes jeux ? Ou alors, t'as peut-être enfin repris conscience ? Mais alors, t'enfuis pas, mais assume, p*tain de merde. J'en ai marre, marre de tes caprices, marre que tu fasses ce que tu veux sans me demander mon avis. MARRE, T'ENTENDS ?

Unster blêmit, recula encore, mes mots ayant sur lui l'effet d'un coup de poing. Il bredouilla :

- Qu'est-ce que tu racontes ? Mineworld, je... tu... tu y étais ?

Ce fut à mon tour de me manger un bel uppercut verbal. Mais immédiatement, je me ressaisis.

- Genre, t'as oublié ? T'es vraiment un beau salaud, en fait. Que t'aies vraiment oublié ou que tu fasses semblant, ça revient au même. T'es qu'un con, Unster !

Mon ami - méritait-il encore ce titre ? - fit un énième pas en arrière, puis sembla se cogner contre un mur invisible. Il frémit, avant de murmurer :

- Désolé, Julien... tellement désolé...

Puis il disparut d'un coup, en une volée de pixels argentés. Le souffle court, le cœur déchiqueté, je me laissai glisser à terre, dos à mon meuble de cuisine, et me recroquevillai sur moi-même.

Arrête de jouer avec mes sentiments...

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