Chapitre ④①

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Bonsoir les amis ^-^

Merci de votre patience. Voici la suite d'Océan, j'ai adoré l'écrire. Je vous conseille vivement la musique en média durant votre lecture, ça donne l'ambiance exacte que je veux que vous ressentiez dans ce chapitre ! ♥


Bonne lecture ~ ♥


********************************


— Ouais, je crois que c'est pour fêter la fin de l'année.

— C'est les profs qui ont organisé ça ?

— Aucune idée. Mais y'a des rumeurs qui disent qu'ils sont sous tension aussi à cause de...

Il déglutit. Son expression faciale n'est pas très discrète.

— De moi ?

— Bah... Pas seulement. Je sais pas, d'un peu tout. On m'a raconté qu'un de tes profs avait pété les plombs une fois parce qu'il avait appris pour le harcèlement ?

— Ouais... J'étais au tableau à ce moment-là.

— Ah, pas très fin de sa part.

Silence.

Namjoon ne m'en a pas parlé. De mon harcèlement, je veux dire. De Jimin et Yoongi. Quand il y a un moment de battement comme celui-ci, il évite mon regard. Je ne le remarque que depuis peu, mais mon ami évite tout bonnement le sujet de ma tentative de suicide et de sa raison.

Je ne lui en veux pas. Je sais qu'il a une bonne raison de faire ça.

— Et donc ? C'est où, cette sortie ? Je demande pour changer l'atmosphère pesante.

Il sourit, ravi d'attraper la bouée que je lui tends.

— Apparemment c'est au musée d'histoire naturelle.

— Ah, je l'ai déjà fait cent fois celui-là, je souris.

— Moi aussi. Mais du coup, tu viens pas ?

Je hausse les épaules.

— C'est quand ?

— Dans deux semaines. Vendredi.

— Tout dépend de quand je sors... Et de si... Si je vais pouvoir revenir à l'école...

Je fronce les sourcils au fur et à mesure de ma phrase.

Est-ce que je vais pouvoir revenir à l'école ? Revenir à Seontaeg ? J'ai manqué un mois et une semaine. Est-ce que c'est foutu ? Je vais doubler cette année ?

Pourquoi n'y ai-je pas pensé depuis mon réveil ? Namjoon voit mon affolement soudain puisqu'il s'approche du lit sur lequel je suis assis, les pieds à plat sur le sol.

— Eh, ça va ?

— Namjoon... Je vais redoubler...

Son visage se ferme. Il détourne les yeux un instant, ce qui confirme mes craintes. Pourtant, quand il ancre de nouveau ses iris dans les miens, j'y vois de l'espoir.

— Tu as des facilités, Taehyung. Je pense que personne ne t'empêchera d'essayer de valider cette année. Et puis si tu es trop bas dans le classement pour la grande école que tu voudras, tu pourras redoubler. Essaie sans te mettre la pression quand tu sortiras d'ici... ?

— Oui mais je sors quand ? Combien de temps je vais rester enfermé dans cette putain de chambre ?!

Mon cœur s'emballe, je me lève et fais les cent pas. Namjoon s'approche davantage, probablement au cas où je tombe.

Est-ce qu'ils vont tous être comme ça maintenant ? A faire mille fois attention à moi ? Voilà, voilà pourquoi je voulais que personne ne le sache. Mon Dieu, tout le monde, toute l'école, ils sont tous au courant que j'ai fait ça, ils sont tous au courant de...

— Tae, il est bientôt treize heures, il faut que j'y retourne.

Quand Namjoon s'en va, inquiet, je lui assure que ça va aller. Mais en réalité, je n'en suis pas sûr moi-même, je ne cesse de paniquer le reste de l'après-midi.

A quoi ça sert que je reste là ?! Je sais marcher, je sais toujours parler, réfléchir, je sais toujours...

Est-ce que je sais toujours réfléchir ?

Allongé sur le lit, les yeux rivés sur le plafond blanc, je me redresse vivement et attrape mon téléphone. Je tape sur le navigateur "exercices de mathématique haut niveau", mais la connexion fait charger la page à l'infini. Mon cœur frappe ma cage thoracique avec force quand je me redresse, titubant, et que je cherche des vêtements. Je m'enferme dans la salle de bain et troque mon horrible blouse d'hôpital pour un jean, un t-shirt et un pull à capuche que ma mère m'a ramené pour "quand je sortirais". Mais si je ne sors pas, personne ne me fera sortir !

Rageusement, j'enfile mes chaussures et mon sac lourd d'affaires. Ma mère en fait toujours trop, mais elle a eu raison, cette fois. Je regarde l'heure ; dix-neuf heures douze. C'est le moment où le personnel sert à manger, il faut que je parte maintenant pendant qu'ils sont occupés, et surtout avant que quelqu'un ne vienne me servir cette soupe dégueulasse avec ce carré de beurre durci par le froid que je devrais passer ma vie à étaler sur cette putain de tranche de pain moisi. Sans compter le yaourt au fruit.

Je suis pas une poule, bordel.

Ma main se dépose sur la poignée. Je prends une inspiration mais je n'ai pas besoin de courage. Je suis déjà déterminé à rentrer.

Je dois aller travailler. Il faut que je rattrape mon retard.

Je sors. Le long couloir se présente à moi. Une semaine et demie que je suis réveillé et je réalise ce soir que je ne suis encore jamais sorti prendre l'air. Je n'ai pas inspiré d'air frais depuis quelque chose comme quarante jours.

La porte se fait clore avec douceur par mes soins. L'instant d'après, je mets un pied devant l'autre comme si j'étais dans l'illégalité la plus totale.

Je ne fais que trois pas avant qu'un infirmier ne me trouve.

Ma respiration se coince dans ma gorge ; je prépare une excuse, le regard paniqué, mais quand il arrive, il... Me passe devant.

Il vient de me passer devant sans faire attention à moi... ?

Je fronce les sourcils et reprends mon chemin. Je croise d'autres personnes et toutes m'ignorent royalement. Un rictus se forme sur le coin de mes lèvres et j'accélère. Grâce aux panneaux, je me repère assez rapidement. Je suis au premier étage, la sortie n'est pas très loin.

Par sécurité, j'emprunte l'escalier plutôt que l'ascenseur pour ne pas me faire remarquer, et débouche sur un hall gigantesque. Une queue interminable empêche la jeune femme de l'accueil de faire attention à moi. Des personnes en blouse s'activent dans tous les sens.

Personne ne me retient.

J'ajuste mon sac et me dirige vers les double-portes automatiques. En revanche, à seulement trois mètres d'elle, une main se pose sur mon épaule. Je me glace de stupeur, puis fais volte-face lentement.

— Taehyung ? Bon sang, qu'est-ce que tu fais là ? Me demande l'infirmier qui passe souvent me voir.

Je ne sais pourquoi je prends peur ; je me dégage vivement de sa poigne et me mets à courir. Je traverse les quelques mètres restants de quelques enjambées et, devant moi, les portes vitrées s'ouvrent. L'air et la pluie fouettent mon visage.

Mais ce qui me frappe surtout, c'est un torse dur et chaud.

Je m'excuse en bafouillant et tente de contourner la personne que je viens de heurter, mais une main attrape doucement ma nuque pour me ramener en arrière.

— Taehyung ?

Tout mon corps, et peut-être aussi mon âme, est électrisé par cette voix. Je me fige comme de la pierre en relevant la tête.

— Jungkook... Je souffle, tremblant.

Capuche noire sur la tête pour se protéger de la pluie, Jungkook me dévisage, confus.

— Taehyung ! Crie l'infirmier en sortant à son tour.

— Non... ! Je m'exclame avant de me coller contre Jungkook.

Ce dernier enroule ma taille de son bras et baisse la tête vers la mienne, plongée contre son sweat-shirt trempé.

— Tu t'es enfui ? Murmure-t-il, sans jugement dans la voix.

Je renifle.

— Aide-moi à rentrer... S'il te plaît... Aide-moi à rentrer à Seontaeg !

J'accroche son haut et le supplie du regard, tandis que le médecin semble s'être arrêté près de nous. Jungkook fronce les sourcils face à mes yeux larmoyants.

— J'ai manqué un mois de cours Jungkook ! Je dois rattraper mon retard, sinon je vais redoubler ! Je... Je vais me retrouver tout seul sans vous... Sans toi...

Son autre main se pose sur ma joue. Je m'y blottis en soupirant, les cheveux lourds d'eau de pluie.

— Viens, on en discute à l'intérieur.

— Non ! Non, non, non, ils vont encore me dire que je dois faire je sais pas combien d'examens, Jungkook j'ai plus le temps de perdre du temps... Aide-moi s'il te plaît... Namjoon m'a dit qu'il était venu tous les jours pour me lire les cours quand j'étais dans le coma mais je ne me souviens de rien, comment je vais faire si-

Il m'embrasse.

J'écarquille les yeux quand je sens ses lèvres se déposer sur les miennes. Il ne les remue pas ni ne cherche à approfondir. Il se contente de les lier chastement quelques longues secondes. Mes épaules se détendent.

Quand il se délie de moi, je baisse la tête, vaincu.

— Viens, fait-il en m'attrapant délicatement le poignet.

**

— Je vous dis que je ne l'autorise pas, mais Taehyung est libre de partir quand il veut.

Je souris, ma mère lève les yeux au ciel.

— C'est encore mon fils ! Taehyung, tu resteras ici si c'est l'avis du médecin !

— C'est mon avis, en effet. Tu devrais rester encore quelques temps, Taehyung.

Je perds espoir.

— ...Mais tu es majeur. Et je n'ai aucun droit de te garder prisonnier. Si tu veux t'en aller, tu devras signer une attestation qui stipule que tu as conscience des risques que tu encoures sans ma surveillance complète. Avec ce papier, je me dédouane de ce qui peut t'arriver. C'est ce que tu veux ?

Dans un coin de la pièce, Jungkook croise les bras, le dos contre le mur et les yeux rivés sur moi.

— Taehyung, tu ne vas quand même pas quitter l'hôpital prématurément ?! S'inquiète ma mère.

Je la regarde.

— Prématurément... ? Ça fait des jours que je suis là et qu'on me fait faire des exercices de motricité qui ne me servent à rien !

— Un problème peut en cacher un autre, Taehyung, souffle l'infirmier.

— Je sais, je... Pardon, ce n'est pas contre vous, mais je suis dans une école très sévère et-

— Seontaeg. Je connais, oui, sourit-il.

— Voilà. Si j'y retourne maintenant, j'ai peut-être encore un espoir de valider mon année.

— Avec un mois d'absence... ?

— Je suis doué, je lâche froidement.

Silence. Jungkook ne cesse de me scruter.

— Plus que n'importe qui. Je vais y arriver.

Mon père s'approche.

— Bien sûr.

Je redresse la tête, surpris.

— A toi de voir, Taehyung. Comme l'a dit le médecin, tu es majeur. Si tu veux signer ce papier et sortir ce soir, fais-le. Mais prends la décision qui te paraît la meilleure, pas celle qui te paraît la moins pire.

Je suis étonné de le sentir me caresser la joue. Il est rare que mon père soit tactile.

— On t'attend en bas, près de la machine à café. Viens nous donner ta décision dans les prochaines minutes, je suppose que tu as besoin d'être un peu seul pour la prendre.

Il dit ça en jetant un œil à Jungkook. Je manque de rougir. Ce dernier est très silencieux.

— Bon, j'ai à faire. Viens me trouver également quand ta décision sera prise, intervient l'infirmier.

Je hoche la tête. Ma mère lance des éclairs par les yeux quand elle regarde mon père, mais elle se tait et sort docilement.

Bientôt, il ne reste plus que lui et moi dans la chambre.

Le silence n'est pas aussi éloquent que je le voudrais ; je n'ai aucune d'idée de ce à quoi il pense.

— A quoi tu penses ? Me demande-t-il.

Ah.

— J'en sais rien.

Quand nos regards se croisent, j'ai l'estomac en compote.

— J'ai... J'ai manqué un mois, Jungkook. J'ai du retard, comment-

— Moi aussi.

Silence.

— Hein ?

— J'ai manqué presque deux semaines.

Je fronce les sourcils.

— Tu... Pourquoi ?

— J'ai eu un problème. Je suis en train de tout rattraper.

— C'était quel problème... ?

Il se tait. Je comprends qu'il n'a pas envie d'en parler, ça m'inquiète, mais je n'insiste pas.

Quand il s'approche, je me lève, précédemment assis sur le bord du lit. Je réalise à quel point je déteste cette pièce quand je pense au fait que Jungkook va encore devoir s'en aller ce soir.

— Je veux pas que... Que tu t'en ailles... Je murmure faiblement.

Il s'arrête devant moi, les mains dans les poches. Les miennes grimpent dans les airs et se déposent contre son ventre tonique. Je peux sentir la contraction de ses abdominaux à travers son pull.

— Je reviendrai demain.

Je secoue la tête. Il ne comprend pas.

— Je...

Mon visage s'approche. Il me laisse faire sans bouger le pouce.

— J'ai besoin de... De dormir avec toi...

Il doit comprendre, car quand je plante de nouveau mes yeux dans les siens, je remarque son expression mi-surprise, mi-dubitative.

— ...Tu n'es pas en état.

Nos souffles se mêlent.

— Arrêtez de tous prétendre connaître mon état, je réponds, vexé.

Il se penche légèrement, sans ôter ses mains de ses poches, et quand ses lèvres frôlent ma joue, je tressaille.

— C'est pour ça que tu veux rentrer ?

— Ça... Ça joue dans ma décision.

Son nez parcourt ma tempe.

— Je vais pas m'envoler.

Démasqué. Je souris sans qu'il ne le voit, gêné d'être pris sur le fait. Oui, j'ai peur. J'ai peur de rester trop longtemps ici et de ne pas le retrouver une fois rentré. Je veux dire, pas physiquement, mais... Le temps efface l'attachement. Jungkook va avancer, et il en a le droit.

Je ne veux pas qu'il avance sans moi, aussi égoïste que je puisse paraître à penser ça.

— Tu n'es pas clair, Jungkook...

Il prend une inspiration près de mes cheveux. Je clos les paupières.

— Je suis patient, répond-il.

Mes poings accrochent sa veste.

— Pas moi.

Il me regarde de haut.

— J'ai remarqué.

On se dévisage. Mon attention dérive sur ses lèvres roses. Il n'arrête pas d'y passer la langue. Il réfléchit beaucoup. Je crois que c'est son tic quand il se torture l'esprit. Ça, et le stylo qu'il fait tourner entre ses doigts en classe.

— Si je signe le papier, on rentre ensemble ce soir ?

Je me pince les lèvres. Il les regarde.

— Ok.

Je n'aurais jamais cru que ce mot m'aurait tant manqué.

**

— Alors c'est ta décision ? Tu n'y reviendras pas ?

— Non, maman. Et s'il y a des complications, je reviendrai à l'hôpital. Je te le promets.

Dehors, la pluie s'est arrêtée. La nuit est noire, le sol est mouillé.

— ...Bon, très bien. Mais appelle-nous tous les jours, d'accord ?

— Promis.

— Tu ne veux vraiment pas qu'on vous raccompagne en voiture ?

— C'est à quinze minutes. Et j'ai vraiment très envie de marcher, papa. Tout va bien aller, je t'assure.

Ils me serrent. Je leur rends l'étreinte, heureux de sentir le froid du dehors me chatouiller le nez. Mais surtout heureux de le sentir lui, dans mon dos, à attendre, aussi patient qu'il l'a toujours été.

— Merci jeune homme, de prendre soin de mon fils.

Je rougis. Ma mère salue Jungkook de loin. Quand je me tourne vers lui, je vois qu'il sourit poliment en réponse. Le cœur réchauffé, je m'approche et me poste à ses côtés.

Avant que je n'ai le temps de le réaliser, Jungkook m'arrache le sac des mains et le prend sur son dos.

— Je peux le porter !

— J'en doute.

Je trottine pour l'atteindre de nouveau. Il fait mine de m'ignorer.

— Rends-le moi ! Je crie.

Il s'arrête.

...Oh oh.

Jungkook penche la tête sur le côté pour me regarder et je recule d'un pas. Non pas que j'ai peur.

...Ok, d'accord, si, il est terrifiant.

— Sinon quoi ? Demande-t-il.

Je croise les bras.

— Je me disais bien, s'amuse-t-il en reprenant sa marche.

Le silence nous habite dès lors que nous avançons côte à côte, et je ne peux m'empêcher de l'observer en coin. Je réalise à quel point je l'aime quand je le regarde ainsi porter mon lourd sac à dos, m'escorter jusqu'à Seontaeg et tout ça sans un bruit, sans m'assomer de questions, sans me rassurer pour rien puisqu'il ne sait pas, comme moi, ce qui m'attend dans les prochains jours.

Jungkook est probablement la personne la plus authentique que je connaisse.

Et je crois, quand bien même notre histoire est douloureuse et n'a pas aucun risque de le rester, qu'il fait partie des raisons pour lesquelles je me suis réveillé.

**

Entrer dans Seontaeg, ce soir, est différent de toutes les fois où j'ai pu y entrer auparavant.

Quand je m'arrête net près des escaliers de l'internat, Jungkook se tourne vers moi. Dans la pénombre du couloir, il m'observe hésiter à monter.

— C'était pas ceux-là.

Sa voix me fait sursauter autant qu'elle me rassure sur la question silencieuse que je me posais.

De quels escaliers est-ce que j'ai sauté ?

Soulagé de ne pas devoir y faire face ce soir, je grimpe les marches une à une, jusqu'à apprécier le grincement du vieux bois du palier où se trouvent les douches. Nous montons une deuxième rangée de marches et, dans la pénombre, le couloir des chambres s'étale devant moi comme un tapis rouge qui se déroule. Je ne suis pourtant pas une star.

Ah, peut-être un peu, finalement. Mais pas pour les bonnes raisons.

Quand je chemine aux côtés du garçon que j'aime à en mourir, je me demande ce que je suis le plus entre un poisson, un zombie, un microbe d'une araignée géante ou une poule.

Peut-être un petit peu de tout à la fois.

J'ai vraiment voulu mourir ?

Je manque de heurter le dos de Jungkook quand je sors de ma torpeur. Il extirpe une clé de sa poche, ouvre la porte, et se pousse sur le côté.

Les larmes naissent quand il allume la lumière et que je retrouve ce que je peux appeler aujourd'hui "mon chez moi". Lui. Il est l'endroit dans lequel je me sens le mieux. A choisir entre l'hôpital, la chambre de mes parents ou celle de Seontaeg, je me réfugierais près de lui.

Ça n'a pas beaucoup de sens en vérité ; s'il était chez mes parents, j'adorerais être chez mes parents. S'il était à l'hôpital, je le rejoindrais à l'hôpital. Peu m'importe de l'espace tant qu'il m'accompagne.

— Tu veux quelque chose à mettre pour dormir ?

— J'ai un t-shirt dans mon sac, je réponds doucement, car les autres doivent dormir.

Quand il ferme la porte et qu'il enclenche le verrou, un frisson grimpe le long de ma nuque et hérisse les poils de mes bras.

Je reste au beau milieu de sa chambre, dos à lui, les yeux rivés sur le radiateur sous la fenêtre.

Pendant un moment, seul le silence, souvent présent quand nous sommes ensemble, meuble l'ambiance. Ce dernier n'est brisé que lorsque Jungkook fait un pas vers moi. Puis un autre. Quand son souffle chaud frappe mes cheveux, je me tends d'appréhension.

— ...On doit discuter.

Quoi ?

Je fais volte-face, presque trahi.

— Discuter... ? Maintenant ?

Il tire la chaise de son bureau et s'y installe. Disons-le : discuter avec Jungkook est probablement la meilleure chose au monde. Surtout que nous n'avons jamais réellement parlé sérieusement.

Mais... Là, maintenant ?

— Je sais ce que tu veux.

— Mais toi tu ne le veux pas... ?

— Putain, Taehyung, arrête de penser que je veux pas de toi.

Oh.

— Je... Heu...

— Assieds-toi.

Je le regarde.

— S'il te plaît, insiste-t-il.

Je m'exécute, posant les fesses sur le bord de son lit. Tandis qu'il m'observe, j'ôte mes chaussures et les balance plus loin pour ne pas salir le tapis de sol. Je me redresse, les lèvres pincées, et accroche les draps de mes poings de part-et-d'autre de mes cuisses. Jungkook prend appui sur son pied droit pour glisser la chaise vers moi, mais il laisse pas mal d'espace entre nous.

Bon sang, il veut vraiment discuter, et rien d'autre.

Il prend une inspiration et clôt les paupières. Je le dévisage, presque inquiet.

Il va me rejeter mais avec gentillesse, hein ?

— Tu dois penser que j'ai beaucoup réfléchi pendant ton absence.

Oui. Je l'ai pensé.

— ...Pour être honnête, c'est pas vraiment le cas.

Il renifle et se redresse pour laisser son dos tomber contre le dossier de la chaise. Ses yeux se perdent. Je n'arrive pas à croire tout ça. Qu'il ait lancé la discussion, je veux dire. Qu'il veuille qu'on mette les choses au clair.

Qu'il me donne tant d'importance.

— En fait, si. J'ai beaucoup pensé. Mais je dirais pas que j'ai réfléchi. Je sais pas si tu vois la différence.

Oh que si.

— Quand... Tu penses à plein de trucs sans vraiment... Traiter l'information ?

Son regard me transperce.

— Ouais, voilà.

J'acquiesce.

— Alors en fait, je sais pas.

— Tu sais pas quoi... ?

Il hausse les épaules.

— Je veux pas prendre de décision. Je veux plus en prendre.

— Tu veux dire-

— Je veux dire te concernant.

Silence.

— Je comprends pas...

— C'est pourtant simple.

Il est tellement différent. Non, non il n'est pas différent, je me trompe.

Il me laisse entrer. C'est ça, qui est différent.

— Je sais ce que je veux, mais il est hors de question que je sois aussi égoïste.

Il me fixe.

— Si tu veux bien l'être à ma place, je...

Le fait qu'il bafouille me pousse à me redresser. Je m'approche de la chaise. Il jette la tête en arrière et ferme les yeux.

— Jungkook...

— Fais ce que tu veux de moi, Taehyung.

Le choc me glace sur place.

Il rouvre des yeux déterminés sur mon visage.

— Jette-moi, garde-moi, j'accepterai.

Oh, mon Dieu.

— Quoi... Mais alors... Si je veux qu'on soit ensemble...

— On sera ensemble.

Si j'avais été niais, j'aurais pensé "le Taehyung d'avant aurait fondu en larmes". Mais il n'existe pas de "moi" d'avant, de "moi" d'après. Si l'on a un jour été immature et que l'on devient mature, ce n'est que grâce au souvenir de ce qu'est être immature. Comme quelqu'un d'intelligent a un jour été bête. Comme quelqu'un d'heureux a un jour été malheureux. Je ne crois pas qu'il existe de versions différentes de nous-même. La "meilleure version de soi", c'est l'évolution. Pas une espèce de clone meilleur. C'est la version qui a connu la douleur, le malheur, la bêtise, l'immaturité, les erreurs et les échecs. Il ne s'agit pas d'effacer le passé pour ne garder que le présent heureux, mais d'être reconnaissant envers ce qui nous a fait souffrir, car c'est ce qui fait de nous ce que nous sommes aujourd'hui.

Arrête de penser, arrête de penser, arrête de pen-

— A quoi tu penses ?

Je papillonne des yeux et reporte mon attention sur lui.

— Heu... Je...

— J'essaie vraiment de te comprendre, avoue-t-il.

Me comprendre ? Moi ?

— Mais parfois, j'ai du mal. T'es tellement fermé.

— Fermé... ? Je répète, abasourdi.

— Indéchiffrable, confirme-t-il.

Incrédule, je secoue doucement la tête de droite à gauche.

— Non, non... Toi, tu l'es, je réponds, sûr de moi.

— J'essaie de te parler, là, non ?

Je hoche la tête.

— Désolé, je murmure, honteux.

— Putain, tu me saoules.

Sa main attrape mon bras et il me tire d'un coup sec. Je tombe sur ses genoux et m'accroche à son cou tandis que son siège, pas très solide, tangue sous nos deux poids.

— Jungkook-

— Parle-moi. S'il te plaît, fait-il, le souffle près de ma joue.

Pourquoi est-ce que ses mots me donnent envie de fondre en larmes ?

— T'as rien dit... Chuchote-t-il.

Je me tends quand je comprends de quoi il parle. Mon cœur frappe dans mes tempes.

— Pourquoi tu me l'as pas dit ?

Sa voix s'étrangle presque. Je ferme les yeux et laisse mon front s'échouer dans son cou. Immédiatement, sa main passe dans mes cheveux et ses lèvres caressent l'oreille qui lui est accessible.

— J'aurais pu t'aider.

Je renifle.

— Je s-sais pas.

Il soupire et attrape mes cheveux dans son poing, sans me blesser.

— J'aurais dû m'en douter. Je m'en étais douté.

— De quoi... ?

— Pas que c'était du harcèlement, mais je savais que quelque chose allait pas. Putain, j'allais te le demander, j'allais te demander c'était quoi ta relation avec Jimin. J'ai failli le faire et je l'ai pas fait.

Il presse davantage mes mèches dans sa main et je grimace.

— Jungkook...

— Pardon, s'excuse-t-il en me lâchant.

Il caresse la zone involontairement meurtrie.

— C'était... Je le cachais. Tu n'as pas à t'en vouloir. Je le cachais de tous, je voulais pas que quiconque soit au courant.

— Pourquoi ?! S'exclame-t-il.

Je sursaute et recule pour le regarder.

— S'il te plaît, ne t'énerve pas...

— Je m'énerve pas mais putain t'aurais juste pu m'en parler à moi !

— Je voulais gérer ça seul.

Il soupire de nouveau.

— Je comprends pas.

— Je sais, je... Je comprends pas non plus ma réaction.

C'est sincère. Après coup, quand je vois jusqu'où ça m'a mené, je sais que j'aurais dû en parler. Mais embrigadé dans le noir de mon mal-être, je n'ai pas su me souvenir que la lumière pouvait encore être atteignable. Je pense que c'est comme ça que ça marche pour tous. Une fois au fond de l'Océan, on se donne un millier de raisons de se laisser mourir plutôt que de tenter de remonter à la surface.

"C'est trop loin", "trop haut", "trop long", "trop dur"...

— Dis... Jimin, où... Où il est ?

Jungkook m'observe. Ses yeux sont sombres, mais pas vides. Je crois que je peux voir la souffrance du mois dernier dans ses pupilles. Elle stagne encore comme un bateau échoué au milieu des vagues après la plus brutale des tempêtes.

— Viré temporairement mais sûrement définitivement. Il est mis en examen pour harcèlement scolaire, cyber-harcèlement et incitation à la haine.

Je baisse les yeux, sous le choc.

— Il doit être terrorisé.

— Tu t'inquiètes pour lui ?

— Non. C'est un constat. Il mérite ce qui lui arrive, je lâche, les poings serrés.

Jungkook masque sa surprise, mais je l'ai vue.

— ...Et maintenant ? Je demande, perdu.

Complètement perdu. A quoi je m'attendais en revenant ici, après un mois de coma ? Après avoir voulu partir ?

— Dis-moi ce que tu veux faire. Ce que tu veux tout court.

Je souffle pour garder contenance.

— Tu penses qu'il y a combien de personnes qui se suicident chaque jour ?

Jungkook arbore, pour la première fois depuis que je le connais, une expression peinée. Ses sourcils s'arquent d'inquiétude, ses lèvres se plissent. Le voir comme ça me fait imaginer toutes les expressions de douleur qui l'auraient traversé si j'étais parti.

J'ai manqué de détruire beaucoup de monde. Parce que, quand j'y pense, je suis bien entouré.

Mais c'est moi que je viens de manquer de détruire de justesse. Je n'arrive pas à croire que je voulais faire ça. Me faire ça.

Une larme roule sur ma joue. Jungkook la chasse avec délicatesse.

— Je sais pas, Taehyung. Beaucoup de gens.

— Tu sais, je... Je ne pense pas qu'ils perdent leur instinct de survie.

Il hoche la tête.

— Je ne le pense pas non plus.

— C'est une pulsion. C'est... Si t'avais été là, ce soir-là, si je t'avais vu avant de... De sauter, je crois que je ne l'aurais pas fait.

Jungkook entrouvre les lèvres, puis les ferme. Finalement, il acquiesce de nouveau.

— Je me souviens avoir eu l'illusion de te voir, mais je savais que ce n'était pas toi.

Je lui demande confirmation par le regard. Après un certain temps, il répond :

— ...J'aurais aimé être là.

Quand je pose le front sur son épaule, il se tend, puis plonge sa main dans mes cheveux.

— Non, je suis content que tu n'aies pas vu ça.

Il ne répond rien cette fois.

— Jungkook... Je... Heu...

— Mmh ?

— Je veux dormir.

— Taehyung-

— C'était pas un sous-entendu cette fois. Je veux dormir avec toi.

Je recule. Il acquisce.

On se lève, se déshabille et, sans ambiguïté, nos bassins, nos torses, nos bras et nos visages se scellent.

— Alors... C'est moi qui choisis ? Je le questionne, mes lèvres frôlant les siennes.

Il embrasse mon nez avec toute la lenteur du monde.

— Oui.

Très bien.

— Je veux qu'on soit ensemble.

J'ai les yeux clos et lui aussi, mais je peux sentir qu'il sourit de mon empressement.

— Malgré mon TEI ?

Avec ton TEI.

— Et si je te fais du mal ?

L'adrénaline foudroie mes veines. Mais seul mon corps a peur.

Pas moi.

— On improvisera.

Un souffle de résignation mêlée à de l'appréhension s'échappe de ses lèvres semi-ouvertes.

— Merci.

— De quoi... ? Je demande, surpris.

Pour la première fois depuis longtemps, mon coeur explose si puissamment de joie que j'en presse ses bras pour évacuer l'euphorie.






— ...Merci d'être égoïste à ma place, Taehyung.













********************************


Hehe, qu'avez-vous pensé de ce chapitre les amis ? ^-^

On approche doucement mais sûrement de la fin. Encore une bonne poignée de chapitres cependant! J'ai hâte des prochaines scènes que j'ai en tête depuis un moment ;)



Je n'ai pas grand chose à ajouter, je vous dis à bientôt pour la suite, prenez grand soin de vous et de vos proches, et bon week-end à tous.tes ! ^-^ ♥♥♥

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