Chapitre ④⑧

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Bonsoir les amis ! ^-^

Voici la suite d'Océan, j'espère qu'elle vous plaira !


Bonne lecture ~ ♥


********************************


Eh bien.

Je tousse et frotte mes paumes contre mon pantalon. Elle me sourit, ouvre son bloc-note.

Si j'avais su qu'un jour je me retrouverais dans une telle situation, j'aurais... Rien, en fait. J'aurais pensé "ah, c'est bien possible, oui."

— Comment ça va, Taehyung ? Me questionne Doona.

Le mien, de sourire, doit assurément être plus crispé.

— Bien, je réponds, mal à l'aise.

Elle s'installe correctement dans son siège. Ses cheveux sont attachés en une queue de cheval basse, dont la longueur s'étale sur son épaule droite. Je griffe le tissu de mon pantalon, distraitement. Je crois qu'elle le voit, mais qu'elle retient un coup d'œil indiscret pour ne pas davantage m'embarrasser. J'ai conscience de ça. Donc ça m'embarrasse.

— D'accord, alors... Dis-moi.

Sa voix, douce, volontairement ou non, s'infiltre dans mes oreilles comme un chant de sirène. Je dis ça parce que j'ai déjà envie de me livrer. Et de pleurer. Est-ce que les psys ont des super-pouvoirs ?

— On avait convenu avec tes parents de commencer tes séances la semaine prochaine. J'ai été étonnée que tu me contactes ce matin... Je me demandais s'il y avait une raison particulière ?

Petit un : oui. Petit deux : elle le sait. Petit trois : elle veut seulement que je le dise de moi-même.

— Heu... Oui... Je suppose...

— Tu voudrais qu'on en parle ? Ou on peut commencer la discussion sur autre chose. Quoi qu'il arrive, tu peux me parler de tout ce dont tu souhaites. Je serais ravie de t'écouter, m'invite-t-elle, l'expression aussi bienveillante qu'elle le puisse.

Je sais, je suis pessimiste ; même si elle m'avait fait bonne impression, Doona est psy, et les psys veulent faire parler. Pour ça, je me demande s'ils utilisent la rhétorique. Une rhétorique propre aux psys. Quelque chose qu'ils ont appris durant les études. Comment faire parler un patient ? Sans que chaque minute ne soit calculée, j'imagine qu'elle a un protocole bien précis pour me pousser à ouvrir la bouche.

Le cadre, pour commencer - murs orangés, beaucoup de plantes, sofas moelleux, petite table avec mouchoirs, bonbons, et même des sortes de petits jouets de la taille de la paume (des anti-stress ?), une bougie, derrière elle, pour ne pas nous assassiner de sa senteur, de laquelle émane des effluves de vanille.

Prosaïque, la vanille. J'aurais préféré de la lavan-

— C'est la bougie, qui t'embête ?

— Vanille ?

— Et coton. Mais on est d'accord, ça sent davantage la vanille.

Elle va être d'accord avec tout ce que je dis ?

— Et si tu étais honnête avec moi ? Souffle-t-elle, sans que son amusement ne soit trop forcé, auquel cas il paraîtrait ironique.

— À quel propos ?

— Tout ce qui te passe par la tête.

— Vraiment tout ?

— En tout cas ce qui me concerne, et concerne la situation actuelle.

Bien rattrapé. J'ai failli la prendre à la lettre pour la punir gentiment de son manque de précision. Une drôle de connivence s'installe, je ne m'en rends pas encore complètement compte.

— Vous m'analysez.

— C'est un peu le but.

— Vous avez un protocole.

— Que j'adapte à ma personnalité, et à la tienne.

— Vous pensez que dire oui à tout et acquiescer à chacune de mes paroles me fera parler.

— Ça aide.

— Vous vous attendiez à tout ce que je suis en train de dire.

— Pas tout.

— Vous savez comment va se dérouler cette séance.

— Je n'en ai aucune idée.

Mes yeux se plissent.

— Vous savez pourquoi je suis venu.

— Je le sais, en effet.

— Vous me trouvez drôle.

— Lucide est plus juste.

— Amusant.

— Plutôt, oui.

— Vous pensez maintenant que je vous drague.

— Tu es amoureux de Jungkook.

Oh, d'accord.

— Comment vous...

— Je t'ai pris par surprise. J'ai donc gagné le jeu ? Glousse-t-elle doucement.

Elle m'arrache un sourire plus vrai.

— ...J'aimerais que ça vienne de toi, comme tu as dû le deviner. La raison pour laquelle tu es ici.

— C'est demain, j'avoue du tac-au-tac, les yeux baissés sur la petite table qui nous sépare.

Ma vision périphérique m'indique qu'elle a opiné du chef avec lenteur. Le rendez-vous dans le bureau du directeur pour prononcer mon choix. C'est demain.

— Tu as pris ta décision ?

— Oui.

— Alors pourquoi veux-tu mon avis là-dessus ?

Je lève la tête. Elle dépose son bloc-note sur la table, puis joint les mains sur ses jambes croisées.

— Parce que je... Je sais pas si c'est la bonne décision.

— Puis-je l'entendre ?

— ...Oui.

J'entrouvre les lèvres, prends une inspiration, puis lui explique ce que je m'apprête à faire. Elle ne semble pas surprise.

— Taehyung, ce que je peux te dire tout de suite, c'est que tes yeux m'ont l'air plus convaincus que ta voix.

Mon coeur tressaute à ces paroles.

— Vous trouvez ?

— Mmh mmh. Qu'est-ce qui t'empêche de faire ce que tu comptes faire ? Quelle question tu n'arrives pas à régler ?

— ...Si c'est...

Elle penche la tête sur le côté quand je murmure. J'élève la voix comme je peux malgré mon trouble :

— ...Si c'est moral, de faire ça.

— Oh, c'est une bonne question. Je pense que c'est important que tu te la poses, en effet.

Je me pince les lèvres.

— Je ne veux pas jouer aux mauvais justiciers, c'est tout, j'avoue, anxieux.

— Je ne pense pas que ce soit le cas. Est mauvais justicier celui qui est seul face à l'adversité, et qui tente de faire justice seul. Toi, tu es accompagné. Tu as du poids, maintenant. Enfin, même, si je peux me permettre.

Un soupir m'échappe.

— Il est difficile de juger si chaque décision est bonne ou non. La meilleure chose que tu puisses faire, c'est établir la liste des conséquences en fonction de ce que tu possèdes en termes de courage, de soutien, d'informations.

— Je l'ai fait.

— Qu'est-ce que ça a donné ?

Ce que ça a donné ?

N'est-ce pas évident ?

Comment, comment, quand nous existons si faiblement, quand tout peut basculer si drastiquement, comment pouvons-nous nous assurer que rien ne va foirer ? Même en pensant aux conséquences comme elle me le conseille ; c'est inutile, un détail ignoré peut tout faire capoter. Un paramètre que je n'aurais pas pris en compte. Un angle de la question que je n'aurais pas intérieurement réglé.

— Pense à l'autre extrême de ta décision.

Je m'exécute en silence.

— Est-ce que ce serait mieux ?

— Ce serait pire.

— Y a-t-il une autre solution que l'une, ou l'autre ? Y a-t-il un troisième choix possible ?

— Non. Puisqu'on me réclame une décision entre faire ou ne pas faire, non.

— Alors je suppose que tu as ta réponse.

Je détourne le regard.

— ...J'ai juste peur qu'il en souffre. Énormément.

Elle acquiesce, imperturbable.

— Je comprends ta crainte. Mais je pense aussi que si tu as eu cette idée, c'est qu'elle n'est pas née de rien. Elle n'est pas apparue sans contexte, sans sens, sans que tu l'aie maturée au préalable. Je me trompe ?

Je secoue la mienne. Non, elle ne se trompe pas.

J'ai seulement peur que ce soit moi, avec ce que je m'apprête à faire, qui me plante complètement.

**

Tic. Tac.

— Bien. Bonjour tout le monde, merci d'être venus un samedi.

Tic. Tac.

— Nous allons attendre encore quelques instants, il reste les parents de Min Yoongi, qui nous arrivent d'une autre ville. En attendant, monsieur et madame Kim, un café ? Monsieur et madame Park ?

— Non, merci, répond ma mère.

— Ça ira pour moi aussi, renchérit celle de Jimin.

— Je ne bois pas de café, merci, souffle le conjoint de cette dernière.

Et mon père secoue la tête, un sourire poli aux lèvres.

Tic. Tac.

Je fixe l'horloge. Douze petits traits, un peu gris, en tout cas d'un noir pâle, comme transparent, sous deux aiguilles : l'une, épaisse, qui bouge rarement. L'autre. Celle qui fait tic tac, inlassablement, tic, tac, tic, ta-

— Tu as besoin de quelque chose, mon coeur ? Me chuchote ma mère.

— Ça va.

Tic. Tac.

— Tiens-toi bien, s'il te plaît, murmure, avec une dureté retenue, madame Park à son fils.

Tic. Tac.

Monsieur Park se passe une main sur le visage. Soupire.

Tic. Tac.

Je sors mon téléphone.

@tae0.0

J'aimerais que tu sois là

L'aiguille fait vingt-neuf fois tic, tac, puis il répond.

@jk.03

Ça a pas commencé ?

@tae0.0

On attend les parents de Yoongi.

@jk.03

Ok

Pourquoi tu m'as pas dit quelle décision tu prenais ?

Tic. Tac.

@tae0.0

Parce que je vais continuer de peser le pour et le contre jusqu'à la dernière seconde

@jk.03

Ça m'étonne pas

Tic. Tac.

@tae0.0

Je t'aime

Je regrette le message à l'instant précis où je l'envoie. Ça m'est sorti des doigts comme ça me serait sortit de la bouche. C'est, je suppose, l'angoisse, la panique, qui veut cette maladresse, ce besoin d'être rassuré, imminemment.

Il répond.

Tic. Tac.

Je n'ose pas ouvrir. J'ai peur d'envahir son espace. D'aller trop vite.

Tic. Tac.

Je clique sur la conversation, mais mes yeux fixent l'horloge.

Tic. Tac.

@jk.03

Je t'aime aussi

Ça va aller

Mon Dieu, il me manque. J'ai dormi avec lui cette nuit, nous avons passé la soirée ensemble, mais il me manque cruellement. Sûrement parce que je me sens seul. Mes parents sont là, à mes côtés, mais ce n'est pas pareil ; l'amour que je leur porte est indéfectible, mais ils n'ont ni mon âge, ni le contexte, ni une quelconque expérience à Seontaeg. Ils me comprennent, mais pas comme Jungkook le fait, autant que Jungkook ne me comprend pas comme ils sont capables de le faire.

Tic. Tac.

— Ah, bonjour ! Nous étions perdus !

Yoongi baisse la tête. Plus qu'elle ne l'était déjà.

— Monsieur et madame Min, bonjour, vous pouvez vous installer.

— Nous vous présentons nos excuses pour le retard, cette école est un vrai labyrinthe.

Pas vraiment. Je dirais plutôt qu'elle est un immense intestin. Si grand, en fait, qu'il faut se dépêtrer pour rebrousser chemin avant de se faire définitivement digérer.

Ils me jettent un coup d'œil. Ils n'ont pas la même expression que les Park ; ces derniers m'évitent visuellement. Les Min, eux, me lancent un regard de alors c'est toi, là, qui fout notre fils dans le pétrin. Je ne leur en veux pas. Ils sont si loin.

Les adultes. Ils sont si loin de tout ça.

— Par contre, c'est une vaste blague les deux policiers devant votre bureau, hein ? S'inquiète le père de Yoongi.

Monsieur Jang croise les mains sur le meuble, face à nous.

— Tout cela n'a rien d'une blague, monsieur Min. 'Permettez ?

— ...Oui, allez-y, soupire ce dernier, déjà impatient de s'en aller.

Le directeur de Seontaeg se redresse haut dans son siège, si bien que je l'imagine comme un maître nageur : son travail est de guetter les eaux sous ses pieds pour ne pas qu'il y ait d'accident, mais à force de le faire à longueur de journée, il finit par se perdre dans ses pensées et ignorer quand quelqu'un se noie vraiment.

— Bien. Monsieur et madame Park, monsieur et madame Min, je vous présente Kim Taehyung.

Il dit toujours monsieur avant madame. Le tic tac ne s'entend plus à cause de sa voix.

— Comme vous le savez, Taehyung a connu, cette année scolaire, un harcèlement assez intense de la part de vos deux fils. Jimin, plus en particulier, de ce que j'en ai compris. Si je vous ai conviés aujourd'hui, c'est pour que nous entendions tous et toutes sa décision concernant sa possible plainte. Avant cela, évidemment, si Taehyung le permet, la discussion est ouverte.

— Pardon ? S'étrangle ma mère.

— Maman, je souffle, gêné.

— Non, elle a raison, qui vous a permis d'ouvrir la discussion ? Renchérit mon père, furibond.

— Calmez-vous, s'il vous plaît, nous ne sommes pas là pour entrer dans le confl-

— Moi j'aimerais bien savoir ce qu'a fait Taehyung pour que mon fils, qui n'a jamais eu de problème, se retrouve dans cette histoire, grogne madame Min.

Mon cœur en prend un coup, mais j'ignore cette phrase pour délicatement prendre le bras de ma mère qui écarquille les yeux.

— Je vous demande pardon ? Ce serait mon fils qui serait la cause de son propre harcèlement ?

— Madame, avec tout le respect que je vous dois, Yoongi n'a jamais été traîné dans de pareils problèmes. Surtout pour quelques taquineries...

— Ce n'était pas que des taquineries, je lance, et tout le monde se tait.

Monsieur Jang, presque impuissant, me remercie d'un regard entendu.

— Quand je parlais de discussions, je voulais dire, entre les enfants. Si Taehyung souhaite entendre ou dire quoi que ce soit avant de nous annoncer sa décision.

Silence. Les parents se taisent comme ils le peuvent. J'ose regarder, en biais, monsieur et madame Park, muets depuis le début.

L'homme pose un drôle de regard sur Jimin. J'ai du mal à le définir. Colère, tristesse ? Oh, non, c'est ça, le mélange des deux: la déception. J'ai eu des difficultés à la dégager de ses iris, car la douceur qui prend le relais sur le désappointement m'induit en erreur.

Sa mère arbore une expression similaire. Mon estomac se tord.

Ses parents l'aiment. Beaucoup.

— Je...

Les têtes se tournent vers moi. Quand madame Park croise mon regard, elle le baisse rapidement, non pas par lâcheté, mais plutôt comme si elle voulait éviter d'en rajouter.

Mes yeux tombent sur ses mains liées, sur lesquelles de petites marques blanchâtres naissent à mesure qu'elle plante les ongles dans ses paumes, distraitement, le dos presque voûté.

— Je n'ai pas envie de discuter, à vrai dire, j'ai... J'ai déjà pris ma décision.

Là, c'est Jimin qui me dévisage. Et autant dire qu'il a abandonné toute forme de carapace de faux-semblant ; ses yeux suppliants pèsent leur poids dans les miens. Je déglutis et détourne le regard pour établir un contact visuel avec le directeur.

— Tu es sûr ? S'informe ce dernier.

Comme Jimin, il prend mon entrain comme mauvais présage. Comme si je n'avais pas réfléchi, que je me laissais bercer par la rancœur, le besoin de me venger.

Inutile de torturer quiconque plus longtemps.

— Je... Je ne souhaite pas porter plainte.

Ma mère se penche vers moi pour attraper mon regard que j'ai détourné. Mon père lève la tête vers elle avec surprise. Les parents Min croisent les bras. Les parents Park expirent longuement.

Yoongi fixe le sol avec passivité.

Jimin me scrute avec incrédulité.

— ...À une condition.

Toutes les réactions, ou presque, s'inversent immédiatement.

Je n'aurais pas voulu l'avouer, mais le contrôle que je possède, là, tout de suite, me fait du bien. À défaut de voir Jimin me supplier, je peux au moins me permettre de leur faire comprendre, à tous, que j'ai le droit, aujourd'hui, de décider. Que c'est à mon tour de m'imposer.

Non, murmure Jimin, paniqué.

Il a compris.

— Je ne porterai pas plainte...

Mes yeux rencontrent les siens.

— ...À la seule condition que Jimin le fasse contre ses harceleurs.

Monsieur Jang hausse les sourcils. Les parents du concerné cherchent vivement son attention, ce qui me conforte dans l'idée qu'ils n'étaient au courant de rien.

Yoongi sursaute à mes mots, et parcourt hâtivement le visage d'un Jimin dépouillé de son secret. Secret que j'ai aussi eu. Secret qui a failli me tuer.

Mes parents sont perplexes. Ceux de Yoongi sont lassés.

— Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Questionne le directeur, lui aussi excédé.

Une pléthore d'émotions passe dans les yeux de celui que j'ai décidé vouloir pousser à avancer, plutôt qu'inutilement tirer vers le fond. Je veux dire, bien sûr ; bien sûr que j'aurais pu porter plainte. Bien sûr qu'il le méritait. Bien sûr que, si ma vie était une histoire et qu'on me lisait, beaucoup de personnes m'en voudraient.

Mais c'est ma décision. Je n'ai pas envie de me lancer dans une telle procédure. Je n'en ai ni la force, ni le besoin. Et par "besoin", j'entends besoin d'une certaine vengeance, en tout cas d'une justice qui devrait être faite. Je me dis seulement qu'elle l'a déjà été. Je ne saurais l'expliquer. Mais envoyer Jimin en prison, ou faire cracher une somme astronomique à ses parents ne me paraît pas être une solution.

Je veux qu'il fasse comme moi : qu'il affronte. Pas en sautant du haut des escaliers, parce que ça fait mal, tomber de haut - sans mauvais jeu de mot. C'est une douleur cuisante. Mais il n'y a qu'en coulant qu'on peut remonter à la surface.

Avec Jimin, j'ai découvert un type de personnes bien précis.

Ceux qui se noient à l'air libre.

— S'il te plaît... Me supplie-t-il.

Et, cette fois, ça me met réellement mal à l'aise.

— Tu dois le faire, je réponds, la voix cassée.

— Non... Je ne peux pas... Tente-t-il d'articuler, de sorte à ce que je sois le seul à entendre, ce qui n'est pas le cas.

Les lèvres pincées, la peur de mal faire grignotant ma nuque de frissons répétés, je décide de garder contenance :

— Si, tu peux... Il te suffit de dire ce qu'ils t'ont fait...

— Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ?! Demande monsieur Park, affolé.

— Rien ! Hurle Jimin.

Les deux policiers déboulent dans la pièce par sécurité.

— Un problème ?

— Tout va bien, messieurs, répond monsieur Jang.

J'ai mis du temps à le voir. C'est seulement quand les deux fonctionnaires sont définitivement entrés pour s'assurer eux-mêmes que tout allait bien qu'il est apparu dans mon champ de vision, à quelques mètres de la porte, les mains dans les poches, le dos contre un muret.

Sa tête pivote vers nous. Il se déplace de sorte à être dans l'angle de l'embrasure, l'expression concernée. Je lui souris rapidement pour lui faire comprendre que tout va bien.

Personne ne ferme la porte.

— Taehyung, c'est ce que tu veux ? C'est ta décision ? Ne pas porter plainte, à condition que Jimin le fasse contre ceux qui l'ont également intimidé ?

Jungkook me fixe. La compréhension se lit dans ses yeux après les mots du directeur. Il regarde Jimin, j'en fais de même.

Dire que je suis surpris est un euphémisme.

Jimin dévisage intensément Jungkook.

— Qu'est-ce que vous regardez ? Fermez-moi cette porte, demande monsieur Jang au policier.

Mais ce dernier croise mon regard, et je secoue doucement la tête, une intuition me laissant croire qu'il ne faut plus clore cette pièce.

Jimin, tourné vers l'arrière, ne lâche plus des yeux mon petit-ami qui, debout, dans le couloir, rend cet échange qui m'échappe en tout point.

J'entends les inspirations de mon ancien bourreau s'intensifier. Je peux voir ses mains, sur la chaise, près de ses cuisses, se crisper tandis qu'elles pressent le plastique. Ses lèvres partiellement écartées, desquelles s'échappe son souffle trémulant, trahit plusieurs choses : la peur, la panique, mais avec une pointe de fascination, peut-être, qui l'empêche de se détourner.

J'aperçois le regard de Jungkook se calmer. Il ne m'accorde plus d'attention, car la sienne est focalisée sur Jimin. Les deux garçons ne se lâchent plus des yeux. Ils clignent à peine, préférant maintenir l'échange étonnant, inattendu, que j'essaie de comprendre mais qui, j'en ai bien l'impression, me nécessiterait plus d'informations.

Je ne sais pas. Tout le monde est silencieux, comme si ce contact visuel poussait la tension à son maximum.

Je vois Jungkook hausser les sourcils délicatement, presque imperceptiblement. Pas de moquerie, ni de provocation. C'est autre chose. En réponse, Jimin déglutit de manière bien visible, si j'en juge sa pomme d'Adam qui tressaute. Suite à cela, il se pince les lèvres, une sueur roule le long de sa tempe.

Finalement, quelque chose d'absolument inédit se passe.

Jungkook, sans lâcher Jimin des yeux, hoche légèrement la tête.

Dès lors, la respiration de celui-ci se bloque, puis reprend avec plus de calme lorsqu'il se tourne vers moi. Dans ses pupilles, je lis une résignation que je n'aurais jamais cru voir apparaître au vu de sa réaction première à ma décision.

Quelque chose a changé. Et c'est Jungkook qui l'y a aidé.

Jimin quitte mon visage pour regarder ses parents, après quoi il établit le contact visuel avec Yoongi qui, peiné, comme si cette situation était familière, en tout cas peu étonnante, lui accorde un sourire sans joie, un sourire désolé.

— ...D'accord, souffle mon harceleur, tendu de la tête aux pieds.

J'entrouvre les lèvres, abasourdi.

— Je... Je vais tout dire. Mais d'abord, Taehyung...

Plus aucune animosité ne réside entre nous lorsque nos regards se croisent. Comme si c'était la première fois qu'on se rencontrait.

— ...Dis-leur, pour la piscine. Pour tes cheveux.

Je comprends qu'il a besoin d'être lancé. Après une profonde inspiration, je conte le récit de la veille de ma tentative de suicide.

Après mes dires, le temps s'écoule plus vite que le fil de mes pensées.

Jimin réclame l'intimité pour raconter à son tour. Nous la respectons et, un à un, sortons. Yoongi demeure près de la porte fermée, assis sur un banc intérieur, le regard fané. Ses parents lui annoncent vouloir rentrer, ce qu'il ne conteste pas. Il a l'air bouleversé. Comme s'il se réveillait d'une grande désillusion.

Les parents Min ne m'accordent pas un coup d'œil supplémentaire, et ça me va très bien. Ma mère et mon père me prennent dans leurs bras. Je ne pleure pas quand ils le font. Ils ont, eux aussi, besoin d'être réconfortés.

Dans un coin du couloir, Jungkook reste en retrait le temps des au revoir.

— Tu as vu Doona ?

— Oui, hier.

— Je veux que tu ailles à l'hôpital la semaine prochaine. Je prendrai rendez-vous. Pour savoir où en est ton état.

— Je vais bien. Mais d'accord.

Ils s'en vont. En passant près de Jungkook, ma mère se tourne vers moi, constate que je rougis de savoir qu'elle peut faire le lien, alors, évidemment, elle fait le lien. Elle sourit à mon petit-ami, qui s'incline, sans un mot.

Quand je le rejoins, laissant derrière moi Yoongi, Jimin,

laissant, derrière moi, les inquiétantes méandres de l'Océan,

je rejoins le réconfort des profondeurs sombres des bras de Jungkook.

— Je me suis inquiété, souffle-t-il contre mon oreille, ses mains dans mes cheveux.

— Ça va. C'est fini.

C'est fini.

Mon nez plonge contre son uniforme. J'en inspire la senteur comme il le fait dans mes mèches longues, partiellement teintées d'un bleu délavé, caché parmi le châtain qui a repris sa place attitrée.

— Qu'est-ce qui s'est passé, entre toi et Jimin ? C'était étrange... Je demande, curieux.

Il pose le menton sur le haut de mon crâne, glisse les doigts contre ma nuque, embrasse ma tempe...

...Et, à ma question, ne donne aucune réponse éloquente.

**

— Putain, je suis vraiment soulagé, Taehyung le terminale.

Je souris, les yeux rivés sur l'herbe que j'arrache du bout des doigts.

— Ouais. Je sais pas si c'était la bonne décision.

— Je pense que c'était une décision vraiment généreuse. J'aurais porté plainte, moi.

— Mmh... J'ai peur de regretter de ne pas l'avoir fait, si j'suis honnête. Mais pour l'instant, je me sens juste... Apaisé.

Il acquiesce, puis regarde deux filles en uniforme passer à nos côtés vers l'entrée de Seontaeg. Je baisse la tête sur les révisions, mâchouillant un stylo entre mes dents.

— C'est fou qu'il fasse déjà si bon, on n'est qu'en mars, s'étire Namjoon, après quoi il laisse son dos tomber dans la verdure.

— C'est passé vite.

— T'as un peu passé un mois en standby, en même temps...

J'écarquille les yeux tandis qu'il s'esclaffe de son propre humour noir. Je frappe son bras, amusé, et surtout heureux de savoir qu'il se sent de nouveau assez à l'aise avec moi pour dire ça.

Seulement trois jours après la réunion dans le bureau du directeur, et j'ai appris que les harceleurs de Jimin ont été virés. Ils sont mis en examen, de ce qu'on entend ; monsieur Jang voulait vraiment laver Seontaeg de cette histoire au plus vite avant que les médias ne s'en mêlent. Ou alors il a de l'empathie. Peut-être, après tout, qu'il s'est souvenu qu'un maître nageur ne doit jamais abandonner sa vigilance.

— Après Seontaeg, tu vas faire quoi ? Je demande en jetant un œil par-dessus mon épaule.

Allongé, Namjoon hausse les épaules, mains derrière la tête et yeux rivés sur les nuages.

— Je suppose que j'vais aller dans la grande école qui voudra bien de moi, histoire de boucler les trois ans et avoir le diplôme. Mais après ça, fini, j'arrête l'école.

— Ça a jamais été ton truc, on dirait ?

— Tu dis ça pour mes notes ?

— Non ! Non non, je-

— Détends-toi, je plaisante, Taehyung le terminable qui panique.

Il rit, puis arbore une expression plus sérieuse.

— Ouais, l'école et moi, ça fait deux. Pourtant, je suis à Seontaeg, va comprendre.

— Je me demandais... Jungkook ne t'a vraiment jamais aidé ?

— Avec tout le bordel de son TEI, tu sais... J'ai pas trop voulu l'emmerder avec mes problèmes.

— Je crois qu'il... Qu'il t'aime beaucoup, tu sais.

— Je sais. Il m'a parlé, quand t'étais dans le coma.

Intrigué, je garde le silence pour l'inciter à continuer.

— Un soir, il est venu me voir. C'est rare, aha. Il a toqué à ma porte, il était tout pâle. Je l'ai rarement vu comme ça. Au début, j'ai cru qu'il était en pleine crise, mais non. Ses épaules tremblaient pas de colère, elles tremblaient d'autre chose.

Mon cœur tambourine de plus en plus fort.

— Il s'est effondré. Je veux pas trop entrer dans les détails parce que c'est un moment qui nous appartient, même si c'est ton petit-ami... Mais disons qu'il m'a parlé. Qu'il a réalisé que la vie des gens qui l'entourent pouvait s'arrêter à tout moment.

Il soupire.

— Je m'en suis également rendu compte, Taehyung. Je veux dire... C'est vraiment dingue à quel point on prend conscience qu'on peut tous mourir quand la mort est proche de nous.

— Je... Je suis désolé, je...

— Non, je ne dis pas ça pour que tu t'excuses. Jamais de la vie. Je voulais juste que tu saches qu'il ne faut pas t'inquiéter pour mon amitié avec Jungkook. Il m'a dit des choses, ce soir-là, que je n'oublierai jamais.

Je me triture les doigts.

— J'ai trop envie de savoir, je grommelle, un rictus aux lèvres.

— Je me doute ! Mais tu sauras rien, sourit-il, après quoi il m'envoie un clin d'œil.

— Même pas un petit truc... ?

— Nope.

— Un mini truc... ?

— Mmh mmh.

J'abandonne en soupirant théâtralement, ce à quoi il me répond que ça ne "fonctionnera pas avec lui". L'instant d'après, on reprend nos révisions sans plus nous laisser distraire, et je crois que je préfère, en fait, ne pas savoir : Namjoon a raison. Le développement de ma relation avec Jungkook, depuis le début, a été chaotique, et surtout jonché de mystères que j'ai tenté d'éluder en le trahissant - notamment en allant voir Teil. Mais j'ai compris, avec le temps, que Jungkook finit par parler quand on lui en laisse le temps.

Je grimace en repensant à Teil. Namjoon voit mon trouble.

— Qu'est-ce qui va pas ?

— Je me demandais juste, pour Teil...

— Ah, ouais.

Le silence nous couve d'abord. Mon ami hausse les épaules une seconde fois.

— Je l'ai bloqué depuis longtemps, j'étais trop en colère. Je crois que Jungkook aussi.

— Et... C'est tout ?

— Je sais pas, Tae... J'y ai pensé aussi. Je me suis dit qu'une ultime discussion entre lui et Jungkook serait bénéfique pour mettre les choses à plat, mais je suis pas certain que Jungkook ait encore envie de faire un bond dans le passé. C'est Teil qui veut parler, pas Kook.

— C'est vrai.

— Il ne t'a rien envoyé, à toi ?

— Non. Pourtant je l'ai pas bloqué.

— Il doit avoir honte.

— J'en parlerai avec Jungkook, mais je ne veux plus interférer là-dedans. J'ai été trop loin la dernière fois, je souffle en grimaçant.

Namjoon acquiesce. Je n'y pensais plus, mais j'ai une sensation d'inachevé avec ce type. S'il a été si loin, c'est qu'il doit vraiment vouloir se débarrasser d'une certaine culpabilité. J'en toucherai deux mots à Jungkook, et respecterai sa décision sur la situation. Après tout, peut-être qu'il s'en fiche, qu'il ne ressent pas le besoin de soulager les démons de Teil.

— Au fait, y'a une soirée d'un pote à moi de l'équipe de basket. Jungkook doit le connaître même s'il joue plus depuis un moment.

— ...Namj-

— Non je t'interdis de refuser : c'est après les derniers exams. T'as aucune excuse, sourit-il, fier de son piège.

— ...Et-

— Oui Jungkook vient.

— ...On-

On verra, je sais, mais je sais aussi que tu viendras, parce que c'est la dernière soirée pour célébrer la fin de Seontaeg et franchement on a tous besoin de fêter le départ de cette école de merde.

Pris d'allégresse, on ne se calme que lorsqu'on reçoit des regards agacés en biais.

Après avoir révisé une heure supplémentaire, je quitte Namjoon, qui décide de rester encore un peu - prétextant devoir davantage bûcher que moi, qui aurait, selon ses dires, des facilités - pour remonter à l'internat. Jungkook nous a affirmé vouloir réviser seul dans sa chambre, nous accusant de trop parler et de le déconcentrer. Ça nous a fait beaucoup glousser, je dois l'avouer, et j'avais adoré son expression quelque peu vexée de nous observer lui rire au nez.

Me hâtant dans les couloirs pour rejoindre mon petit-ami, je ne m'attends cependant pas à ce qu'une douce main attrape mon bras.

Je fais volte-face, surpris, tandis que les élèves grouillent autour de moi et de cette fille inconnue qui m'a freiné dans ma presque course.

— Heu... Taehyung, c'est bien ça ?

Je fronce les sourcils.

— Oui.

— Désolée, je voulais juste... Je voulais juste te dire que je suis contente de te voir en forme.

Je les hausse cette fois.

— On se connaît ? Je l'interroge, intrigué.

— Non, à vrai dire, je... C'est moi qui t'ai trouvé, tu sais... Au sol, quand tu as...

Oh. Elle voit mon visage se décomposer, et se confond en excuses.

— Non, ce n'est rien, je suis juste surpris, c'est soudain, j'avoue, un peu gêné.

— Oui, je... Je t'avoue que je suis un peu bouleversée. Mais je suis vraiment heureuse de constater que tout va bien pour toi.

— Merci, c'est très gentil. Et merci d'avoir prévenu les secours, j'espère que ça ne t'a pas traumatisée, ou...

— Non non ! J'ai été chamboulée quelques jours, c'est sûr, mais je ne t'ai pas vu sauter, j'ai juste vu quand vous étiez tous les deux au sol, donc ça va.

Je la dévisage, interloqué.

"Tous les deux" ?

— Comment ça ? Je la questionne, perdu.

— Bah, tu sais, quand tu as sauté.

— Mais tu dis "tous les deux", je ne comprends pas.

— Oui, tous les deux. Toi, et Jungkook, enfin si j'ai bien retenu son prénom.

Je reste impassible. Elle pose une main sur mon épaule.

Non. Pitié.

— Tu as eu beaucoup de chance qu'il soit là pour te rattraper. Est-ce que son épaule va mieux ?








Pitié.

Non.
















********************************


...Aha ?

Évidemment que Taehyung allait être au courant avant la fin de l'histoire, vous me connaissez :) 

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre les amis ? ^-^ 


Encore 3 chapitres environ. Peut-être 4. Honnêtement ? Je veux même pas y penser, j'ai jamais été aussi mal à l'approche d'une fin d'histoire depuis Suprématie.

J'essaie de voir le bon côté des choses : après Océan, une nouvelle histoire (dont je suis déjà obsédée) sortira (en avril normalement). D'ailleurs, j'espère que cette future histoire vous plaira, j'y mets beaucoup de coeur, et la relation Taekook promet d'être intense ;)


En attendant, je vous dis à bientôt pour la suite ! Prenez soin de vous et de vos proches, comme d'habitude, et passez une bonne semaine ! Gros bisous les amis ^-^ ♥

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